Gers Marsan. La Cuma ou «le remède contre le mal-être paysan» Publié le 07/02/2014 http://www.ladepeche.fr/article/2014/02/07/1812496-la-cuma-ou-le-remede-contre-le-mal-etre-paysan.html
la fédération se réunit aujourd'hui à Marsan
La fédération des Cuma du Gers, qui compte 4 000 adhérents répartis dans 421 coopératives, organise ce matin son assemblée générale. Ces dispositifs agricoles sont une alternative crédible dans un contexte économique morose.
Le principe des Cuma (Coopérative d’utilisation du matériel agricole) est simple et séduisant. Ses membres mettent en commun leurs ressources afin d’acquérir du matériel agricole. «A titre personnel, je ne possède plus aucune machine», souligne Jean-Claude Bonato, président de la fédération des Cuma du Gers, et membre avec quatre autres agriculteurs d’une structure de ce type à Berrac. Stationnés dans des hangars, tracteur, moissonneuse-batteuse ou encore corn-picker sont à disposition des exploitants. Des machines dont le coût (jusqu’à 230 000 €) est prohibitif pour la majorité des agriculteurs. La Cuma permet donc à ses membres d’avoir accès à ces engins à moindre prix. «Sur une exploitation traditionnelle, la charge mécanique s’élève à 400 € par hectare, indique Jean-Claude Bonato. Pour nous, grâce à la mutualisation du matériel agricole, le coût est deux fois moins élevé.» Cette baisse de charge offre notamment aux paysans une marge de manœuvre financière plus importante dans un contexte économique difficile. «À cause des conditions climatiques et du faible rendement, 2013 a été une année très compliquée pour les agriculteurs, avance le président de la fédération des Cuma du Gers. Certains ont vu leur revenu diminuer de 50 %. La Cuma compense, en partie, ces pertes financières.»
6,5 millions d'euros investis en 2013
Mise en commun des ressources, partage du matériel, production groupée... cette approche «collectiviste» de l’agriculture s’apparente-elle à une philosophie communiste ? «Ce n’est pas la première fois qu’on me fait la remarque», rétorque Jean-Claude Bonato dans un éclat de rire. Dans une corporation marquée plutôt à droite, il est, en effet, surprenant d’être qualifié de «rouge». «J’ai baigné dans un milieu qui ne partageait pas forcément l’idéologie véhiculée par la Cuma, poursuit le responsable départemental. Mais j’ai intégré cette structure en 1984 et j’ai même converti mon père à la Cuma.» Mais au-delà des avantages matériels que propose la Cuma, cette société coopérative favorise les échanges humains. «La Cuma est un formidable remède contre le mal-être paysan, lance l’agriculteur. Je ne passe pas une journée isolé, sans voir personne.» Des réunions de travail sont organisées pour planifier les différentes tâches agricoles, les membres de la Cuma s’entraident lorsqu’ils ont besoin de main-d’œuvre,... «Cette organisation nous permet de dégager du temps libre pour d’autres activités ou profiter de notre vie de famille», se satisfait Jean-Claude Bonato. L’agriculteur ne cache pas pour autant les difficultés qui émanent de ce type de dispositif : il n’est pas toujours aisé de dégager un consensus entre membres de la Cuma, le matériel qui passe entre de nombreuses mains se dégradent plus rapidement,... Des aspects négatifs qui ne séduisaient guère Antoine Stiers, 25 ans, qui s’est lancé l’an dernier dans la production de blé et de tournesol sur la commune de Pouy-Roquelaure. Pourtant, le jeune homme a décidé de franchir le pas en adhérant à une Cuma. Et il ne le regrette pas. «L’esprit de groupe est très présent au sein de cette structure. On ne se sent jamais seul. Et puis la possibilité d’avoir accès à un matériel de qualité n’est pas négligeable.» Le Gers compte aujourd’hui environ 4 000 adhérents à la Cuma répartis sur 421 coopératives. Ces dispositifs tendent à se développer en favorisant notamment les échanges interdépartementaux. «Une machine peut servir en Aveyron puis être mise à disposition dans le Gers pour réaliser d’autres travaux agricoles», illustre Mireille Fraysse, directrice de la fédération départementale de la Cuma. L’an dernier, dans un contexte morose, les Cuma du Gers ont investi 6,5 millions d’euros. Preuve de la fiabilité économique de ces structures agricoles.
Sébastien Barrère