source : COMEDE , Comité pour la santé des exilés*
Cf. chapitre « Torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants »
in Guide Migrants/étrangers en situation précaire - Soins et accompagnement éd. 2015 p.368-388
in Guide Migrants/étrangers en situation précaire - Soins et accompagnement éd. 2015 p.368-388
Etat des lieux
En 2013, 80% des demandeurs d’asile soignés au Comede déclaraient
des antécédents de violence (définition OMS), 21% des antécédents de
torture (définition ONU), et 17% des violences liées au genre et à
l’orientation sexuelle. Parmi les patients suivis en psychothérapie, ces
taux s’élèvent respectivement à 96%, 43% et 39%. Pour l’ensemble des
patients suivis en médecine - incluant les non-demandeurs d’asile -, les
antécédents de torture sont plus fréquents parmi les hommes, et les
antécédents de violence liée au genre plus fréquents chez les femmes. Il
existe également une forte corrélation entre les violences subies et le
devenir de la demande d’asile. Les antécédents de violence sont plus
fréquents parmi les personnes reconnues réfugiées que parmi celles qui
ont été déboutées de leur demande de protection. Il en est de même pour
les antécédents de torture et de violences liées au genre et à
l’orientation sexuelle. Une telle différence, ainsi que la fréquence
également très importante de tels antécédents parmi les déboutés,
interroge les pratiques de reconnaissance du statut de réfugié dans un
contexte de crise de la protection.
La présence des syndromes psychotraumatiques graves est corrélée aux antécédents de violence dans le pays d’origine et tout au long du parcours d’exil. Pour les femmes, le risque relatif de présenter un psychotraumatisme grave (suivi en psychothérapie) est de 1,4 en cas d’antécédent de violence, de 2,6 en cas d’antécédent de torture et de 2,3 en cas d’antécédent de violence liée au genre. Pour les hommes ce risque est également de 1,4 en cas d’antécédent de violence et de 2,6 en cas de torture, il s’élève à 4 en cas de violence liée au genre. Parmi les patients du Comede, la torture est plus fréquemment déclarée par les Sri-Lankais, les Guinéens, les Congolais/RD et les Mauritaniens.
Cette violence s’est davantage exercée à l’encontre de certains groupes professionnels, en particulier les ouvriers, employés et professions intellectuelles. Les violences liées au genre sont plus souvent déclarées parmi les personnes originaires de Côte d’Ivoire, d’Angola, de Guinée, du Congo et du Congo RD. Les personnes sans profession et les professions intermédiaires y ont été les plus exposées. Les différentes formes de violence sont également très liées aux indicateurs de vulnérabilité sociale. Leur fréquence est plus élevée parmi les personnes en situation de détresse sociale. Les antécédents de torture et de violence liée au genre sont fortement corrélés à la précarité du quotidien et de l’hébergement, à l’isolement social et plus encore à l’isolement relationnel : les personnes concernées sont 84% à avoir subi des violences, 25% des tortures et 21% des violences liées au genre.
La moitié des patients suivis en psychothérapie en 2013 présentaient des troubles de la concentration, de l’attention et/ou de la mémoire. De tels troubles sont plus fréquents chez les femmes, et concernent plus de la moitié des personnes ayant subi des tortures et/ou des violences liées au genre. Cette situation peut entrave notamment la capacité des demandeurs d’asile à mettre en récit leur parcours d’exil, a fortiori lors de convocations à l’Ofpra et à la CNDA. En raison de ces troubles, les personnes non francophones rencontrent également davantage de difficultés concernant l’apprentissage de la langue. L’importance des idées suicidaires et des antécédents de tentative de suicide parmi les exilés suivis en psychothérapie au Comede illustre la gravité de leurs troubles psychiques. Plus d’un quart des patients ont présenté des idées suicidaires au cours de la psychothérapie, et 6% avaient effectué une tentative de suicide au cours de leur vie. Les idées suicidaires sont plus fréquentes chez les hommes, chez les personnes en situation de détresse sociale, ainsi que parmi les exilés ayant subi des tortures.
