L'APA publie le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, cinquième édition, révision du texte (DSM-5-TR) WASHINGTON, 21 mars 2022 /PRNewswire/ -- source https://www.lelezard.com/* Aujourd'hui, l'American Psychiatric Association (APA) a publié le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, cinquième édition, révision du texte (DSM-5-TR). Le manuel, que l'APA publie et met à jour depuis 1952, définit et classe les troubles mentaux afin d'améliorer le diagnostic, le traitement et la recherche. Développé avec l'aide de plus de 200 experts en la matière, le DSM-5-TR comprend le texte et les références entièrement révisés du DSM-5, ainsi que des critères de diagnostic mis à jour et des codes d'assurance de la CIM-10-CM. Il présente un nouveau trouble, le trouble du deuil prolongé, ainsi que des codes pour le comportement suicidaire et l'automutilation non suicidaire. Au fur et à mesure que la révision était préparée, 29 experts américains et internationaux en psychiatrie culturelle, en psychologie et en anthropologie l'ont examinée pour déterminer les influences culturelles sur les caractéristiques des troubles, en intégrant des informations pertinentes dans les sections sur les questions de diagnostic liées à la culture. Un groupe de travail supplémentaire composé de 14 professionnels de la santé mentale de divers milieux ethniques et racialisés possédant une expertise dans les pratiques de réduction des disparités a examiné les références à la race, à l'origine ethnique et aux concepts connexes tout au long du manuel pour éviter de perpétuer des stéréotypes ou d'inclure des informations cliniques discriminatoires. « Cette révision du texte reflète les mises à jour les plus récentes de la littérature avec le regard supplémentaire des constructions ethnoculturelles et raciales dans le diagnostic, ainsi que des constructions de sexe et de genre », a déclaré Vivian Pender, M.D., présidente de l'APA. « Ce sera un outil puissant entre les mains des psychiatres et autres cliniciens en santé mentale alors que nous travaillons à diagnostiquer et à traiter nos patients. En produisant ce volume, l'APA continue de faire progresser la science de l'esprit. » Le DSM-5, depuis 2013, a été mis à jour au moyen d'un processus en ligne ; les chercheurs qui souhaitaient proposer des mises à jour du manuel les ont soumises par le biais du portail en ligne. Chaque proposition a fait l'objet d'un vaste processus d'examen en plusieurs étapes par des groupes d'experts avant l'approbation finale et l'inclusion, le cas échéant. En fin de compte, le DSM-5-TR inclut toutes ces mises à jour ainsi que des correctifs techniques. Le processus en ligne restera également ouvert pour le DSM-5-TR. « Deux cents chercheurs et praticiens experts ont consacré d'innombrables heures à faire en sorte que le DSM-5-TR soit une contribution indispensable à notre compréhension de la maladie mentale », a déclaré Saul Levin, M.D., M.P.A., PDG et directeur médical de l'APA. « Nous sommes reconnaissants envers tous ceux qui ont contribué à sa production et nous sommes impatients de voir les chercheurs, les cliniciens et les étudiants du monde entier l'utiliser. » Pour en savoir plus, consultez le site psychiatry.org/psychiatrists/practice/dsm.
Une modalité de prise en charge de jeunes adultes psychotiques suicidants en institution psychiatrique Souad Dehbi * Psychologue clinicienne au GHU Paris Psychiatrie & neurosciences, Paris, France L'Information Psychiatrique Volume 97, numéro 5, Mai 2021
Les tentatives de suicide dans un contexte de psychose
continuent d’interroger les soignants d’une part, à cause de la
fréquence et la gravité des passages à l’acte et d’autre part, parce
qu’elles se distinguent des passages à l’acte suicidaire dans d’autres
pathologies. Nous présenterons, dans une première partie, comment
certaines modalités de traitement institutionnel permettent qu’une
dynamique de soins limite les effets délétères du risque des passages à
l’acte. Nous donnerons ensuite quelques repères psychanalytiques pour
penser l’adolescence et la psychose émergente afin d’aider à saisir la
problématique d’un jeune homme âgé de 20 ans ayant fait de nombreuses
tentatives de suicide dans un contexte de psychose. Enfin, je montrerai
les potentialités que peut permettre un suivi psychothérapique au côté
d’un travail pluridisciplinaire.
Mots-clés : premier épisode psychotique, jeune adulte, tentative de suicide, récidive suicidaire, prise en charge, hospitalisation psychiatrique, psychothérapie, cas clinique DOI : 10.1684/ipe.2021.2268 Page(s) : 397-401 Année de parution : 2021
A pharmacoepidemiological study of the association of suicide reattempt risk with psychotropic drug exposure
Alice Demesmaeker aEmmanuel Chazard b Guillaume Vaiva ac Ali Amad a a Univ. Lille, Inserm, CHU Lille, U1172, LilNCog - Lille Neuroscience & Cognition, F-59000, Lille, France b Univ. Lille, CERIM, EA 2694- Santé publique et qualité des soins, F-59000, Lille, France c Centre national de ressources et de résilience (CN2R), F-59000, Lille, France
Received 16 November 2020, Revised 15 March 2021, Accepted 1 April 2021, Available online 7 April 2021. Journal of Psychiatric Research Volume 138, June 2021, Pages 256-263
Abstract
Introduction
Recent pharmacoepidemiological studies have suggested that consumption of certain classes of psychotropic drugs could be considered protective or risk factors for suicidal behaviour. The aim of the study was to evaluate the association between the risk of suicide reattempt within 6 and 14 months after a suicide attempt (SA) with the use of different classes of psychotropic drugs, combination pairs and treatment adequacy from inclusion through 6 and 14 months post-SA.
Method
A prospective observational cohort of 972 subjects from the ALGOS study from January 2010 to February 2013 was used to evaluate the association of risk of suicide reattempt within 6 and 14 months with the use of different classes of psychotropic drugs (antidepressants, anxiolytics, antipsychotics, lithium, anticonvulsants, analgesics, opioid maintenance therapy and maintenance treatment for alcohol dependence). A multivariable Cox model was performed after imputation of missing data using the multiple imputation method.
Results
Our main results did not show an association between psychotropic drug use and suicide reattempt after 6 months of follow-up. We demonstrated that the use of benzodiazepines (HR = 1.87 [1.25; 2.81], p < 0.01) and hypnotics (HR = 1.49 [1.03; 2.17], p = 0.04) or a combination of both (HR = 1.80 [1.17; 2.72], p = 0.01) were associated with suicide reattempt within 14 months after a previous SA.
Conclusion
The early identification of a positive association between psychotropic drugs and the risk of suicidal behaviour is extremely important for prevention of suicide reattempts. Special precautions should be considered when prescribing psychotropic drugs for these subjects, particularly those at risk of suicide reattempt.
Psychiatrie : 20 recommandations pour améliorer le parcours de soin Dépendance - Handicap Publié le : 24.03.2021 https://www.ash.tm.fr*
Le Cese formule 20 recommandations pour améliorer le parcours de soin en psychiatrie.
A l'occasion de sa séance plénière du 24mars, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a adopté à l’unanimité l’avis «Améliorer le parcours de soin en psychiatrie», dans lequel il est préconisé de mieux articuler les secteurs sanitaire, social et médico-social.
« En France [avant la crise sanitaire, ndlr],
une personne sur cinq souffre de troubles psychiques. Plus d’un quart de
la population consomme des anxiolytiques, des antidépresseurs, des
somnifères. La maladie psychiatrique est la première cause d’invalidité
et le deuxième motif d’arrêt de travail. Si 80% des patients sont traités en ambulatoire, plus de 420000personnes sont hospitalisées chaque année, dont 82000
sans leur consentement. Aucune catégorie de la population n’échappe à
ces maladies, dont la prévalence s’accroît chez les jeunes… » Ces données ont été énoncées ce mercredi 24mars
par Alain Dru, membre du groupe CGT au Cese (Conseil économique, social
et environnemental), lors de la présentation de l’avis « Améliorer le parcours de soin en psychiatrie », adopté à l’unanimité.
Le Conseil formule 20 recommandations
autour de trois objectifs : améliorer la connaissance et la
représentation de la santé mentale ; favoriser une entrée plus précoce
dans le soin; renforcer la
coordination médicale et médico-sociale afin d’assurer l’accompagnement
des patients et de leurs familles. L’une des préconisations vise à
conduire des campagnes d’information et de sensibilisation sur la santé
mentale pour mettre en avant la variété des troubles, leurs causes, leur
prévalence, les professionnels à consulter et les traitements
possibles.
« Il est difficile de convaincre la population que les maladies
psychiatriques sont des maladies comme les autres et que les personnes
qui en souffrent sont surtout dangereuses pour elles-mêmes, observe Alain Dru, corapporteur de cet avis. Notre
projet est donc de construire des campagnes d’information à destination
du grand public ou de publics cibles, à l’exemple de ce qui a été mis
en place pour le sida, l’alcool ou le tabac. »
« Former des secouristes en santé mentale »
Au-delà de la déstigmatisation, le Conseil entend accroître le niveau de connaissance sur la santé mentale de la population. « Nous estimons nécessaire de renforcer les formations aux premiers secours en santé mentale, avance Anne Gautier, corapporteure et membre du groupe “Agriculture”. De
la même manière que l’on apprend les gestes qui sauvent dans une
situation d’urgence, il est possible d’apprendre à détecter, orienter
quand un trouble mental s’installe. Il s’agit en réalité de former des
secouristes en santé mentale. »
Des espaces de rencontre pour les aidants
Le Cese se penche aussi sur la question des aidants. En France, 4,5millions
de personnes sont concernées par la pathologie d’un proche. Pour elles
aussi, la maladie a des répercussions considérables. Elles subissent de
plein fouet les parcours trop complexes et sont trop souvent amenées à
endosser un rôle qui ne devrait pas être le leur. « Nous tirons donc
un signal d’alarme. Les proches aidants sont soumis à une tension
extrême, au point que trop souvent leur propre santé est en danger, déplore encore Anne Gautier. Au-delà
du simple soutien au moment de l’annonce de la pathologie, nous
proposons de favoriser la création d’espaces de rencontre dédiés et de
groupes support. De plus, nous jugeons indispensable de mieux les
associer aux prises de décision. »
Instauration d’un référent de parcours
Le Cese recommande également d’instaurer de«nouveaux
partenariats, fondés sur les principes de “l’aller vers”, associant la
psychiatrie de secteur aux structures des champs sanitaire, social et
médico-social pour favoriser le repérage et l’entrée dans un parcours de
soin coordonné et recruter dans chaque secteur un poste d’infirmier ou
de psychologue en charge des partenariats» (préconisation n°8). Pour ce faire, lesdits secteurs doivent « construire
une mission de référent de parcours, confiée à des professionnels du
soin ou du travail social chargés de coordonner et d’articuler les
différentes prises en charge ».
