Société
Au Havre, un rendez-vous pour aborder le suicide, sans tabou
Publié 31/01/2018 22:37
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Des lieux d’écoute existent, comme Havre de Vie, qui recherche des bénévoles
Société. Lundi 5 février, aura lieu la 22e Journée Nationale de Prévention du Suicide. À cette occasion, l’Association du Réseau de Prévention du Suicide (ARPS) organise la projection du film « Dalida » de Lisa Azuelos au Sirius du Havre. S’ensuivra un échange avec le Dr Jean-Marc Limare, psychiatre et président de l’ARPS, Sophie Caillot-Allain, psychanalyste, et Catherine Tollemer, coordinatrice des Réseaux de Santé du Havre et formatrice prévention.
Nous sommes tous à un moment ou un autre confrontés à la problématique du suicide de façon plus ou moins directe. Et nous nous posons alors tous les mêmes questions : « Pourquoi ? Comment repérer les signes avant-coureurs ? Comment sortir de cet engrenage infernal qui ne pourrait aboutir qu’à sa propre mort ? »
Depuis 2000, au Havre, un groupe de réflexion se réuni régulièrement pour échanger autour du thème de la prévention du suicide. Une initiative ayant abouti en 2003 à la création d’une association dont le but est de promouvoir toutes les actions concourant à prévenir le suicide sur le territoire de santé du Havre.
En février 2011, le Dr Limare constatant la difficulté de beaucoup de personnes à parler de leurs idées suicidaires à leur entourage et à leur médecin, estime pertinent d’ouvrir un lieu d’écoute, Havre de Vie, dédié à accueillir les souffrances suicidaires qui ne peuvent se dire ailleurs. « La fonction de nos accueils n’est pas de prendre en charge les personnes en difficulté de façon durable, explique le docteur Limare. Il s’agit plutôt de récupérer les personnes qui ont des difficultés à confier leurs idées suicidaires à un professionnel, qu’elles soient déjà suivies ou pas encore, et qui acceptent plus facilement de nous en parler dans la mesure où nous leur apparaissons à la fois plus neutres affectivement et spécialisés, donc sans risque d’être étonnés ou choqués par leurs propos. »
« Osons en parler ! »
Si l’on ose parler du suicide lorsqu’il touche un proche (famille, amis, travail) ou s’il concerne une personnalité publique (Dalida, par exemple), le reste du temps, le suicide reste un mot que l’on évite comme s’il pouvait être contagieux. « Il participe en effet du double tabou de la mort et de la folie. » Et de faire un parallèle avec le mot « cancer ». « Il devrait être possible de pouvoir évoquer le suicide, véritable cancer de l’âme. Notre mot d’ordre, c’est Osons en parler ! » martèle le Dr Limare.
Et pour en parler, il faut mettre en œuvre des moyens : « Nos besoins sont avant tout humains : nous recherchons de nouveaux adhérents pour participer à la vie de l’association et à nos campagnes d’information, ainsi que des personnes se sentant aptes à devenir accueillant au Havre de Vie (nous assurons la formation). Nous avons aussi desbesoins financiers... »
Alors qu’on meurt toujours en 2018 trois fois plus souvent par suicide que par accident de la route, les moyens de prévenir ce fléau se révèlent toujours insuffisants. « C’est pourquoi l’ARPS relaie depuis quinze ans au Havre la Journée Nationale de Prévention afin de manifester la gravité du phénomène et la nécessité de continuer à se mobiliser pour en diminuer les effets dévastateurs », poursuit le médecin. Et ce, dans un cadre dédramatisant : un film, un échange. « Une soirée dédiée à toute personne qui se pose des questions sur les conduites suicidaires et désire s’informer sur les possibilités de prévention. »
Projection lundi 5 février à 20 h 30 au Sirius, 5 rue du Guesclin, 76600 Le Havre. Participation : 4 €). www.arps.asso.fr
Pour devenir adhérent ou faire un don, laissez un message sur le site : www.arps.asso.fr ou contactez le DrLimare au 02 35 22 40 01.
Qu’en est-il localement ?
Les hommes meurent quatre fois plus par suicide que les femmes. Après la Bretagne, la Normandie est la région la plus touchée par le suicide en France. Mais étonnamment, le territoire de santé du Havre est celui où l’on se suicide le moins (au même niveau que la moyenne nationale), contrairement aux territoires de Dieppe, de l’Orne ou de la Manche où l’on meurt davantage par suicide (jusqu’à 62 % de plus que la moyenne française). Même Rouen-Elbeuf, avec une densité médicale et en particulier psychiatrique beaucoup plus importante, se situe 13 % au-dessus des chiffres nationaux. L’explication de notre meilleure efficacité serait à rechercher du côté justement d’une meilleure information du public et des professionnels de santé grâce au travail associatif.
SOS Suicide Phénix
À noter également l’existence de l’association SOS Suicide Phénix créée au Havre il y a une trentaine d’années. Labellisée Qualité « Aide en Santé », l’association a pour but l’accueil physique des personnes en mal-être plus ou moins profond, afin de renouer le lien social très souvent élastique. Les permanences ont lieu deux soirs par semaine au local situé 10 rue Jules-Vallès au Havre. Une ligne téléphonique d’appel nationale est à la disposition du grand public au 01 40 44 46 45 ainsi qu’un mail : accueil@sos-suicide-phenix.org
Le pitch du film
De sa naissance au Caire en 1933 à son premier passage à l’Olympia en 1956, de son mariage avec Lucien Morisse, patron de la jeune radio Europe n°1, aux soirées disco, de ses voyages initiatiques en Inde au succès mondial de « Gigi l’Amoroso » en 1974, le film Dalida est le portrait intime d’une femme absolue, complexe et solaire.
En se donnant la mort en mai 1987, Dalida a voulu laisser derrière elle une vie qu’elle ne supportait plus, faite de nombreux drames personnels dont le suicide de quatre des hommes de sa vie.
Fatiguée, en dépression et se sentant extrêmement seule, Dalida a préféré mettre fin à ses jours dans son appartement parisien en avalant une dose mortelle de barbituriques. Elle avait 54 ans... et une carrière couronnée de succès...
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