En 2013, les psychologues et médecins ont pu caractériser ces troubles psychiques au moyen de la nouvelle catégorisation des principales maladies et syndromes observés. Parmi 190 patients pour lesquels ces données ont été documentées (voir tableau page suivante), 57% présentaient un syndrome psychotraumatique (SPT), 26% une dépression (DEP), 11% un trauma complexe, 4% des troubles anxieux et 1% des troubles psychotiques. Les femmes présentent plus souvent que les hommes un syndrome psychotraumatique (60% vs 54%), et moins souvent une dépression (23% vs 28%). Les syndromes psychotraumatiques apparaissent plus fréquents chez les personnes ayant subi des tortures (60%) et des violences liées au genre (60%), alors que le trauma complexe est fortement corrélé aux antécédents de torture (18%). Selon la région d’origine, on observe davantage de SPT chez les patients d’Afrique de l’Ouest (66%, et 68% des Guinéens), et chez ceux d’Afrique centrale davantage de dépression (29%) et de trauma complexes (20%). Enfin, il existe une forte corrélation entre les tableaux cliniques et l’évolution de la demande d’asile. Parmi les personnes suivies pour psychotraumatisme en 2013, les demandeurs d’asile en cours de procédure présentent plus souvent un syndrome psychotraumatique (58%) et un trauma complexe (14%), les personnes déboutées plus souvent une dépression (46%).
La présence des syndromes psychotraumatiques graves est corrélée aux antécédents de violence dans le pays d’origine et tout au long du parcours d’exil. Pour les femmes, le risque relatif de présenter un psychotraumatisme grave (suivi en psychothérapie) est de 1,4 en cas d’antécédent de violence, de 2,6 en cas d’antécédent de torture et de 2,3 en cas d’antécédent de violence liée au genre. Pour les hommes ce risque est également de 1,4 en cas d’antécédent de violence et de 2,6 en cas de torture, il s’élève à 4 en cas de violence liée au genre. Parmi les patients du Comede, la torture est plus fréquemment déclarée par les Sri-Lankais, les Guinéens, les Congolais/RD et les Mauritaniens.
Cette violence s’est davantage exercée à l’encontre de certains groupes professionnels, en particulier les ouvriers, employés et professions intellectuelles. Les violences liées au genre sont plus souvent déclarées parmi les personnes originaires de Côte d’Ivoire, d’Angola, de Guinée, du Congo et du Congo RD. Les personnes sans profession et les professions intermédiaires y ont été les plus exposées. Les différentes formes de violence sont également très liées aux indicateurs de vulnérabilité sociale. Leur fréquence est plus élevée parmi les personnes en situation de détresse sociale. Les antécédents de torture et de violence liée au genre sont fortement corrélés à la précarité du quotidien et de l’hébergement, à l’isolement social et plus encore à l’isolement relationnel : les personnes concernées sont 84% à avoir subi des violences, 25% des tortures et 21% des violences liées au genre.
La moitié des patients suivis en psychothérapie en 2013 présentaient des troubles de la concentration, de l’attention et/ou de la mémoire. De tels troubles sont plus fréquents chez les femmes, et concernent plus de la moitié des personnes ayant subi des tortures et/ou des violences liées au genre. Cette situation peut entrave notamment la capacité des demandeurs d’asile à mettre en récit leur parcours d’exil, a fortiori lors de convocations à l’Ofpra et à la CNDA. En raison de ces troubles, les personnes non francophones rencontrent également davantage de difficultés concernant l’apprentissage de la langue. L’importance des idées suicidaires et des antécédents de tentative de suicide parmi les exilés suivis en psychothérapie au Comede illustre la gravité de leurs troubles psychiques. Plus d’un quart des patients ont présenté des idées suicidaires au cours de la psychothérapie, et 6% avaient effectué une tentative de suicide au cours de leur vie. Les idées suicidaires sont plus fréquentes chez les hommes, chez les personnes en situation de détresse sociale, ainsi que parmi les exilés ayant subi des tortures.
En 2013, les psychologues et médecins ont pu caractériser ces troubles psychiques au moyen de la nouvelle catégorisation des principales maladies et syndromes observés. Parmi 190 patients pour lesquels ces données ont été documentées (voir tableau page suivante), 57% présentaient un syndrome psychotraumatique (SPT), 26% une dépression (DEP), 11% un trauma complexe, 4% des troubles anxieux et 1% des troubles psychotiques. Les femmes présentent plus souvent que les hommes un syndrome psychotraumatique (60% vs 54%), et moins souvent une dépression (23% vs 28%). Les syndromes psychotraumatiques apparaissent plus fréquents chez les personnes ayant subi des tortures (60%) et des violences liées au genre (60%), alors que le trauma complexe est fortement corrélé aux antécédents de torture (18%). Selon la région d’origine, on observe davantage de SPT chez les patients d’Afrique de l’Ouest (66%, et 68% des Guinéens), et chez ceux d’Afrique centrale davantage de dépression (29%) et de trauma complexes (20%). Enfin, il existe une forte corrélation entre les tableaux cliniques et l’évolution de la demande d’asile. Parmi les personnes suivies pour psychotraumatisme en 2013, les demandeurs d’asile en cours de procédure présentent plus souvent un syndrome psychotraumatique (58%) et un trauma complexe (14%), les personnes déboutées plus souvent une dépression (46%).