Mieux évaluer les troubles chez la personne âgée
Enfin, le Conseil souhaite renforcer la place de la psychiatrie dans l’accompagnement de la personne âgée.
« Le vieillissement de la population s’accompagne en effet d’une
augmentation de la prévalence des pathologies liées à l’âge, parmi
lesquelles celles qui relèvent de la santé mentale occupent une place
importante », explique Anne Gautier. Si la maladie d’Alzheimer est
régulièrement citée, d’autres troubles frappent plus spécialement le
sujet âgé, comme la dépression, trop souvent sous-diagnostiquée et non
traitée. «Nous insistons sur la nécessité d’une évaluation, mais aussi d’une prise en charge globale et multidisciplinaire», stipule Anne Gautier.
Psychiatrie : comment améliorer les parcours de soins des patients ?
Le système de santé français fait face à une demande de soins de santé mentale et à un nombre d’hospitalisations en hausse en psychiatrie. Face à un contexte de pandémie, la Cour des comptes analyse dans un récent rapport l’offre de traitements et l’organisation des soins en santé mentale. Par La Rédaction https://www.vie-publique.fr*
Publié le 2 mars 2021
Les troubles dépressifs et anxieux (légers ou modérés) sont assez fréquents dans la population : ils concernent presque un tiers des personnes sur une vie entière.
En 2018, on compte 552 structures psychiatriques sur le territoire français, dans lesquelles 340 000 patients ont été hospitalisés à temps complet. La notion de santé mentale est large. Elle inclut généralement trois dimensions : la santé mentale positive qui correspond à un état de bien-être mental ; la détresse psychologique ou le "mal-être" qui correspond à des symptômes de type dépressif ou anxieux, passagers et de faible intensité ; et les troubles psychiatriques, passagers ou durables, et qui sont plus ou moins sévères.
La Cour des comptes reconnaît la diversité de l’offre en soins psychiatriques et psychologiques déployée pour palier à ces différents troubles. Cependant, l’analyse met l’accent sur le manque de coordinations entre les hôpitaux, cliniques, établissements médico-sociaux et psychiatres libéraux. Ce manque de complémentarité entre professionnels nuit à l’efficacité du système en place.
La Cour regrette également un nombre trop important de prises en charge en urgence de patients atteints de troubles plus sévères. Certains troubles psychiatriques nécessitent un suivi prolongé et une prise en charge préventive pour éviter les hospitalisations d’urgence et/ou sous contrainte. En l’état, les hospitalisations sont souvent inadéquates et ne sont pas orientées vers une sortie durable.
Des parcours de soins à adapter
L’organisation des soins de manière graduée doit permettre d’offrir des parcours de soins plus pertinents aux patients tout en garantissant un meilleur usage des ressources spécialisées et non spécialisées.
Les parcours de soins
Le parcours désigne une suite de soins reçus à partir de la première prise en charge du trouble jusqu’à la stabilisation du patient. Pour garantir l’efficacité des traitements, le rapport préconise une meilleure articulation des rôles des différents professionnels.
Pour cela, il faut prendre en compte la sévérité des symptômes et mobiliser les intervenants de "première ligne". Les médecins traitants forment ainsi un premier filtre dans l’accès aux centres médico-psychologiques qui doivent être réservés aux publics prioritaires.
#PsyJournalClub 3 : Quels sont les corrélats cérébraux du risque suicidaire chez les patients ayant une schizophrénie débutante ?
Publié
le mercredi 6 janvier 2021 https://www.encephale.com/*
L'Encephale online@encephaleonline
Dans ce thread, Lucie Berko vous invite à échanger autour d'une étude
explorant l'activité du cortex préfrontal chez des patients ayant une
schizophrénie débutante avec ou sans antécédent de tentative de suicide.
N'hésitez pas à poursuivre la conversation sur Twitter !
Borderline
personality disorder and prior suicide attempts define a severity
gradient among hospitalized adolescent suicide attempters
Aveline Aouidad,1 David Cohen,2 Bojan Mirkovic,3 Hugues Pellerin,1 Sébastien Garny de La Rivière,4 Angèle Consoli,1 Priscille Gérardin,3 and Jean-Marc Guilé4
1Hopital Universitaire Pitie Salpetriere, Paris, France
2Institut des Systemes Intelligents et de Robotique, Paris, France
3Hopital Charles Nicolle, Rouen, France
4Centre Hospitalier Universitaire Amiens-Picardie, Amiens, France
Borderline
personality disorder (BPD) and history of prior suicide attempt (SA)
have been shown to be high predictors for subsequent suicide. However,
no previous study has examined how both factors interact to modify
clinical and suicide severity among adolescents.
Methods
This
study presents a comprehensive assessment of 302 adolescents (265
girls, mean age = 14.7 years) hospitalized after a SA. To test clinical
interactions between BPD and history of prior SA, the sample was divided
into single attempters without BPD (non-BPD-SA, N = 80), single attempters with BPD (BPD-SA, N = 127) and multiple attempters with BPD (BPD-MA, N = 95).
Results
Univariate
analyses revealed a severity gradient among the 3 groups with an
additive effect of BPD on the clinical and suicide severity already
conferred by a history of SA. This gradient encompassed categorical
(anxiety and conduct disorders and non-suicidal-self-injury [NSSI]) and
dimensional comorbidities (substance use and depression severity) and
suicide characteristics (age at first SA).
According
to regression analyses, the BPD-MA group that was associated with the
most severe clinical presentation also showed specific features: the
first SA at a younger age and a higher prevalence of non-suicidal
self-injury (NSSI) and anxiety disorders. The BPD-MA group was not
associated with higher impulsivity or frequency of negative life events.
Conclusions
Based
on these findings and to improve youth suicide prevention, future
studies should systematically consider BPD and the efficacy of
reinforcing early interventions for anxiety disorders and NSSI.
Supplementary Information
The online version contains supplementary material available at 10.1186/s12888-020-02930-4.
ÉVALUER LES TECHNOLOGIES DE SANTÉ NOTE DE CADRAGE Stimulation magnétique transcrânienne dans le traitement de la dépression pharmacorésistante de l’adulte Validée par le Collège le-7 octobre 2020
« Cette hospitalisation m’a rendu plus fort et m’a appris qu’il ne fallait pas forcément garder ses problèmes pour soi. »
Mercredi 02 septembre 2020 Ouest France sur https://saint-brieuc.maville.com*
Maël a 18 ans. Il est étudiant à Brest. Après
une tentative de suicide, son témoignage a été recueilli par les
journalistes de la Zone d’expression prioritaire, lors d’ateliers avec
des jeunes.
La Zone d’expression prioritaire (Zep)
collecte la parole des jeunes de 14 à 28 ans lors d’ateliers d’écriture
encadrés par des journalistes. Ces témoignages sont ensuite publiés par
des médias. Ouest-France a choisi d’être l’un d’eux. Tous les mois, le premier mardi, dans le journal et sur ouest-france.fr, on peut lire ces récits de vie, comme celui de Maël, étudiant à Brest, qui a fait une tentative de suicide.
«Dix-sept
: c’est le nombre de médicaments que j’ai ingérés le jour où j’ai tenté
de me suicider. Un mois : c’est la durée de mon hospitalisation.
C’était il y a trois ans, en seconde. À cette époque, rien n’allait
malgré le sourire sur mon visage. L’envie de quitter ce monde, et mes
problèmes familiaux.
J’ai ingéré ces médicaments au lycée
et je me suis réveillé le lendemain à l’hôpital. Un médecin m’a
expliqué que j’avais deux possibilités : me faire hospitaliser dans un
hôpital spécialisé en psychiatrie, ou intégrer un service spécifique au
CHU de Brest, réservé aux personnes de 15 à 25 ans ayant commis des
gestes suicidaires.
Je ne voulais qu’une seule chose :
rentrer chez moi. Mais ce choix ne m’était pas proposé. J’ai choisi le «
moins pire » : mon hospitalisation dans le service spécialisé pour les
jeunes.
« Quarante-huit d’observation en arrivant »
En
arrivant, un médecin m’a expliqué brièvement comment fonctionnait le
service, il m’a demandé si j’avais des objets contondants (je devinais
facilement que c’était pour éviter d’éventuelles scarifications), et mon
téléphone afin d’éviter les contacts avec l’extérieur pendant au moins
deux jours. Ces quarante-huit heures servaient d’observation mais
permettaient aussi de couper tout lien afin de pas être perturbé.
