Afin de mieux appuyer les intervenants travaillant auprès des enfants ainsi que les familles, la CSSSPNQL met à votre disposition des trousses de premiers soins émotionnels. Destinées aux enfants de 5 à 13 ans, les trousses contiennent les éléments suivants :
· Un plan de sécurité qui soutient et guide la personne éprouvant des pensées suicidaires pour l’aider à éviter un état de crise. Quiconque ayant une relation de confiance avec le jeune envisageant un suicide peut l’aider à rédiger le plan de sécurité.
· Une fiche explicative qui accompagne l’adulte responsable dans l’élaboration du plan de sécurité.
· Des objets réconfortants pour les jeunes enfants, soit des peluches en forme de loutre. Celles-ci imitent un mouvement semblable à une respiration, ce qui crée un effet apaisant. Pour les plus âgés, la trousse contient des bandelettes antistress. Il suffit de toucher la bandelette texturée, puis d’inspirer et d’expirer aux endroits indiqués.
"On a plus de force qu’on pense" : témoignages bouleversants sur le suicide
Par Frédérique Gissot ⸱ Publié le lundi 27 janvier 2025 https://www.radiofrance.fr/*
En France, le nombre de suicides baisse. Les professionnels de santé mettent en place de nouvelles approches de ce risque. Une prise en charge adaptée et un accompagnement pour libérer la parole ont prouvé leur efficacité.
"Je
suis passé par cette phase-là il y a quelques années. Je sais que
beaucoup d'autres traversent encore ce genre d'étape et que je pense que
dans mon histoire, il y a des gens qui pourraient se reconnaître et
s'en sortir, parce qu'il y a un fond du tunnel, comme on dit." Samuel a fait une tentative de suicide en 2018. Aujourd'hui, il regarde les choses en face. "Je n'en ai pas spécialement honte, je n'en tire aucune fierté pour autant, cela fait partie de mon histoire." Nouvelle frayeur pour lui en 2022 avec un grave accident de la route. "J'ai
perdu mon emploi, mon autonomie, je me suis retrouvé en fauteuil
roulant. J'ai perdu mon couple en 2024. Je pensais toucher le fond et
devoir recommencer parce que je voulais tout lâcher, mais non."
Jean-Jacques Chavagnat, psychiatre au centre hospitalier Henri-Laborit de Poitiers et responsable du Centre de Prévention du Suicide,
préside un colloque sur les "Nouvelles approches de la prévention du
suicide". A noter trois temps forts : Peut-on prédire la crise
suicidaire ? Comment les médias peuvent-ils présenter la prévention du
suicide ? et la présentation du plan personnalisé de protection.
"Aller avec les personnes qui vont nous aider"
En
20 ans, le nombre de suicides est passé de 13 000 à 9000. Mais les
conséquences de l'épidémie de covid ne sont pas encore bien mesurées. En
matière de prévention, la psychologue Émilie Sauvaget, coordinatrice en
prévention du suicide, a mis en place Les Ulysse, des témoignages
d'hommes et de femmes qui ont fait des tentatives de suicide. Comme Léa,
qui parle de son état d'esprit à l'époque de sa tentative de suicide. "Pour
moi, l'évidence, c'était que ça devait s'arrêter, parce qu'il n'y avait
pas d'autre solution, c'était une évidence, c'était une conviction...
Je ne voyais rien d'autre. Il n'y avait pas d'issue possible. Il n'y a
pas de baguette magique, il n'y a pas le bouton « on » pour être heureux
et « off » pour éteindre l'envie de mourir." Ce qu'elle a appris, c'est d'aller vers les bonnes personnes. "Ce n'est pas forcément aller vers les personnes qu'on aime bien. C'est aller avec les personnes qui vont nous aider."
