Suicide: la prévention, première arme contre une crise sanitaire mondiale
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14 juin 2018
Mise à jour 14.06.2018 à 18:00
Par Veronique DUPONT AFP
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Carte du monde avec le taux de suicide par pays
afp.com - Paul DEFOSSEUX
Les récents décès de la styliste américaine Kate Spade et de son compatriote, le cuisinier Anthony Bourdain, rappellent l'urgence de lutter contre le suicide, l'une des premières causes mondiales de mortalité, en dopant les efforts de prévention, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Si ces disparitions de célébrités mettent un coup de projecteur sur le suicide dans les pays riches, l'OMS souligne que plus des trois quarts des cas surviennent dans des pays en développement.
Près de 800.000 personnes mettent fin à leurs jours chaque année dans le monde et le suicide est la deuxième cause de décès chez les 15-29 ans, selon la même source.
Aux Etats-Unis, 45.000 personnes se sont données la mort en 2016, soit une augmentation inquiétante de 30% depuis 1999.
"C'est difficile à expliquer, peut-être en partie dû à l'épidémie d'opiacés" ou à la crise financière de 2008 qui s'est traduite par l'expulsion de millions de personnes, explique à l'AFP David Brent, psychiatre à l'école de médecine de l'université de Pittsburgh.
Ces facteurs "ont peut-être un impact plus fort aux Etats-Unis car nous n'avons pas un système de protection sociale et de santé aussi poussé" qu'en Europe, ajoute-t-il.
- Facteurs multiples -
"La prévalence du suicide a fluctué avec le temps, elle augmente souvent pendant les périodes de difficultés sociales" comme la Grande dépression de 1929, remarque le psychiatre Richard Friedman dans une tribune au New York Times.
"La vraie question est pourquoi nous n'avons pas fait plus" car le taux de suicide actuel aux Etats-Unis est équivalent à celui d'il y a un siècle, poursuit-il, appelant à "déclarer la guerre au suicide comme nous l'avons fait avec des crises sanitaires autour du VIH ou des maladies cardiovasculaires", en donnant les fonds nécessaires à la recherche et aux hôpitaux.
Les pays rongés par la guerre comme le Sri Lanka sont les plus touchés, tandis que la Corée du sud et le Japon sont en tête des pays industrialisés les plus concernés.
"Avoir fait l'expérience d'une guerre, d'un désastre naturel, des violences, d'abus sexuels (...) sont des facteurs largement associés avec le comportement suicidaire", avertit l'OMS.
La France, le taux de suicide a chuté de 26% en 15 ans (à 10.000 par an) mais reste l'un des plus élevés d'Europe.
La majorité des personnes suicidaires sont atteintes d'"au moins un trouble mental" non traité comme la dépression, l'anxiété ou l'addiction. Mais d'autres facteurs comme l'isolement, la perte d'un emploi, d'un être cher, une rupture amoureuse, peuvent pousser quelqu'un à commettre l'irrémédiable, selon les autorités sanitaires américaines.
Le phénomène touche toutes les couches de la société, tous les âges. Les plus jeunes, plus influençables, sont plus vulnérables aux "suicides par imitation", fréquents notamment lorsque des personnalités mettent fin à leurs jours.
Certaines professions sont particulièrement concernées - militaires, agriculteurs - ainsi que les minorités ethniques ou sexuelles qui subissent des discriminations: peuples aborigènes ou indigènes, migrants et réfugiés déracinés, homosexuels, transsexuels...
- Formation et suivi -
Si le suicide est souvent un choc pour les proches qui n'avaient rien vu venir, c'est parce que ceux qui l'envisagent cachent leurs intentions. Pour ne pas se laisser décourager mais aussi par honte.
Le chef Anthony Bourdain "appartenait à la génération +un homme fort n'appelle pas à l'aide+. Je sais qu'avant de mourir Anthony avait demandé de l'aide mais n'avait pas suivi les conseils du médecin", a écrit il y a quelques jours l'actrice Rose McGowan, amie d'Asia Argento, petite amie du chef et star de la télévision.
La prise en charge médicale fonctionne, associée à des psychothérapies, assurent les experts. La formation des personnels médicaux et d'urgence à dépister ces comportements, et le suivi dans la durée sont déterminants, car les personnes qui ont déjà fait une tentative de suicide ont de très fortes chances de recommencer.
"Me mère est celle qui a m'a le plus secouru et m'a aidé pour parvenir à voir la lumière", raconte Ben, un ancien militaire américain qui vit avec des pensées suicidaires depuis sa démobilisation il y a neuf ans.
Il dit avoir été suivi étroitement par un travailleur social du ministère des Anciens combattants et avoir beaucoup travaillé sur lui-même, psychologiquement et spirituellement.
L'OMS insiste aussi sur l'importance de réduire la disponibilité de substances létales ou d'armes à feu. Les autorités sanitaires américaines constatent que les suicides augmentent très fortement dans les régions où la possession d'une arme à feu est répandue: aux Etats-Unis, 22.000 personnes les utilisent chaque année pour se donner la mort.
Par Veronique DUPONT
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