Communiqué de presse - Jean-Michel Blanquer - 06/11/2019
https://www.education.gouv.fr*
Un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) , présentant le bilan national des actes suicidaires et des moyens de prévention, s’est tenu ce mercredi 6 novembre au ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse.
Lors de ce CHSCT, les travaux de l’inspection générale menés par Didier Lacroix, à la demande du ministre, ont été présentés.
Dans les bilans sociaux du ministère de l’éducation nationale, il n’a jamais été fait mention jusqu’à présent des données recueillies sur les suicides et les tentatives de suicide des personnels en milieu professionnel et hors milieu professionnel.
Pour la première fois l’Éducation nationale présente un bilan annuel des actes suicidaires au plan national.
Sur l’année 2018-19 cela représente 58 suicides sur les 992.600 membres du personnel du ministère (hors personnel de l’enseignement privé sous contrat).
Cela représente sur l’année 2018-2019 au sein du ministère, un taux de 5,85 cas de suicide sur la base de 100.000 personnes, quand il se situe pour l’ensemble de la population française à 16,7 pour 100.000 (10 700 décès)
Pour l’année scolaire en cours 2019-2020, 11 agents ont mis fin à leurs jours.
Chacune de ces situations dramatiques est inacceptable et appelle la mobilisation de l’ensemble de l’institution. Cette mobilisation et les moyens de prévention et d’accompagnement des personnels ont été au cœur des échanges du CHSCT.
Lors du CHSCT, ont été rappelés les travaux en cours sur les métiers et les missions des directeurs d’école. Plusieurs axes de travail ont été discutés et retenus :
Le ministère s’est engagé à assurer la continuité et la robustesse des données nationales recueillies. Ces données feront l’objet d’une communication et d’un échange annuels avec les partenaires sociaux lors d’un CHSCTMEN.
Un groupe de travail sera réuni avant la fin de l’année civile afin de travailler sur la prévention de l’alerte suicidaire et sur une offre de formation à destination des acteurs de la prévention et des encadrants, avec l’appui de l’Autonome de solidarité laïque (ASL).
Un séminaire sur la prévention des risques psycho-sociaux sera organisé pour les cadres académiques du 9 au 11 décembre.
Une campagne nationale de recrutement des médecins de prévention sera lancée d’ici la fin de l’année civile.
Mise à jour : novembre 2019
https://www.education.gouv.fr/cid146515/reunion-du-comite-d-hygiene-de-securite-et-des-conditions-de-travail-chsct-sur-le-bilan-et-les-mesures-de-prevention-des-actes-de-suicide-parmi-les-personnels-de-l-education-nationale.html
***
58 suicides dans l'Éducation nationale en 2018-2019, 11 depuis la rentrée
La tranche d'âge la plus exposée au suicide est celle des 45-54 ans. Le ministère indique que le taux de suicide est de 5,85 cas pour 100 000 personnes. Source AFP
Modifié le 07/11/2019 à 07:33 - Publié le 06/11/2019 https://www.lepoint.fr
Les mois de novembre, août et septembre représentent un pic des suicides. © FRED TANNEAU / AFP
C'est la première fois que de tels chiffres sont dévoilés. Durant l'année scolaire 2018-2019, 58 agents de l'Éducation nationale se sont suicidés, et 11 depuis la rentrée de septembre. Ces chiffres sont ceux du ministère de l'Éducation, ils ont été donnés mercredi 6 novembre à l'occasion d'une réunion sur les conditions de travail des enseignants. Ces chiffres ont été annoncés lors d'un CHSCT extraordinaire (Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Une réunion organisée à la demande des syndicats, et consacrée à la souffrance au travail à l'école primaire, au collège et au lycée, un mois et demi après le suicide de Christine Renon, une directrice d'école de Pantin (Seine-Saint-Denis).
Au cours de l'année scolaire 2018-2019, 58 agents de l'Enseignement public se sont donné la mort (37 hommes et 21 femmes) et 11 depuis la rentrée scolaire de septembre (5 hommes, 6 femmes), ont précisé les syndicats Snes-FSU et Unsa. Le ministère de l'Éducation a confirmé ces chiffres.
12 agents non titulaires
Ils concernent l'ensemble du personnel enseignant et du personnel administratif, soit 992 000 agents. Le ministère indique que le taux de suicide est de 5,85 cas pour 100 000 personnes. Le taux de suicide moyen en France en 2012 était de 16,7 cas pour 100 000 personnes, selon des données de l'Observatoire national du suicide. Sur les 58 victimes en 2018-2019, on recense 12 agents non titulaires.