"Il ne faut pas rester tout seul, témoigne Thierry qui a attenté à ses jours an août 2024. Il
faut essayer de trouver des gens qui puissent nous aider. J'étais au
bout du rouleau, j'avais perdu ma femme depuis deux ans. J'étais suivi
par mes médecins, mais le traitement n'était pas adapté. Suite à cette
tentative de suicide, j'ai préféré être hospitalisé au centre Henri
Laborit. Ils m'ont super bien aidé, super bien soigné et bien aiguillé." Il se sent encore fragile, mais a maintenant ce qu'il appelle "des ficelles" pour s'en sortir. "Depuis
que je suis sorti, je suis suivi par une psychologue tous les 15 jours
et ça me fait un bien fou. Elle est très attentive, très à l'écoute." Le
dispositif « Mon soutien psy » prévoit 12 séances remboursées par an
auprès d'un psychologue conventionné. Cela devrait faciliter l'accès aux
soins.
"Maintenant, globalement, je suis nettement plus heureux qu'avant"
"Les
hommes vont utiliser des moyens assez violents, ce qui fait que,
malheureusement, ceci aboutit plutôt à un suicide, c'est-à-dire à une
mort, plutôt qu'à un suicide tenté, hélas" rappelle Jean-Jacques
Chavagnat. Ces hommes qui ne parlent pas et gardent au fond d'eux leurs
doutes et leur mal-être reste une réalité, même si de plus en plus
d'hommes se sentent capables de parler et de demander de l'aide. Christophe a fait une tentative de suicide, il en est revenu plus fort. "Maintenant,
globalement, je suis nettement plus heureux qu'avant. Ma vie n'est pas
forcément différente, quand un petit moment de bonheur se présente, je
l'apprécie pleinement. Je sais quelle est la route qui mène au fond du
chemin parce que je l'ai parcourue. Si jamais je dois la reparcourir de
nouveau, j'ai mis en place des facteurs de protection à tous les étages."
Le plan personnalisé de protection a été mis en place aux États-Unis, auprès des vétérans, puis dans les services d'urgence. "L'idée est-ce que le patient soit un acteur de vigilance"
souligne Jean-Jacques Chavagnat. Ce plan se décline en sept points.
Quels sont mes signes d'alerte ? Que faire pour réguler mes émotions et
me calmer ? Quelles sont les personnes que je peux appeler pour me
changer les idées ? Quelles sont les personnes que je peux appeler pour
demander de l'aide ? Quelles sont les personnes à contacter et les
démarches à faire en cas d'urgence ? Comment je peux rendre mon
environnement sécuritaire ? Quelles sont les démarches à entreprendre à
la suite de ma dernière consultation / hospitalisation ?
"L'objectif
est de sortir de ce marasme psychique où les personnes sont un peu
confuses, sourdes, muettes et aveugles. Sourd ; je n'entends pas autour
de moi tous ceux qui disent qu'ils m'aiment. Muet : je n'arrive pas à
dire ce que je ressens. Et aveugle : je ne vois plus tout ce que
j'aimais auparavant." Pour Jean-Jacques Chavagnat, l’approche actuelle valorise davantage les facteurs de protection que de risque. "Il y a des liens à recréer : avec soi-même, d’abord, puis avec les autres", précise-t-il. Cet s’ajoute à d’autres initiatives, comme le dispositif "VigilanS" qui accompagne les suicidants par téléphone et carte postale pendant six mois après leur tentative. "Le passage que j'ai eu par Henri Laborit en 2018 m'a grandement ouvert les yeux, reconnait Samuel qui a beaucoup appris sur lui."On commence à comprendre qu'on a plus de force que ce qu'on pense."
3114 : numéro national de prévention du suicide, accessible 24h/24 et 7j/7, gratuitement, en France
Nous avons le plaisir de vous informer que notre groupe de parole Crises et Croissants, à destination des jeunes adultes, se poursuit en cette nouvelle année 2025 !
Prochain groupe le samedi 1 février 2025 11h-12h30
Tous les premiers samedis du mois, ouvert aux patients suivis du Centre de Prévention du Suicide Paris, ou d'ailleurs (après entretien d’accueil), entre café chaud et croissants, ce groupe s’articule autour du vécu de crise : identitaire, suicidaire, existentielle…
Objectifs : échanges d’expériences, de questionnements, partages de ressources, entraide.