Suivi des patients
En 2014, les psychothérapeutes du Comede ont effectué 1 181 entretiens pour 210 patients,
dont 44% en langue étrangère. La durée moyenne de suivi des patients
est de 14 mois, ce qui correspond à la nécessité de proposer des suivis
soutenus pour des patients présentant souvent des troubles psychiques
graves, en lien avec des expériences de violences et tortures.
Au Centre de santé, l’orientation initiale vers le psychothérapeute est proposée par le médecin, généralement après les résultats du bilan de santé. Les troubles psychiques constituent la principale cause de morbidité chez les exilés, davantage encore chez les femmes. Les patients reçus souffrent pour la grande majorité d’entre eux de syndromes psychotraumatiques dans lesquels dominent cauchemars et reviviscences, troubles de la mémoire et de la concentration mais aussi douleurs physiques rebelles au traitement antalgique. Les syndromes psychotraumatiques prennent parfois des formes particulièrement graves dans lesquelles peuvent survenir des épisodes dissociatifs, s’exprimant par des moments de confusion, d’agitation ou encore de mutisme et de stupeur. Certains patients traversent des états de détresse psychique intense, associés à des dépressions graves, et témoignent d’idées suicidaires.
Si les violences ont un grand impact sur la vie psychique des personnes, il ne faut pas négliger le retentissement psychologique de la situation d’exil, marquée par la séparation d’avec les proches, la découverte d’un environnement nouveau et inconnu. En outre, la précarité sociale et administrative associée au contexte politique de l’accueil en France induit fréquemment une souffrance psychique importante. Le suivi des patients recouvre des modes de prises en charge - thérapies d’orientation psychanalytique et/ou thérapies de soutien - que l’on cherche à adapter à la situation du patient, dans laquelle se nouent les effets du traumatisme psychique et la précarité de la situation sociale. Face à un tableau clinique de syndrome psychotraumatique et/ou de dépression, les psychologues et médecins peuvent conduire l’essentiel des prises en charge requises, les médecins prescrivant au besoin des traitements anti-dépresseurs, anxiolytiques et hypnotiques. Toutefois l’avis d’un psychiatre reste nécessaire en cas de tableau psychotique, de dépression ou de syndrome psychotraumatique sévère.
Au Centre de santé, l’orientation initiale vers le psychothérapeute est proposée par le médecin, généralement après les résultats du bilan de santé. Les troubles psychiques constituent la principale cause de morbidité chez les exilés, davantage encore chez les femmes. Les patients reçus souffrent pour la grande majorité d’entre eux de syndromes psychotraumatiques dans lesquels dominent cauchemars et reviviscences, troubles de la mémoire et de la concentration mais aussi douleurs physiques rebelles au traitement antalgique. Les syndromes psychotraumatiques prennent parfois des formes particulièrement graves dans lesquelles peuvent survenir des épisodes dissociatifs, s’exprimant par des moments de confusion, d’agitation ou encore de mutisme et de stupeur. Certains patients traversent des états de détresse psychique intense, associés à des dépressions graves, et témoignent d’idées suicidaires.
Si les violences ont un grand impact sur la vie psychique des personnes, il ne faut pas négliger le retentissement psychologique de la situation d’exil, marquée par la séparation d’avec les proches, la découverte d’un environnement nouveau et inconnu. En outre, la précarité sociale et administrative associée au contexte politique de l’accueil en France induit fréquemment une souffrance psychique importante. Le suivi des patients recouvre des modes de prises en charge - thérapies d’orientation psychanalytique et/ou thérapies de soutien - que l’on cherche à adapter à la situation du patient, dans laquelle se nouent les effets du traumatisme psychique et la précarité de la situation sociale. Face à un tableau clinique de syndrome psychotraumatique et/ou de dépression, les psychologues et médecins peuvent conduire l’essentiel des prises en charge requises, les médecins prescrivant au besoin des traitements anti-dépresseurs, anxiolytiques et hypnotiques. Toutefois l’avis d’un psychiatre reste nécessaire en cas de tableau psychotique, de dépression ou de syndrome psychotraumatique sévère.