Ensuite,
on m’a donné une sorte d’emploi du temps et des règles à respecter : le
téléphone n’est accepté que vingt minutes le matin et vingt minutes le
soir, une pause cigarette le matin et une le soir, aucune sortie
autorisée sauf si on en fait la demande. Des entretiens réguliers avec
un médecin allaient être mis en place mais aussi des ateliers afin
d’extérioriser ses sentiments et son mal-être.
Des
visites étaient autorisées mais honnêtement, cela me faisait mal de voir
des gens dans ces circonstances… Je n’ai accepté que très peu de
visites, seulement de la famille. Je ne voulais en aucun cas que mes
amis me voient dans cet état, et encore moins qu’ils s’inquiètent pour
moi, qui suis une personne souriante, à l’écoute des autres, toujours
prête à aider.
« On s’aidait les uns les autres »
Au
début de mon hospitalisation, je me demandais si j’allais réellement
m’en sortir ou au contraire si j’allais sombrer encore plus.
Heureusement que les autres personnes hospitalisées sont venues très
vite vers moi. Elles m’ont beaucoup aidé à traverser cette période
difficile. J’ai rencontré des jeunes qui sont passés par les mêmes
choses que moi. On s’aidait les uns les autres.
Ça m’a
permis de parler avec des gens qui ressentaient vraiment la même chose
que moi. On essayait de ne pas y penser même si, au début, il fallait
bien savoir pourquoi chacun était là… Et puis après on a arrêté, et on a
parlé de plein d’autres choses. On avait des permissions, on pouvait
sortir pendant une heure et demie. On se baladait, on faisait les
magasins…
Nous avions aussi des activités en groupe afin
de dire chacun notre ressenti. Par exemple, dire ce qui nous passait par
la tête en piochant un mot dans un regroupement de bouts de papier.
Toutes les activités étaient axées sur nos émotions. Le médecin qui
m’accompagnait, un homme grand, tout fin, souriant, était à l’écoute. Je
sentais qu’il était vraiment là pour m’aider, pour que je m’en sorte.
« Cette hospitalisation m’a rendu plus fort mentalement »
Au
fil des jours qui défilaient et des activités qui s’accumulaient,
intérieurement j’allais mieux. Je récupérais la joie de vivre qui
s’était éteinte il y a quelques semaines de cela. Trois semaines après
mon hospitalisation, je me sentais mieux, j’avais extériorisé mes
émotions.
Assez vite, je n’ai attendu qu’une chose : la
sortie définitive pour pouvoir revoir mes amis et ma famille. Mais
j’avais quelques appréhensions sur le fait que mon entourage ne me voit
plus de la même manière, qu’il me regarde comme une personne instable
émotionnellement.
Je m’étais trompé sur toute la ligne.
Mes amis et ma famille n’attendaient qu’une chose, c’est de me revoir
avec le sourire aux lèvres. Lorsque je suis rentré, tout le monde était
content mais aussi soulagé que j’aie surmonté tout ça. Avec ma famille,
on a parlé de ce qu’il s’était passé, de comment je me sentais
maintenant. Les amis, ils ont fait comme si rien ne s’était passé et que
j’étais toujours la même personne. Heureusement.
Ouest France Mercredi 02 septembre 2020 Maël, 18 ans : Après une tentative de suicide, «le service psychiatrique m’a redonné goût à la vie»
Un nouveau médicament contre la dépression bientôt disponible Après plusieurs décennies sans innovation, Janssen va mettre sur le marché Spravato, un médicament contre les formes résistantes de cette maladie. Pharmacie - Santé Publié le 3 févr. 2020 https://www.lesechos.fr/*
En France, quelque 150.000 des 2,9 millions de personnes souffrant de dépression ne peuvent être soulagées par l'utilisation des antidépresseurs existants. (Getty Images/iStockphoto) Par Catherine Ducruet
C'est du jamais vu depuis trente ans… une nouvelle famille d'antidépresseurs va être lancée. Spravato de Janssen a en effet obtenu fin 2019, le feu vert des autorités de santé européennes, après celle des autorités américaines. « Ce médicament repose en effet sur un mécanisme d'action complètement nouveau », explique la directrice médicale Neurosciences de Janssen en France, Sophie Bouju.
Son principe actif, l'eskétamine, est une variante de la kétamine, molécule utilisée habituellement en anesthésie, afin de soulager les douleurs chroniques, ou en soins intensifs. Sur la base de cinq études cliniques de Phase III, ce type de kétamine a donc fait son entrée dans le domaine de la dépression. Dépressions résistantes
Sans doute Spravato est-il réservé seulement aux dépressions résistantes, c'est-à-dire qui ne sont pas sous contrôle, en dépit de tentatives de traitement avec au moins deux médicaments. Mais cela représente malgré tout 15 à 30 % des 300 millions de malades dans le monde, soit quelque 150.000 des 2,9 millions de dépressifs en France. Et devraient venir bientôt s'ajouter à cette population, les patients « dépressifs avec idées suicidaires et intention de passer à l'acte », nouvelle catégorie de patients plus difficile à cerner, pour lesquels Janssen a déposé, il y a quelques jours, une demande d'autorisation européenne.
« Alors que le poids de la dépression s'accroît - elle devrait être la première cause d'invalidité en 2030 - les familles actuelles d'antidépresseurs ne permettent pas de traiter correctement tous les patients », observe Sophie Bouju. Le recours possible à une nouvelle classe élargit donc l'éventail thérapeutique des psychiatres. Elle leur fournit en particulier un produit dont les effets bénéfiques sont sensibles au bout d'une semaine (contre trois à quatre pour les antidépresseurs oraux), et qui diminue de 50 % le risque de rechute. Spray nasal
Ce nouveau produit a déjà pu bénéficier à certains patients français avant même son autorisation officielle, grâce au mécanisme dérogatoire dit d'« Autorisation temporaire d'utilisation de cohorte », « la première jamais accordée en psychiatrie » souligne-t-on chez Janssen. Mais il doit être utilisé avec précaution.
Sa prescription peut en effet entraîner des effets secondaires qui nécessitent une surveillance (dissociation, vertiges, sédation…), ou un risque d'addiction en cas d'abus. Il sera donc uniquement à usage hospitalier, et sous une forme originale, celle d'un spray nasal (pour un effet rapide) et à usage unique (afin d'éviter les détournements), en complément d'un antidépresseur oral. Lancement fin 2020
Janssen, qui a lancé son produit aux Etats-Unis au prix de 32.400 dollars par an, devra certainement en rabattre en Europe. En France, son dossier vient d'être soumis à la Haute autorité de santé pour évaluation médicale, étape préalable à la négociation du prix, avec un lancement commercial espéré fin 2020.
Les analystes américains créditent, en tout cas, un bel avenir au Spravato avec 3 milliards de dollars de ventes à son apogée. Une promesse de succès dans un domaine, les neurosciences, que les laboratoires ont tendance à déserter, en dépit d'importants besoins non satisfaits, du fait d'un taux d'échec très élevé. Janssen est un des rares à persister dans ce domaine. Il dispose actuellement de sept molécules en développement clinique. La plus avancée, le Seltorexant, en Phase III, cible la dépression avec troubles du sommeil.
Comment prévenir le risque suicidaire chez un patient ? Source https://www.epsm-marne.fr/**
Une nouvelle formation a commencé au sein de
l’Établissement Public de Santé Mentale (EPSM) de la Marne : la
prévention du risque suicidaire. Destinée aux infirmiers, psychologues,
assistants sociaux et médecins, elle doit leur permettre de reconnaître
les signes de détresse chez les patients, d’évaluer le risque de passage
à l’acte et d’adapter leur intervention.
Retarder le plus possible le passage à l’acte suicidaire pour
laisser la place au soin : tel est l’objectif principal de la formation
sur la prévention du risque suicidaire qui a démarré les 18 et 19
novembre 2019 au sein de l’Établissement Public de Santé Mentale (EPSM)
de la Marne. Quinze infirmiers s’étaient inscrits à cette première session qui dure trois jours. « La
première partie s’avère théorique. On aborde la notion de suicide,
l’épidémiologie, les idées reçues, la particularité du suicide en milieu
psychiatrique », explique le Dr Vincent Scherr, pédopsychiatre au
pôle infanto-juvénile d’Épernay-Sézanne de l’EPSM de la Marne et
formateur régional avec Carine Léon, psychologue au pôle rémois 05. Le
modèle théorique psychosocial de la crise suicidaire y est développé.
Tout comme les interventions de crise avec des outils d’évaluation. « Il
n’y a pas uniquement des paroles explicites mais aussi de petits signes
allusifs, de petits gestes qui peuvent survenir avant le passage à
l’acte suicidaire », rappelle le Dr Vincent Scherr. Pour travailler les techniques d’entretien avec des patients
suicidaires, les deux formateurs n’hésitent pas à mettre en situation
les participants dans des jeux de rôle. « Le but est qu’ils
développent, qu’ils optimisent leur capacité à repérer une personne en
phase de crise suicidaire et à apporter une aide appropriée, adaptée
pour éviter le passage à l’acte », précisent le Dr Vincent Scherr et Carine Léon.
« Un risque fort en psychiatrie »
« Le risque suicidaire est un risque fort en psychiatrie qui est
identifié comme tel par l’établissement et posé au Compte Qualité
thématique Parcours du patient, indique Marie-José Mouchot, directrice adjointe - coordonnateur des risques associés aux soins. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place un panel d’actions. » La formation systématique des professionnels à la prise en charge de patients présentant un risque suicidaire, recommandée par la Haute Autorité de Santé (HAS) lors de la visite de certification en avril dernier, en fait désormais partie. Une formation que les 15 infirmiers ont trouvée « très enrichissante » et particulièrement « accessible ». La plupart d’entre eux se sentent désormais « plus à l’aise ». « On est mieux armé, on a des outils supplémentaires pour faire face à un patient en crise suicidaire, confie Mathilde, infirmière dans un centre médico-psychologique (CMP). On peut tous être confronté à ce type de situation quelle que soit la structure dans laquelle on travaille. » La première session s’achève le 28 janvier 2020. Une deuxième session
est d’ores et déjà programmée les 3 et 4 février 2020, ainsi que le 18
mars, sur le site rémois de l’établissement. Elle sera animée par le Dr
Éric Tran, médecin psychiatre à G10, et Nezlie Lefevre, psychologue
clinicienne au CHU de Reims, tous deux formateurs régionaux. À terme,
l’ensemble des soignants devrait être formé à la prévention du risque
suicidaire. Comme l’annonce Marie-José Mouchot : « cette formation a vocation à être pérenne ».
