Comment aider les adolescents en crise suicidaire ?
L’ATRAP
est un centre d’accueil psychiatrique à Paris, qui prend en charge les
adolescents suicidaires. Brut s’est rendu sur place.
"J'ai tenté de comprendre comment les adolescents en crise suicidaire pouvaient être écoutés et aidés. Pour ça, je suis allée à l'ATRAP, un centre d'accueil psychiatrique à Paris." 🤳 @FannyLesbros pour Brut. pic.twitter.com/nbzHdzO2zf
“Parfois, quand je venais par surprise dans sa chambre, elle
était sur TikTok à regarder des trucs comme ça, des trucs où les gens,
ils s'ouvraient ici… et quand j'arrivais, elle fermait les pages”,
explique un jeune homme par rapport à sa petite sœur, lors d’une séance
de soutien psychiatrique. La jeune fille est prise en charge à l’ATRAP,
Accueil Temporaire Rapide pour Adolescents Parisiens. “Suite à la crise du Covid, on a eu une augmentation vraiment dramatique des passages aux urgences pour crise suicidaire, explique Isabelle Sabbah Lim, pédopsychiatre, et cheffe de service d'Atrap. On reçoit 90% de jeunes filles, entre 10 et 15 ans." Mais pourquoi les filles sont plus suicidaires que les garçons? "Une
des hypothèses qu'on peut faire, c'est que les filles expriment plus
leur mal-être par une agressivité contre elles, alors que les garçons,
lorsqu'ils vont mal, ils ont plutôt des troubles externalisés,
c'est-à-dire troubles de conduites, troubles du comportement,
opposition…”
Un sujet qui est souvent difficile à soulever pour la famille et notamment les parents. “C'est
un peu la crainte aussi de: on ne veut pas blesser le jeune, on ne va
pas dire qu'on est culpabilisé, que ça soit pour le jeune ou pour les
parents aussi, finalement. Et nous, on est vraiment là, aussi, pour les
aider, et leur dire ‘Non, maintenant, il faut dire les choses et on va
vous aider à traiter et à comprendre ce que ça peut déclencher,
finalement, chez l'un ou chez l'autre, aussi, cette émotion’”, détaille Lorraine Petitot, infirmière. “Un
ado qui va mal, on peut le voir tous les jours, voire plusieurs fois
par jour si c'est nécessaire. Ce qui est très avantageux sur notre
structure à Atrap, c'est que nos agendas sont pleins uniquement 24, 48
heures à l'avance. C'est-à-dire que si on a besoin de revoir un ado
l'après-midi même, le lendemain, c'est toujours possible”, conclut Isabelle Sabbah Lim.
Prévention du suicide : l’ARS Île-de-France poursuit son engagement au plus près des professionnels de santé et des personnes à risque suicidaire 28 septembre 2021
A l’occasion des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie, qui se sont tenues ce lundi 27 et mardi 28 septembre, l’ARS Île-de-France rappelle les objectifs prioritaires pour la région et les dispositifs déjà mis en place à l’attention de l’ensemble des professionnels de santé, des associations et des personnes concernées par le risque suicidaire.
C’est dans le cadre de la Feuille de route nationale santé mentale et psychiatrie que l’ARS Île-de-France met en œuvre sa stratégie régionale de prévention du suicide. Ses objectifs sont : Maintenir le contact avec la personne qui a fait une tentative de suicide ; Former les acteurs au repérage, à l’évaluation, à l’orientation et à l’intervention des crises suicidaires ; Prévenir la contagion suicidaire ; Elaborer un annuaire thématique de ressources pour les acteurs ; Déployer en région le numéro téléphonique national d’aide. Lancement du numéro téléphonique national de prévention du suicide accessible 7J/7 et 24H/24, permettant une prise en charge immédiate des personnes suicidaires par des professionnels de santé : l’ARS crée le centre régional Île-de-France
Le 3114, un numéro national de prévention du suicide dans le cadre de la stratégie nationale de prévention du suicide a officiellement été lancé à l’occasion des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie par le Ministère des solidarités et de la santé. Description détaillée sur le site du Ministère des solidarités et de la santé. Le déploiement en région est assuré par les ARS.
En Île-de-France, le déploiement du centre régional est prévue en deux temps : La plateforme téléphonique est dès le 1er octobre centralisée au niveau national et opérationnelle pour répondre aux appels. Puis, le 15 décembre, la territorialisation des appels sera effective. Le centre régional Île-de-France, opérationnel en journée, sera porté par un partenariat entre le Groupement Hospitalier Universitaire - Paris psychiatrie et neurosciences (GHU PPN) et l’AP-HP.
Les centres régionaux s’articuleront avec le référent ARS IDF en charge de la santé mentale et de la prévention du suicide, avec les coordonnateurs des PTSM, des CLS et des CLSM, avec les formateurs régionaux en prévention du suicide, avec les VigilanSeurs, avec les associations soutenues par l’Agence et avec les réseaux d’acteurs identifiés. Ces répondants sont capables : D’évaluer le niveau de souffrance, D’écouter, sans jugement et avec bienveillance, De soutenir et aider à résoudre la crise de façon adéquate, D’orienter vers les acteurs du territoire pour une prise en charge adaptée aux situations, De s’assurer que la personne n’est pas en situation de danger et, si tel est le cas, de mettre en place les mesures pour la protéger, D’informer.
Ce service, confidentiel et gratuit est à destination de tous et notamment pour : Les personnes en souffrance, L’entourage inquiet pour un proche ou une personne en détresse Les personnes endeuillées par suicide Les professionnels.
En Île-de-France, on recense 22 formateurs cliniciens spécialisés en « Intervention de crise suicidaire » et en « Evaluation/orientation » ainsi que 19 formateurs « Sentinelle » dont 8 sont des cliniciens formés aux 3 modules et 11 sont des acteurs non-cliniciens (coordonnateurs CLSM, délégué Unafam, responsable de formation PSSM, membre d’association contre la transphobie, etc.). Leur rôle est de former le plus de professionnels de santé et de citoyens volontaires à la prévention du suicide. En particulier, le module « sentinelle » s’adresse aux citoyens volontaires, les personnels associatifs mais aussi les acteurs en proximité immédiate avec des personnes qui peuvent nécessiter de l’aide.
La survenue d'une tentative de suicide multiplie par 4 le risque de suicide ultérieur. Pour prévenir ce risque, le maintien du contact avec les personnes est essentiel.
Entre 2020 et 2022, l’ARS Île-de-France déploie dans chaque département le dispositif de recontact et d’alerte VigilanS, permettant d’organiser autour de la personne ayant fait une tentative de suicide un réseau de professionnels de santé joignables et qui garderont contact avec elle.
A date, et à partir des services des urgences, près de 2000 patients sont inclus dans le dispositif VigilanS en Île-de-France et sont pris en charge par les équipes de soins psychologiques ou psychiatriques du 75, 78, 94, 92, 94. Dès cet automne 2021, VigilanS sera progressivement opérationnel dans le 95, 93, 91 et 77.
L’élaboration de cet annuaire à destination des acteurs, confiée au Collège National pour la Qualité des Soins en Psychiatrie – CNQSP, est en cours de finalisation pour le printemps et regroupera l’ensemble des ressources disponibles classées par thématiques et accessibles en ligne à tous les acteurs mobilisés dans la prévention au suicide.
Le soutien aux associations
Le soutien régional aux associations SOS Amitié Île-de-France (notamment pour le recrutement et la formation de 120 écoutants supplémentaires en 2020 et 2021) et La Porte Ouverte (avec la mise en place d’un nouveau site sur le campus Condorcet dans le 93) a été renouvelé pour la 2ème année consécutive. En complément, l’ARS Île-de-France soutient d’autres associations qui peuvent être mobilisées dans la prévention du suicide ou en tant que formateur pour les professionnels de santé et citoyens volontaires, comme par exemple l’association de lutte contre les discriminations à l’encontre des personnes transgenres Acceptess-T ou l’association d’écoute pour et par étudiants Nightline ou, encore, l’association de familles et amis de personnes malades ou touchées par un handicap psychique Unafam.
Conduites suicidaires VigilanS Paris Médecin coordonnateur : Dr Liova Yon Adresse : 1 Rue Cabanis 75014 Paris
Tél : 08 00 73 04 03
Qu'est-ce que c'est ?
Un dispositif de veille post hospitalière pour les suicidants de Paris. Pourquoi ?
Pour prévenir et limiter la récidive suicidaire. Pour qui et quand ?
Pour tout suicidant, à la sortie d'un service d'urgence ou d'une structure de soins. C'est à cet instant que la veille commence.
Le dispositif VigilanS Paris, déployé à ce jour dans 13 régions, est un dispositif de recontact des personnes ayant fait une tentative de suicide qui est une mesure phare de la stratégie nationale de prévention du suicide.
