Suicide, dépression : une première étude sur les souffrances des "trans"
EXCLU
 - Dans le cadre de la "Journée internationale du souvenir trans", une 
étude du Comité Idaho et du think tank République et Diversité sera 
remise jeudi à la Mairie de Paris. Celle-ci, que metronews publie en 
avant-première, montre que 85% des personnes transgenres ont déjà 
souffert de transphobie. Quelque 20% d’entre eux ont ensuite tenté de se
 suicider et 60% d’entre eux sont tombés dans une dépression.
 
Une
 question d’un groupe de jeunes - "Mais t’es un garçon ou une fille ?" -
 suivie de coups, qui pleuvent. Tel est le récit que fait Karine 
Espineira, personne trans,
 de son agression il y a quelques années. Devenue docteure en sciences 
de l’information et de la communication, elle a travaillé avec le 
sociologue Arnaud Alessandrin sur la toute première étude exclusivement 
dédiée à la transphobie, intitulée "Mission transphobie". Metronews vous
 révèle en avant-première ce rapport du Comité Idaho France et de 
l’association République et Diversité qui sera remis jeudi à la mairie 
de Paris, à l'occasion de la "Journée internationale du souvenir trans".
Pas
 facile d’être transgenre* en 2014 : ainsi, près de 85% des 281 
personnes interrogées, par le biais de questionnaires relayés par des 
associations, déclarent avoir souffert d’un acte transphobe. Et ce n’est
 souvent pas un cas unique : 37% des répondants indiquent avoir subi 
"plus de cinq" fois de tels actes. Insultes (59%), coups (13%), 
harcèlement (27%), discrimination (60%) : les caractéristiques de cette 
transphobie sont nombreuses et se déroulent surtout dans la rue (pour 
plus de 50% des cas) mais aussi dans des contextes privés (en famille, 
pour près d’un tiers des répondants) ou au travail (33%).
Presque jamais de plainte
Les
 conséquences de cette intolérance sont “dramatiques”, et les chiffres 
sont, selon Karine Espineira, "sans appel" : en effet près de 20% des 
répondants déclarent avoir fait une tentative de suicide et près de 60% 
une dépression. Une partie significative d’entre eux (15%) a par 
ailleurs subi des agressions physiques ayant entraîné une interruption 
temporaire de travail (ITT) de plus de quatre jours.
On pourrait 
imaginer que, face à cette ampleur, les plaintes soient nombreuses. Or 
ce n’est pas le cas : seulement 3,3% des trans interrogés ont porté 
plainte. "Ils ont conscience que la loi ne les protège pas", explique 
Arnaud Alessandrin, qui milite avec le comité Idaho pour que le mot 
transphobie soit inscrit dans les textes législatifs. "Même lorsqu’elles
 sont répertoriées, les agressions transphobes disparaissent dans les 
statistiques générales de la police", souligne le rapport.
Formation
 des personnels médicaux, protection des salariés, sensibilisation des 
médias… De nombreuses recommandations sont formulées, avec une priorité :
 reconnaître la possibilité de changer son état civil "de manière libre,
 gratuite et dé-médicalisée", sur le modèle de l’Argentine. Une 
proposition de loi allant dans ce sens a été élaborée par les députés PS
 Erwann Binet, Michèle Delaunay et Pascale Crozon, mais n’a pas encore 
été déposée.
*Le terme transgenre décrit toutes les personnes dont
 l'identité de genre, leur identité profonde, entre en conflit avec leur
 sexe de naissance. Transsexuel renvoie plus précisément aux personnes 
qui souhaitent changer de sexe ou ont changé de sexe.
 
 
Aude Lorriaux