Des actions inscrites dans le projet d’établissement Lors de la commission médicale d’établissement (CME) du 22 novembre
2018, le Dr Vincent Scherr, pédopsychiatre, avait déjà présenté des
préconisations concernant la prévention des passages à l’acte suicidaire
en service intra-hospitalier. Parmi les pistes envisagées, la formation
des personnels soignants dans les trois ans, la mise en place de
référents en prévention du suicide dans chaque unité, le développement
de réunions cliniques en équipe autour de la crise suicidaire.
Parallèlement, une fiche actions dédiée à la prévention du risque
suicidaire a été insérée dans le projet d’établissement 2018-2022.
Présentation du rapport « La santé mentale en France a l’horizon 2022" rapport de la mission d'information sur l'organisation territoriale de la santé mentale de Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale
"Un rapport alarmant sur la psychiatrie déplore une "prise en charge catastrophique" POLITIQUE 18/09/2019 www.huffingtonpost.fr* Un rapport alarmant sur la psychiatrie déplore une "prise en charge catastrophique" Les députées Martine Wonner (LREM) et Caroline Fiat (LFI) dévoilent les conclusions de leurs travaux. Le HuffPost avec AFP
SANTÉ - Un rapport explosif. Face à la “prise en charge catastrophique” des patients en santé mentale, deux députées appellent à “sortir enfin la psychiatrie de l’hôpital” en “redéployant 80%” du personnel de cette filière “au bord de l’implosion” vers la ville ”à l’horizon 2030″, dans un rapport dévoilé ce mercredi 18 septembre.
“Retard au diagnostic beaucoup trop important”, “sur-occupation des lits” de psychiatrie représentant un “fléau pour les patients comme pour les soignants”, recours croissant ”à l’hospitalisation sans consentement”... L’organisation territoriale de la psychiatrie est “tout à la fois inefficiente et inefficace”, estiment Martine Wonner (LREM) et Caroline Fiat (LFI), rapporteures d’une mission d’information sur le sujet.
Avant de devenir députées, Martine Wonner était psychiatre, Caroline Fiat aide soignante dans un Ehpad. Les CMP “partout saturés”
“Le nombre de lits d’hospitalisation en psychiatrie par habitant a diminué de moitié depuis les années 1990”, rappellent les députés. Mais les structures qui se sont développées parallèlement en ville “ne permettent pas de répondre à la demande croissante” de soins, les centres médicopsychologique (CMP) étant “partout saturés” tandis que “le premier rendez-vous avec un psychiatre peut atteindre trois mois, et parfois bien plus”.
Conséquence, “les patients n’ont d’autre solution que les urgences, puis d’être hospitalisés, alors que la crise aurait pu être évitée”.
“Si les revendications des personnels hospitaliers”, illustrées par plusieurs grèves depuis l’an dernier (Amiens, Rouen, Le Havre, etc...), “en faveur de plus de lits sont parfaitement compréhensibles (...) la réponse ne se trouve pas dans l’hôpital mais en dehors”, jugent-elles. La création d’une agence dédiée
“Il est urgent de déployer des moyens importants sur les structures extra-hospitalières, qu’elles soient sanitaires, sociales ou médico-sociales”, font-elles valoir, plaidant pour “le développement massif d’équipes mobiles sur l’ensemble du territoire mais aussi de structures d’amont et d’aval”.
“Au terme d’une dizaine d’années, l’objectif (...) devrait être de déployer 80% des moyens de l’hôpital psychiatrique sur l’ambulatoire”. Les députées proposent en outre la création d’une “agence nationale en charge des politiques de santé mentale” sur le modèle de l’Institut national du cancer. Autre initiative préconisée, la “destigmatisation de la psychiatrie”.
En réponse à la crise du secteur, la ministre de la Santé Agnès Buzyn avait nommé en avril le professeur Frank Bellivier délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie, quand les députées souhaitent un “pilotage interministériel”.
Clinical and neuropsychological characteristics of
euthymic bipolar patients having a history of severe suicide attempt
E. Olié
1, 2, 3
M. Seyller
1, 3
S. Beziat
2
J. Loftus
3, 4
F. Bellivier
3, 5
T. Bougerol
3, 6
R. Belzeaux
3, 7
J.M. Azorin
3, 7
S. Gard
3, 8
J.P. Kahn
3, 9
C. Passerieux
3, 10
M. Leboyer
3, 11
B. Etain
3, 11
C. Henry
3, 11
P. Courtet
1, 2, 3
1
CHRU Montpellier - Centre Hospitalier Régional Universitaire [Montpellier]
2
Neuropsychiatrie : recherche épidémiologique et clinique
3
Fondation FondaMental [Créteil]
4
Hôpital Princesse Grace [Monaco]
5
Groupe Hospitalier Saint Louis - Lariboisière - Fernand Widal [Paris]
6
CHU Grenoble
7
Hôpitaux Sud - Département Universitaire de
Psychiatrie - [Hôpital Sainte Marguerite - APHM]
8
Hôpital Charles Perrens
9
CHRU Nancy - Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy
10
CHV - Centre Hospitalier de Versailles
11
Hôpital Albert Chenevier
Abstract : OBJECTIVE:
Identifying bipolar patients at high-suicide risk is a major health
issue. To improve their identification, we compared dimensional and
neuropsychological profile of bipolar patients with or without history
of suicide attempt, taking into account suicidal severity (i.e.
admission to intensive ward).
METHOD:
A total of 343 adult euthymic bipolar out-patients recruited in the
French FondaMental Advanced Centres of Expertise for Bipolar Disorder
were divided into three subgroups: 214 patients without history of
suicide attempt, 88 patients with past history of non-severe suicide
attempt and 41 patients with past history of severe suicide attempt.
General intellectual functioning, speed of information processing,
verbal learning and memory, verbal fluency and executive functioning
were assessed.
RESULTS:
Severe suicide attempters had lower affective intensity and lability
than non-severe attempters. Severe suicide attempters outperformed
non-severe attempters for verbal learning and non-attempters for Stroop
word reading part after adjustment for study centre, age, gender,
educational level, antipsychotics use, depression score, anxious and
addictive comorbidities.
CONCLUSION:
Neuropsychological tasks commonly used to assess bipolar patients do not
seem accurate to identify suicide attempters in euthymic patients. In
the future, decision-making and emotional recognition tasks should be
assessed. Moreover, clinical and neuropsychological profiles should be
considered together to better define suicidal risk.
[37-216-H-10] - Doi : 10.1016/S0246-1072(19)63168-8
B. Mirkovic, Docteur en médecine, PhD, médecin pédopsychiatre a, b, ⁎, M.-A. Podlipski, Docteur en médecine c, d, P. Gerardin, Docteur en médecine, PhD, Professeur de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent c, d, e a Service
de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, Groupe hospitalier La
Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l'Hôpital, 75013 Paris, France b Unité de recherche EA4047, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, France c Pôle de psychiatrie enfants-adolescent, Centre hospitalier du Rouvray, 4, rue Paul-Éluard, 76301 Sotteville-lès-Rouen, France d Laboratoire CRFDP, Normandie Université, Rouen, France e Département
de pédiatrie médicale, Fédération hospitalo-universitaire de
psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, Centre
hospitalo-universitaire Charles-Nicolle/CH-Rouvray, Rouen, France
Auteur correspondant.
Psychiatrie Sous presse. Épreuves corrigées par l'auteur.
Disponible en ligne depuis le mercredi 28 août 2019
Résumé
Le
suicide représente une des principales causes de mortalité,
potentiellement évitable, chez les adolescents. Il s'agit d'un phénomène
complexe qui constitue l'extrême d'un continuum appelé communément les
conduites suicidaires. Au regard des données les plus récentes, il
convient de considérer les conduites suicidaires comme résultant
d'interactions multiples, bio-psycho-sociales. Une approche
développementale et intégrative permet d'avoir une vision plus large
dans la compréhension des voies étiopathogéniques. Une perspective
évolutive, allant de la période de la grossesse à l'âge adulte, au sein
d'un environnement familial et social particulier, est indispensable à
la fois pour la compréhension des mécanismes psychopathologiques mais
aussi pour l'élaboration des protocoles de prise en charge et de
recherche. L'évaluation du risque suicidaire associe à l'évaluation des
facteurs de risque celle des facteurs de protection. Les facteurs
prédisposants comme les agressions pendant l'enfance constituent une des
pistes importantes dans la recherche des mécanismes neurobiologiques
associés aux conduites suicidaires. Des éléments de preuve suggèrent que
les événements d'adversité précoce peuvent augmenter le risque
suicidaire à l'adolescence et à l'âge adulte, par l'intermédiaire des
modifications épigénétiques. La prise en charge des adolescents
suicidants est difficile et marquée par un important taux de récidive. À
ce jour, il n'existe pas de recommandations fondées sur des preuves
pour la prise en charge des adolescents suicidants. Il n'existe que très
peu de traitements ciblant spécifiquement les tentatives de suicide et
ces prises en charge manquent cruellement d'évaluation. La thérapie
comportementale dialectique et la thérapie fondée sur la mentalisation
semblent être deux pistes ayant montré des résultats encourageants. Les
interventions visant à maintenir un contact entre le patient et les
services de santé mentale (connectedness care) sont en
développement. Les progrès technologiques et les nouveaux modes de
communication ont accéléré la recherche dans ce domaine, avec des
résultats très encourageants.