Pour mémoire, à Paris, il y a entre 5 000 et 7 000 tentatives de suicide par an.
Cliquez ici pour regarder la vidéo "VIGILANS PARIS : PREVENIR LA RECIDIVE SUICIDAIRE "Qu'est-ce que c'est ? Un dispositif de veille post hospitalière pour les suicidants de Paris. Pourquoi ? Pour prévenir et limiter la récidive suicidaire. Pour qui et quand ? Pour tout suicidant, à la sortie d'un service d'urgence ou d'une structure de soins. C'est à cet instant que la veille commence. Le dispositif VigilanS, déployé à ce jour dans 13 régions, est un dispositif de recontact des personnes ayant fait une tentative de suicide qui est une mesure phare de la stratégie nationale de prévention du suicide.Pour mémoire, à Paris, il y a entre 5 000 et 7 000 tentatives de suicide par an. Médecin coordonnateur : Dr Liova Yon1 Rue Cabanis75014 Paris tel : 08 00 73 04 03
Lancement de VIGILANS Paris avec Frank Bellivier A l'occasion de la journée mondiale de la santé mentale, le GHU Paris a présenté, à Sainte-Anne, le nouveau dispositif VigilanS Paris mis en place au service des parisiens pour prévenir le suicide, enjeu phare de santé publique.
Publié le 13 octobre 2020
Le dispositif VigilanS, déployé à ce jour dans 13 régions, est un dispositif de recontact des personnes ayant fait une tentative de suicide qui est une mesure phare de la stratégie nationale de prévention du suicide. Pour mémoire, à Paris, il y a entre 5 000 et 7 000 tentatives de suicide par an.
La nouvelle équipe de VigilanS Paris, créée en janvier 2020 et opérationnelle depuis le mois de juin, a reçu la visite du Pr Frank Bellivier. Cette équipe de 4 personnes rattachée au Pôle CPOA-SMPR-Vigilans du GHU Paris psychiatrie & neurosciences est en charge d’organiser le recontact et le suivi des personnes ayant fait une tentative de suicide dans les suites de leur sortie des urgences ou d’hospitalisation. En effet, les personnes ayant fait une tentative de suicide ont un risque accru de récidiver et 75% des récidives ont lieu dans les 6 mois.
A Paris, une cellule de suivi pour garder le lien avec les «survivants» du suicide VigilanS Paris est une cellule installée à l’hôpital Sainte-Anne à Paris qui recontacte et qui suit les personnes rescapées d’une tentative de suicide. Objectif affiché : prévenir la récidive. GHU Paris Psychiatrie et neurosciences (XIVe), jeudi 22 octobre. Le Dr Liova Yon, qui dirige l’équipe d’infirmiers appelants de VigilanS. LP/Elodie Soulié Par Elodie Soulié Le 10 novembre 2020
Garder le contact, leur faire savoir qu'ils et elles sont importants. Les maintenir à flot, en vie surtout, pour contrer cette vilaine statistique du risque accru de récidive après une première tentative de suicide : 40 % des personnes ayant cherché une première fois de mettre fin à leurs jours, risquent de recommencer. Et dans 75 % des cas, cette récidive intervient dans les 6 mois.
C'est à ce laps fragile que s'attelle la nouvelle cellule de « recontact » et de suivi VigilanS Paris, mise en place au sein du GHU Paris psychiatrie & neurosciences (XIVe, ex Sainte-Anne). Un dispositif phare de la « stratégie » nationale de prévention des suicides (10 000 par an en France), et déjà expérimenté dans 13 régions dont celle de Lille, où son équipe a permis de faire chuter de 13 % le nombre de récidives en 5 ans. Une première victoire qui donne de l'espoir aux soignants et aux familles des personnes en mal-être. À Paris elles sont entre 5 000 et 7 000 chaque année, « une population comparable à ce que l'on observe partout en France, en général beaucoup de 25 à 30 ans, et plus de femmes », précise le Dr Liova Yon, médecin coordonnateur et responsable de l'unité VigilanS Paris.
«On s'inquiète de leur bien-être»
Lancé en début d'année mais victime des aléas de la crise sanitaire, VigilanS Paris s'attaque désormais à ce nombre terrifiant avec des outils que d'aucuns imagineraient dérisoires, presque anachroniques à l'heure du multimédia : le téléphone, la carte postale, la parole simple et « le bon sens en action. Simplement le bon sens », sourit le Dr Yon. Son unité suit déjà 171 patients volontaires, tous sortis de services d'urgences ou d'hospitalisation de la capitale après une première « TS », et considérés comme des patients à risques. Quant aux conséquences des confinements et du reconfinement, elles seront difficiles à évaluer pour les spécialistes, car si effectivement « il y a eu un effondrement des consultations dans les services de psychiatrie, comme partout, il est impossible de quantifier s'il y a eu plus ou au contraire moins de tentatives et de suicides, les conséquences se feront sentir aussi d'autres façons, et à plus long terme », estime le médecin.
« Le dispositif s'appuie naturellement sur une méthode, un protocole, mais nous sommes à mille lieues du jargon que l'on peut entendre en psychiatrie, insiste le médecin. L'objectif est de garder le lien, parce que l'on sait d'expérience que garder le lien permet d'éviter que des gens meurent. Il faut avoir en tête qu'en cas de récidive, une personne sur 10 parviendra à ses fins… Les gens que nous suivons sont des survivants », rappelle-t-il gravement. « Notre rôle est de leur montrer qu'on s'inquiète de leur bien-être. On va au-devant de gens qui ne nous connaissent pas, mais que l'on va chercher, en leur montrant qu'ils sont importants ».
Premiers maillons du dispositif : les infirmiers appelants. Les « VigilanSeurs », ainsi qu'aime à les désigner le Dr Yon. « Nous contactons chaque patient entre 10 et 20 jours après sa sortie d'hospitalisation », explique Mehdi, que 7 ans au sein d'une fondation des étudiants de France, auprès de jeunes de 16 à 25 ans, ont rodé à la gestion de crise et à la question du suicide. « La première idée est de prendre des nouvelles, de discuter, d'évaluer leur état psychologique selon qu'ils ont un bon ou un mauvais sommeil, leur appétit, les idées noires qu'ils peuvent avoir etc., voire si ces idées aboutissent à un scénario morbide. Plus c'est scénarisé, plus on va vers l'urgence », souligne l'infirmier. « Les silences, le timbre de voix, les sons autour… Tout est important lorsque l'on a que le bruit pour se repérer, sans la personne en face », complète le Dr Yon.
La compétence professionnelle ne fait pas tout. Il faut de la finesse pour ainsi évaluer, par téléphone, l'état mental d'un « rescapé » du suicide. « Notre rôle c'est d'identifier rapidement les facteurs de vulnérabilité, les fragilités, tout ce qui pourrait amener à un événement déclencheur, mais aussi tout ce qui sera aidant et protecteur pour la personne », confirme Mounia, infirmière depuis 6 ans, dont 4 dans un service d'accueil de jeunes suicidaires.
Une carte postale personnalisée chaque mois
De cette évaluation clinique globale à « J + 10 », dépend la suite du dispositif, une intervention ou un nouvel appel à J + 20, puis dans le meilleur des cas 6 mois plus tard. À l'appui d'un compte rendu coordonné au médecin généraliste et au psychiatre référent, VigilanS relâche alors sa veille du patient à risques, ou peut la reconduire 6 mois .La carte postale, une reproduction d'un papillon de C215, permet de garder le lien et est envoyé une fois par mois durant 4 mois, lorsque le patient ne répond pas aux appels. LP/Elodie Soulié
Si aucun de ces appels n'aboutit, si toutes les tentatives entre les 10e et le 20e « jour d'après » restent vaines pour joindre le patient, – qui a également reçu, à sa sortie, une « carte ressource » avec un numéro Vert à contacter en cas de besoin —, on lui envoie…. des cartes postales. « Une par mois pendant 4 mois », précise le Dr Yon.
Bizarrement, c'est ce petit média d'une autre époque qui peut faire mouche. « Cher…, lit-on dans cette écriture ronde presque enfantine, au dos d'une reproduction d'un papillon de C215, le street artiste qui a gracieusement décoré plusieurs établissements du GHU parisien de pochoirs colorés, l'année dernière. « Nous vous avons accueilli il y a quelque temps et nous espérons que les choses vont mieux pour vous […]. Si vous voulez prendre contact, nous serons heureux d'avoir de vos nouvelles… » Anodin? D'expérience, les soignants défendent l'inverse. « C'est de la veille, insiste le Dr Yon. La relation épistolaire est reconnue par les plus grands psychiatres, et cette lettre personnalisée comporte ce qui fait le cœur de VigilanS : elle montre qu'on s'intéresse, qu'on est là. Qu'on garde le lien ». 13 % de récidivistes en moins en 5 ans
Si le patient reste malgré tout aux abonnés absents, si aucun contact avec des proches n'a pu être noué, alors ce risque de crise suicidaire déclenche la consultation en urgence. « Entre les appels et les cartes, il y a aura eu 6 tentatives de contact en 6 mois, et pendant ce temps nous essayons aussi de passer par les personnes-ressources, les proches, le médecin traitant par exemple.