Les mois de novembre, août et septembre représentent un pic des suicides. La tranche d'âge la plus exposée est celle des 45-54 ans, puis celle des 55-64 ans. « Ces données feront l'objet d'une communication et d'un échange annuels avec les partenaires sociaux », précise le ministère dans un communiqué. Et « une campagne nationale de recrutement des médecins de prévention sera lancée d'ici à la fin de l'année civile », annonce-t-il.
https://www.lepoint.fr/societe/58-suicides-dans-l-education-nationale-en-2018-2019-11-depuis-la-rentree-06-11-2019-2345810_23.php
***
Suicides dans l’Éducation nationale. Comment interpréter les chiffres dévoilés par le ministère ?
Le ministère de l’Éducation nationale a
révélé, mardi 5 novembre, pour la première fois le nombre officiel de
suicides parmi ses agents. Pendant l’année scolaire 2018-2019, 58
personnes ont mis fin à leurs jours. Par ailleurs, onze autres suicides
ont été recensés depuis la rentrée de septembre. Décryptage.
Le ministère de l’Éducation nationale a révélé, mardi, le nombre de suicides parmi ses agents. Cette
annonce a eu lieu lors d’un CHSCT extraordinaire, consacré à la
souffrance au travail des enseignants, organisé à la demande des
syndicats, un mois et demi après le suicide de Christine Renon.
Cette directrice d’école maternelle de 58 ans exerçant à Pantin (Seine-Saint-Denis) avait mis fin à ses jours un week-end sur son lieu de travail et laissé une lettre bouleversante sur son « épuisement » et les difficultés de son poste. Un suicide qui a suscité un profond émoi au sein de la profession et relancé les témoignages d’enseignants en souffrance dans leur poste. Ouest-France fait le point sur cette actualité.
Jean-Michel Blanquer a promis des recrutements de médecins de prévention et du travail et le déploiement d’un service de « gestion des ressources humaines de proximité » pour que chaque agent puisse bénéficier d’un interlocuteur à son écoute « à moins de 20 minutes de son travail ».
Affiner ces taux de suicide par métiers semble nécessaire pour percevoir les professions les plus affectées. En effet, l’enseignement est l’un des secteurs d’activité professionnelle les plus touchés par les idées suicidaires, selon le baromètre 2017 de Santé publique France. Or, la moyenne nationale à laquelle se réfère le ministre est calculée en intégrant actifs, chômeurs et inactifs. Selon le même baromètre, les suicides sont beaucoup plus importants dans les deux dernières catégories. Il apparaît donc important d’isoler des statistiques portant sur les actifs seuls.
De nombreuses demandes de mobilité, de disponibilité ou de démissions des enseignants sont refusées au nom de la « nécessité de service », ce qui créé des situations de souffrance au travail. Rémi Boyer regrette aussi le profil de ces référents « qui ne sont pas des psychologues du travail mais souvent des agents administratifs qui occupent cette fonction en plus de leur poste » et qui « n’ont pas vécu dans leurs tripes le métier d’enseignant et auront donc du mal à comprendre leurs difficultés au quotidien ».
Pourquoi sont-ils si peu nombreux ? Les postes n’attirent pas à cause des salaires et des conditions salariales. « Le traitement statutaire s’élève à 4 500 € brut maximum, beaucoup moins que ce qu’ils peuvent toucher en dehors. Et certains médecins sont affolés par les cas lourds qui arrivent dans leur cabinet, explique Rémi Boyer. Je crains que le ministère se heurte au même problème de recrutement, à moins de doubler le salaire. »
Cette directrice d’école maternelle de 58 ans exerçant à Pantin (Seine-Saint-Denis) avait mis fin à ses jours un week-end sur son lieu de travail et laissé une lettre bouleversante sur son « épuisement » et les difficultés de son poste. Un suicide qui a suscité un profond émoi au sein de la profession et relancé les témoignages d’enseignants en souffrance dans leur poste. Ouest-France fait le point sur cette actualité.
Combien de suicides parmi les agents de l’Éducation nationale ?
Selon le ministère, 58 agents publics de l’Éducation nationale ont mis fin à leurs jours lors de l’année scolaire 2018-2019 (37 hommes et 21 femmes). Sur les 58 victimes en 2018-2019, on recense 12 agents non titulaires. Et depuis la rentrée de septembre, onze suicides (5 hommes et 6 femmes) ont été recensés.Que dit le ministère à propos de ces chiffres ?
