Les super-policiers sur le pont contre les suicides
20 février 2014
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A l’occasion des 18es
journées de prévention du suicide, l’association SOS Solitude a convié
différents acteurs à parler des passages à l’acte. Parmi eux, des
policiers du Groupe d’intervention de la police nationale (GIPN) qui
œuvrent en tant que négociateurs. Ce sont eux qui discutent et essaient
de faire repasser du bon côté de la barrière des suicidants au bord du
vide sur les ponts. Rencontre avec Willy, l’un de ces fonctionnaires.
LA SALINE-LES-BAINS
Pont Vinh-San. Pont du
bras de la Plaine. A eux seuls, ces deux ouvrages situés à chaque
extrémité de l’île concentrent la grande partie des interventions des
forces de l’ordre pour des tentatives de suicide. En première ligne, la
police secours prend un premier contact. "Une formation a été dispensée
au commissariat de la Ravine-des-Cabris", explique le commandant Rémi
Authebon, chef du Groupe d’intervention de la police nationale (GIPN).
Car les fonctionnaires de La Ravine-des-Cabris et les pompiers du
secteur sont bien souvent les premiers à arriver sur le pont du bras de
la Plaine lorsque quelqu’un enjambe la barrière et menace de se jeter
dans le vide. Le GIPN intervient en alternative, lorsque la situation
s’enlise. D’autant que depuis Saint-Denis, le temps de trajet est plutôt
long même si les policiers bénéficient de l’hélicoptère de la Section
aérienne de la gendarmerie (SAG) pour se faire transporter sur les
lieux. Entre l’alerte et l’arrivée, il faut compter environ 45 minutes.
Quand le GIPN est appelé à
la rescousse, un des cinq négociateurs de l’unité entre en jeu. "Il
faut tout de suite se mettre en condition. Sur ce genre d’intervention,
il faut peser chaque mot. On n’a pas le droit à l’erreur", raconte
Willy, l’un d’eux. Hier, il est venu parler de son expérience aux 18es
journées nationales de prévention du suicide. Comme ses collègues, il a
reçu une formation intensive et diplomante dispensée par la "cellule
négo" du RAID (Recherche, assistance, intervention, dissuasion).
"Montrer une certaine sérénité"
Dans ce cadre, en 2013,
le GIPN est entré en action à sept reprises. Sept tentatives de suicide
dont quatre avaient pour théâtre des ponts. Trois interventions avaient
lieu dans des habitations ou dans des bâtiments publics. Lorsque le
groupe se déplace, il est composé du chef opérationnel, du négociateur
et de deux cordistes. "A La Réunion, ce genre d’intervention occupe une
place importante dans notre travail", affirme le commandant Authebon.
"Nous avons développé nos rapports avec police secours. Nous sommes plus
proches d’eux et ils n’hésitent pas à nous appeler."
Willy touche du bois.
"J’ai eu 100 % de réussite dans mes négociations." La crainte est de
voir une personne sauter. "Ce qui est important, c’est la prise de
contact. Il faut accrocher la personne." La négociation est un exercice
difficile qui peut durer en moyenne entre deux et trois heures. Willy
poursuit : "Le processus qui a conduit les gens à se mettre dans cette
situation a été long. La négociation est donc aussi longue. Il faut
créer un électrochoc chez eux. Les mettre face à la mort. Le ton employé
doit montrer une certaine sérénité." Willy est créole. Et selon le
commandant Authebon ça rapproche encore un peu plus le négociateur des
personnes qui sont dans une position délicate sur les ponts. Ça met en
confiance.
Car la préparation du
passage à l’acte a pu être minutieuse. Willy continue : "Certaines
personnes vont mettre de l’ordre dans leur vie. Payer des factures,
ranger leurs affaires avant de se suicider." Le GIPN arrive alors comme
un grain de sable dans le mécanisme.
La dernière intervention
en date du groupe a eu lieu dimanche dernier. Un jeune homme menaçait de
se jeter du deuxième étage d’un immeuble en construction sur le site de
la fac au Moufia. L’histoire s’est une nouvelle fois bien terminée. Ce
n’est pas toujours le cas. Depuis son ouverture en 2002 jusqu'à fin
2013, les pompiers ont recensé 460 interventions pour des suicides ou
tentatives de suicide sur le pont du bras de la Plaine. Sur cette même
période, 33 personnes sont parvenues à leurs fins.
Le GIPN était intervenu
et avait négocié en mars 2013 avec cet employé de la ville de
Saint-Denis qui menaçait de sauter de la mairie (photo d’archives LLY).
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