Lætitia a fait des tatouages sur ses bras : des dessins sur les cicatrices du passé, sur son corps blessé, quand elle s’automutilait. Elle a aussi dessiné ce qui lui est arrivé et comment elle l’a vécu : une bande dessinée, Comment survivre en hôpital psychiatrique (éditions Kiwi).
Lætitia Bocquet avait 17 ans quand ses parents l’ont conduite d’urgence à l’hôpital psychiatrique Sainte-Anne, à Paris, après une tentative de suicide. Dans sa BD, parue le 12 juillet, elle raconte d’un trait vif, sensible, l’enfermement d’une adolescente et de ses « compagnons de misère », Stanislas, Marta, Léon, Juliette, Bérénice, Tom, Jules ou Camille…
Il lui a fallu du temps et tout un travail thérapeutique pour écrire cette période noire. Une dizaine d’années, des soins, une thérapie, un diagnostic sur sa dépression, son extrême sensibilité, ses crises, sa maladie – elle souffre d’un trouble de la personnalité limite. Lætitia Bocquet publie sa BD après « tout un travail cathartique ».
« Je ne voulais pas être internée, mais cela m’a sauvé la vie. Si j’étais rentrée chez moi, je me serais suicidée. À l’époque, j’en voulais à mes parents de me forcer à vivre. Aujourd’hui, je leur en suis reconnaissante. Ils sont à mon écoute et me soutiennent énormément ».
« Aller en thérapie reste tabou »
Avec son témoignage, Lætitia veut sensibiliser sur la question de la santé mentale des jeunes : « Plus on s’exprime, moins on porte cette souffrance. Plus on en parle, plus on peut obtenir de l’aide. Le fait que la population générale soit aujourd’hui touchée, on en parle davantage, mais il y a encore du chemin à faire. Aller en thérapie reste tabou. Mais en parler à des spécialistes, à des amis, à sa famille, à des inconnus, c’est important et nécessaire. J’ai dû me battre pour expliquer ce que je vivais, en quoi cela m’affectait ».
« Pendant longtemps, j’ai cru que j’étais faible parce que je n’arrivais pas à supporter la vie, mais j’ai compris que j’avais beaucoup de force en moi, parce que je réussissais à survivre. La dépression est un symptôme récurrent de ma maladie. Maintenant on ne peut plus me dire : “Reprends-toi !” ».
Témoigner, parler de la santé mentale des jeunes, c’est « ouvrir une conversation entre les parents et les enfants avant qu’il ne soit trop tard ». Comment mieux accompagner les familles et les jeunes ? « Il faut faire de la prévention contre le suicide en en parlant plus facilement. Si on en parlait tous plus, on pourrait aider plus de gens ».