Quimper : une bande dessinée qui casse les clichés sur la psychiatrie
Titiane Vorano a passé deux mois dans une
clinique psychiatrique. Elle livre son témoignage dans une bande
dessinée illustrée par Clara Vialletelle : Je ne suis pas folle.
Les personnes qui séjournent dans un hôpital ou une clinique psychiatrique, en parlent peu voire le cachent. Souvent par honte. Titiane Vorano a, au contraire, volontiers raconté son expérience à son entourage familial, ses amis…
Elle en a même fait une bande dessinée : Je ne suis pas folle. Sortie en décembre 2023 aux éditions Édifice, cette BD a été mise en images par Clara Vialletelle qui vit à Quimper (Finistère).
« Je voulais partager mon expérience car elle était très positive. Je suis bien consciente que cela se passe mal voire très mal pour certains patients. C’est donc une histoire très subjective, très personnelle que je livre »
Idées reçues
Aidée à l’écriture par Marie-Pierre Bard, elle s’est attachée à déconstruire pas mal de clichés sur la santé mentale et l’hospitalisation. Elle les passe tous un à un au début de la BD : « Comme beaucoup de gens j’avais plein d’idées reçues. Les anxiolytiques, c’est mal, les antidépresseurs, c’est mal. La clef se trouve dans ma tête. La sensibilité est une faiblesse. »
Elle
a aussi dû faire face à des remarques et attitudes souvent maladroites
de son entourage : entre apitoiement, silences gênés, reproches…
L’entrée dans la clinique psychiatrique de Renoncules s’est donc faite à
reculons, avec beaucoup d’angoisse et d’a priori.
Les planches décrivent ensuite toutes les étapes de l’hospitalisation : le premier rendez-vous avec le psychiatre qui livre le diagnostic du trouble anxieux généralisé avec agoraphobie et phobie sociale, le protocole médical, les effets secondaires, les ateliers suivis (chant, pensées négatives…), les moments de découragement, la sortie…
Le récit n’est pas sombre pour autant. Au contraire, l’humour
s’infiltre dans chaque page. « Titiane a beaucoup de second degré,
d’ironie. Cela offre des respirations dans la BD », apprécie Clara
Vialletelle. On sourit donc lorsqu’elle évoque les effets secondaires :
odeurs corporelles, libido évaporée et flatulences (fort dérangeantes
dans l’ascenseur !)…
Les échanges sont parfois aussi très loufoques avec les autres patients. Tout comme leur expédition dans l’hôpital voisin pour manger des sucreries. On rigole franchement quand on voit que tous les patients attendent avec impatience le rendez-vous avec le beau psychiatre si gentil, dessiné avec un nuage de fleurs et de tourterelles.
Représenter la maladie mentale
L’une des principales difficultés de cette BD était de représenter la maladie mentale, invisible par nature. « J’ai mis du temps à trouver une solution. Finalement, c’est un tigre qui la représente. Au début, il est là, très imposant. Puis, il se laisse un peu apprivoiser, diminue de taille », décrit Clara Vialletelle. Pour autant, il ne disparaît pas totalement.
Au bout de deux mois, Titiane Vorano sort de la clinique des Renoncules, retrouve son mari et ses trois filles. Ce n’est pas fini pour autant. « J’ai ensuite suivi 18 mois d’hospitalisation de jour », poursuit la quadragénaire qui a reçu de la part des soignants des retours positifs de son album. « Cette BD ne laisse pas indifférent. Cela ouvre les portes à la réflexion. C’était le but. »