Mutualité sociale agricole : des sentinelles en première ligne
Publié par Claire Marion le 16 février 2022
Dans le cadre de la prévention du risque suicidaire, des bénévoles mais aussi professionnels (travailleurs sociaux, collaborateurs chargés des relations avec les assurés, du recouvrement, du contrôle…) sont formés à détecter les « signaux faibles ». (Photo d’illustration Franck Beloncle)
Le mal-être agricole est une réalité. La prévention du risque suicidaire, une évidence pour la MSA des Portes de Bretagne qui forme notamment des « sentinelles ». Ces hommes et femmes apprennent à détecter les « signaux faibles », pour que soit mis en place un accompagnement et éviter le pire.
1 Prévenir et accompagner
Dans une région où l’agriculture représente 4 % des emplois (deux fois plus qu’au niveau national), « les acteurs du monde agricole breton ont développé de longue date des actions de prévention et d’accompagnement des difficultés », explique Alain Foret, directeur des territoires et de l’innovation à la MSA des Portes de Bretagne.
Économie, santé physique ou psychique, problèmes familiaux, épuisement professionnel… « Notre boulot, c’est d’identifier les raisons du mal-être et d’essayer d’apporter des solutions, aussi bien aux exploitants qu’aux salariés agricoles ».
Et ça commence dès la formation initiale. « Réfléchir très tôt à l’organisation de son activité, ça contribue à prévenir les risques », explique encore Alain Foret. Prévenir, c’est aussi « financer et proposer des alternatives de répit. Ça permet de se reposer, de réfléchir et de repartir sur une bonne dynamique ».
En lien avec les chambres d’agriculture, la MSA organise aussi des sessions collectives pour « permettre aux professionnels de se poser, de s’interroger sur leur évolution et leur éventuelle reconversion ». Avec ses partenaires, l’organisme finance également des dispositifs pour accompagner le retour à l’emploi après un long arrêt maladie.
2 Des sentinelles spécialement formées
« Le mal-être agricole est une réalité ». La prévention du risque suicidaire, une évidence. Dans l’éventail des dispositifs de la MSA, il y a la plate-forme Agri’écoute. Une écoute téléphonique anonyme et gratuite, coordonnée avec la ligne 31 14, le numéro national de prévention du suicide déployé depuis le mois d’octobre. « Si l’appelant s’identifie comme venant du monde agricole, il est dirigé vers la MSA », précise Alain Foret.
Et puis, il y a le réseau des « sentinelles ». Ces bénévoles et ces professionnels, en contact avec le monde agricole, font remonter à la MSA les situations à risque qu’ils identifient. Il y en a 150 en Bretagne. Ce sont des élus de l’organisme, en activité ou à la retraite, mais aussi des professionnels : « Travailleurs sociaux, collaborateurs chargés des relations avec les assurés, du recouvrement, du contrôle… Ils sont formés à détecter les « signaux faibles »», explique Alain Foret. Ces sentinelles bénéficient aussi d’un accompagnement et d’un suivi avec un psychologue. « Leur engagement n’est pas anodin. Ils peuvent être confrontés à une grande souffrance, des situations dramatiques ».
Dès que la situation est signalée, elle est analysée. « S’il s’agit d’une urgence, on active le 15, le Samu ou les pompiers… Dans les autres cas, les travailleurs sociaux prennent le relais ».
3 La parole se libère
« Deux tiers des signalements aboutissent à un accompagnement », souligne Alain Foret. Si le mal-être agricole est une réalité, « ces difficultés ne concernent, finalement, qu’un nombre limité de professionnels ». Et surtout, un nombre qui n’évolue pas, selon lui : « Depuis 2016, chaque année, on compte entre 80 et 120 situations identifiées comme à risque dans les départements de l’Ille-et-Vilaine et du Morbihan ». Ce qui a changé, par contre, c’est que « la parole se libère progressivement. Demander de l’aide est de moins en moins tabou ».
Contact
MSA des Portes de Bretagne, 3 rue des Trois-Frères-Le-Forestier, à Pontivy. Tél. 02 97 46 52 73, site internet : portesdebretagne.msa.fr
Lorraine Fortin, spécialisée dans l’accompagnement individuel des actifs fragilisés : tél. 02 97 46 93 47 ou 06 76 32 91 22.
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