Mots-clés : Suicide,
Tentative de suicide, Conduites suicidaires, Adolescent,
Psychopathologie, Facteurs de risque et de protection, Recommandations
Plan
Introduction
Situation et problématique
Définitions et terminologie
Quelques repères épidémiologiques
Défis des cliniciens et des chercheurs
Modèles de compréhension
Facteurs de risque et facteurs de protection
Aspects morphologiques et neurobiologiques
Aspects génétiques et épigénétiques
Aspects socioanthropologiques et nouveaux modes de communication
Quels sont les syndromes du DSM-5 les plus associés aux idées suicidaires chez les adolescents? Analyses selon l’âge et le sexe M. Cournoyer 1,2,3 R. Labelle 1,2,3,4C. Berthiaume 3L. Bergeron 3,5 Revue de psychoéducationVolume 45, numéro 1, 2016, 41-62
1 Département de psychologie, Université du Québec à Montréal 2 Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et l’euthanasie, Université du Québec à Montréal 3 Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, site de l’Hôpital Rivière-des-Prairies, Université de Montréal 4 Département de psychiatrie, Université de Montréal 5 Département de psychologie, Université de Montréal
Cette étude transversale vise à déterminer la force d’association entre cinq catégories de syndromes du DSM-5 et les idées suicidaires en fonction de l’âge et du sexe. Quatre cent soixante-quatre jeunes âgés de 12 à 15 ans en contexte scolaire (237 filles; 227 garçons) et 141 adolescents en milieu clinique (62 filles et 79 garçons) de Montréal participent à l’étude. Chaque adolescent complète le Dominique Interactif pour Adolescents, un instrument d’évaluation de la santé mentale. En contexte scolaire, 8,6 % des adolescents présentent des idées suicidaires et 37,6 % en milieu clinique. Les résultats indiquent une forte association entre les idées suicidaires et la dépression dans les deux échantillons, indépendamment de l’âge et du sexe. Dans l’échantillon scolaire, les adolescents déprimés et les jeunes âgés de 14 et 15 ans sont plus susceptibles de présenter des idées suicidaires. De plus, les garçons avec des comportements perturbateurs et les filles présentant des symptômes de TDAH ont plus de possibilité d’avoir des idées suicidaires. Dans l’échantillon clinique, les syndromes associés aux idées suicidaires sont la dépression et la consommation de substances. La présence de dépression représente un facteur de vulnérabilité important, tant chez les filles que chez les garçons indépendamment de l’échantillon scolaire ou clinique. De plus, la présence de l’une ou l’autre des cinq catégories de syndromes psychiatriques, telle que nous l’avons évaluée, augmente le risque de présenter des idées suicidaires chez les adolescents. Les résultats de cette étude appuient la pertinence d’une identification précoce des syndromes du DSM-5 et l’importance du dépistage précoce chez les jeunes du secondaire
Des psychiatres s’alarment : pourquoi tant de malades mentaux livrés à eux-mêmes ?
>Société>Santé|Elsa Mari|
16 janvier 2019 www.leparisien.fr*
Des médecins lancent un signal d’alarme : des patients atteints de troubles mentaux, parfois majeurs, ne sont pas pris en charge car les services psychiatriques sont débordés.
Dans
un tunnel du métro parisien de la ligne 6, un homme, seul, nage dans un
jogging trop large. Comme s’il jouait, il va et vient, en riant, dans
le sens contraire de la foule. Quelques jours plus tôt, une femme,
élégante, chapeau rouge digne des courses hippiques, se met à taper du
pied, dans un wagon de la ligne 1, avant de se mettre à hurler, en
furie. Le sol tremble, la rame retient son souffle. Une autre erre toute
la journée, le regard vide, le long de la rue Rambuteau, dans le IVe
arrondissement.
Des personnes qui crient, qui parlent seule dans
les rues, ce sont des scènes courantes surtout dans les grandes villes.
Ces âmes errantes sont-elles plus nombreuses qu’avant ? Difficile de
savoir, les chiffres n’existent pas. Mais « ce n’est pas normal d’en
voir autant », dénonce pour la première fois le docteur Antoine
Pelissolo, chef du service psychiatrie à l’hôpital Henri-Mondor, à
Créteil (Val-de-Marne). « C’est un vrai problème, rebondit le professeur
Michel Lejoyeux de l’hôpital Bichat. Il n’est pas acceptable que, sur
une question aussi grave, il n’y ait aucune évaluation. Il en faut une !
»
Selon les spécialistes,
cette situation est le reflet d’un défaut de prise en charge des
malades, conséquence d’un système psychiatrique en plein naufrage,
dénoncé aujourd’hui, haut et fort, par toute une profession. Une journée
d’action nationale, à l’appel de plusieurs collectifs, mardi prochain. «Ils sortent trop tôt de l’hôpital»Réduction
du nombre de lits, alors que la population augmente et que le recours à
la psychiatrie est plus fréquent, absence de structures alternatives…
Résultat, les patients – et leurs familles
– trinquent. « Ils sortent trop tôt de l’hôpital et doivent être
réhospitalisés », déplore Marion Leboyer, responsable de pôle à
l’hôpital Mondor et coauteure d’une enquête choc « Psychiatrie : l’état
d’urgence ».
Le professeur Lejoyeux le constate tous les jours
dans son service. « On a de plus en plus de difficultés à trouver des
places. » Les malades sont davantage livrés à eux-mêmes. En 2018, les
études épidémiologiques montrent qu’un Français sur cinq souffre de
troubles mentaux, de dépressions, de troubles bipolaires, d’autisme, de
schizophrénie. « Une énorme partie de la population n’est pas soignée
correctement », s’insurge Marion Leboyer. C’est surtout le cas des
sans-abri, déjà confrontés à la précarité, et des prisonniers où l’on
compte 80 % des hommes et 70 % des femmes qui souffrent de troubles
mentaux. S’ajoute
à ce manque de places, un problème de prise en charge. Dans les
cabinets de ville bondés, les délais de rendez-vous s’allongent comme
dans les centres médico-psychologiques, qui proposent aux patients des
consultations près de chez eux, il faut souvent attendre… un an !
Conséquence le diagnostic est tardif, parfois inexistant. Sans soutien,
les chances de guérir paraissent impossibles. Des parents se sentent
aussi abandonnés, seuls face à la difficulté de gérer et de s’occuper de
leurs enfants atteints de schizophrénie. Alors « nous devons tout
revoir » et vite d’après les médecins. Marion Leboyer demande une vraie
réforme. « On pourrait faire beaucoup mieux, il y a plein de stratégies
thérapeutiques qui ont fait leurs preuves. »
Fin décembre, la
ministre de la Santé a accordé une rallonge budgétaire de 50 millions
d’euros à ce secteur. Elle souhaite également à l’horizon 2022 « que tous les généralistes fassent un stage en psychiatrie, pendant leur internat, parce qu’ils sont confrontés aux pathologies mentales dans leur quotidien ». Agnès Buzyn
donnera des précisions sur sa stratégie lors d’une réunion le 24
janvier. « Dans ce domaine, on a un retard incroyable », nous
confiait-elle récemment.
SOUVENT VICTIMES ET NON AUTEURS DE VIOLENCE
Il
y a quelques jours, un homme de 36 ans, suspecté d’avoir tué puis
découpé un homme de 45 ans, à Issoire, dans le Puy-de-Dôme, a été
interpellé puis interné d’office. Ce genre d’histoires, associant
maladie mentale à la violence, contribue à alimenter la peur. Et ne
sont, d’après les spécialistes, pas révélateurs de la réalité. « Les
données de la littérature scientifique vont à l’encontre de ces idées
reçues : les personnes vivant avec un trouble psychiatrique sont avant
tout victimes de violences bien plus qu’elles n’en sont les auteurs,
précise le docteur Marion Leboyer. Cette stigmatisation de personnes
malades est très dommageable en ce qu’elle entrave à bien des niveaux la
qualité de leur prise en charge. »
L’incarnation de cette peur ?
La schizophrénie, souvent associée à la rubrique des faits divers. En
réalité, il s’agit surtout « d’un effet loupe », poursuit la
spécialiste, et les patients dangereux pour la société sont une
minorité. Un contexte anxiogène, comme une période d’attentat peut
aggraver les troubles de personnes qui souffrent déjà de problèmes
psychiatriques selon Santé Publique France.
LES TROUBLES PSYCHIQUES EN CHIFFRES
4,7 à 6,7 millions :
c’est le nombre de personnes touchées par la dépression en France (7 à
10 % de la population). Les troubles bipolaires, 800 000 à 3,7 millions
de personnes (1,2 à 5,5 %) la schizophrénie, environ 670 000 personnes
(1 %) et les troubles du spectre de l’autisme, 1 % également. 15-25 ans : c’est en moyenne l’âge d’apparition de ces maladies. 10 à 20 ans : c’est
la réduction de l’espérance de vie de ces patients, notamment du fait
des suicides : 10 000 suicides par an et 220 000 tentatives par an. 300 000 : c’est le nombre de patients supplémentaires qui font l’objet d’un suivi régulier depuis le début 2010. Chiffres du livre « Psychiatrie : l’état d’urgence », Marion Leboyer, Pierre-Michel Llorca, éd. Fayard.
