lundi 16 décembre 2013

LOIRE : dispositif de prévention du suicide dans le monde agricole

Suicide des agriculteurs : 144 ligériens suivis depuis 2008
- Dimanche 15 décembre 2013 sur http://lessor.fr/2013/12/15/suicide-des-agriculteurs-144-ligeriens-suivis-depuis-2008/



Le docteur Laurent est parmi ceux qui a initié le dispositif de prévention du suicide dans le monde agricole (© DR)

  • Le docteur Laurent est parmi ceux qui a initié le dispositif de prévention du suicide dans le monde agricole (© DR)

La récente étude de l’Institut de veille sanitaire sur le suicide des agriculteurs en a répertorié en France 485 pour la période 2007-2009, soulignant l’ampleur du phénomène sur les éleveurs bovins et laitiers. Un constat sur lequel la Mutualité sociale agricole travaille depuis quelques années avec comme précurseur sa branche ligérienne lançant un dispositif pluridisciplinaire de prévention des actes suicidaires dont s’est inspirée le dernier plan national. Rencontre avec l’un des acteurs ligériens de l’initiative, le docteur Philippe Laurent.

Comment ce dispositif ligérien est-il née ? C’est une action transversale des services santé et sécurité au travail et de l’action sanitaire et sociale. Le point de départ est en 2007. A l’époque on parlait du suicide au travail, les assistantes sociales qui ont l’habitude d’accompagner les agriculteurs en difficulté, avaient des suspicions de risques par rapport à ça. On a mis en place un dispositif pluridisciplinaire de prévention tertiaire. On intervient quand les gens sont vraiment en situation de détresse. La prévention du suicide doit se faire en amont en essayant de travailler sur les causes. Cela fait maintenant partie des actions du plan national de prévention du suicide dans l’agriculture. Le ministre de l’époque Bruno Le Maire a décidé de mettre en place ce plan avec trois axes : avoir une meilleure connaissance du risque suicide sur les exploitants agricoles ; travailler en partenariat avec les plateformes françaises nationales spécialisées, comme SOS Amitié ou info suicide ; mettre en place dans toutes les caisses de MSA ce dispositif pluridisciplinaire. Progressivement, les 35 caisses de la MSA mettent en place ce dispositif, pour l’instant il y en a 22, les huit départements de Rhône-Alpes sont déjà couverts.
Comment fonctionne cette cellule ?
Cette cellule pluridisciplinaire comporte un médecin du travail, une assistante sociale et un psychologue. L’objectif est d’évaluer l’urgence. D’abord la détection de situation à risque : un agriculteur même s’il est tout seul sur son exploitation, beaucoup de gens interagissent avec lui (l’inséminateur, le contrôleur laitier, l’administration pour le contrôle des aides Pac…). L’idée a été de former ces gens là, de les sensibiliser à la crise suicidaire. On a aussi formé les personnels de la MSA en contact avec les agriculteurs (médecins, assistantes sociales, personnel d’accueil…). On a créé un numéro dédié. Dans un deuxième temps, on analyse la situation des personnes en détresse avec l’équipe pluridisciplinaire voyant comment on peut les accompagner, chacun mobilisant ses réseaux respectifs. La moyenne de suivi est de 6 mois. Cette cellule se réunit une fois par mois.
Toutes causes de mortalité confondues « une mortalité moindre » Combien de personnes ont-elles été suivies dans la Loire depuis 2008 ? 144 ; 347 en Rhône-Alpes dont 84 % sont exploitants agricoles. Il y en a en fait beaucoup plus mais ils ont du mal ou de la honte à demander de l’aide. Cela ne veut pas dire que nous en avons plus que les autres régions, simplement nous avons commencé plus tôt. Je voudrais souligner que globalement, toutes causes de mortalité confondues, on a moins de mortalité pour les exploitants agricoles que pour le reste de la population active française. Il y a un lien entre la détresse et les difficultés professionnelles rencontrées dans ce type de métier d’abord par rapport à la pénibilité du travail et de la difficulté économique. Les facteurs de stress au travail sont au maximum chez les agriculteurs. Outre les différents conflits (familiaux, entre associés…), la rigueur administrative est importante. Dans les facteurs principaux, on trouve la maladie. La majorité des risques suicidaires est en lien avec une dépression.

Propos recueillis par Florence Barnola