21% d'entre eux travaillent 70 heures par semaine.
Par Le Figaro avec AFP
Publié 20/02/2020
Surcharge
de travail, manque de sommeil et sentiment de ne plus être maître de
son destin ont conduit à l'épuisement professionnel plus d'un tiers des
agriculteurs de Saône-et-Loire en 2019, selon une rare étude de fond sur
le sujet, portant sur ce seul département.
La
Chambre d'agriculture de Saône-et-Loire avait lancé en 2018 une enquête
de trois ans, menée en plusieurs vagues par l'Observatoire Amarok, pour
mesurer les situations de fragilité professionnelle des femmes et des
hommes à la tête des 7.000 exploitations du département.
Les
résultats 2019, tirés de 427 questionnaires retournés par des
agriculteurs du département, sur 4.000 envoyés par courriel, révèlent un
risque d'épuisement toujours élevé. En effet, sur cet échantillon,
35,1% des agriculteurs apparaissent en risque de «burn-out», selon les données de cet observatoire créé par le professeur Olivier Torrès de l'Université de Montpellier qui se dit «stupéfait»
par ce score, bien supérieur aux autres catégories de chefs
d'entreprise (17,5%). Différents éléments contribuent à favoriser cette
situation, selon Olivier Torrès.
L'évolution des marchés agricoles n'est pas toujours bien vécue par les agriculteurs. «Dès
qu'un agriculteur est sur une forme de marché mondialisé, dont les prix
ne sont pas négociés, il a le sentiment qu'il ne maîtrise plus son
destin. Or, le sentiment de maîtriser son destin est bon pour la santé», assure le chercheur. «Les
agriculteurs sont des hommes et des femmes qui travaillent beaucoup et
la surcharge de travail est l'un des déterminants de l'épuisement
professionnel», et sur l'échantillon analysé, «ils sont sur un niveau extrême»,
selon Olivier Torrès. Il n'y a en a que 9% qui travaillent moins de 40
heures, 77% sont à 50 heures, et 21% dépassent 70 heures.
De plus, les agriculteurs rognent sur leur temps de sommeil et dorment moins pour travailler plus. «Alors
que le Français moyen dort 7H04 par nuit, les agriculteurs sont entre
6H20 et 6H30, cela fait 150 à 200 heures de sommeil en moins à la fin de
l'année», souligne le chercheur.
En
tant que travailleurs indépendants, les agriculteurs engagent leur
patrimoine propre pour pouvoir travailler, et dans l'agriculture en cas
de faillite «ils ont en plus le sentiment qu'ils liquident
l'entreprise familiale, cela fait que quand ils liquident leur boîte,
ils sont en danger suicidaire fort», souligne Olivier Torrès. «Il y a une comorbidité entre l'épuisement professionnel et le risque suicidaire», explique-t-il tout en soulignant que «ce n'est pas la même chose».
Les
questionnaires sont anonymes, mais l'observatoire donne la possibilité
aux répondants qui auraient un score trop important sur «l'échelle de l'épuisement de Pines», ou «l'échelle du désespoir» de contacter une psychologue, ou la cellule Agri-Ecoute lancée par la Mutualité sociale agricole.