Jeudi, sur France 2, le ministre Jean-Michel Blanquer a reconnu « l’émotion » qui entoure ce « drame » et reconnu que « les directeurs d’école sont, dans le système scolaire, ceux qui concentrent le plus d’obligations et qui ont […] besoin d’être aidés ». Néanmoins, le ministre a tenu à souligner que la moyenne des suicides dans l’Éducation (5,85 personnes pour 100 000) était « très en dessous de la moyenne nationale », soit 16 personnes pour 100 000 en 2012 (10 700 décès).Jean-Michel Blanquer a promis des recrutements de médecins de prévention et du travail et le déploiement d’un service de « gestion des ressources humaines de proximité » pour que chaque agent puisse bénéficier d’un interlocuteur à son écoute « à moins de 20 minutes de son travail ».
Pourquoi les syndicats parlent de minimisation ?
Publier ces chiffres est « un bel effort », salue Rémi Boyer, de l’association Aide aux profs, même s’il s’étonne de leur « petitesse ». « Il faudrait publier les tentatives de suicides et les chiffres sur les dix dernières années », réclame Rémi Boyer dont l'association accompagne des profs en souffrance. Une demande aussi du Snalc (syndicat enseignant), qui s’interroge sur la « méthode employée » et s’étonne de l’écart avec une étude de l’Inserm de 2002 affichant 39 suicides d’enseignants pour 100 000 (soit 2,4 fois plus que la moyenne de l’époque). Cette étude avait d’ailleurs été reprise en 2015 dans une question au Sénat pour alerter sur les carences de la médecine préventive et du travail dans l’Éducation nationale.Affiner ces taux de suicide par métiers semble nécessaire pour percevoir les professions les plus affectées. En effet, l’enseignement est l’un des secteurs d’activité professionnelle les plus touchés par les idées suicidaires, selon le baromètre 2017 de Santé publique France. Or, la moyenne nationale à laquelle se réfère le ministre est calculée en intégrant actifs, chômeurs et inactifs. Selon le même baromètre, les suicides sont beaucoup plus importants dans les deux dernières catégories. Il apparaît donc important d’isoler des statistiques portant sur les actifs seuls.
La gestion des ressources humaines de proximité est-elle une solution ?
Selon le ministère, la gestion des ressources humaines (GRH) de proximité en test l’an dernier dans certaines académies (Toulouse, Nantes, Rouen, Montpellier) est généralisée à la totalité des académies cette année. « Cette GRH de proximité va dans le bon sens pour accompagner les personnels en difficulté, juge Rémi Boyer, qui vient en aide via son association à environ 500 enseignants par an. L’idée que ces référents de proximité puissent écouter l’enseignant, l’aider à changer de poste ou à demander une disponibilité est important. Seulement, à l’heure actuelle, ces référents n’ont pas le pouvoir de s’opposer aux décisions du directeur académique ou du recteur qui peuvent bloquer des demandes de mobilité. »De nombreuses demandes de mobilité, de disponibilité ou de démissions des enseignants sont refusées au nom de la « nécessité de service », ce qui créé des situations de souffrance au travail. Rémi Boyer regrette aussi le profil de ces référents « qui ne sont pas des psychologues du travail mais souvent des agents administratifs qui occupent cette fonction en plus de leur poste » et qui « n’ont pas vécu dans leurs tripes le métier d’enseignant et auront donc du mal à comprendre leurs difficultés au quotidien ».
Pourquoi la médecine du travail est si peu présente dans l’Éducation nationale ?
Contrairement aux salariés du privé, les enseignants peuvent faire toute leur carrière sans voir de médecin du travail, excepté la visite médicale d’entrée dans le métier. La visite obligatoire tous les cinq ans est très rarement effectuée. Face aux risques d’épuisement ou de burn-out démontrés dans plusieurs études, les enseignants manquent d’un suivi régulier institutionnalisé par une vraie médecine de prévention. Un suivi impossible à tenir à l’heure actuelle : le bilan annuel du ministère de l’Éducation nationale pour l’année 2018 mentionne 87 médecins de prévention (soit 68 équivalents temps plein) pour suivre plus de 1,1 million d’agents dépendant du ministère de l’Éducation nationale. Soit un médecin pour environ 16 000 personnes…Pourquoi sont-ils si peu nombreux ? Les postes n’attirent pas à cause des salaires et des conditions salariales. « Le traitement statutaire s’élève à 4 500 € brut maximum, beaucoup moins que ce qu’ils peuvent toucher en dehors. Et certains médecins sont affolés par les cas lourds qui arrivent dans leur cabinet, explique Rémi Boyer. Je crains que le ministère se heurte au même problème de recrutement, à moins de doubler le salaire. »