lundi 16 septembre 2024

ETUDE RECHERCHE CANADA L'intelligence artificielle au service de la prévention du suicide

Université Laval https://nouvelles.ulaval.ca*
10 septembre 2024

L'intelligence artificielle au service de la prévention du suicide

Une analyse approfondie de données en santé a permis de mieux comprendre les facteurs, individuels ou collectifs, qui influencent les risques de suicide 
Par : Raymond Poirier, collaboration spéciale
 

Des équipes de recherche de l'Université Laval, de l'Université Dalhousie et de l'Université de Montréal ont conçu des modèles liés à l'intelligence artificielle (IA) pour l'analyse et la prédiction des risques de suicide. Grâce à la collaboration avec l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), les chercheuses et chercheurs ont eu accès à une montagne de données.

«Ce premier grand projet constitue ainsi une belle démonstration de l'apport potentiel de l'IA à la prévention en santé mentale et en dépendances», indique Christian Gagné, professeur à la Faculté des sciences et de génie de l'Université Laval et directeur de l'Institut intelligence et données.

Fatemeh Gholi Zadeh Kharrat, stagiaire postdoctorale à l'Université Laval, a intégré des données écologiques, liées à la démographie ou à l'environnement, et des données anonymisées d'individus, répertoriées entre 2000 et 2019. Elle a analysé des statistiques liées à la population, à l'assurance médicament, à l'accessibilité des systèmes de santé et bien plus. 
Comprendre pour mieux prévenir

L'initiative a permis de confirmer des hypothèses déjà existantes sur le sujet, en plus de faire émerger de nouvelles connaissances. «Par exemple, on a vu que les gens qui avaient eu un suivi en santé mentale dans les 60 jours qui précèdent avaient un risque accru de suicide. Idem pour la consommation de drogues. C'est le genre de relation qu'on s'attendait à voir, mais l'analyse par apprentissage automatique nous a montré clairement leur incidence», indique Christian Gagné, qui a travaillé étroitement avec Alain Lesage, professeur à la Faculté de médecine de l'Université de Montréal.
« C'est donc une relation claire entre les niveaux d'investissement public en santé mentale et en dépendances et le risque de suicide qui a été établie. À l'inverse, si on augmente le financement, alors il y a un effet réel sur la réduction de ce risque. »

— Christian Gagné, d'après l'analyse des données

Les modèles utilisant l'IA ont aussi montré que les troubles de santé mentale et de dépendance sont des facteurs importants de la prédiction du suicide. Ils ont aussi mis de l'avant l'effet cumulatif de facteurs de risque, tant lié à l'individu qu'au contexte dans lequel il évolue. Ce qui se passe sur le plan individuel est aussi déterminé par des facteurs d'ordre écologique, comme le budget régional en santé mentale et en dépendances. 

Les analyses ont d'ailleurs montré que le taux de décès par suicide chez les hommes est plus élevé dans les régions où le budget par habitant pour les situations liées aux dépendances est plus bas. «C'est donc une relation claire entre les niveaux d'investissement public en santé mentale et en dépendances et le risque de suicide qui a été établie. À l'inverse, si on augmente le financement, alors il y a un effet réel sur la réduction de ce risque», souligne le professeur Gagné.
Quelque 600 variables étudiées

Ce type de relation a pu être mis de l'avant grâce à l'apport d'une quantité importante de variables. Situation sociodémographique, diagnostics et hospitalisations, antécédents de santé physique ou mentale, budget régional de santé mentale, c'est quelque 600 variables cliniques ou sociétales qui ont été considérées. «Nous avons pu voir à quel point les données portées par l'INSPQ étaient riches!», raconte Fatemeh Kharrat.

Deux modèles d'IA se sont rapidement imposés, définis en fonction du genre. «La différenciation des facteurs de risque féminins et masculins, c'est quelque chose qui est déjà bien compris par le milieu clinique. En développant des modèles par sexe, ça nous a permis de mettre de l'avant d'autres variables d'intérêt, voire d'identifier des variables qui seraient spécifiques selon le sexe», note Christian Gagné.

 Au fil des simulations, l'équipe a mesuré l'impact des différentes variables pour cibler les facteurs avec le plus d'influence. «Si on joue avec la défavorisation sociale du quartier où demeure la personne, ça a quel effet sur les facteurs de risque?, illustre Fatemeh Kharrat. On a pu comprendre les relations entre les variables et leur effet sur le niveau de risque.»

