Le Nord-Pas-de-Calais sollicite l'ARS pour former le personnel d'Ehpad en matière de suicide
source :http://psyzoom.blogspot.fr/2014/02/le-nord-pas-de-calais-sollicite-lars.html
11/02/14 - 15h33 - HOSPIMEDIA |
Enquête à l'appui, la Fédération régionale de recherche en santé mentale (F2RSM) du Nord-Pas-de-Calais fait le point sur le suicide et les tentatives de suicide en Ehpad. Deux éléments retiennent l'attention : le "sur-risque de suicide" dans l'année suivant l'institutionnalisation des âgés et "l'intérêt majeur à une formation spécifique accrue du personnel".
"Du fait de la fréquence des pathologies psychiatriques et du sur-risque de suicide présent dans l'année qui suit une entrée en structure d'hébergement gériatrique, il y aurait un intérêt majeur à une formation spécifique accrue du personnel médical et para-médical sur la dépression, le suicide et la tentative en Ehpad". Telle est la conclusion de l'enquête "Suicides et tentatives de suicide en Ehpad dans le Nord-Pas-de-Calais"(1).
Le taux de suicide des âgés plus important en Ehpad
Menée entre le 30 mai et le 13 juillet 2013, cette enquête visait prioritairement à mesurer l'ampleur du risque suicidaire en Ehpad. Sur les 288 établissements de la région, 107 médecins coordonnateurs ont répondu à l'enquête descriptive sur les résidents de leurs structures. 21 d'entre eux ont déclaré être concernés par un décès ou au moins une tentative de suicide (TS) en 2012 et au total, 22 tentatives et 4 décès par suicide ont été enregistrés dans ces Ehpad (2). Rapporté aux 9 089 places, le taux de tentative de suicide s'élève à 242 pour 100 000, et celui de suicide à 44 pour 10 000.
Même s'ils se limitent à la seule région Nord-Pas-de-Calais, ces chiffres démontrent la proéminence du risque suicidaire au sein de la population en Ehpad par rapport à l'ensemble de la population âgée. En effet, le taux de mortalité par suicide est estimé en France à 35 pour 100 000 chez les plus de 75 ans.
Pour Marie Manechez, auteure de l'étude, cette sur-représentativité en Ehpad doit se comprendre à la lumière des poly-pathologies et de la dépendance des résidents, plus importantes qu'à domicile. "Globalement, écrit-elle, dans notre étude, la dépression et les troubles bipolaires représentent 50% des troubles psychiatriques rencontrés en Ehpad selon les médecins coordonnateurs. Or, la dépression est un facteur de risque majeur de passage à l'acte suicidaire."
Jean Roche, psychogériatre au CHRU de Lille, développe et précise que l'apparition d'une pathologie à l'origine de l'institutionnalisation n'est pas le seul élément explicatif. "L'étude a démontré ce que nous attendions, à savoir le risque que crée le passage du domicile à l'Ehpad. Le changement d'environnement constitue un moment traumatisant et implique de nombreux renoncements, souvent vécu comme un deuil".
L'intérêt d'engager une formation accrue
Dans ce contexte, et alors que 38% des Ehpad répondants ne disposaient pas de psychologue et que près de 60% ont dû faire appel au secteur de la psychiatrie pour un nombre de patients allant de 1 à 8 par établissement, l'étude s'est penchée sur l'indéniable besoin en formation des professionnels.
Pour l'apprécier, des entretiens complémentaires ont été réalisés auprès des médecins coordonnateurs ayant été confrontés à un suicide ou une tentative de suicide. D'après Laurent Plancke, sociologue et chargé de mission pour la Fédération régionale de recherche en santé mentale (F2RSM), le recueil des données est actuellement en cours.
Par ailleurs, et afin d'apporter une réponse au besoin évoqué par les professionnels, le F2RSM a sollicité l'ARS Nord-Pas-de-Calais pour financer la formation à hauteur d'une dizaine de milliers d'euros. Laquelle n'a à ce jour pas encore fait savoir sa réponse.
Agathe Moret
Le suicide des âgés entre dans les prérogatives publiques Objet de recommandation de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes, ex-HAS) depuis 2000, la crise suicidaire touche particulièrement les âgés. Sur les 10 400 suicides enregistrés par le CepicDC (Inserm), un tiers concerne les plus de 65 ans. Le chiffre augmente avec l'âge et touche encore davantage les hommes de 75 ans et plus.Le programme Mobiqual, destiné au repérage de la dépression et du risque suicidaire chez la personne âgée, présentait le premier sursaut de volonté politique. Volonté qui semble s'accentuer au regard du projet de l'autonomie, auquel le plan de prévention du suicide des personnes âgées sera annexé.
A. M.
(1) Enquête menée par les cliniques de gérontologie et de psychiatrie du CHRU de LIlle en partenariat avec la F2RSM Nord-Pas-de-Calais. Marie Manechez, Jean Roche, Laurent Plancke, Thierry Danel, François Puisieux, Guillaume Vaiva, F2RSM
(2) En moyenne, les suicides concernaient des personnes de 82 ans, les TS, celles de 85 ans, pour un ratio homme-femme de 1/1. Les modalités de suicide relevaient pour leur part de pendaison (2 cas) et de noyade (1 cas). Avec les auto-intoxications, les noyades figurent parmi les moyens les plus souvent utilisés dans le cadre de tentatives de suicide.
Agathe Moret