Hôpital psychiatrique : Raymond Depardon donne la parole aux malades
"J'ai la folie d'un être humain" c'est un jeune homme d'une vingtaine d'années, le regard totalement absent qui parle. "Ça a été de la souffrance toute ma vie", une jeune femme cette fois, dont on comprend qu'elle a tenté à maintes reprises de se suicider. "Il n'y a pas de trouble dans ma tête, j'ai plein de choses à faire... mon avenir recule" un homme encore. Ce sont ces mots, ces paroles que le photographe réalisateur Raymond Depardon a capté, des paroles rares, fortes, poignantes, drôles aussi parfois. Celles de malades, hospitalisés contre leur gré en psychiatrie, à l'hôpital Vinatier à Lyon.
100 000 mesures d'hospitalisation sous contraintes par an en France
Depuis septembre 2013, la loi oblige les juges des Libertés et de la détention à contrôler, sous douze jours, puis tous les six mois si nécessaire, la régularité de ces procédures d'hospitalisations d'office. Il s'agit d'éviter les abus et de permettre la levée ou non de l'hospitalisation. Mais les juges se conforment, presque dans tous les cas, à l'avis médical du psychiatre, qui n'est pas présent lors de ces audiences dites "foraines", qui ont lieu deux fois par semaine à Lyon. Il faut rappeler qu'en France il y a chaque année près de 100 000 mesures d'hospitalisation sous contraintes.
Des moments lucides pour certains, surréalistes pour d'autres
Le documentaire de Raymond Depardon, laisse place de façon très sobre et digne, à la parole des patients, au moment de leur rencontre avec le juge. Les dialogues qui s'instaurent abordent leur situation, leur vie, la liberté, la folie. Des moments très lucides pour certains, surréalistes pour d'autres. Ces personnes hospitalisées sont là pour des dépressions, des burn-out, des risques suicidaires, parce qu'il "sont en situation de péril imminent", ou pour des maux plus profonds, schizophrénie, délire paranoïaque... Les audiences sont entrecoupées par des images de l'hôpital, "un temps suspendu" des couloirs, des grillages, des malades qui tournent en rond, qui fument cigarette sur cigarette, portée par la très belle musique originale d'Alexandre Desplat.
Sortie sur les écrans, le 29 novembre prochain
Un film à hauteur d'homme, intense et émouvant. Un film rare sur la psychiatrie, qui donne la parole aux malades eux-même, à leurs mots, à leurs sentiments, à leurs émotions. Un film nécessaire. Ce documentaire "12 Jours" est projeté ce lundi soir à 20h15 à l'Arvor à Rennes, il sortira en salle le 29 novembre.