«Parler seul dans la rue est le reflet d’une souffrance psychique réelle»
>Société>Santé|Elsa Mari| 16 janvier 2019 www.leparisien.fr*
Pour Antoine Pelissolo, chef de psychiatrie, « les malades psychiatriques ne sont pas suffisamment pris en charge ». LP/Agnès Vives
Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie de l’hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne), fait partie des signataires d’une lettre remise à la ministre de la Santé. Il pointe les problèmes des budgets consacrés à la psychiatrie dans les hôpitaux.
Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie de l’hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne) dénonce une prise en charge insuffisante des patients en psychiatrie. Et nous annonce en exclusivité qu’il a remis une lettre à la ministre de la Santé, signée par plus de 100 professionnels, sur le problème des budgets.
Le sentiment de voir de plus en plus de personnes atteintes de troubles psychiques dans les rues correspond-il à une réalité ?
ANTOINE PELISSOLO. Tout le monde peut le remarquer. Ce n’est un mystère pour personne. Il y a des lieux plus propices, comme le métro, où l’on croise beaucoup de gens qui semblent perdus sans savoir exactement si c’est la conséquence de troubles psychiques, de l’alcool ou de drogues. Certes, il n’existe pas de statistiques pour dire s’il y en a plus qu’avant, mais ce n’est pas normal d’en voir autant.
Mais n’est-ce pas mieux que de les enfermer ?
S’ils étaient bien pris en charge, oui, or ce n’est pas le cas. Parler seul dans la rue est le reflet d’une souffrance psychique réelle. Ce n’est pas bon signe. Cela signifie que cette personne n’est pas soignée correctement ou qu’elle ne l’est pas du tout. Avec des traitements, on n’est pas censé avoir ce genre d’hallucinations.
Comment expliquez-vous qu’ils soient livrés à eux-mêmes ?
Il y a une réalité, aujourd’hui en France, les malades psychiatriques ne sont pas suffisamment pris en charge. A l’hôpital ou en ville, la demande de consultations augmente car on identifie mieux certains troubles et des pathologies comme les dépressions et l’autisme sont aussi en hausse. Or, ces patients ne sont pas assez vite examinés à cause des délais d’attente. En trente ans, le nombre de lits dans les hôpitaux a aussi été divisé par deux alors que la population augmente. L’idée de départ, plutôt vertueuse, était de permettre à ces personnes d’avoir une vie normale, de les soigner en ambulatoire, c’est-à-dire qu’elles dorment chez elles le soir et consultent à l’hôpital en journée. Mais il n’y a pas eu assez de moyens pour compenser la fermeture des lits, trop importante pour faire des économies. Par exemple, rares sont les soignants qui se déplacent à domicile quand un malade est en crise, il n’y a pas assez d’assistance.
Votre hôpital est-il aussi concerné ?
Bien sûr, mon service est, comme les autres, en grande difficulté. On a 100 places d’hospitalisation pour, en moyenne, 110 patients. Résultat, on doit aménager des chambres à trois au lieu de deux, sans armoire, ni table de chevet. On a donc tendance à garder moins longtemps les malades qui auraient, pourtant, besoin de rester chez nous. Certains, toujours en crise, continuent d’errer dans les rues, et mêmes sur les routes, d’autres, des sans-abri, n’ont simplement pas de domicile. C’est inadmissible. Jamais vous ne verrez ça ailleurs, jamais on ne laisserait un patient, opéré à cœur ouvert, quitter l’hôpital le lendemain de son intervention.
Comptez-vous faire entendre votre détresse ?
On ne fait que ça. C’est un combat de tous les jours. J’ai envoyé une lettre à la ministre de la Santé, signée par plus de 100 psychiatres dont beaucoup de chefs de service. Dans ce courrier, on évoque le problème des budgets, censés être réservés à la psychiatrie, et utilisés souvent pour d’autres soins. On ne veut pas que cet argent serve à autre chose. Cela peut paraître étonnant, mais c’est trop souvent le cas. On veut que les agences régionales de santé vérifient ainsi les comptes des hôpitaux et leur demandent comment ils dépensent cette enveloppe. La ministre a annoncé une rallonge de 50 millions, c’est toujours ça mais cela reste insuffisant par rapport aux besoins. Aujourd’hui, beaucoup de soignants sont résignés. Les grèves, comme celle de la faim, les arrêts maladie se multiplient. Ils font tout ce qu’ils peuvent, mais la frustration est énorme : malgré leurs efforts dévoués, trop de malades restent mal soignés.
120 chefs de services et pôles alertent sur l'affectation des budgets psychiatrie à l'hôpital
Publié le 17 Janvier 2019 https://www.santementale.fr*
Dans un courrier (reproduit ci-dessous) adressé à Agnès
Buzyn, 120 psychiatres essentiellement chefs de pôles et de services,
alertent sur un problème d'affectation effective des moyens dédiés à la
psychiatrie dans les établissements généraux et universitaires et
certains GHT.
Madame la Ministre,
Vous avez à plusieurs reprises souligné à quel point la psychiatrie est
aujourd’hui une discipline en grande difficulté. Les enjeux pour la
santé publique y sont pourtant majeurs : du
dépistage et de l’intervention précoce jusqu’à la réinsertion de
personnes en situation de handicap psychique souvent lourd, en passant
par les soins aigus et chroniques, la prévention du suicide et des
troubles du comportement ou encore des addictions, et cela dans des
populations très larges et très variées (jeunes, sujets âgés, santé au
travail, milieu pénitentiaire, etc.). Toutes ces missions sont portées
en très grande partie par la psychiatrie publique, au travers notamment
des secteurs de santé mentale et des divers établissements hospitaliers
du territoire. Mais cette discipline traverse aujourd’hui une crise que
personne ne peut nier. Le risque, déjà très présent sur de nombreux
sites, est de voir s’effondrer la qualité de l’offre de soin en santé
mentale.
Vos récentes déclarations insistent surtout sur des problématiques
d’organisation, et nous sommes bien sûr tous prêts à continuer à
travailler collectivement à l’amélioration des dispositifs et des
parcours de soins. Mais la question des moyens est elle aussi
incontournable, notamment car les interventions en santé mentale sont
avant tout des soins relationnels et humains sur lesquels des économies
répétées ne sont pas réalisables. Au-delà de la question complexe des modes de financement des
soins psychiatriques dans leur ensemble, nous souhaitons attirer votre
attention sur celle, plus circonscrite, des moyens attribués aux
services de psychiatrie des établissements généraux et universitaires,
et de certains GHT. L’affectation des Dotations Annuelles de Financement
(DAF) s’y avère en effet, dans bien des cas, réellement problématique.
Pour différentes raisons variables selon les sites, il est fréquent que
la DAF prévue pour le fonctionnement des services de psychiatrie de ces
établissements ne leur soit pas entièrement affectée, avec des
conséquences très délétères pour l’offre de soins et les conditions de
travail des personnels. Bien souvent, ces affectations se font
sans transparence vis-àvis des responsables médicaux concernés, et cela
malgré les rappels qui sont faits régulièrement sur ces irrégularités.
Cette réalité fait par ailleurs obstacle à la bonne intégration des
pôles de psychiatrie aux GHT généralistes.
Sans aborder donc ici la question du montant total des dotations, nous
formulons la demande de dispositions réglementaires garantissant la
mise en oeuvre complète des moyens DAF alloués sur tous les sites, et
demandant aux établissements de rendre compte annuellement des dépenses
effectuées pour les activités de psychiatrie.
Nous nous tenons à votre disposition pour tout échange à ce sujet, et
vous remercions par avance de l’attention que vous pourrez porter à
cette demande essentielle pour l’accès à des soins de qualité dans tous
les territoires.
Nous vous prions de croire, Madame la Ministre, en l’expression de notre plus haute considération.
Correspondance : Pr Antoine PELISSOLO - Service de Psychiatrie, HU Henri-Mondor - 40 rue de Mesly 94000 CRETEIL antoine.pelissolo@aphp.fr 01 49 81 31 75
Les malades mentaux sont-ils vraiment livrés à eux-mêmes en France? La réponse du psychiatre de Sainte-Marie Jean-Yves Giordana www.nicematin.com*
PAR Recueillis par Ra. Publié le 17/01/2019 à
Dans un article publié jeudi par Le Parisien et intitulé Des psychiatres s'alarment: pourquoi tant de malades mentaux livrés à eux-mêmes? Le manque de moyens et la dangerosité des malades psychiques en France sont pointés du doigt.
On a voulu savoir quelle était la réalité de la situation avec Jean-Yves Giordana, président de la Commission médicale d'établissement du centre hospitalier Sainte-Marie à Nice qui intervient ici au titre de Centre collaborateur pour l'Organisation mondiale de la santé (OMS)
La psychiatrie manque-t-elle de moyens?
"Malgré la rallonge budgétaire de 50 millions d'euros accordée fin décembre par la ministre de la Santé, dans la pratique, la psychiatrie reste 'un parent pauvre de la médecine'.
Cependant, il existe une particularité française: la sectorisation des soins. Pour une aire géographique définie, il existe une équipe en charge de la santé mentale des citoyens avec une politique de redéploiement des moyens de l'intra hospitalier vers l'extra hospitalier. Par cette politique de secteur, les malades n’ont pas été délaissés.
En matière de nombre de psychiatres par habitants, la France se place dans les premier pays européens devant l'Allemagne, la Grande Bretagne ou la Belgique, avec 22,7 psychiatres pour 100.000 habitants.
Ainsi, plus qu’un manque de moyens, il existe un réel problème d’organisation et de répartition de ces moyens.
Une étude de l'OMS sur les recours à l'hospitalisation sans consentement (hospitalisation d’office) montre une variation de 1 à 10 selon les régions qui serait beaucoup plus liée à des aspects de cultures locales qu’à la gravité des troubles psychiques.
