jeudi 5 mars 2020

ETUDE RECHERCHE Récidive suicidaire à l'adolescence: facteurs de risque et de protection 12 mois après l'hospitalisation.

Récidive suicidaire : comment protéger les adolescents français ?
Mirkovic B & al.
Eur Child Adolesc Psychiatry
12 févr. 2020
Par Caroline Guignot

Résumé d’articles
Messages principaux
  • Le risque de récidive suicidaire concerne près d’un tiers des jeunes adolescents suivis durant l’année suivant une première tentative, selon une étude prospective française. Si la sévérité de la dépression et le fait d’être pris en charge pour des troubles psychiatriques en constituent des facteurs favorisants, le fait de s’adapter (stratégies de coping) en travaillant fort, en faisant de l’activité physique ou des activités relaxantes semblent des éléments protecteurs. Il convient de les évaluer afin de mieux prévenir le risque de récidive en pratique clinique.
Le risque de récidive est très élevé après une première tentative de suicide, notamment chez les jeunes. Différentes études se sont penchées sur les facteurs favorisant cette récidive, mais peu ont été menés prospectivement pour évaluer les paramètres pouvant réduire ce risque. De tels facteurs sont déterminants lorsqu’ils amoindrissent la vulnérabilité des jeunes. Afin de mieux les connaître, une équipe française a conduit un travail prospectif à 1 an de 320 jeunes de 13 à 17 ans ayant été hospitalisés dans cinq services pédiatriques (Meaux, Crépy, Creil, Rouen, Amiens) pour une tentative de suicide.
Structures, protocoles, suivi
Parmi les 320 jeunes initialement inclus dans l’étude (âge moyen 14,73 ans), le suivi était disponible pour 135 sujets à 6 mois et 91 à 12 mois, parmi lesquels 78 filles et 12 garçons. Outre les perdus de vue, 29 sujets ont refusé de répondre aux questionnaires de suivi. Il s’agissait notamment de participants présentant un plus fort score sur l'Échelle de Désespoir de Beck que les autres.
À 12 mois, 30% avaient réalisé une nouvelle tentative de suicide. Ils avaient eu à 6 mois un plus fort score sur l'Échelle de Désespoir de Beck que les autres. Ce paramètre n’était plus significatif à 12 mois, mais ce résultat doit être pris avec précaution étant donné le nombre de perdus de vue.
Parmi les stratégies d’adaptation évoquées par les adolescents face aux problèmes et aux inquiétudes ( Adolescent Coping Scale ), le fait de « travailler fort pour réussir », de « faire de l’activité physique » et de « chercher des activités de détente » apparaissaient comme des facteurs protecteurs. Par ailleurs, parmi les traits de personnalité (TCI-56), la dimension de coopération décrivant le degré de maturité et de prise de conscience sociale de l'individu apparaissait aussi comme un facteur protecteur.
Plus la dépression était sévère et moins les stratégies d’adaptation ( coping ) de l’adolescent avaient un effet protecteur vis-à-vis du risque de récidive. Par ailleurs, le fait d’être pris en charge sur le plan psychiatrique (par médicament ou psychothérapie) constituait également un facteur de risque, sans doute parce que cela constitue un marqueur indirect de sévérité de l’atteinte de la santé mentale.
Enfin, l’étude a déterminé que le fait d’avoir déjà expérimenté des évènements stressants était un élément protecteur, mais ce constat doit être modulé par trois points : le fait que le questionnaire utilisé ( Newcombe’s Life Event questionnaire ) ne comporte pas d’évocation des violences physiques ou sexuelles, le fait qu’il n’y ait pas de distinction entre les évènements anciens et plus récents et le fait qu’un évènement stressant n’ait pas le même impact selon que l’adolescent ait ou non déjà vécu une situation négative.
Références
Disclaimer

https://www.univadis.fr/viewarticle/recidive-suicidaire-comment-proteger-les-adolescents-francais-714077?


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Eur Child Adolesc Psychiatry. 2020 Feb 12. doi: 10.1007/s00787-020-01491-x. [Epub ahead of print] Repeating a suicide attempt during adolescence: risk and protective factors 12 months after hospitalization.Mirkovic B1,2, Cohen D3,4, Garny de la Rivière S5, Pellerin H3, Guilé JM5,6, Consoli A3, Gerardin P3,7.
1
Department of Child and Adolescent Psychiatry, CHU Charles-Nicolle-CH Le Rouvray, Université Rouen Normandie, 1 Rue de Germont, 76000, Rouen, France. docteur.mirkovic@gmail.com. 
2 Unité de Recherche EA4047 (HANDIReSP), University of Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, Versailles, France. docteur.mirkovic@gmail.com. 
3 Department of Child and Adolescent Psychiatry, CHU Charles-Nicolle-CH Le Rouvray, Université Rouen Normandie, 1 Rue de Germont, 76000, Rouen, France. 
4 CNRS, UMR 7222, Institut des Systèmes Intelligents et Robotiques, University Pierre and Marie Curie, Paris, France.
5
Department of Child and Adolescent Psychiatry, University Hospital of Amiens, University Picardie Jules Verne, Amiens, France. 
6 Department of Psychiatry, McGill University, Montreal, Canada. 
7 Laboratoire CRFDP, University of Normandie, Rouen, France.
Abstract
Suicide attempts (SAs) are a public health concern in adolescence. A brief hospitalization is recommended, but access to inpatient wards is often not available. In addition, numerous risk factors for SA recurrence have been identified, but few studies have explored protective factors. Here, we aimed to assess the role of both risk and protective factors on SA relapse in a context of free access to inpatient services. We performed a prospective follow-up study of 320 adolescents who were hospitalized for an SA between January 2011 and December 2014 in France. Assessments at baseline included socio-demographics, clinical characteristics, temperament, reasons for living, spirituality, and coping. Patients were re-evaluated at 6 months and 12 months for depression severity and SA relapse. A total of 135 and 91 patients (78 girls, 12 boys, aged 13-17) were followed up at 6 and 12 months, respectively. At the 12-month follow-up, 28 (30%) subjects had repeated an SA. Adolescents who either had a history of SA or were receiving psychotropic treatment at baseline were at higher risk of recurrence. Several variables had a protective effect: (1) productive coping skills, namely, working hard and achieving, physical recreation, and seeking relaxing diversions; (2) a particular temperament trait, namely, cooperativeness; and (3) having experienced more life events. We also found a significant interaction: the higher the depression score during follow-up, the lower the protective effect of productive coping. Our findings confirm that a history of SA and seeking psychiatric care with medication are risk factors for SA relapse. However, productive coping strategies and cooperativeness are protective factors, and the improvement of such strategies as well as treatment of persisting depression should be a goal of psychotherapy treatment offered to suicidal adolescents.
KEYWORDS:

Adolescent; Cohort study; Coping; Protective factor; Suicidal behaviour; Suicide attempt

PMID:
32052175 DOI: 10.1007/s00787-020-01491-x