vendredi 22 juin 2018

À Dieppe, la prévention en mode 2.0 avec les jeunes

À Dieppe, la prévention en mode 2.0 avec les jeunes
Mireille LOUBET |
Publié 20/06/2018 http://www.paris-normandie.fr*


Alexis Douala, le directeur de l’association Foyer Duquesne encadre une équipe de 14 salariés dont cinq éducateurs de rues

Social. L’association Foyer Duquesne mène sur le terrain une action de prévention spécialisée auprès des jeunes. Pour s’adapter aux nouveaux modes de vie, elle réfléchit à une intervention en ligne.

Le travail d’éducateurs de rues est-il en pleine mutation ? À écouter les intervenants du Foyer Duquesne, une « mise à jour » du métier est en train d’être opérée. Des changements qui nécessitent réflexion.

« Historiquement, notre association de prévention spécialisée maille le terrain avec des éducateurs de rues. Le principe, c’est d’aller à la rencontre des jeunes dans leurs lieux de rencontre : à la sortie des établissements scolaires, dans les squares, les squats, les bois et d’entamer une discussion de manière spontanée, explique Alexis Douala, le directeur du Foyer Duquesne. S’ils ont besoin et envie qu’on les accompagne, qu’on les aide face à certaines difficultés, nous sommes là. Il s’agit parfois de toutes petites choses du quotidien, mais ça peut aussi concerner des problématiques plus lourdes : addictions, maltraitance, relations toxiques, prostitution... Nous n’abordons pas que des individus mais aussi des collectifs, des groupes de jeunes ».

Nous sommes des « œuvriers »

Cette prise de contact libre permet néanmoins de repérer les situations qui sont potentiellement à risque, et de faire de la prévention spécialisée auprès d’un public souvent exclus des dispositifs de droit commun.

Dans certains cas, cette rencontre doit néanmoins être provoquée. « Nous avons créé les bancs collectifs dans le quartier du Bout du quai pour faire en sorte que les habitants sortent pour un moment de convivialité avec le centre social L’Archipel. À la suite de cette expérience, certains sont devenus des adhérents assidus du centre social qu’ils ne fréquentaient pas auparavant. Nous faisons du sur-mesure. Je dis souvent que nous sommes des œuvriers. Malheureusement, cette mission de prévention est difficile à mesurer ».

En dépit de contraintes financières qui sont venues, il y a quelques années, gêner ce travail de fourmi (les subventions du Département ont été divisées par deux), les éducateurs de rues remettent constamment leur métier en question et ses modes opératoires pour aborder les jeunes. « Notre prochain chantier, actuellement déjà en réflexion, c’est notre présence dans les rues numériques, explique Alexis Douala. Les jeunes sont aujourd’hui captés par les écrans : il faut des professionnels de la prévention dans ces espaces. Avant, un enfant victime de harcèlement à l’école pouvait souffler en arrivant à la maison. Aujourd’hui, il est cyber-harcelé, il n’y a plus de pause. Nous réfléchissons à un projet de promeneurs du net, expérimentés, avec des personnes référentes qui iront sur les réseaux sociaux. Nous avons déjà le site internet ADO 76 et son application mobile, mais nous ne devons pas abandonner les gamins dans ces espaces numériques. Ce sera notre prochaine mission ».

La parentalité au banc d’essai
Pendant deux décennies, le Foyer Duquesne, des parents et des professionnels ont mené un travail de recherche sur la reparentalisation.
Ce travail prend désormais un nouvel essor avec la création d’une université populaire des parents (UPP). Ces parents souhaitent, à leur tour, être acteurs de la transmission de leur expérience. Dans ce sens, une action commune a été lancée l’an dernier avec l’association des Collectifs enfants, parents, professionnels (Acepp) pour le développement de cette université populaire des parents à Dieppe. Le principe des UPP est de réunir des groupes de parents volontaires qui, avec l’aide d’un animateur et avec le soutien méthodologique d’un universitaire, mènent une recherche sur un thème choisi, en lien avec la parentalité. Ils mettent ensuite leur travail en débat avec d’autres acteurs : des professionnels, des institutions, des politiques, pour croiser les points de vue et construire du dialogue afin de conduire ensemble des actions citoyennes, dans le thème choisi.
Dès sa première année d’existence, - en 2017 -, l’UPP de dieppoise a été active en prenant attache avec d’autres groupes déjà constitués ailleurs en France et en partageant sa réflexion avec d’autres associations du territoire. Depuis 2017, un groupe d’une vingtaine de parents assidus échange sur les secrets de famille, la recohabitation, l’influence de la pensée. Le groupe UPP se réunit le 2e lundi de chaque mois à la Ferme des Hospices à Janval. C’est un temps de décompression, un temps d’échange sur la parentalité qui est devenu précieux pour les participants concernés.
Il est prévu qu’en 2019 ou en 2020, le groupe UPP de Dieppe accueille dans la commune le séminaire national des parents. Un livre sur cette expérience et ses enseignements sera ensuite édité.

UNE APPLI CRÉÉE
Depuis une dizaine d’années le site internet :
www.ado76.com développé par le Foyer Duquesne
permet aux jeunes de poser directement sur un forum en ligne des questions sur une problématique personnelle, de façon anonyme.
Via le forum le dialogue s’instaure directement entre les jeunes qui fréquentent le site avec la participation également de professionnels (éducateurs, psychologues) de la prévention spécialisée qui apportent leurs compétences.
Dans ce forum sont abordées tous types de problématiques : sexualité, harcèlement scolaire, relations avec les parents, avec les amis, la santé, les mutilations, le suicide... Le site est présenté chaque année dans les collèges de Dieppe, aux délégués de classes, pour le faire connaître au public concerné. En fin d’année 2016, une application mobile (ADO76) pour téléphone Androïd a été développée.

Les parents aussi
Si le Foyer Duquesne a une mission de prévention vers les jeunes, les parents ne sont pas oubliés. Le jeudi de 10 h à 12 h et de 14 h à 17 h, l’association a ouvert pour les parents un espace d’échange (physique ou téléphonique) avec une thérapeute familiale. Les parents peuvent venir confier, anonymement et gratuitement, les problèmes de relations qu’ils entretiennent avec leurs enfants, parler et trouver des solutions alternatives aux problèmes rencontrés. Pour avoir ce rendez-vous avec la thérapeute familiale, il faut d’abord appeler le tél. 02 32 90 96 48.

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