Publié le 10/10/2018 https://www.jim.fr*
Le suicide est heureusement un événement rare. Mais il est difficile à prédire, y compris en présence de symptômes psychiatriques. Si 90 % des suicides se produisent dans le cadre d’une dépression, cela ne signifie pas pour autant que tous les patients dépressifs se suicident. Il s’agit d’un facteur de risque. Sans plus (?), sauf en présence de douleur psychique, de haine de soi, d’angoisse et de perte d’espoir, tous phénomènes auxquels le psychiatre doit être attentif.
Peut-on pour autant prévenir le suicide ? Plusieurs équipes ont développé des outils à cet effet.
Ainsi, une équipe britannique a proposé un modèle basé sur l’empathie en 5 étapes : établissement de la détresse individuelle par le biais d’une balance détresse/espoir permettant de détecter les zones d’action et la nature dynamique du risque, construction d’une relation empathique sans cacher une certaine curiosité permettant de mieux appréhender le souhait de voir disparaître la douleur par le suicide, coproduction d’une réponse au risque par le biais de scénarios réalistes couchés sur papier, documentation des expériences décrites et établissement de nouvelles directions de réflexion (1).
AWARE (Anxiety, Weighting, Agenda, Resource, Experience) est une autre technique, qui, après avoir analysé les besoins du patient explore le risque (ce qui augmente l’anxiété) et ce qui empêche l’acte (ou réduit l’anxiété). Ces faits sont analysés en tenant compte des facteurs individuels tels que la présence d’une affection préexistante (abus de substance, trouble de la personnalité), évolution de la maladie (aiguë, aiguë se chronicisant, chronique) et la présence ou l’absence de facteurs sociaux concomitants. Il analyse aussi l’agenda de chaque patient (ce qu’il attend d’événements proches à venir : mariages, fêtes, naissances, …) et explore l’intérêt pour une hospitalisation préventive’ (2).
Dans la mesure où la douleur psychologique (psychache) se construit progressivement, PROactive deTECTion (PROTECT) a été développée comme une thérapie cognitivo-comportementale en 5 étapes qui se focalise sur les modèles de pensée, les sensations et les comportements provoqués par divers ‘triggers’. Cette thérapie permet au patent de moduler sa réaction et le plus souvent de modifier la trajectoire qu’il aurait empruntée pour y répondre. Les interventions en pleine conscience permettent de donner du temps et de l’espace à cet effet tandis qu’une thérapie comportementale dialectique termine le travail par la formulation de ces expériences pour réduire la douleur psychologique (3).
Jusque récemment, les tentatives de suicide étaient une
infraction punissable en Inde, ce qui a conduit à une large
sous-estimation du nombre de suicides et de tentatives dans ce pays
où certains états du Sud (Kerala, Tamil Nadu, Andhra Pradesh et
Karnataka) avouent un taux élevé aux alentours de 25/100 000,
qu’ils attribuent à la crise agricole indienne.
C’est précisément sur les fermiers que les autorités de santé
de l’état de Kerala se sont focalisées pour effectuer une
prévention en identifiant aussi tôt que possible la présence de
maladies psychiatriques et en luttant contre les mythes (notamment
religieux) tournant autour du suicide. Les médias ont été
pleinement intégrés dans ce processus de manière à toucher la plus
large population possible (4).
Références
1. Hafizi S : Empathic relational suicide risk assessment.2. Lombardo C : AWARE – Dynamics of decision making in suicidal patients.
3. Kar Ray M : Architecture of a safety panning conversation.
4. Kallivayalil R : Suicide Risk management – An Indian perspective.
18th World congress of psychiatry (Mexico) : 27-30 septembre 2018.
https://www.jim.fr/e-docs/prevenir_le_suicide_une_lutte_au_niveau_mondial_174109/document_actu_con.phtml