mardi 23 septembre 2025

À Menton (06) , des "sentinelles" formées pour prévenir les crises suicidaires

A Menton, des "sentinelles" formées pour prévenir les crises suicidaires
Les Conseils locaux de santé mentale du territoire ont consacré une journée entière à la prévention du suicide, dans le cadre de la mobilisation nationale. Une quarantaine de professionnels ont déjà été formées.
LR
La rédaction • nice-matin
CRÉÉ LE 20 septembre 2025 • 11:00
MIS À JOUR LE 19 septembre 2025 • 23:55

Lancée en 2019, la mobilisation autour de la prévention et de la prise en charge de la crise suicidaire engagée par les deux Conseils locaux de santé mentale (CLSM) du territoire de la Riviera française (Menton et Roquebrune-Cap-Martin) prend de l’ampleur chaque année, grâce à l’opération nationale "Septembre Jaune". Et cette nouvelle dynamique s’est intensifiée dans le contexte de l’après-Covid, marqué par une hausse des vulnérabilités psychiques.

Le CLSM de Menton a développé ses actions partenariales (collectivités, Agence Régionale de Santé, Centre hospitalier psychiatrique du secteur Sainte-Marie et Centre régional de prévention du suicide) pour sensibiliser tous les acteurs sociaux et éducatifs du terrain et favoriser la mise en place d’outils et de formations visant à renforcer le repérage, l’accompagnement et le soutien des personnes en détresse. Il affirme ainsi son rôle central dans la lutte contre le suicide et la promotion de la santé mentale, qui a été reconnue comme "Grande cause nationale" cette année.

En France, 8.868 suicides ont été recensés en 2023 et 200.000 tentatives de suicide ont lieu chaque année.

"Les gens sont très en demande d’aide sur notre territoire, car l’inquiétude est montante depuis le Covid" précise Céline Nifle, coordinatrice du CLMS de Menton. "Le suicide touche tous les âges, avec une incidence élevée chez les femmes victimes de violences conjugales. Le plus de passages à l’acte concernent les plus de 50 ans, chez les jeunes, la situation est préoccupante, souvent en rapport avec les réseaux sociaux...".

Mais le territoire mentonnais est en manque d’offres de soins dans ce domaine (en particulier les vallées), et souffre d’une pénurie de médecins libéraux. D’où la volonté et le besoin d’aller chercher partout des partenaires qui puissent inclure dans leur activité ce volet de la santé mentale: des établissements scolaires, des associations sportives, sociales, tournées vers la jeunesse, la culture... et même des usagers!

Première concrétisation: une quarantaine de professionnels et acteurs de la vie sociale locale – mairies, CCAS de Menton et R.C.M., I.M.E Bariquand-Alphand, Centre de santé médico-psychologique de Menton, CPTS, professionnels du maintien à domicile, assistantes sociales, aides-soignants, personnels éducatifs, etc.) –, ont pu bénéficier d’une formation spécialisée.

Désormais constitués en réseaux, ils déploient leurs compétences sur le territoire en qualité de "sentinelles" pour les uns (acteurs de prévention et de repérage des situations à risques) et d’"évaluateurs" pour les autres (acteurs du 1er niveau de prise en charge et d’orientation vers les recours spécialisés).

Jeudi matin, au Palais de l’Europe, ces "lanceurs d’alerte", déjà formés au dépistage et à l’évaluation de la crise suicidaire, se sont regroupés pour échanger leurs premières expériences sur le terrain, accompagnés par leurs formateurs, des psychologues cliniciens, qui ont rappelé les outils d’identification disponibles pour leurs missions sur le territoire mentonnais.
Répétition générale

Une sorte de répétition générale qui permet de porter des "regards croisés, de se parler et d’échanger pour mieux se connaître entre professionnels", précise Céline Nifle. L’une des participantes avoue qu’être confrontée à une personne au bord de la crise suicidaire est très compliqué. "La première fois, je ne savais pas quoi faire... Je venais tout juste de faire la formation, mais j’ai préféré appeler le 15. Je leur ai exposé la situation avec les bons mots", témoigne-t-elle. "D’où l’intérêt d’un langage commun", lui répond la formatrice. "En transmettant aux médecins les éléments nécessaires à la prise en charge de la personne et en qualifiant précisément la situation, vous avez augmenté ses chances de survie" ajoute-t-elle, précisant que le Centre 15 va être renforcé en novembre par une équipe de régulation psychiatrique.

Des propos forts qui ont pris toute leur résonance dans ce groupe d’hommes et de femmes très à l’écoute des formateurs, et on l’imagine, des personnes fragiles qu’ils sont amenés à rencontrer dans leur vie professionnelle. De la souffrance au passage à l’acte, ils sont ainsi le maillon précieux d’une opportunité d’interventions, où ils peuvent encore interagir sur la désescalade, "car jusqu’au dernier moment, l’être humain est en instinct de survie...". Après avoir revu les notions essentielles (la posture relationnelle, comme l’empathie, l’écoute active, la disponibilité, sans jugement, les risques et la dangerosité du potentiel suicidaire ou encore ses propres limites comme le dépassement de ses angoisses, la fusion émotionnelle, etc.), tous ont travaillé en atelier avec des mises en situation.

L’après-midi, acte II de la journée sur le campus de Sciences Po, où les différents dispositifs de prévention et d’accompagnement de la crise suicidaire ont été présentés aux nombreux participants. Notamment la ligne nationale directe dédiée à la prévention du suicide, le 3114*, mais aussi le dispositif d’alerte des personnes à risque de récidive (VigilanS) et celui dédié aux adolescents (ASMA).

Le CLSM de Menton poursuivra ses formations aussi longtemps que nécessaire. Des actions au service des populations de la Riviera française sont à venir.

CLSM de Menton - Tél. 04.92.41.76.33. *3114: plateforme téléphonique d’aide et de soutien aux professionnels et au grand public pour la prévention du suicide. 

https://www.nicematin.com/societe/vie-locale/a-menton-des-sentinelles-formees-pour-prevenir-les-crises-suicidaires-1002677