Rapport de recherche
«Tout d'abord, ne pas nuire»: les évaluations d'invalidité sont elles associés à des tendances négatives en matière de santé mentale? Une étude longitudinale écologique
titre original : ‘First, do no harm’: are disability assessments associated with adverse trends in mental health? A longitudinal ecological study
B Barr 1, D Taylor-Robinson 1, D Stuckler 2, R Loopstra 2, A Reeves 2, M Whitehead
1 Université de Liverpool, Liverpool, Royaume-Uni
2 Oxford University, Oxford, UK
Correspondance Dr B Barr, ministère de la Santé publique et de la politique, Institut de psychologie, santé et société, Université de Liverpool, Whelan Building, Liverpool L69 3GB, Royaume-Uni; b.barr@liverpool.ac.uk
Publié en ligne le 16 Novembre 2015
J Epidemiol Community December 2015, Volume 69, Issue 12
Contexte : En Angleterre entre 2010 et 2013, un peu plus d'un million des principaux bénéficiaires de la pension d'invalidité de travail avait vu réévaluer leur admissibilité à l'aide d'une nouvelle évaluation des capacités de travail. les Médecins et organisations des droits des personnes handicapées ont soulevé des inquiétudes sur le fait que cela a eu un effet négatif sur la santé mentale des demandeurs, mais il n'y a pas d'études au niveau de la population explorant ses effets sur la santé ou des politiques similaires.
Méthode L'étude utilise la régression multivariée afin de déterminer si la variation de la tendance dans les réévaluations, dans chacune des 149 autorités locales en Angleterre, a été associée à des différences dans les tendances locales sur les suicides, les problèmes de santé mentale autodéclarés et le taux de prescription d'antidépresseurs, tout en ajustant les conditions et les tendances de base dans d'autres facteurs connus pour influer sur les problèmes de santé mentale.
Résultats à chaque 10 000 personnes supplémentaires réévaluées dans chaque zone a été associée un supplément de 6 suicides (95% CI 2 à 9), 2700 cas de problèmes de santé mentale signalés (95% CI 548-4840), et la prescription d'un 7020 antidépresseurs supplémentaires (95% CI 3930 à 10100). Le processus de réévaluation a été associé avec les plus fortes hausses de ces résultats pour la santé mentale défavorables dans les zones les plus défavorisées du pays, l'accroissement des inégalités de santé.
Conclusions Le programme de réévaluation de personnes sur les pensions d'invalidité en utilisant l'évaluation de la capacité de travail a été indépendamment associés à une augmentation des suicides, des problèmes de santé mentale autodéclarés et la prescription d'antidépresseur. Cette politique peut avoir des conséquences indésirables graves pour la santé mentale en Angleterre, ce qui pourrait être supérieur o tous les avantages qui résultent du déplacement des personnes hors des prestations d'invalidité.
http://jech.bmj.com/content/early/2015/10/26/jech-2015-206209
Article sur le sujet
Une analyse lie 590 suicides de handicapés à l’incitation au travail
Par : Jacqueline Charpentier Le : 20 novembre 2015 sur http://actualite.housseniawriting.com/sante-actualite/2015/11/20/une-analyse-lie-590-suicides-de-handicapes-a-lincitation-au-travail/10713/
L’Angleterre voulait réduire le nombre de personnes qui pouvaient prétendre aux allocations de handicapés. Mais cette mesure d’austérité économique a provoqué le suicide de 590 personnes et plus de 725 000 handicapés ont été obligés de passer sous antidépresseurs.
Les chercheurs suggèrent que les avantages de la suppression des allocations sont largement neutralisés par les effets néfastes avec un retour de levier qui incitera d’autres personnes à demander l’aide de l’État. Depuis 2010, l’Angleterre a diminué ou supprimé les allocations de handicapés de plus de 1 million de personnes. De nombreux observateurs estiment que les critères d’éligibilité sont trop sévères et cela a provoqué une pression insoutenable sur des handicapés qui ne pouvaient pas travailler et qui ont été poussés au suicide.
Il était difficile de mesurer ces critiques. Le département des pensions et du travail n’a pas voulu publier les données médicales sur les handicapés qui avaient perdu leurs allocations. C’est pourquoi Ben Barr de l’université de Liverpool et ses collègues se sont tournés vers les données de la santé mentale au niveau local. Ils ont mesuré les évolutions de la situation après que les handicapés aient perdu leurs allocations.
L’équipe a découvert que sur les 149 autorités locales qui ont été réajustées de 2010 à 2013, le taux de suicide et de souscription aux antidépresseurs avait augmenté. Le nombre de personnes, qui rapportaient des problèmes mentaux, est passé à 275 000. Cependant, l’augmentation du suicide et des antidépresseurs était uniquement valable chez les personnes qui étaient en âge de travailler. Cela implique que c’est le programme du gouvernement, à l’incitation du travail, qui est directement responsable de ces suicides et de l’utilisation des antidépresseurs.
L’analyse a exclu les autres facteurs, car elle s’est concentrée uniquement sur la période après la réduction ou la suppression des allocations de handicapés. Les effets étaient plus graves dans les régions à faible revenu ce qui a exacerbé les problèmes de santé des plus pauvres.
Les effets de l’austérité
Sur les personnes qui ont été réévaluées, un cinquième a totalement perdu ses allocations selon Barr. De plus, le processus de réévaluation est stressant et peut prendre des mois. Même si à la fin, certains ont pu garder leurs aides sociales, la longue période d’incertitude a eu des impacts négatifs. De plus, il n’est pas clair si l’austérité gouvernementale a incité les handicapés à travailler. Dans les pays qui ont appliqué des politiques similaires, on a découvert que les handicapés ont fini par demander des allocations de chômage ce qui neutralise totalement la prétendue austérité.
Et cette étude prouve sa pertinence quand on regarde les impacts de l’austérité en général et elle nous montre aussi les chemins complexes vers le suicide et l’addiction aux antidépresseurs selon David Gunnel de l’université de Bristol. De 2008 à 2010, ce chercheur a identifié 1 000 suicides supplémentaires en Angleterre ainsi que 40 000 tentatives de suicide qui étaient tous liés à la récession économique. Mais le suicide lié au chômage peut baisser si on aide correctement les chômeurs, notamment les jeunes. On peut les aider à trouver du travail et à les former. Il faudrait demander à l’Angleterre si elle estime que la solution à la récession économique passe par une récession de sa population.
Source : Journal of Epidemiology & Community Health