À Paris, l'équipe de VigilanS manque encore de recul pour voir la courbe du risque fléchir, mais s'appuie sur les cinq années d'expérimentation des premières unités, notamment dans le Nord. « 13 % de baisse des récidives, ce sont des dizaines de personnes sauvées, insiste le Dr Liova Yon. C'est un petit dispositif en effectifs, ici par exemple il mobilise quatre personnes, mais il est parmi les plus efficaces dans la prévention… C'est le bon sens en action pour pas cher ! », sourit le médecin. Le déploiement des unités VigilanS doit couvrir la France entière d'ici 2022.
Seine-Saint-Denis : Medef et tribunal de commerce s’inquiètent des risques de suicide chez les patrons
Le tribunal de commerce de Bobigny va proposer dès ce mercredi, avec l’appui du Medef, une aide psychologique aux patrons en «souffrance aiguë». Une initiative qui s’inscrit dans un contexte de crise économique et sanitaire, et des perspectives plutôt sombres.
Par Nathalie Revenu Le 12 janvier 2021 https://www.leparisien.fr/*
Parce qu'il a connu un redressement judiciaire, Bastien Brunis sait ce que la détresse psychologique des dirigeants d'entreprise veut dire. Élu en novembre président du Medef 93-94, il veut placer son mandat sous le signe de « l'aide aux entreprises en difficulté ».
C'est donc sans hésiter qu'il a accepté de soutenir le dispositif Apesa (Aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aiguë) destiné aux chefs d'entreprise présentant un risque suicidaire. Il est lancé ce mercredi par le tribunal de commerce de Bobigny et sera pleinement opérationnel fin janvier. Il proposera cinq consultations chez des psychologues aux chefs d'entreprise au fond du gouffre.
«Le sentiment de passer de héros à zéro»
Des dispositifs d'aide aux dirigeants existent déjà (procédures de conciliation du tribunal de commerce, centre d'information sur la prévention des difficultés des entreprises…) mais peu d'entre eux aborde de front l'aspect psychologique. Bastien Brunis n'a lui jamais plongé et fort heureusement Solicom, son agence de communication, a été sauvée. Mais en période de pandémie et de turbulences économiques, il pressent le désarroi des petits patrons et des commerçants à l'assise financière déjà fragile.
Lors de sa prise de fonction, il avait livré un témoignage personnel très fort sur ce passage à vide : « J'ai d'abord eu le sentiment de passer de héros à zéro. Annoncer à mes salariés, mes clients, mes partenaires, ma famille, la réalité d'une situation que je ne maîtrisais plus ne m'a pas soulagé, mais fait sentir coupable, honteux de ne pas avoir su l'anticiper. Moi qui réussissais tout, cette fois j'avais merdé ».
«L'Apesa, c'est le dernier stade avant la mort»
II sait que pour mettre Apesa sur les rails, il faudra surmonter des écueils. « Les chefs d'entreprise parlent très rarement de leurs difficultés, explique-t-il. Et cela s'accompagne d'un fort sentiment de culpabilité, voire d'un déni. Car ils ont toujours l'impression qu'ils sont responsables de ce qui leur arrive. C'est le cercle vicieux des 3 D : dépôt de bilan, divorce, dépression ou décès. Apesa, c'est le dernier stade avant la mort », résume sans pincettes le patron des patrons de Seine-Saint6denis et du Val-de-Marne.
Me Patrick Roulette, président de la commission entreprise au barreau de Bobigny, veut aussi balayer certains préjugés à l'égard des entreprises à travers ce projet : « Toutes ne sont pas riches et elles ne sont pas en difficulté à cause de malversations de leurs dirigeants ». « Nous ne pouvons pas rester insensibles à leur détresse », ajoute-t-il.
«Venir au tribunal de commerce ne doit pas être vécu comme une infamie»
Francis Griveau, président du tribunal de commerce, cheville ouvrière du dispositif et siège de l'association, espère qu'avec cette main tendue, le tribunal « ne sera plus perçu comme le fossoyeur des entreprises mais comme une aide. Venir au tribunal de commerce ne doit pas être vécu comme une infamie ».
Il anticipe néanmoins des heures difficiles pour certains patrons et salariés « à partir des mois de mars-avril, quand les entreprises ou les commerces placées sous perfusion pendant la crise du Covid vont devoir rembourser les cotisations à l'Urssaf ». Le tableau dressé par
Bastin Brunis est tout aussi sombre. « Beaucoup de patrons ont déjà complètement décroché. Ils n'ont pas été présents sur les dispositifs d'aide de l'Etat, le chômage partiel ou les remises de loyer ». Il est impossible pour l'instant de les quantifier mais il estime déjà que « 65 % des boîtes n'ont pas consommé leur PGE (prêt garanti par l'Etat) ».
Déjà des signes avant-coureurs se manifestent. Le second tribunal de commerce de France a enregistré en 2020 trois fois plus de procédures de prévention, une mesure déclenchée avant le redressement judiciaire. En revanche les procédures collectives ont baissé de 43 %. Un chiffre trompeur.
2022, année critique
« Cela tient au fait que l'Urssaf n'assigne plus en ce moment les entreprises qui ne peuvent plus payer leurs charges pour leur donner un peu d'oxygène », explique Francis Griveau, qui pronostique une année 2022 très critique, lorsqu'il faudra rembourser tous les prêts. « C'est 3 à 400 PME qui vont se retrouver à la barre du tribunal », indique-t-il.
Face à ce constat préoccupant, les juges consulaires, le Medef, les avocats du barreau de Bobigny et les experts-comptables vont se muer en « sentinelles » chargées de détecter les dirigeants en souffrance. « Nous allons aller au charbon, explique Bastien Brunis. Ces sentinelles seront recrutées dès ce mois-ci. Toutes entretiennent un lien de confiance avec les entreprises. Leur rôle sera d'aller les chercher pour mettre fin à leur solitude et les adresser ensuite à des psychologues ».
La Seine-Saint-Denis sera un terrain d'expérimentation fertile. Les petites structures — les plus fragiles — y sont nombreuses, mais « il y a un esprit de résilience et la solidarité plus forts qu'ailleurs », analyse Bastien Brunis.
La crise sanitaire liée au Covid-19 entraine des
conséquences économiques et psychosociales lourdes sur l’ensemble de la
population francilienne. Pour une majorité de personnes, les réactions émotionnelles
et comportementales permettent de s’adapter à cet état de stress
extraordinaire. Pour une minorité, cet état peut engendrer une détresse
psychologique voire des troubles psychiatriques avérés.
Pour faire face, et depuis la mise en place de sa Feuille de route en 2019
sur la santé mentale, l’ARS Île-de-France intègre les conséquences de la crise
dans le déploiement progressif de l’ensemble des actions d’aide à la santé
mentale. Ainsi, près de 3.5 millions d’euros ont été consacrés au renforcement
des actions de prévention et de soins en lien direct avec la crise sanitaire.
Quelques groupes de population sont particulièrement concernés dont les
étudiants qui peuvent être confrontés, entre autres, à des incertitudes
concernant leur scolarité, à de l’isolement social et à de la précarisation.
C’est ainsi que des études récentes montrent chez les étudiants plus de
problématiques d’anxiété et de stress sévères, et même des pathologies
dépressives, qu’en temps normal hors pandémie. Par ailleurs, les personnes
touchées par des maladies psychiatriques peuvent avoir des rechutes avec des
situations plus complexes.
Dans ce cadre, les experts au niveau national et international alertent sur
un risque d’augmentation des souffrances ou troubles psychiques (dépression,
troubles anxieux, phobie scolaire, idées suicidaires…), y compris chez les
personnes n’ayant pas d’antécédents psychiatriques. Même s’il est encore
difficile d’avoir une vision précise de ce phénomène diffus, l’ARS a travaillé
sur un plan d’actions avec les acteurs de la santé mentale.
