mardi 1 mars 2022

Patients suicidaires : bilan du dispositif RE-START à 6 mois

Patients suicidaires : bilan du dispositif RE-START à 6 mois
Publié le 28 février 2022 https://www.santementale.fr*

Dans un contexte actuel très difficile pour les sujets vulnérables psychologiquement et socialement, le dispositif RE-START (CHU de Montpellier) répond à la problématique cruciale de la prévention des conduites suicidaires. Il s’assure d’une prise en charge individualisée mais aussi globale du patient, de son arrivée aux urgences jusqu’à son suivi par d’autres structures de psychiatrie publique ou libérale. Bilan après six mois de lancement.

L’équipe mobile de prévention du suicide, RE-START, a démarré son activité au 15 septembre 2021. Entre cette date et le 21 Janvier 2022, 936 passages aux urgences de l’hôpital Lapeyronie pour idées suicidaires et tentative de suicide ont été identifiées. Parmi les patients qui ne sont pas orientés en hospitalisation, la grande majorité, soit 172 patients, ont pu bénéficier du dispositif. Grace à RE-START, sont assurés la mise en place du « Safety plan », le suivi de la crise suicidaire et le passage de relai. Ce projet est financé au CHU par La Fondation de France et l’ARS Occitanie.

La mission de RE-START

Le dispositif s’adresse aux patients se présentant aux urgences de l’hôpital Lapeyronie (CHU de Montpellier) pour idées suicidaires (IDS) et tentative de suicide (TS) pour lesquels un retour à domicile après consultation médicale est décidé. Systématiquement avant leur sortie, l’inclusion dans le dispositif ambulatoire Restart leur est proposé. Le patient bénéficie d’une évaluation clinique précise des facteurs de risque et de protection suicidaire, d’un traitement adapté et sur le plan social d’une évaluation de ses besoins sociaux par l’assistante sociale. Un plan de soins est co-construit avec l’infirmier qui prévoit un temps d’accompagnement personnalisé sur une période maximale de 3 mois avec en moyenne 5 consultations planifiées.

RE-START oriente et met en contact avec d’autres unités sociales, et sanitaires comme l’addictologie, l’algologie, etc. Le lien est établi avec de nombreuses structures d’aval : Centres Médicaux Psychologiques (CMP), Médecin Généraliste (MG) et Psychiatres libéraux, puisqu’ils sont informés de toute action de la part du dispositif. Ce dispositif permet d’impliquer de nombreux acteurs de la santé sur la problématique du suicide. Les différents services d’aide et d’urgences sont rappelés aux patients : VigilanS, 3114, SAMU.

RE-START aussi pour les mineurs

RE-START s’adresse aux patients à partir de 16 ans. A ce jour, 50,6% des patients ont moins de 26 ans et 17% entre 16 et 18 ans. Pour ces patients mineurs, les parents sont informés du dispositif et accompagnent le jeune à chaque consultation. Les entretiens sont menés sans la présence parentale sauf demande contradictoire du mineur. A la fin de la consultation, les parents sont conviés pour répondre à d’éventuelles questions et échanger sur le futur suivi en libéral. Dans la majorité des cas, les mineurs ne souhaitent pas que le contenu des entretiens soit transmis aux parents. En cas d’absence à une consultation de suivi et de non réponse à l’appel téléphonique, les parents du mineur sont joints directement. 40% des patients suivis par l’assistante sociale ont moins de 26 ans.

Du suivi au passage de relai

Lors des consultations de suivi, l’acceptation des soins est travaillée avec le patient, car les réticences qui caractérisent les patients suicidaires, sont parfois aggravées par les fausses représentations des soins psychiatriques.

L’équipe s’adapte aux situations cliniques et personnelles de chaque patient avec une offre de soins personnalisée. Le temps dédié à l’inclusion du patient dans le dispositif est crucial pour la compréhension de l’aide qui est proposée et pour faciliter sa volonté d’adhésion. L’objectif pour ces patients en crise suicidaire est de les amener à accepter le soutien, l’accompagnement lors des semaines suivantes repérées comme critique par la communauté scientifique jusqu’à ce que le passage de relais de soins soit effectif

Une évaluation multidimensionnelle est réalisée et le risque suicidaire évalué avec l’état clinique (thymie, anxiété, douleur psychique, sommeil, appétit, décompensation psychiatrique sous-jacente), l’observance et la tolérance du traitement médicamenteux, ainsi que les conditions de vie du patient (présence d’un entourage soutenant, reprise des activités professionnelles ou de loisirs…).

L’objectif de RE-START est de procurer les outils de prévention du suicide et de susciter l’adhésion aux soins avec une stratégie d’accompagnement intensif et de recontact, coordonnée par une équipe spécialisée. 

Grace à plusieurs questionnaires, les professionnels élaborent avec le patient un plan de sécurité, « SAFETY PLAN » afin que le patient identifie dans son environnement des éléments lui permettant de gérer la survenue d’idées suicidaires. Cette pratique est devenu un standard de soins dans plusieurs pays.

Des techniques de gestion de la crise et des outils sont expliqués : méthodes de relaxation, prévention des scarifications, gestion de leurs émotions, hygiène du sommeil, etc. La majorité des patients y est très sensible. Au fur et à mesure des consultations de suivi, la plupart des patients rapporte s’en être saisi au domicile.

La prise en charge sociale dans RE-START

Souvent dans la précarité, l’isolement social, les difficultés administratives et financières, situations largement aggravées par la pandémie, la rencontre avec une assistante sociale, qui repère les problématiques sans jugement et facilite les démarches, apporte une aide concrète et un nouveau souffle aux patients. Se sentant moins démunis et pouvant entrevoir une solution à leur situation, le soulagement ressenti vient participer à l’envie d’aller mieux et de s’inscrire dans un suivi. 

En début de prise en charge, les questions « Qu’aimez-vous faire ? Qu’est-ce qui vous fait du bien ? Quelles activités avez-vous l’habitude de faire ? » restent bien souvent sans réponse tant les personnes sont perdues et ne parviennent plus à définir ce qui pourrait leur apporter du plaisir. C’est une réelle marche en avant qui s’opère au sein même du dispositif et qui les amènera à la reprise d’une activité (sport, activité culturelle) et de re-construction des liens sociaux.

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