Pour l'interprétation des résultats, les chercheuses et chercheurs ont travaillé avec des spécialistes du domaine. «Ils pouvaient vérifier si la relation existe ou est probable d'un point de vue clinique», ajoute Christian Gagné.

Ce projet, soutenu par un financement du programme Nouvelles frontières en recherche des trois conseils de recherche du Canada, a fait l'objet de publications scientifiques dans les revues PLOS One et JMIR Public Health and Surveillance.

https://nouvelles.ulaval.ca/2024/09/10/lintelligence-artificielle-au-service-de-la-prevention-du-suicide-a:b7115809-4788-4511-b0ae-e8b8fe7060eb

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"Génération Z, la prévention du suicide à l’épreuve des jeunesses contemporaines"

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PARUTION Souffrance psychique : dans les coulisses d’une ligne d’écoute


Souffrance psychique : dans les coulisses d’une ligne d’écoute

À l’occasion de la journée mondiale de la prévention du suicide le 10 septembre, l’association Suicide Écoute publie l’ouvrage “Au fil de l’autre - dans les coulisses d’une ligne d’écoute”. Fruit d’un travail collectif mené par un groupe d’écoutants, ce livre témoigne de l’expérience de l’association, qui fête cette année ses 30 ans d’existence.

À travers les témoignages et les récits personnels des écoutants qui se mettent chaque jour au service d’appelants anonymes, l’ouvrage explore l’éthique et la spécificité d’une écoute singulière, centrée sur l’accueil et la disponibilité, sans objectif, dans une présence à l’autre jour et nuit. Les recueils de paroles d’appelants donnent également la voix à ceux qui ont le courage de composer ce numéro d’appel, de parler de leurs souffrances et de chercher de l’aide.

Serge Hefez, psychiatre et psychanalyste français, a rédigé la préface de l’ouvrage. Il témoigne : “Cet ouvrage s’aventure courageusement dans les profondeurs de la réalité bouleversante du suicide, avec l’intention de prévenir et de sensibiliser. Il n’a pas pour ambition de fournir des réponses simples à une question aussi complexe que le suicide. Au contraire, il aspire à ouvrir un dialogue sans jugement sur un sujet souvent évité.”

Fabrice Jollant, professeur de psychiatrie à l’Université Paris-Saclay, signe la postface : “Tout le monde n’a pas une oreille attentive ou une main aidante à disposition dans son entourage en cas de coup dur. On peut être véritablement isolé. On peut être aussi honteux ou coupable. On peut avoir le sentiment que son entourage ne comprendra pas, ou nous blâmera, ou nous culpabilisera, ou minimisera le problème, ou le dramatisera de manière pénible. On peut craindre de blesser ses proches ou de les mettre en difficulté. On peut aussi avoir été exposé à de précédentes expériences négatives d’aides inappropriées ou de demandes d’aide non entendues. Savoir qu’il y a toujours quelqu’un pour écouter celui ou celle qui est dans le besoin, quelle formidable idée !”

Environ 10 000 décès par suicide et 200 000 tentatives de suicide sont enregistrés chaque année en France. Cela équivaut à une personne qui se suicide toutes les heures et à 550 tentatives de suicide par jour, en moyenne. Si les taux de suicide augmentent avec l’âge, les tentatives sont plus fréquentes chez les jeunes et les adolescents : environ un tiers d’entre elles concernent des personnes de moins de 25 ans. Le suicide est ainsi la principale cause de mortalité (hors maladies) chez les jeunes adultes en France. Les tentatives de suicide sont deux à trois fois plus fréquentes chez les femmes que chez les hommes. Mais les trois quarts des décès par suicide concernent des hommes, qui sont moins souvent demandeurs d’aide.

Suicide Écoute est une ligne d’écoute, non surtaxée, accessible au 01 45 39 40 00 24h sur 24 et 7j sur 7. L’écoute, anonyme, s’adresse aux personnes qui ont des idées suicidaires, aux proches démunis devant la situation ou endeuillés, ainsi qu’à toute personne ayant besoin d’une écoute attentive pour soulager une forte angoisse, rompre une solitude et apaiser un mal-être profond.

 

Contact presse :  Pascale Dupas pascale.dupas@wanadoo.fr