Consolidation de la stratégie multimodale de prévention du suicide
Ces actions, renforcées avec la crise sanitaire, s’intègrent dans les
travaux engagés tant dans les projets territoriaux de santé mentale (PTSM) que
dans les autres outils au service de la politique de santé mentale au niveau
local (conseils locaux de santé mentale ou contrats locaux de santé) :
Formations
des cliniciens
avec une proposition de séances « Intervention
de crise suicidaire » et « Évaluation-Orientation » ;
Déploiement
du programme VigilanS, recontact post-hospitalier des personnes ayant fait une
tentative de suicide, avec des possibles mutualisations entre les
départements. Les programmes actuellement actifs sont dans le 78 (CH
Plaisir), dans le 94 (H MONDOR) et dans le 75 (GHU PNS) ;
Création
d’un annuaire régional prévention du suicide à destination des acteurs et dont
l’élaboration a été confiée au Collège National pour la Qualité des Soins
en Psychiatrie ;
Surveillance
des données
concernant les tentatives de suicide aux SAU permettant d’objectiver les
évolutions dans le contexte de la crise sanitaire. Ce travail est fait
avec la CIRE Île-de-France et les pilotes VigilanS ;
Déploiement
du programme Premiers secours en santé mentale (PSSM) avec formation de
secouristes en santé mentale et de formateurs sur le 93 et le 78.
Renforcement ou maintien des 7 plateformes régionales d’orientation et de soutien psychologique téléphoniques
Ces actions ont été lancées dans le contexte de la première vague épidémique
pendant le confinement avec l’objectif principal de structurer l’offre de
prévention en santé mentale pour répondre à la crise sanitaire et ses
conséquences, avec des modalités à la fois adaptées au contexte et permettant d’assurer
un bon suivi des parcours de soins et une bonne qualité et sécurité des prises
en charge.
L’ARS Île-de-France a créé, en avril dernier, la plateforme d’écoute
régionale « Psy IdF » destinée aux familles, aidants ou proches, en
partenariat avec le GHU Paris Neurosciences. A ce jour, plus de 7 000 appels
ont été passés et 50% d’entre eux émanent de personnes sans antécédents
psychiatriques. Dans près de 80 % des cas, la plainte est de nature
anxieuse et pour près de la moitié à caractère dépressif. Dans 30% des
situations, le lien avec la Covid est fait explicitement.
Par ailleurs, avec le contexte épidémique actuel, l’Agence a souhaité
renforcer plusieurs dispositifs de consultations psychotrauma, en particulier
pour les familles endeuillées par l’épidémie covid-19 (en lien avec le Centre
régional de psychotraumatisme Paris Nord) et pour le public étudiant.
Soutien aux établissements pour la prise en charge des patients
Une enquête régionale a été créé début mai afin de monitorer le
fonctionnement du système de soins en psychiatrie et de repérer les tensions
capacitaires dans tous les établissements franciliens. Cette surveillance a
permis d’ouvrir des unités Covid-19 +, de participer à la régulation régionale
des lits pour les urgences psychiatriques et d’identifier les impacts de la
crise sanitaire sur l’offre de soins disponible. Les résultats sont accessibles
en permanence et les données quantitatives et qualitatives récoltées font
l’objet d’un tableau de bord hebdomadaire. Dans la période de très forte
tension sur les lits d’hospitalisation complète, une cellule de régulation
régionale a été mise en place pour assister les établissements saturés dans
leur recherche de lits dans les autres établissements. Le secteur privé a
également été mobilisé pour pouvoir accueillir des patients aigus en
post-urgence immédiat.
Par ailleurs, un plan d’actions est actuellement en cours pour augmenter
l’offre de soins (hospitalisation complète, partielle et ambulatoire) pour
répondre à la forte demande de soins pour des enfants ou adolescents en
souffrance psychique.
Des recommandations spécifiques pour les activités de psychiatrie ont été
rédigées dès le début de la crise, puis régulièrement adaptées en fonction de
l’évolution de la situation et des recommandations nationales. Ces
recommandations ont notamment été enrichies de réflexions sur l’équilibre entre
sécurité sanitaire et respect des droits des patients.
Mobilisation des Conseils Locaux de Santé Mentale, des Conseils Locaux de Santé et des groupes de travail PTSM
Le retour d’expériences de la première vague a mis en lumière des actions
locales comme le réseau lanceur d’alerte sur Rosny-Sous-Bois. C’est pourquoi,
dans le cadre de la seconde vague, une animation CLS/CLSM a été mise en place
par l’Agence. Une visioconférence est organisée tous les 15 jours avec les
coordonnateurs pour leur soutenir dans leur action de terrain et, par ailleurs,
des formations à la prévention ont été organisées avec le Codes. Enfin, un
espace collaboratif a été mis en place permettant le partage d’outils, de
ressources et d’expériences inspiratrices.
Aller plus loin Publication de nombreuses doctrines régionales
Essonne : le tribunal de commerce se mobilise pour aider les entrepreneurs au bord du suicide L’association Apesa vient d’ouvrir une antenne en Essonne. Les professionnels de la justice commerciale ont reçu une première formation au tribunal d’Evry pour détecter les chefs d’entreprise en détresse, et leur proposer des séances gratuites avec un psychologue. Tribunal de commerce d’Évry, le 26 novembre 2020. Une trentaine de professionnels de la justice commerciale ont assisté à cette première formation sur la prévention des risques suicidaires. LP/Pauline Darvey
Par Pauline Darvey Le 29 novembre 2020 https://www.leparisien.fr*
« La meilleure façon de savoir si quelqu'un veut se suicider, c'est de lui poser la question. » Derrière son micro, Jean-Luc Douillard, psychologue, égraine ses conseils. Pourtant, ce jeudi, ce spécialiste de la prévention des risques suicidaires ne s'adresse pas à des professionnels de la santé mentale mais à des acteurs de la justice commerciale.
Face à lui, dans la grande salle du tribunal de commerce d'Évry, des juges, des greffiers, des mandataires et des administrateurs judiciaires, des avocats ou encore différents représentants du monde économique local. Une trentaine de personnes qui ont toutes pour point commun d'être régulièrement en contact avec des entrepreneurs dont l'entreprise va mal. Et qui sont parfois eux-mêmes au bord du suicide. «Comment réagir face à la souffrance»
« Il faut comprendre que la santé d'un chef d'entreprise est liée à celle de son entreprise, abonde Jean-Luc Douillard. L'idée, c'est donc de pouvoir adapter la prévention du suicide à la justice commerciale. »
Une idée mise en pratique depuis la création en 2013 du réseau Apesa (Aide psychologique pour les entrepreneurs en souffrance aiguë), qui s'articule autour d'une soixantaine de tribunaux de commerce dans toute la France, dont celui d'Évry qui vient d'ouvrir une antenne. Objectif, repérer les entrepreneurs en souffrance et leur permettre, s'ils le souhaitent, de bénéficier de cinq consultations gratuites chez un psychologue.
« Depuis quelques années, les souffrances psychologiques se manifestent de plus en plus dans les audiences du tribunal de commerce, certains expriment même des idéations suicidaires », reprend Jean-Luc Douillard, qui a co-fondé cette association avec Marc Binnié, greffier au Tribunal de commerce de Saintes (Charente-Maritime). Des situations face auxquelles les acteurs de la justice commerciale et du monde économique sont souvent démunis. « C'est difficile de savoir comment réagir quand on n'est pas un professionnel de la santé mentale, reconnaît le psychologue. Cette formation a pour but de vous donner des outils pour apprendre à parler de cette souffrance mais aussi à la déceler. » Des sentinelles pour veiller sur les entrepreneurs
Au terme de ces quelques heures de sensibilisation, les participants deviendront des « sentinelles » du réseau Apesa. S'ils repèrent un entrepreneur en détresse, ils lui proposeront, avec son accord, de transmettre ses coordonnées à l'association. Dans l'heure, le chef d'entreprise sera rappelé par un psychologue. Après un premier bilan, il pourra bénéficier de cinq séances gratuites à proximité de chez lui.
