Les premiers concernés dans le Gers comme ailleurs en France : les éleveurs.
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Parfois mise en cause dans les suicides
d’agriculteurs, la MSA met les bouchées doubles pour prévenir ce
phénomène : service dédié, réseau de sentinelles, et surtout large
communication pour vaincre les tabous.
Les difficultés financières rencontrées
par les agriculteurs, et souvent les cotisations à la MSA (Mutualité
sociale agricole), sont souvent citées parmi les causes de suicide dans le monde agricole.«
La détresse des agriculteurs nous est imputée, assume le président de
la caisse locale, Daniel Gesta, mais nous menons de nombreuses actions
pour contrer ce phénomène. »Qu’il s’agisse de la détection, de l’accompagnement ou de régler les difficultés, la MSA tente de répondre au malaise du milieu agricole depuis 2012, avec déjà un numéro et des cellules de prévention. Dans le Gers, en 2018, 9 personnes ont ainsi contacté la cellule prévention.
Le profil type : un éleveur, de 45 à 65 ans. « Le Gers est dans la moyenne nationale, note Christian Davenne.Ils nous contactent pour des problèmes relationnels. » Séparation, décès, ou conflit dans un Gaec, la difficulté exposée par l’agriculteur qui contacte la cellule de la MSA est souvent la goutte d’eau.« Viennent se superposer des difficultés financières qui auraient pu être absorbées par la famille, le couple, assure Sébastien Bismuth-Kimpe, le directeur général. Les crises ont laissé des traces dans les exploitations, avec pour certaines des situations compliquées, subies. Le déclencheur du mal-être, c’est l’accident. Santé, couple, etc,... l’origine peut être très variable, mais ce n’est pas le fond du problème rencontré par l’agriculteur. »
« Plus personne ne dit aujourd’hui : ça n’existe pas. Il y a une vraie prise de conscience de cette question dans le mode agricole, il n’y a plus de tabou sur le sujet. C’est ce qui permet de passer à l’étape du traitement du mal-être. » Sébastien Bismuth-Kimpe, directeur général MSA MPSPour faire face à ce sujet délicat, la MSA essaie de se positionner en amont du geste fatal, en s’inspirant des modèles scandinaves, des pays qui ont fait face à des taux très importants.« Ils ont fait le choix de lever le tabou, et nous suivons ce chemin, précise le directeur.Avant, on parlait de prévention suicide, et maintenant on essaie d’amener vers la prévention du mal-être. »
Exemple de cette volonté de briser les tabous, la projection d’un film documentaire à Mirande, qui avait lancé un débat intense dans la salle.La MSA a également sensibilisé ses 500 élus dans les cantons.« Ils représentent un vrai maillage local, et peuvent faire remonter les situations. S’y ajoutent les autres interlocuteurs du monde agricole : le personnel de la chambre d’agriculture, du crédit agricole, etc. » Dès que les services de la MSA sont alertés sur des difficultés, « en particulier celui des contentieux, tout le monde agit pour aller au plus vite vers l’agriculteur en détresse ».
Appels en augmentation
Bon ou mauvais signe ? La MSA enregistre une hausse des appels vers la cellule de prévention. « On ne sait pas si le nombre de situations difficiles conduit à plus d’appels, ou si c’est le fait que la parole se libère », analyse Christian Davenne, chargé de la communication.
« Les agriculteurs aimeraient avoir une autre image »
Selon les responsables gersois de la MSA, si le suicide des paysans n’est plus une question tabou, « les agriculteurs aimeraient aussi renvoyer une autre image de leur métier : pour eux, on a parfois l’impression que, à en croire les médias, toute la profession est en situation de mal-être. Il faut dire aussi qu’il y a des agriculteurs qui vont bien ! » Les discussions engagées lors de soirées débats, dans le Gers, en Ariège, montrent une préoccupation face au malaise des exploitants, mais surtout sur la question des revenus agricoles ! « On a des situations qui sont liées à des faits sans relation avec le métier, observe le directeur de la MSA MSP. Il y a un paradoxe dans le monde agricole aujourd’hui. On a des mouvements extrémement négatifs autour des questions agricoles, qui prennent des formes diverses autour de l’environnement, du bien-être animal, et en même temps s’exprime une très forte demande d’un retour aux sources, avec une agriculture qui est précisément celle qu’on trouve dans le Gers, modérée, familiale, avec beaucoup d’atouts, comme la présence territoriale, le maintien d’activité rurale… Des éléments positifs, mais pour les agriculteurs, c’est un peu compliqué d’être à la fois les méchants et les gentils ! »
https://www.ladepeche.fr/2019/06/25/la-msa-du-gers-veut-prevenir-les-suicides-dagriculteurs,8277053.php