En PACA par exemple, le nombre d'hospitalisations sans consentement est important. Parallèlement, le nombre de sorties qui s'effectue après diverses étapes sont faibles, en raison d'une dimension sécuritaire notamment.
En France, plus de 80 % des personnes suivies en psychiatrie le sont en ville avec 2 millions de patients en ambulatoire et 415.000 hospitalisées."
Les patients sont-ils dangereux et violents?
"On assiste à une description caricaturale du malade psychique: le malade fait peur, donc on le met à l'écart de la société ou bien le malade est vulnérable et suscite de la compassion.
La violence et la dangerosité sont surévaluées. Aucune corrélation scientifique ne prouve le lien entre un diagnostic psychiatrique et un passage à l'acte violent. 'La violence n'est pas liée à la maladie, mais plutôt à des pathologies associées comme la prise d'alcool, de drogues...'
Cette stigmatisation généralisée a des conséquences très délétères pour les malades en terme d’accès à l’emploi, au logement, au réseau amical et social, voire même à l’accès aux soins.
Elle altère la qualité de vie des malades et compromet les possibilités de rétablissement."
Troubles psychiques : le cri de détresse des mamans d’enfants malades
>Société>Santé|Elsa Mari| 16 janvier 2019 leparisien.fr
Bénédicte, dont le fils a été diagnostiqué schizophrène, dénonce la solitude dans laquelle elle se trouve face à la maladie de son fils. LP/Guillaume Georges
Les mères de patients atteints de troubles mentaux alertent sur l’absence ou la mauvaise prise en charge de leurs enfants.
Elles demandent juste à être des mamans. Pas des soignantes, encore moins les « otages » d’un système psychiatrique qui se fracasse. Et qui entraîne dans sa chute leurs fils et leurs familles. Au bout du fil, Carole, 57 ans, s’est isolée dans sa voiture pour se confier librement.
Dans un flot intarissable de détresse, cette héroïne du quotidien, mère d’Ivan*, 32 ans, schizophrène, fait le récit de « sa drôle de guerre », égrène les dates d’hospitalisation, raconte les ruptures de suivi, l’inégalité des soins. Toujours se battre, seule, lutter contre l’abandon. Quelle bataille. C’est à 16 ans que son fils, fumeur de cannabis, déstabilisé par des conflits familiaux, a commencé à « dévisser ». Dans le département des Hautes-Alpes, où habite sa mère, le Samu rappliquait à la moindre crise, l’hospitalisation, surtout d’un mineur, n’était pas un problème. Peu à peu, les voix qui torturaient l’adolescent se sont tues. Et il a pu reprendre le chemin de l’école.
Mais une fois majeur, lorsque le garçon décide de rejoindre son père, en Seine-et-Marne, tout vacille. Médicaments inadaptés dans un hôpital, absence de suivi à la sortie dans une autre clinique. Pourtant, dans cet établissement, Ivan, mieux soigné, avait découvert la menuiserie, s’était ouvert aux autres. « Il n’était plus délirant, isolé, je voyais revenir mon fils. » Aussi, près d’un mois et demi plus tard, les soignants ne voient pas de raison de le garder. Place aux cas les plus graves. Ivan peut sortir.
Et ensuite ? Ensuite rien. « Le centre médico-psychologique, censé assurer son suivi après l’hospitalisation, a estimé qu’il avait seulement besoin de consulter un psychiatre de ville une fois par mois ». Insuffisant, juge Carole affolée, son fils va replonger. Première crise, deuxième… retour inéluctable à l’hôpital. « S’il était mieux pris en charge, il n’y aurait pas toutes ces rechutes, poursuit d’une voix calme sa mère avant de hausser subitement le ton. Est-ce que c’est normal ? »
«On nous fait jouer un sale rôle, celui d’aidant»
Depuis la fin de l’été, Ivan a quitté sa chambre aux murs blancs. On lui a encore proposé la même solution, voir un psychiatre, de temps en temps. Alors Carole, qui a abandonné sa propre vie, s’agite, cherche des solutions : le mettre sous tutelle, monter un dossier pour une allocation handicapé. Elle pense à la suite : qui le soignera plus tard ? « On nous fait jouer un sale rôle, celui d’aidant, un mot à la mode. Je n’en veux pas, je leur rends ! Je veux des professionnels à la hauteur. Il y a des structures qui s’occupent des toxicomanes, des repris de justice, une fois sortis de prison. Et pour les malades ? Il n’y a rien derrière l’hospitalisation, ils sont seuls, et nous aussi. »
Cette solitude, Bénédicte, maman de Gaspard*, 26 ans, schizophrène, avec qui elle a collaboré à la création du Collectif Schizophrénies, l’affronte aussi tous les jours. Quand à 16 ans, le discours de son fils devient incohérent, elle compose le numéro du Samu. Qui ne vient jamais. « On me disait : il a été violent ? Non ? Alors on ne peut rien faire. » La prise en charge est retardée, le diagnostic aussi, huit ans pour Ivan, trois pour Gaspard. Et les soins inégaux… « Il existe de très bons services et d’autres catastrophiques où votre enfant s’abîme ».
Fin septembre, Bénédicte, 56 ans, rend visite à son fils, hospitalisé en Seine-Saint-Denis et le retrouve « bourré aux médicaments, au Valium et aux somnifères, qu’il n’avait jamais pris, les vêtements sales, l’air hagard ». La double peine.
Alors pour être mieux renseignées, mieux armées, Bénédicte et Carole ont suivi une formation de deux ans afin de comprendre la pathologie de leurs enfants. « Ça ne va plus, il faut repenser le système, ça n’est pas qu’une question d’argent, de 50 millions d’euros en plus ou non. La France doit améliorer la formation, il faut mettre, une bonne fois pour toutes, tous les acteurs autour de la table », s’exclame Bénédicte qui déplore aussi de voir tant de patients abandonnés errer dehors. « Beaucoup ont des troubles psychiques. » Carole est du même avis : « Aujourd’hui, soit vous avez une famille qui vous soutient, soit c’est la rue. »
Tribune Pour un renouveau des soins psychiques
— 17 janvier 2019 https://www.liberation.fr/*
Au-delà de la revalorisation des budgets, il est urgent de réhumaniser les lieux de soins de la psychiatrie et de la pédopsychiatrie ou de développer des accompagnements alternatifs. Professionnels, associations de familles sont appelés à participer le 22 janvier à Paris, à la manifestation «Debout pour le Printemps de la psychiatrie».
Pour un renouveau des soins psychiques
Tribune. La psychiatrie et la pédopsychiatrie n’en peuvent plus. Depuis déjà plusieurs décennies, ceux qui les font vivre ne cessent de dénoncer leur désagrégation et de lutter contre le déclin dramatique des façons d’accueillir et de soigner les personnes qui vivent au cours de leur existence une précarité psychique douloureuse. En vain le plus souvent. Ce qui est en crise, c’est notre hospitalité, l’attention primordiale accordée à chacun et à un soin psychique cousu main, à rebours du traitement prêt-à-porter standardisé qui se veut toujours plus actuel. Les mouvements des hôpitaux du Rouvray, Le Havre, Amiens, Niort, Moisselles, Paris… ont su bousculer l’indifférence médiatique et rendre visible au plus grand nombre le chaos qui guette la psychiatrie. Pour percer le mur du silence, il n’aura fallu rien de moins qu’une grève de la faim…
Devant cette régression organisée, nous nous engageons tous ensemble à soigner les institutions psychiatriques et à lutter contre ce qui perturbe leur fonctionnement. Patients, soignants, parents, personnes concernées de près ou de loin par la psychiatrie et la pédopsychiatrie, tous citoyens, nous sommes révoltés par cette régression de la psychiatrie qui doit cesser. Il s’agit pour nous de refonder et construire une discipline qui associe soin et respect des libertés individuelles et collectives.
Contrairement à la tendance actuelle qui voudrait que la maladie mentale soit une maladie comme les autres, nous affirmons que la psychiatrie est une discipline qui n’est médicale qu’en partie. Elle peut et doit utiliser les ressources non seulement des sciences cognitives, mais également des sciences humaines, de la philosophie et de la psychanalyse, pour contribuer à un renouveau des soins axés sur la reconnaissance de la primauté du soin relationnel. Notre critique de ce qu’est devenue la psychiatrie ne peut faire l’impasse sur la responsabilité de ses gestionnaires.
Face à la négation du sujet
Les avancées de la recherche scientifique ne peuvent durablement être confisquées par des experts autoproclamés dont les liens avec l’industrie pharmaceutique sont parfois suspects. Les savoirs scientifiques ne doivent pas servir d’alibi à des choix politiques qui réduisent les sujets à un flux à réguler pour une meilleure rentabilité économique. Nous sommes face à une véritable négation du sujet et de sa singularité, au profit de méthodes éducatives, sécuritaires ou exclusivement symptomatiques. Les interdits de pensée sont devenus la règle d’une discipline où l’on débat de moins en moins. La psyché humaine est tellement complexe qu’elle n’obéit à aucune causalité, simple et univoque, et se moque des réductions idéologiques. Toute approche privilégiant une réponse unidimensionnelle est nécessairement à côté. Nous récusons, dès lors, toute politique d’homogénéisation des pratiques. Une politique qui détruit la cohérence des équipes et instrumentalise la parole des patients fige la capacité d’inventer à force d’injonctions paradoxales, dans la nasse de discours sans épaisseur et mortifères.
