jeudi 13 juin 2019

Guyane Séminaire sur le suicide des amérindiens

Guyane Séminaire sur le suicide des amérindiens


© J. Helgoualch / K. Constable
Jocelyne Helgoualch /Karl Constable / P.N
Publié le 29/05/2019
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A Maripasoula et dans les villages Wayanas du haut Maroni, une vague de suicides touche depuis le début de l’année, des enfants et de jeunes adultes.
Le dernier drame s'est déroulé au collège Gran Man Difou à Maripasoula , une jeune femme Wayana de 27 ans aide documentaliste s’est donnée la mort, le 8 mai dernier.
Face aux enfants et à leurs familles, les enseignants se retrouvent désemparés, sans savoir comment agir dans de telles situations.
Pour les aider, peu ou pas de réponses de l’Education Nationale. Le syndicat Unsa éducation organisait hier matin un séminaire à Maripasoula sur le suicide pour la communauté éducative du haut maroni.

© J. Helgoualch / K. ConstableIls arrivent des villages amérindiens du haut Maroni ou du collège Gran Man Difou de Maripasoula pour parler et échanger sur le suicide des Wayanas.
Tous sont enseignants et tous ont vécu cette année des drames. Des jeunes des villages qui se sont suicidés ou des collègues de travail du collège de Maripasoula, qui se sont données la mort . Des jeunes femmes Wayanas.
Ces enseignantes ont été particulièrement touchées par ces suicides à répétition

© J. Helgoualch / K. Constable
Christelle Tessier, documentaliste au collège Gran Man Difou de Maripasoula :

" J'ai vraiment le sentiment d'être impuissante et après Vanessa, je ne vois pas ce que je peux prévenir, je n'ai rien prévenu pour elle, alors qu' elle s'est confiée nous étions très proches, que nous avions discuté, je l'ai vue 10 heures avant, je n'ai rien vu venir."
Sandra Bondon, enseignante en français au collège Gran Man Difou :

" On commence à saturer, à me dire comment prendre mes élèves en charge ? que leur répondre ? comment les aider ? A chaque fois, on nous demande de prendre nos élèves, le lendemain du drame, de libérer leur parole, mais moi je n'ai pas de clé pour libérer leur parole."Pour répondre à leurs questions et leur permettre d’aider les élèves, des psychologues et psychiatres du centre hospitalier de Cayenne sont venus leur donner des conseils.

Kevin Nicole, enseignant Ce2 école de Taluen :

" J'attends qu'ils puissent nous apporter cette faculté d'écoute et de pouvoir entendre ce que l'on vit et de pouvoir être force de proposition."Léon Ribas, enseignant ce1 école de Taluen :

" Que les choses remontent au niveau hiérarchique, au niveau du rectorat, au niveau de l'Education Nationale, pour que les choses soient vraiment prises en considération, que la gravité des choses soit prise en compte."Des enseignants démunis et seuls face cette crise suicidaire qui touche les jeunes amérindiens. Tous attendent des aides et des actions venant de l’éducation nationale ou des autorités pour la mise en place d’un véritable plan d’accompagnement des jeunes wayanas.
Séminaire sur le suicide des amérindiens
https://www.youtube.com/watch?v=orDfD5vN22E
https://la1ere.francetvinfo.fr/guyane/seminaire-suicide-amerindiens-715857.html 


Guyane

Suicide des amérindiens : Pour Christophe Pierre représentant des jeunesses autochtones la solution passe par un autodiagnostic des communautés

Invité de Mayouri info à la radio, le représentant des Jeunesses autochtones, Christophe Pierre a réagi sur la vague de suicides actuelle qui touche la communauté Wayana sur le Haut Maroni. Une des causes, selon lui, est le déracinement familial, spirituel et culturel.

© Guyane la 1ère Christophe Pierre des jeunesses autochtones

Par Catherine Lama
Publié le 05/06/2019

Comme à son habitude, Christophe Pierre n'a pas mâché ses mots :


"Si successivement les services de l'Etat ou les personnes qui ont travaillé sur ce phénomène pensent résoudre ces questions en 5 ans ou en 10 ans, c'est simplement pas faisable. Les programmes de prévention des suicides c'est sur 30 ans, 40 ans que cela apporte des résultats..."
Un autodiagnostic des communautésEt de souligner aussi qu'il n'y a ni continuité ni vision à long terme sur les programmes mis en place avant d'asséner : "cela reste du bricolage".
Christophe Pierre ne se fait pas d'illusions sur l'avancée des 37 mesures proposées par la mission parlementaire de 2015 menée par la sénatrice Aline Archimbaud et la députée Marie-Anne Chapdelaine pour enrayer le phénomène des suicides chez les amérindiens. Mission à laquelle il a participé. Il affirme que 4 ans après, beaucoup de ces mesures n'ont pas été suivies d'effet, comme par exemple la cellule régionale pour le mieux être des populations de l'intérieur (CerMePI) qui n'existe plus. Ou encore le projet de construction d'un collège à Taluen dont la réalisation tarde. Pour les enfants qui doivent quitter un environnement libre dans leur village pour se retrouver en internat loin de chez eux, ce déracinement est un des points qui peuvent amener au suicide.
Mais le suicide est à prendre dans sa globalité, outre la problématique éducative, il y a le questionnement culturel et spirituel. Christophe Pierre prône un autodiagnostic des communautés :


"... Elles sont les plus à même de connaître les pistes de solutions... le grand conseil amérindien doit savoir écouter les propositions formulées par les communautés et c'est là le noeud du problème..."

Mettre en place un plan de prévention du suicide sur le très long terme
Pour Christophe Pierre, il faut s'inspirer de ce qui s'est fait ailleurs avec les communautés autochtones du Brésil et du Canada qui ont mis en place des plans de prévention du suicide sur 30 ans. Par ailleurs, il faut prendre le problème dans sa globalité. L'orpaillage illégal fait aussi partie du mal être exprimé. Ce fléau influe sur beaucoup de choses comme la circulation de drogues, l'accaparation des terres, la diminution du gibier, la pollution de l'eau.
Christophe Pierre met aussi en avant l'inadéquation du système scolaire pour les jeunes autochtones. Certes, le système éducatif est national mais dans le contexte local, il lui semble tout a fait inapproprié. Il faut remettre les peuples au centre de leur fonctionnement, réapprendre à vivre et à enseigner au rythme des saisons qui articule le rythme de vie. Le problème de langue se pose également :


"... La question de la vision du monde et de l'intelligence s'exprime à travers cela. Un enfant qui maîtrise sa langue maîtrisera le français et maîtrisera les deux mondes dans lesquels il est obligé de vivre, de jongler ..."L'interview complète :
Christophe Pierre sur la question du suicide
https://www.youtube.com/watch?v=wtHPujy_ozY 

* https://la1ere.francetvinfo.fr/guyane/suicide-amerindiens-christophe-pierre-representant-jeunesses-autochtones-solution-passe-autodiagnostic-communautes-718066.html