« Votre objectif sera de comprendre comment les chefs d'entreprise que vous avez en face de vous se sentent à l'intérieur d'eux-mêmes, prévient Jean-Luc Douillard. Car il y a aussi des souffrances qui ne se voient pas. »
Mais demander de l'aide reste une démarche difficile. « Généralement ceux qui vont mal ont tendance à travailler encore plus et à s'isoler », confirme le psychologue. D'où le rôle crucial que peuvent jouer les sentinelles, qui ont déclenché près de 80 alertes dans la région depuis le mois de janvier. Jean-Luc Douillard leur recommande de poser des questions courtes et concises, comme « est-ce que je dois m'inquiéter pour vous ? Et si oui, à quel point je dois m'inquiéter pour vous ? » «Une femme s'est mise à pleurer»
Des conseils simples qui ont d'ores et déjà permis à Alexandre Dehé, le vice-président du tribunal de commerce d'Évry et le président de la toute nouvelle antenne Apesa 91, de lancer trois procédures de prise en charge dans le département. « Il y a quelques jours, lors d'une audience, une femme s'est mise à pleurer, détaille ce juge. Sur sa déclaration de dépôt de bilan, elle avait écrit qu'elle était au bout du rouleau. Quand je lui ai proposé l'aide de l'association, j'ai senti que ça la soulageait. »
Un dispositif qui permet aussi de soulager les professionnels de la justice commerciale. « Nous sommes régulièrement confrontés à des gens qui sont en très grande souffrance, confirme Alexandre Dehé. Nous pouvons les aider sur le plan de l'entreprise mais nous nous sentions démunis pour le reste. Et c'est difficile de se dire que ce n'est pas notre problème. Apesa nous aide à faire face. »
« Quand on doit annoncer à quelqu'un une liquidation, on cherche longtemps nos mots, renchérit Engareh Alirezaï, administratrice judiciaire à Evry-Courcouronnes. Mais nous ne sommes pas psychologues. Et c'est compliqué de savoir quoi faire face à quelqu'un qui est très déprimé. On n'ose pas toujours poser des questions et s'immiscer dans leur vie privée. »
Apesa devrait donner quelques clés à toutes ces nouvelles sentinelles. Au moins une centaine sera formée en Essonne dans les prochains mois. « Des filets de sécurité » d'autant plus nécessaires dans ce contexte de crise sanitaire, qui menace la santé de nombreuses entreprises.
Santé mentale en Île-de-France Rôle clé des médecins généralistes dans le repérage et la prise en charge des patients 02 avril 2020 https://www.ors-idf.org*
Le médecin généraliste est le premier professionnel consulté par les personnes pensant souffrir de troubles mentaux. De ce fait, il est un acteur clé dans le repérage et la prise en charge de ces patients. D’après l’OMS, une personne sur quatre sera concernée par un trouble de santé mentale dans sa vie. Les données actuelles montrent d’ailleurs qu'environ 27 % de la population adulte de l'Union européenne est ou a été affectée par au moins un trouble de santé mentale au cours des 12 derniers mois.
Ce Focus santé, à partir d’une revue de la littérature, examine la place qu’occupe le médecin généraliste dans la détection des troubles de santé mentale et sa place dans l’organisation des soins de santé mentale en France et s’attache en particulier à la situation de l’Île-de-France. Il propose également des indicateurs qui permettraient un suivi de l’activité en santé mentale des médecins généralistes.
Parmi les éléments marquants : L’organisation des soins psychiatriques est complexe et le médecin généraliste pallie souvent un manque de moyens du secteur ; L’analyse des données de remboursement des psychotropes prescrits par les médecins généralistes aux Franciliens met en évidence l’importance des troubles mentaux dans leur activité de généraliste ; Un patient sur quatre de la patientèle du médecin généraliste est concerné par un trouble de santé mentale; L’activité en santé mentale des médecins généralistes est peu valorisée et ils rencontrent des difficultés dans la mise en place de soins optimaux ; Les patients ayant des troubles mentaux ont moins recours à des soins somatiques, une meilleure coordination entre médecins (généralistes et spécialistes de santé mentale) devrait améliorer la prise en charge tant physique que psychique ; Des indicateurs de suivi de l’activité en santé mentale des médecins généralistes permettraient d’améliorer leur positionnement dans le système de soins en santé mentale.
La Nightline, ligne d’écoute anonyme, ouvrira courant mai pour les étudiants de la région lilloise
Le service d’écoute à
destination des étudiants, par les étudiants, devrait ouvrir au
printemps prochain. Du jeudi soir au lundi soir inclus, il sera anonyme,
ouvert à tous, pour laisser les problèmes des étudiants s’exprimer plus
librement.
Pauline Linard-Cazanave
|
La
Nightline de Lille permettra aux étudiants en difficulté de Lille de
bénéficier d’une oreille attentive et bienveillante, plusieurs soirs par
semaine, de 21h30 à 2h30. - VDNPQR
Selon une étude de la Smerep datant de 2018, un étudiant sur cinq aurait déjà eu des pensées suicidaires. Comment résoudre le problème de la fragilité psychologique des étudiants ? L’écoute pourrait en être la clé. Nightline, une ligne d’écoute pour les étudiants fragiles tenue par les étudiants eux-mêmes, avait été installée en 2017 à Paris,
par Patrick Skehan, un étudiant irlandais à l’ENS. Après avoir connu un
beau succès dans la capitale, avec le soutien de l’université PSL
(Paris Science Lettre), la ligne d’écoute devrait maintenant
ouvrir une antenne pour la région lilloise d’ici le mois de mai, de
21 h 30 à 2 h 30, du jeudi soir au lundi soir inclus.
Thomas (le prénom a été modifié) est étudiant
doctorant en ingénierie. Présent au sein de la Nightline depuis sa
création, il a commencé au sein de l’association d’abord comme écoutant,
puis comme formateur. Sa motivation : « J’ai observé le malaise
psychologique de plusieurs de mes camarades autour de moi au cours de
mes études, et rien ne semblait exister pour leur venir en aide, au
moins pour les écouter », explique-t-il.
La ligne garantit anonymat, bienveillance et liberté de paroleAu cœur de Nightline, l’anonymat, pour les appelants comme pour les écoutants. C’est la raison pour laquelle Thomas ne souhaite pas communiquer son identité. Pour devenir bénévole, les étudiants sont formés pendant deux week-ends à l’écoute active. Mais Thomas, aujourd’hui en charge du pôle formation insiste : « Nous ne sommes pas des psychologues, notre formation nous apprend l’écoute, sans orienter la conversation, ni jugements ». La future équipe Lilloise sera formée par des bénévoles de Paris. « La formation est basée et inspirée par celle qui est donnée pour ce genre de lignes d’écoute dans plusieurs pays anglo-saxons », indique Thomas. Au printemps 2019, l’association avait répondu à plus de 1 500 appels.
Et avant même que l’association n’ait finalisé son installation dans la
région lilloise, la plateforme a déjà reçu plus de 200 candidatures. « Mais nous avons toujours besoin de bénévoles, parce qu’il y a parfois des désistements et que le travail peut être compliqué »,
ajoute Thomas. Pour ne pas laisser les bénévoles seuls face aux appels
qu’ils reçoivent, ils sont aussi accompagnés par d’autres écoutants.
Tout est fait pour que le bénévolat se fasse dans les meilleures
conditions possibles.
Le numéro sera mis en service en mai. Ce sera le 03 74 21 11 11.
Parler de tout
et de rien, jouer, ou évoquer des problèmes plus graves, comme la
solitude, la sexualité, le stress ou le suicide. C’est le principe de
Nightline, une ligne d’écoute à destination des étudiants parisiens.
Près de 40 bénévoles s’y partagent les permanences, de 21 h 30 à
2 heures.
Hotline étudiante : «La nuit, on est un peu les seuls à être là»
Quand ils s’aperçoivent dans le Quartier latin en
compagnie de leurs amis respectifs, Lise, Alban et Angèle se saluent
discrètement. «C’est sûr que c’est compliqué de dire où je les ai rencontrés !» se marre Lise, étudiante en arts de 22 ans. «C’est toujours un peu chelou quand on se croise», abonde Alban, la vingtaine lui aussi. L’élève de Polytechnique sourit : «A l’ENS,
une semaine au ski a été organisée. Les gens se demandaient un peu
comment certains élèves se connaissaient alors qu’ils n’étaient pas dans
le même département…» Levons tout de suite les doutes : Lise, Alban et Angèle ne
sont pas membres d’une obscure société secrète estudiantine. Mais ils
doivent garder l’anonymat - nous avons donc modifié leurs prénoms - car
tous les trois sont bénévoles à Nightline, une association qui propose
une écoute aux étudiants qui éprouvent le besoin de parler, de se
confier. Pour garantir aux appelants le confort de l’anonymat, les
bénévoles ne doivent pas trop ébruiter leur participation. «J’évite
d’en parler à mes amis étudiants. Toute personne doit pouvoir appeler,
si elle savait que je suis bénévole, ça pourrait la bloquer», explique Lise. «Mes colocs sont quand même au courant, s’amuse Angèle, thésarde dans un domaine scientifique. A force
de me voir rentrer à 3 heures du matin… Parfois, pendant les appels,
les gens vous demandent votre prénom, mais on n’a pas le droit de le
donner. Je dis "choisis un prénom pour moi et appelle-moi comme ça",
donc j’ai eu beaucoup d’identités différentes !»
