En prévenant les cas de burn out ou de suicide, l'association Assopol vient en aide aux forces de l'ordre
Publié le 30/12/2019 https://www.larep.fr/*
Policier depuis vingt-trois ans, Cyril Cros, qui a vécu dix-huit ans à
Orléans, a créé l’association Assopol qui prend en compte le burn out,
la prévention suicide et la souffrance des familles chez les forces de
l’ordre (police, gendarmerie, douanes, pompiers). Vaste programme.
Si l’expérience personnelle de Cyril Cros a contribué à la création de l’association Assopol, ce sont également des faits divers qui l’ont incité à se lancer. Cyril Cros et un ami, chef d’entreprise, avaient été choqués par l’agression d’une violence inouïe de jeunes envers un équipage de police (en mai 2016 à Paris), où se trouvait également un emploi jeune.
"Nous nous étions dit qu’il fallait faire quelque chose", explique Cyril Cros. "Parce qu’on en sort jamais indemne. Ce sont des SSPT (syndromes de stress post-traumatique)." L’autre fait qui a déclenché tout cela, ce sont les pompiers qui se font de plus en plus agresser.
Des brigades où "ça fonctionne aux antidépresseurs"
Assopol (ASsociation de SOutien aux POliciers) est là pour faciliter l’aide aux membres des forces de l’ordre (policiers, gendarmes, douanes, pompiers, etc.) qui en ont besoin. "Je connais certaines brigades où ça fonctionne aux antidépresseurs", explique-t-il.
Depuis un peu plus d’un an d’existence, Assopol a déjà reçu environ 150 demandes en France dont une dizaine en région Centre-Val de Loire. S’il existe des psychologues et des centres médico-psychologiques, de son côté, Assopol a été créé "pour que la parole se libère", souligne Cyril Cros, quarante-quatre ans dont vingt-trois passés dans la police. "Avec les collègues, nous avons le même langage. Chaque métier a ses propres codes. Et nous leur proposons cet éventail de possibilités."
Assopol pense également à l’entourage : "Nous prenons en charge la souffrance du ou de la collègue, mais aussi de sa famille. Et nous nous sommes engagés là-dessus. Notre rôle est d’essayer d’offrir un panel de solutions pour aider."
L’association de Cyril Cros, qui a passé dix-huit ans à Orléans et dont une partie de la famille y vit encore, tient également à remplir un devoir de mémoire. "Pour les collègues tués dans l’exercice de leur fonction ou ceux qui ont mis fin à leurs jours. Afin de ne pas oublier."
Autre objectif d’Assopol : retisser du lien avec la population. Qui a quelque peu disparu depuis la fin de la police de proximité. "Nous avons créé un partenariat avec l’association “Football Kids Academy” à Lille, Lyon, en région parisienne et à Bordeaux. Pour sensibiliser les enfants de 8 à 11 ans. Nous sommes dans la prévention et le dialogue."
"Nous gardons toujours des séquelles"
Le nombre de suicides croissant dans la police, les problèmes d’insécurité pour les pompiers… Les forces de l’ordre sont mises à rude épreuve. "Dans ces métiers-là, nous récupérons la souffrance d’autrui. Systématiquement. Nous sommes toujours confrontés à ça.
Nous ne sommes pas des super-héros. Nous gardons toujours des séquelles. En fait, au fil du temps, c’est un mille-feuille de bribes de souffrance de soi-même ou d’autrui que l’on garde en soi. La seule chose qui nous fait tenir le coup, c’est la petite bulle de verre qu’on a au-dessus de la tête qui est notre sphère extraprofessionnelle (amis et famille). Quand on est pris d’un certain mal-être, cette bulle de verre s’ébrèche et sans s’en rendre compte, tout s’effondre.
"On se prend en pleine face toutes ces micro-souffrances qu’on a pu accumuler. Là, on perd là vraiment pied. C’est un mille-feuille d’incompréhension et de souffrance. Il n’y a plus de sens. Pris dans la tourmente, on ne voit pas d’issue. On s’enfonce, on s’enfonce et on peut avoir des gestes malheureux. Dans l’association, nous restons à l’écoute de toute sollicitation. Nous essayons de trouver les mots pour orienter. Le but d’Assopol est d’éviter aux collègues de passer par ce que j’ai vécu. Si un collègue nous appelle, c’est déjà un grand pas. Et parfois, ça suffit pour aller mieux. Et ça, c’est une victoire."
Il est sur le point de se suicider, ses enfants lui sauvent la vie...
Il l’avoue lui-même : "Aujourd’hui, je prends ces expériences non comme une faiblesse, mais comme une force." Cyril Cros, policier à Bordeaux dans un commissariat qui a connu deux suicides récemment, a vécu des moments difficiles ces dernières années. "C’est compliqué quand on est dans cette spirale. Mais, on ne se l’avoue pas. C’est vrai que ça m’était arrivé de regarder mon arme de très près… D’ailleurs, nous faisons des métiers où nous savons comment ne pas nous louper. Et quand on tente de passer à l’acte, en fait, on ne voit rien autour. C’est malheureux. Que ce soit les enfants, la famille, les amis… C’est comme s’ils n’existaient pas. C’est un drôle de sentiment. Et si on ne se reprend pas, on n’est plus là…"
Quel a été ce déclic pour Cyril Cros ? "Ce sont mes enfants. J’ai entendu mes enfants arriver." Au moment où il est sur le point de se suicider : "Oui, oui…", répond ce policier de 44 ans. "Ça faisait deux ans que c’était compliqué. Et là, j’ai déraillé complètement. Mais j’ai entendu mes enfants arriver et j’ai eu un flash."
Il passe ensuite plusieurs mois dans une clinique privée, puis à la clinique du Courbat (en Indre-et-Loire, où on prend en charge le burn out chez les forces de l’ordre). "Grâce à la psychologue du SSPO (service de soutien psychologique opérationnel) et au Courbat qui ont travaillé en parfaite symbiose, je suis encore là aujourd’hui."
Il est possible de faire des dons à l'association Assopol sur ce site Internet ou sur la page Facebook.
Alban Gourgousse
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