Face à l’échec, les patrons de l’Oise ont désormais quelqu’un à qui parler
Oise|Patrick Caffin avec Juliette Duclos| 05 avril 2019.
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« Quand j’ai monté les marches du tribunal, je me suis effondré », raconte un ancien patron d’agence immobilière (Illustration). LP/Julien Barbare
Lors d’une liquidation judiciaire, il n’est pas rare que des entrepreneurs entrent en dépression, que des symptômes suicidaires apparaissent. Une association vient de se créer à Beauvais, pour leur venir en aide.
« Du jour au lendemain, tout s’est dégradé, j’étais au RSA, tout seul. J’ai dû vendre ma maison pour rembourser les prêts et je me suis retrouvé interdit bancaire », se remémore Stéphane, 49 ans, dont l’agence immobilière a été placée en liquidation judiciaire en 2015.
« Quand j’ai monté les marches du tribunal, je me suis effondré. » Ce dirigeant se rapproche alors d’une association, l’Aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aiguë (Apesa), dont l’antenne oisienne vient d’être installée à Beauvais.
« Lors d’une liquidation judiciaire, on se préoccupe souvent du devenir des salariés licenciés, rarement de celui des dirigeants de l’entreprise, regrette Marie-Noëlle Blain, présidente du tribunal de commerce de Beauvais, à l’initiative de cette création. Le chef d’entreprise est considéré comme un winner, alors quand il échoue, la chute est terrible à vivre. Elle est souvent synonyme de dépression et de divorce. »
« Il manquait la partie psychologique »
Ce fut le cas pour Stéphane, séparé de sa conjointe. « Il y a tout un engrenage qui se met en place, explique-t-il. Plus vous avancez, plus vous vous noyez et vous n’arrivez plus à voir la lumière au bout du tunnel. J’étais capable de faire une connerie. »
C’est ainsi qu’une liquidation judiciaire peut dépasser le strict cadre de l’entreprise. « Le recours au suicide dans ces cas-là est une réalité, assure Marie-Noëlle Blain. Au tribunal de commerce, nous sommes à l’écoute et nous avons des outils pour aider à sauver les sociétés mais il manquait la partie psychologique pour les chefs d’entreprise. »
Désormais, le greffier du tribunal, le représentant syndical ou encore le commissaire au compte pourra devenir une « sentinelle », c’est-à-dire qu’ils seront formés pour détecter « les signes de souffrance aiguë ou de crise suicidaire ». Après une alerte, le chef d’entreprise pourra alors bénéficier de cinq séances avec un psychologue gratuitement.
« Mettre des mots sur mon mal-être »
« Aujourd’hui, ma situation professionnelle n’est pas revenue à 100 %, mais grâce à ce suivi, j’ai réussi à prendre du recul et à mettre des mots sur mon mal-être », confie Stéphane, devenu expert immobilier.
L’alerte peut être donnée à n’importe quel moment de la procédure. À peine créée, Apesa 60 a déjà reçu cinq fiches alertes. À noter que le tribunal de commerce de Compiègne a également adhéré à Apesa 60. En 2018, 80 liquidations judiciaires ont été enregistrées.
Renseignements : 03.44.06.74.00.
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