Téléphone ou tchat
Trois soirées par mois, ces vingtenaires délaissent révisions ou
verres en terrasse pour se rendre dans un petit local situé dans le Ve arrondissement
parisien. Près de 40 bénévoles se partagent les permanences. De 21 h 30
à 2 heures du matin, dans la limite d’une heure trente par appel, ils
recueillent en français ou en anglais les confidences d’autres
étudiants, par téléphone ou en tchat. Lise : «Tchater c’est plus un réflexe, et pour les plus timides c’est encore plus anonyme d’une certaine manière.» Alban : «La nuit, c’est le moment où les gens ne vont pas bien, et avec le Fil Santé Jeunes, on est un peu les seuls à être là.» Aucun de ceux que nous avons rencontrés n’étudie la psychologie, mais
ils ont suivi une formation pratique étalée sur deux week-ends où ils
ont été sensibilisés à l’«écoute active», c’est-à-dire à «écouter de façon bienveillante, sans jugement, sans diriger la conversation», explique Lise. «L’écoute
active, ce n’est pas intuitif. Pendant la formation, on s’en rend
compte. On pense qu’on est bienveillants, qu’on écoute bien… Mais on
réalise qu’il y a beaucoup d’autres choses qu’on pourrait faire pour
être vraiment avec la personne. On pourrait poser des questions ouvertes
au lieu de fermées : par exemple dire "comment ça va ?" plutôt que
"est-ce que tu vas bien ?", ça ouvre vraiment des possibilités. On ne
peut pas répondre par oui ou non, donc la personne est obligée de
raconter et ça ouvre la discussion», analyse Angèle.
«Bavards»
Deux fois par mois, les bénévoles se réunissent en outre avec un
psychologue pour faire le point. S’ils ne sont pas autorisés à donner
des conseils, leur écoute permet aux appelants de verbaliser leurs
soucis. Alban : «On n’a pas tous les éléments du problème, donc on
ne donnerait pas de bons conseils de toute façon. Même si parfois on ne
règle pas nos soucis comme le font les gens, ce n’est pas à nous d’être
directifs.» Une posture peu spontanée, mais qui ouvre davantage la conversation, selon Angèle : «Quand on a envie que les choses se passent bien pour un ami, quand il
te dit "je suis déprimé", ta première réaction c’est de dire "ah mais
pourquoi tu dis ça, arrête, ça va aller". Alors que juste écouter, même
si c’est contradictoire avec ton premier réflexe, aide davantage. J’ai
testé le principe sur mes proches et ça changeait complètement la
discussion, tu apprenais des trucs sur la personne que tu ne pouvais pas
deviner. On réagit selon nos expériences, nos projections, nos idées…
mais si tu laisses la personne vraiment t’expliquer ce qui se passe,
après tu peux poser une question beaucoup plus A chaque permanence, les bénévoles ne savent pas à quoi leur soirée
va ressembler : le principe de Nightline, c’est que chacun peut appeler
même s’il n’a pas de problème particulier. «Il y a des appels dits
"bavards", où les gens racontent leur vie, ou parlent d’un film qu’ils
ont vu ou de l’actualité. Il y a aussi des appels où les gens parlent de
problèmes relationnels ou de leurs pratiques sexuelles, comme cette
fille qui voulait tester les relations anales mais dont le copain
n’était pas très chaud, donc ça peut être rigolo. Parfois les gens
tournent autour du pot, on ne rentre pas vraiment dans le sujet. Mais
parfois ça mène à quelque chose, il faut les laisser venir», détaille Alban. Angèle : «Une
fois j’ai juste joué à un jeu avec une personne, elle me donnait un
numéro, je devais deviner lequel c’était. C’était juste sympa et rigolo.
Mais il y a des cas plus difficiles, tout ce qui touche aux agressions
sexuelles, aux pensées noires, au suicide…» Lise : «Au moment
des partiels, les gens peuvent avoir peur de ne pas y arriver, avoir des
angoisses générales, du stress. L’image corporelle et de genre, ce sont
des choses qu’on voit pas mal aussi, comme les troubles alimentaires.» A l’origine du projet se trouve Patrick Skehan, étudiant irlandais à Paris devenu depuis professeur d’anglais. «Il y a quatre ans, une amie a fait une tentative de suicide, explique-t-il. Il
n’y avait des psychiatres présents sur le campus que deux jours par
semaine. Je me suis rendu compte que tous les étudiants ne savaient pas
forcément où s’orienter en cas de problème. Or chez les jeunes, le
suicide est la deuxième cause de mortalité.» Originaire de Dublin,
où il était bénévole dans un service similaire ouvert depuis 1993,
l’étudiant envisage alors de dupliquer à Paris la structure qu’il avait
connue en Irlande. Elle sera sur pied en novembre 2017. Lorsque les appelants le demandent, ils sont orientés vers les
services universitaires adaptés. Mais ils peuvent aussi juste parler à
un autre étudiant : «On n’a pas forcément envie d’aller directement
chez le psy, surtout si on a l’impression de n’avoir qu’un "petit"
problème. Et parfois, ça prend du temps d’obtenir un rendez-vous», explique Patrick Skehan. «Je
trouve assez louable le fait d’être entre pairs, c’est bien de
diversifier les interlocuteurs possibles pour une personne, qu’elle ait
le choix. Ce n’est pas facile de tout dire à ses amis, on peut avoir
peur d’être jugé», estime Alban. «Cette idée qu’il faut parler quand on est en difficulté, c’est un peu tabou dans la culture française, complète Patrick Skehan. C’était
pareil pendant longtemps en Irlande, mais ça a changé au moment où il y
a eu beaucoup de suicides de jeunes hommes. En Grande-Bretagne, même le
prince Harry a parlé de santé mentale. Ici le mot fait un peu peur.»Angèle :«Quand
il y a des pensées suicidaires, on essaye de ne pas avoir de tabou, ni
de stigmatiser la situation. On pense qu’en en parlant simplement, ça
peut agir comme un mode de prévention.»
«Il faut avoir de la distance»
En décembre et en mai, les discussions tournent davantage que le
reste de l’année autour de la scolarité, partiels obligent. Le samedi
soir, plus autour de la solitude, a constaté Alban. «Le thème le plus fréquent, qui revient dans 30 % des appels, ce sont les problèmes relationnels, détaille Patrick Skehan. Puis
il y a la famille et les études, qui représentent chacun 10 % des
appels, 8 % c’est juste de la conversation. Les problèmes de dépression
et les idées suicidaires, eux, représentent chacun 7 % des appels.
Enfin, il y a tout ce qui tourne autour de la sexualité.» Parfois, les appels sont trop durs. Comme lorsqu’une jeune femme au
passé compliqué, entre famille toxique et prostitution, a appelé. Alors
les bénévoles prennent «le temps de faire une pause, ça ne sert à rien d’enchaîner, il faut avoir l’esprit disponible», explique Alban. «On
essaye d’être plusieurs dans le local pour prendre des appels, ça fait
du bien d’en parler après, de prendre une tisane, c’est cosy. C’est pas
la même chose de traiter ça tout seul chez toi», précise Angèle. Quand ils sont débordés par leur travail personnel, ils sautent aussi
des permanences, qu’ils rattrapent plus tard. Pas question de se rendre
malade.«Ce n’est pas tous les jours dans la vie que quelqu’un vous
raconte qu’il a été agressé. C’est hyper fort émotionnellement, les gens
donnent quelque chose de leur intimité, or il n’existe aucun autre
cadre social où c’est possible de faire ça sans être jugé. Mais il faut
avoir de la distance, ne pas tout prendre sur soi. Ces gens, on ne les
connaît pas, ils n’appellent pas pour créer un lien, donc ça ne me hante
pas», relativise Alban. «C’est fort que quelqu’un se confie comme ça, même si on est
formés à dissocier ce qui se dit pendant les permanences et nos vies à
nous. Parfois, ce qui est dit peut résonner avec nous, mais le rôle de
l’écoutant protège un peu», estime aussi Lise. Angèle : «C’est
émouvant d’entendre la voix d’une personne, qu’elle nous confie des
choses qui lui tiennent très à cœur ou dont elle n’avait jamais parlé
avant. Alors oui, il y a des choses qui restent en nous, mais pas au
point d’arrêter.» Lise, Alban et Angèle sont unanimes : être bénévole à Nightline leur fait du bien à eux aussi. «J’ai appris à être plus attentive», estime Angèle. Pour Lise, Nightline «donne une épaisseur en plus à la vie étudiante». Alban :
«Je me sens un peu plus empathique, plus ouvert, plus respectueux aussi
quand les gens n’ont pas envie de parler de quelque chose.Toute
la semaine, on fait des études, on va boire des verres, on brasse un
peu du vent… Là, on se dit qu’on a servi à quelque chose, même si on a
juste dit "oui, oui, oui" pendant une heure et qu’on n’a pas fait
grand-chose. Etre une oreille, ça a déjà beaucoup de valeur pour moi.»