Aussi, si les budgets de la psychiatrie et de la pédopsychiatrie, sans cesse rognés depuis des années, doivent être largement revalorisés, comme l’exigent toutes les mobilisations actuelles, c’est l’appauvrissement des relations au sein des lieux de soins qui est notre souci premier. La standardisation des pratiques protocolisées déshumanise les sujets, patients et soignants. Le recours massif aux CDD courts, le tarissement organisé de la formation continue, l’inadéquation des formations initiales qui privilégient cours magistraux et visionnages de DVD sans interactions entre les étudiants et leur formateur, contribuent à la désagrégation des équipes au sein desquelles le turn-over est de plus en plus important. La continuité des soins et la cohésion des équipes en sont durablement compromises. Nous devons opposer à cet état de fait la spécificité de la maladie psychique, qui sous-tend la nécessité d’une approche singulière et d’un travail spécifique d’équipes pluridisciplinaires en institution psychiatrique ainsi que dans le médico-social, et la co-construction d’alliances thérapeutiques fécondes avec les personnes accueillies. C’est tout le monde de la psy et des psys, en institution ou pas, qui est concerné.
La contrainte ne doit plus être la norme
Nous voulons en finir avec l’augmentation continuelle du recours à l’isolement et à la contention, la contrainte doit cesser d’être la norme. Le droit des patients, hospitalisés ou non, est régulièrement ignoré, parfois volontairement bafoué. Cette violence institutionnelle, régulièrement dénoncée par la Cour européenne des droits de l’homme, touche en premier lieu les soignés, mais affecte aussi les soignants. La psychiatrie et le secteur médico-social doivent pouvoir s’appuyer sur des équipes stables avec des personnels non interchangeables quel que soit leur statut. Ils doivent pouvoir bénéficier d’une assise solide qui autorise la parole et propose de véritables évolutions de carrière.
Au-delà du soin, nous voulons travailler à des accompagnements alternatifs, nouer des liens équilibrés avec les différentes associations qui œuvrent dans la cité. Nous voulons multiplier les lieux qui cultivent le sens de l’hospitalité avec un accueil digne et attentif aux singularités de chacun.
Nous nous engageons à participer, organiser, soutenir tout débat, toute action ou mouvement cohérent avec ce manifeste, avec tous les professionnels, leurs syndicats, les collectifs, les associations de familles et d’usagers, et l’ensemble des citoyens qui souhaiteraient soutenir et développer une psychiatrie émancipatrice du sujet.
Nous appelons à participer à la manifestation nationale du 22 janvier à Paris. Debout pour le printemps de la psychiatrie !Les premiers signataires : Alain Abrieu, psychiatre
de secteur, AMPI, Marseille ; Isabelle Basset, psychologue clinicienne,
CHPP, Amiens ; Mathieu Bellahsen, psychiatre, chef de pôle, EPS de
Moisselles ; Dominique Besnard, militant des Cemea et membre des 39 ;
Philippe Bichon, psychiatre, clinique de La Borde ; Pascal Boissel,
psychiatre, président de l’Union syndicale de la psychiatrie ; Cécile
Bourdais, enseignante-chercheure en psychologie, collectif des 39 et Psy
soin accueil ; Fethi Brétel, psychiatre, Rouen ; Alain Chabert,
psychiatre, USP ; Patrick Chemla, psychiatre chef de pôle Reims,
psychanalyste, anime le centre Artaud et l’association la Criée ; Jérôme
Costes, infirmier en psychiatrie ; Dominique Damour, collectif des 39 ;
Pierre Delion, professeur de psychiatrie ; Sandrine Deloche, psychiatre
des hôpitaux, Paris ; Yves de l’Espinay, cadre infirmier formateur ;
Parviz Denis, psychiatre, praticien hospitalier, membre de l’ADA ;
Patrick Estrade, infirmier de secteur psychiatrique ; Fanny Rebuffat,
interne en psychiatrie, Reims ; Dominique Friard, infirmier de secteur
psychiatrique, superviseur d’équipes, rédacteur en chef adjoint de Santé Mentale ;
Philippe Gasser, vice-président de l’Union syndicale de la psychiatrie,
Uzès ; Yves Gigou, collectif des 39, Cemea ; Delphine Glachant,
psychiatre des hôpitaux, Union syndicale de la psychiatrie, Les Murets ;
Roland Gori, psychanalyste, professeur honoraire de psychopathologie à
Aix-Marseille université, président de l’Appel des appels ; Liliane
Irzenski, pédopsychiatre, psychanalyste, collectif des 39 ; Serge Klopp,
PCF, collectif des 39 ; Emmanuel Kosadinos, psychiatre des hôpitaux,
EPS de Ville-Evrard ; Nicolas Laadj, SUD Santé Sociaux ; Marie
Leyreloup, présidente Serpsy ; Sophie Mappa, psychanalyste ; Jean-Pierre
Martin, Ensemble ! ; Simone Molina, Le Point de Capiton ; Pierre
Paresys, psychiatre de secteur, vice-président de l’Union syndicale de
la psychiatrie ; Martin Pavelka, pédopsychiatre, association des
psychiatres du secteur infanto-juvénile ; Virginie Perilhou, infirmière
en psychiatrie ; Laurence Renaud, «personne avec expérience
psychiatrique», Réseau Européen pour une Santé Mentale Démocratique ;
Pascale Rosenberg, USP, psychiatre, directrice du Cmpp Henri Wallon à
Sainte-Geneviève-des-Bois ; Dominique Terres, psychiatre, psychanalyste,
membre de l’ADA. Liste des groupes et syndicats soutenant l’initiative :
Appel des appels (ADA) ; association des psychiatres de secteur
infanto-juvénile ; association méditerranéenne de psychothérapie
institutionnelle ; Cémea ; collectif des 39 ; La Criée ; Humapsy ; Pinel
en lutte ; le Point de Capiton ; les Psy causent ; Psy soins accueil ;
réseau européen pour une santé mentale démocratique ; Serpsy ;
fédération Sud Santé Sociaux ; union syndicale de la psychiatrie (USP).
Plus de 100 psychiatres ont remis une lettre à Agnès Buzyn pour alerter sur l'insuffisance de la prise en charge des personnes atteintes de maladies mentales. Sur Europe 1, deux d'entre eux dressent un état des lieux inquiétant.
LE TOUR DE LA QUESTIONC'est
un profond "désarroi" qui habite depuis déjà trop longtemps les équipes
de psychiatrie et les familles de malades. À causes de problématiques
budgétaires, la prise en charge des personnes atteintes de troubles
mentaux est insuffisante. Cette situation est aujourd'hui dénoncée par une centaine de psychiatres, cosignataires d'une lettre adressée à la ministre de la Santé Agnès Buzyn. Des lits en moins, une demande en hausse.
Chez Wendy Bouchard sur Europe 1 jeudi, Pierre-Michel Llorca, chef du
service psychiatrie au CHU de Clermont-Ferrand, dresse un constat
inquiétant. "Du début des années 1990 à 2011, 55.000 lits
d'hospitalisations ont été supprimés, et on compte 15.000 places
d'ambulatoire en moins. On voit bien que le compte n'y est pas", déplore
le médecin.
Pourtant, selon plusieurs études dont celle de la Fondation Pierre Deniker, un Français
sur cinq souffre de troubles mentaux, de dépressions, de troubles
bipolaires, d'autisme ou de schizophrénie. Et la demande de prise en
charge psychiatrique ne cesse d'augmenter. "Désormais, on s'occupe des
enfants, des femmes enceintes… Maintenant, on fait attention à tout ça,
on parle plus de ces choses-là", observe Antoine Pelissolo, chef du
service psychiatrique de l'hôpital Henri-Mondor de Créteil, qui a remis
la lettre à Agnès Buzyn mercredi.
Pour le psychiatre, une solution
à ce manque de lits pourrait être le développement des prises en charge
"à domicile" de certains malades. "Il faut que le nombre total de lits
supprimés soit redéployé vers l'extérieur", insiste-t-il. "Un déficit gigantesque de lieux de vie spécialisés".
Selon le docteur Pelissolo, les dysfonctionnements sont présents à
chaque étape du processus de prise en charge des personnes atteintes de
troubles mentaux. Il illustre : "Certaines personnes ne sont pas
autonomes malgré les traitements que l'on peut mettre en place. Elles ne
peuvent pas vivre seules et n'ont plus leurs familles présentes. Pour
ces personnes, on cherche des lieux de vie adaptés, spécialisés.
Malheureusement, là aussi, il y a un déficit gigantesque en France. Les
places qu'on a fermées dans les hôpitaux, on ne les a pas créées
ailleurs. Trouver des places à ces personnes dans ces foyers peut
prendre des années."
Résultat, ces personnes, bien que stabilisées
mentalement, restent à l'hôpital dans l'attente d'un nouveau lieu de
vie. "Pendant ce temps, les lits ne sont pas accessibles aux personnes
en crise", se désole le psychiatre. Un budget qui ne sert pas toujours au service. Plus
surprenant peut-être : les moyens financiers normalement alloués aux
services hospitaliers de psychiatrie ne leur servent pas toujours. "Le
système français fait que la psychiatrie est financée par une enveloppe
globale. Le problème c'est qu'elle est donnée de manière
inconditionnelle aux hôpitaux, qui ont tendance à l'utiliser pour
d'autres besoins considérés comme plus urgents, ou pour combler des
déficits malheureusement", explique Antoine Pelissolo sur Europe 1.
Dès
lors, ce sont des postes en moins pour aider les malades, et une charge
de travail qui augmente au point de devenir invivable pour les
soignants. "Ça fait quelques années qu'il y a en permanence des services
en grève, c'est quand même étonnant. Les malades sont soignés et les
soignants font leur travail, mais ils sont tellement découragés qu'ils
disent : 'on n'en peut plus'", rapporte le psychiatre, qui formule cette
demande "assez pratique" et que l'on peut "résoudre facilement" : "Que
les moyens qui sont théoriquement affectés à la psychiatrie… soient bien
affectés à la psychiatrie."
Une journée d'action nationale est annoncée pour mardi prochain à l'appel de plusieurs collectifs.