Une expérience à laquelle vont pouvoir participer prochainement les
étudiants de Lyon, où Nightline compte bientôt ouvrir un deuxième
bureau. Kim Hullot-Guiot Illustration Simon Bailly
Le GHU Paris, 1er acteur hospitalier parisien des maladies mentales et du système nerveux lance son nouveau site internet ! Le Groupe Hospitalier Universitaire Paris psychiatrie et neurosciences, né du rapprochement des établissements Maison Blanche, Perray-Vaucluse et Sainte-Anne le 1er janvier 2019, poursuit la transformation de sa plateforme de communication par le lancement de son nouveau site internet.
L'apesa seine-et-marne, une main tendue aux chefs d'entreprise en détresse
le - propos recueillis par Quentin CLAUZON -https://www.lemoniteur77.com*
Jean Huault est le président de L'Aide
psychologique aux entrepreneurs en souffrance aigüe (Apesa) de
Seine-et-Marne. Ce dispositif, créé à Saintes en 2013, permet à tout
chef d'entreprise qui en éprouve le besoin de bénéficier d'une prise en
charge psychologique rapide, gratuite et à proximité de son domicile par
des psychologues spécialisés dans l'écoute et le traitement de la
souffrance morale. Également vice-président du tribunal de commerce de
Melun, Jean Huault détaille le fonctionnement de l'antenne
seine-et-marnaise de ce dispositif né sous l'impulsion de Jean Gaillard,
président du Tribunal de commerce de Melun, qui avait réuni les
adhérents statutaires actuels en 2016. Le président de l'Apesa
Seine-et-Marne évoque également les évolutions à venir d'un service jugé
efficace et déjà fort de plus d'une centaine de “sentinelles“.
Comment est née l'Apesa France ?
C'est Marc Binnié, greffier à Saintes, et Jean-Luc Douillard,
psychologue clinicien, qui ont imaginé le dispositif en 2013, constatant
que les procédures collectives, efficaces pour contenir et canaliser le
chaos des difficultés des entreprises, ne l'étaient pas s'agissant de
la prise en compte de la souffrance humaine de l'entrepreneur, pouvant
déboucher sur des idées noires. Marc Binnié et Jean-Luc Douillard ont
constaté que les professionnels intervenant à l'occasion des procédures
judiciaires, bien que non compétents en matière psychologique, n'étaient
pas indifférents et pouvaient constituer des “sentinelles efficaces“.
Jean Huault, président de L'Aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aigüe (Apesa) de Seine-et-Marne. Qu'en est-il en Seine-et-Marne ?
C'est le président du tribunal de commerce, Jean Gaillard, qui a le
premier été sensible à certaines publications sur le sujet et il est
apparu évident d'agir : nous avons été nous-mêmes des chefs
d'entreprise. Nous avons ressenti dans nos trippes le stress du client
qu'on peut perdre, son règlement qui tarde à venir et qui crée des
tensions, etc.
C'est pourquoi le président a pris en 2016 la décision de convoquer
l'ensemble des organismes départementaux concernés, en présence de Marc
Binié lui-même, pour leur exposer le dispositif. Toutes les parties
prenantes ayant pleinement adhéré au concept, cette réunion est devenue
l'assemblée constitutive d'Apesa Seine-et-Marne. Elles en sont encore
aujourd'hui les membres statutaires.
Dès lors, il fallait structurer l'association, trouver son président et son conseil d'administration. Cela s'est fait naturellement ?
Oui, nous avions, au niveau du tribunal et du greffe, la capacité
d'organiser un secrétariat. Nous nous trouvions également au cœur des
procédures collectives et donc à la source des problématiques, c'est
pourquoi nous avons naturellement pris en charge la gestion des alertes
lancées par les “sentinelles“, que nous devons former, accompagner, etc. Comment l'Apesa Seine-et-Marne agit-elle ?
L'objectif principal est de pouvoir déceler le stress et les
difficultés du chef d'entreprise à tous les moments et tous les niveaux
de la vie de l'entreprise. Pour ce faire, Il fallait constituer un
réseau formé de “sentinelles“ dédiées (c'est-à-dire des personnes
formées à la détection des signes de détresse psychologiques et du
risque suicidaire).
Il est d'abord possible d'agir au niveau du tribunal de commerce,
c'est-à-dire lors du terme de cette descente aux enfers psychologique.
L'expert-comptable peut aussi déceler des difficultés très en amont.
L'avocat, à qui l'entrepreneur fait appel lorsqu'il se pose des
questions au niveau juridique, peut également intervenir un peu plus
tard. Les organismes patronaux, tels que le Medef et la CPME, sont
également importants en matière de détection des signes de détresse
psychologique.
Aussi, pour permettre à ces sentinelles d'agir, nous avons procédé en
trois ans à huit actions de formation. Nous pouvons ainsi compter sur
un peu plus d'une centaine de personnes habilitées à détecter et à
lancer des alertes. Elles et elles seules en ont la possibilité, si bien
entendu l'entrepreneur a donné son accord. Comment se déroule la procédure ?
Que ce soit en ligne ou sur papier, l'alerte se résume à une fiche
comprenant les coordonnées de la personne, le moment où elle s'est
exprimée, le type de détresse (difficultés familiales, financières,
etc.), et éventuellement si des pistes d'amélioration ou des solutions
sont apparues. Ce document est hébergé à Nantes sur la plateforme de
Ressources Mutuelles Assurance, qui fait partie du Groupe Harmonie
Mutuelle et qui a constitué une cellule pour examiner ces fiches
d'alerte.
Une fois cette fiche-alerte mise en ligne, la personne en détresse
est appelée dans l'heure où les deux heures qui suivent. Les
psychologues de la plateforme effectuent un premier diagnostic pour
cerner l'étendue de la problématique. Après un ou deux rendez-vous
téléphoniques, il peut être décidé qu'un suivi plus approfondi est
nécessaire.
Les dirigeants ont alors la possibilité de faire appel au réseau de
psychologues que nous avons constitué et avec qui nous avons signé une
convention. Cette dernière prévoit que l'Apesa Seine-et-marne s'engage à
rémunérer des psychologues locaux (sélectionnés par Apesa France) en
lieu et place des ches d'entreprise concernés, dans la limite de cinq
séances (renouvelable une fois).
Ces psychologues ont préalablement été formés par notre association
aux problématiques générées par les procédures collectives. Il est
nécessaire pour eux de prendre conscience que le passage final devant le
tribunal est difficile et parfois brutal, mais constitue aussi
l'aboutissement d'une longue période de tension émotionnelle… Le choc se manifeste le plus fortement à ce moment…
Oui, et c'est en cela qu'il est important que les juges consulaires soient formés et fassent partie des sentinelles :
la décision du tribunal peut apporter un soulagement, mais va constituer
dans le même temps un choc émotif extrêmement fort, qui se traduit
parfois par des signes de confusion dans l'expression, voir des signes
physiques. Il s'agit d'un moment-clé de la détection.
Ainsi, l'alerte peut être lancée tout de suite, de sorte que le chef
d'entreprise, en perte de repères, ne se retrouve pas seul face au vide
ressenti (fin de l'activité, disparition de l'entreprise, conséquences
sur la vie privée, la famille… ). En cas de nécessité, il lui sera
proposé un rendez-vous chez un psychologue dans les 24 heures. Nous
avons d'ailleurs conclu un accord pour que ces professionnels
seine-et-marnais puissent aménager leur planning et recevoir en urgence
les dirigeants en détresse. Vous orientez ensuite ces entrepreneurs vers des structures dédiées au rebond ?
En effet, mais la condition première, c'est que ces personnes
retrouvent un bon équilibre psychologique pour que ce rebond soit
envisagé. C'est la condition préalable. Nous avons finalement une action
complémentaire : l'Apesa intervient sur la remise en forme du chef
d'entreprise, tandis 60 000 Rebonds apporte des solutions en matière de
création d'entreprise ou de retour vers l'emploi. Quel bilan tirez-vous après trois années d'exercice ?
Je dirais d'abord que notre dispositif est bien rodé, simple et
réactif. Sur un plan chiffré, nous constatons que le nombre d'alertes se
stabilise entre 50 et 60 par an. Il faut aussi remarquer que les
sentinelles font bien leur travail et sont efficaces : nous ne recevons
pas de fausses alertes (les signalements sont tous suivis d'un
diagnostic et de séances avec un psychologue). Nous avons également
extrêmement peu de refus de soutien psychologique, ce qui peut arriver
lorsque le dirigeant est déjà suivi à titre personnel, par exemple.
Plus généralement, nous espérons étendre notre rayon d'action à
travers l'adhésion des TGI du département. Nous avons signé une
convention avec celui de Melun et je discute actuellement avec celui de
Meaux. Restera à prendre contact avec le TGI de Fontainebleau dans les
semaines à venir. Cela nous permettra de toucher d'autres catégories
d'entrepreneurs, qui sont plutôt des professions libérales. Enfin,
s'agissant du monde agricole, des dispositifs existent déjà, mais ce
n'est pas exclu. L'Apesa Seine-et-Marne jouit d'une très bonne
réactivité et les soins sont prodigués rapidement au niveau local, ce
qui pourrait profiter aussi aux exploitants agricoles. Quelles sont les structures les plus touchées ?
Il s'agit, dans 80 % des cas, de TPE : plus les sociétés sont
structurées, plus elles ont la capacité de surmonter l'épreuve
collectivement, contrairement au dirigeant de TPE qui est souvent seul.
Les personnes que nous prenons en charge sont âgées de 50 ans en moyenne
et il s'agit d'hommes dans 57 % des cas. Plus de la moitié des alertes
font suite à une liquidation judiciaire. Le Conseil départemental vous apporte un soutien régulier ?
Notre ambition finale est de proposer le dispositif à l'échelon départemental,
c'est-à-dire d'apporter une couverture totale, à travers les TGI comme
je l'ai évoqué mais aussi les sentinelles qui interviennent plus en
amont et que nous devons continuer à mobiliser. Pour financer cet
objectif, nous avions besoin d'un apport complémentaire à celui octroyé
par nos adhérents statutaires. C'est le Conseil départemental qui est
venu l'apporter à travers son agence Seine-et-Marne Attractivité, qui
alloue 5 000 euros de subventions à l'Apesa Seine-et-Marne. La somme
correspond à la possibilité d'accompagner 15 entrepreneurs durant un an.
Cela nous donne également la certitude de pouvoir boucler un exercice,
voire de dégager des moyens pour améliorer nos éléments de communication
envers les entreprises elles-mêmes.
L'Apesa vient en aide aux entrepreneurs en détresse psychologique
L'Apesa est une association qui a vocation à prévenir le suicide des
chefs d'entreprise en situation de défaut. Pour ses animateurs,
« elle est de grande utilité ». Face à une liquidation, qu'on appelait
autrefois “faillite”, l'entrepreneur se trouve dans une situation très
difficile pour laquelle il ne va généralement pas chercher d'aide auprès
de services compétents. Grâce à cette association, avec un délai
d'intervention quasi immédiat, les personnes en détresse psychologique
importante trouvent une oreille attentive et un soutien par des
professionnels spécialement formés. Les Tribunaux de commerce de Melun
et de Meaux se sont regroupés dans l'association départementale qui est
aujourd'hui à la disposition des chefs d'entreprise de Seine-et-Marne.
Le dispositif de prévention du suicide VigilanS déployé dans les Yvelines
Actualité Santé publique
Date de publication 15 avril 2019 www.iledefrance.ars.sante.fr* L’ARS Île-de-France accompagne le centre hospitalier de Plaisir (78) dans le déploiement de VigilanS, dispositif innovant de prévention de la récidive suicidaire.
La survenue d’une tentative de suicide multiplie par quatre le risque de suicide ultérieur. Pour prévenir ce risque, le maintien du contact avec les personnes est l’un des modes d’intervention les plus efficaces.
Dans son Projet régional de santé, l’ARS Île-de-France s’est fixé comme objectif de disposer d’une organisation de recontact dans chaque département francilien d’ici 2022.
C’est la raison d'être du dispositif VigilanS, initialement déployé dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, puis dans plusieurs régions françaises.
Dans les Yvelines, le projet est financé par l’ARS Île-de-France et porté par le Dr Cécile Omnes, praticien hospitalier, psychiatre au CH de Plaisir.
VigilanS 78
VigilanS 78 repose sur une équipe de professionnels : praticien hospitalier psychiatre, infirmière, psychologue, cadre de santé, assistante médico-administrative.
Concrètement, l’équipe médicale hospitalière propose aux patients ayant effectué un geste suicidaire de bénéficier du dispositif de recontact à leur sortie des services d’urgences ou de toute autre structure de soins hospitalière. Ils reçoivent alors un document d’information et une carte comportant le numéro de téléphone de VigilanS 78, à contacter en cas de besoin.
La cellule VigilanS contacte les patients entre 10 et 21 jours après leur sortie des services de soins et met en place le suivi téléphonique pour une durée de six mois. Selon l’évaluation du risque de passage à l’acte suicidaire, plusieurs niveaux croissants d’intervention peuvent être décidés depuis la poursuite du contact téléphonique jusqu’à la mobilisation du SAMU pour une intervention au domicile.
Tous les patients sont rappelés à l’issue de la période des six mois pour faire un bilan. Une nouvelle période de veille de six mois pourra être proposée si nécessaire.
En parallèle, les médecins traitants ou référents sont informés de l’entrée de leur patient dans le dispositif VigilanS et bénéficient d’une ligne téléphonique dédiée pour les accompagner dans la gestion de la crise suicidaire.
Chiffres clés
En Île-de-France, 751 décès par suicide ont été déclarés en 2015, dont 146 dans les Yvelines (Source : Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès)
1370 hospitalisations pour tentatives de suicides en 2016 dans les Yvelines
MàJ Suicide : du lien au bout du fil
08/11/2019 https://www.espaceinfirmier.fr*
La
cellule d’écoute et de veille active contre le suicide, au sein du
dispositif VigilanS 78, a ouvert au printemps. Son action de prévention
du risque de récidive complète le suivi de ville et des centres
médico-psychologiques.
Dans les locaux du CH
de Plaisir (78), une « VigilanSeuse » est au téléphone avec une
personne hospitalisée dix jours plus tôt au CH de Rambouillet, après une
tentative de suicide (TS). Elle fait le point avec son interlocuteur :
a-t-il consulté le psychiatre qui le suit, comme prévu lors de sa sortie
des urgences ? Durant l’entretien, la professionnelle de santé évalue
le risque suicidaire du patient. « Si nous nous trouvons en présence d’une personne encore très en difficulté, nous l’orientons au plus vite, explique Olivia Barasino, médecin coordonnatrice du dispositif. Si
nous estimons qu’il y a un risque de suicide immédiat, nous déclenchons
les secours, en contactant le Samu. En cas d’urgence relative,
c’est-à-dire quand une consultation est nécessaire dans les vingt-quatre
heures, nous faisons en sorte que le patient se rende aux urgences. Si
un proche est près de lui, nous lui demandons d’emmener le patient aux
urgences. Sinon, nous appelons une ambulance. » Pour un patient
fragile ne nécessitant pas de soins immédiats, l’équipe de VigilanS 78
lui demande son accord pour le mettre en lien avec un psychiatre libéral
ou un CMP. Une veille active de six moisL’équipe des Yvelines veille actuellement une centaine de patients,
pour une période de six mois. À leur sortie des urgences, les patients
ayant effectué une TS sont sollicités par l’équipe. S’ils intègrent le
dispositif VigilanS, le numéro vert de la cellule leur est remis.
L’équipe est pour le moment joignable la journée en semaine. Lors des
horaires de fermeture, un répondeur dit aux correspondants à quelles
structures s’adresser en cas d’urgence. Les numéros ayant appelé le
standard sont recontactés dès réouverture des bureaux de VigilanS 78.
La littérature scientifique précise que c’est pendant les six mois
suivant la TS, et particulièrement durant le premier, qu’une récidive
est le plus à craindre. Tous les patients intégrés à VigilanS 78 sont
appelés six mois après leur sortie des urgences. Les personnes
considérées comme les plus à risque reçoivent un coup de fil
supplémentaire, dix jours après leur passage aux urgences. Il s’agit des
mineurs, des personnes âgées, de celles ayant une addiction à l’alcool
associée, ou ayant fait un geste suicidaire grave ayant nécessité une
hospitalisation en réanimation, ainsi que les personnes ayant déjà des
antécédents de TS.
Pour parvenir à joindre les patients, trois appels successifs sont
réalisés, à des jours et à des créneaux horaires différents. S’ils
restent injoignables, une carte postale leur est envoyée. Il s’agit
d’établir un lien personnalisé avec le patient. « Nous avons fait des recherches dans notre stock personnel de photographies pour les illustrations, précise Magalie Lio, cadre de santé de l’équipe. Nous
avons rédigé des formules simples pour demander au patient comment il
va, lui souhaiter un bon rétablissement. Certains nous recontactent
après réception de la carte. »
Au terme de chaque conversation téléphonique, un compte-rendu est envoyé au professionnel suivant le patient. « Les personnes peuvent nous dire des choses dont ils n’ont pas parlé à leur médecin, leur psychologue ou leur psychiatre, précise Olivia Barasino. D’où
l’importance du réseau. Nous sommes là pour replacer le patient dans sa
prise en charge existante quand il y en a une, ou l’amener vers le
réseau de soins quand il n’est pas suivi. » Marie-Capucine Diss