La vie après le suicide d'un proche: un deuil de la culpabilité et de l'impuissance
Samuel Vivant – Édité par Émile Vaizand – 22 janvier 2025 https://www.slate.fr*
La recherche scientifique s'accorde sur la particularité du deuil après cette mort brutale et mystérieuse. Comment les personnes endeuillées parviennent-elles à surmonter cette épreuve?
On estime qu'environ 100.000 personnes perdent un proche par suicide chaque année en France.
Temps de lecture: 6 minutes
Après la secousse, les répliques. En vacances à Rome,
Patricia et sa fille Marie, 27 ans, dorment à l'hôtel. Au cœur de la
nuit, des bruits inquiétants, des cintres qui se balancent, des murs qui
vibrent. Paniquée, la mère réveille sa fille, qui ouvre un œil distrait
et lâche: «C'est rien: ça doit être un tremblement de terre.» Le terrible séisme qui a ébranlé la ville de L'Aquila (Abruzzes), le 6 avril 2009, à une centaine de kilomètres de la capitale italienne, n'a pas fait ciller une seconde la jeune femme.
Sur le retour, au moment de se séparer à l'aéroport, Patricia a pourtant un mauvais pressentiment. Une «boule d'angoisse inexplicable»
en regardant s'éloigner la silhouette de sa fille. Quelques jours plus
tard, un appel de la gendarmerie. Marie vient de se donner la mort. Au
bout du fil, la mère s'effondre dans sa cuisine. Un drame insoupçonné
couvait au milieu des selfies et des virées shopping en Italie. Et
derrière, un deuil en forme de point d'interrogation.
On estime qu'environ 100.000 personnes perdent un proche par suicide chaque année en France, selon les données de la plateforme Espoir, un outil collaboratif dédié à la question du deuil après un suicide et à l'accompagnement des personnes touchées. «Plus
que d'autres causes de décès, ces gens se retrouvent dans une situation
qui isole énormément et complique l'accès au soin. C'est un deuil
particulier. Comme un puzzle où il manquera toujours la pièce centrale», indique Edouard Leaune, psychiatre aux Hospices civils de Lyon et coordinateur d'Espoir.
D'Émile Durkheim à Albert Camus,
le geste suicidaire a largement été disséqué. Défaut d'intégration
sociale pour l'un, baiser mortel de l'absurde pour l'autre. Mais pour
ceux qui restent, la part irréductible et mystérieuse du passage à
l'acte pousse à la rumination. «J'ai relu 10 milliards de fois sa lettre sans y trouver d'explications, soupire Patricia. Marie
avait tout préparé et je n'ai rien vu. J'ai balayé toute la vie que
j'ai eu avec cet enfant depuis mon ventre jusqu'à sa mort. On découvre
des choses. C'est une enquête qui fait mal et dont on ressort forcément
déçu.»
«Un roman personnel du suicide»
Fabrice, 57 ans, n'a lui non plus «rien vu venir».
En 2015, Jeanne, sa fille de 12 ans, est retrouvée morte dans son lit
d'enfant, quelques jours après la rentrée scolaire. Les investigations
du père mènent à une chanson triste de Céline Dion écoutée en boucle sur
YouTube, une lettre évoquant des relations difficiles avec des copines
et une liste secrète de Noël dans laquelle la fillette demande à «mourir pour toujours». «La question du harcèlement scolaire s'est posée, expose Fabrice. Mais
d'autres raisons coexistent. Son grand-père est décédé six mois plus
tôt. Un an auparavant, dans la classe de son frère, une gamine est
décédée d'un cancer. Il y a eu des obsèques avec tout le groupe
scolaire. Je crois que quelque chose s'est produit en elle devant ce
petit cercueil blanc.»
«Le sentiment de toute-puissance qui
nous vient de l'enfance explique en bonne partie la façon dont nous
pouvons nous inventer des culpabilités.»
Guy Cordier, pédopsychiatre et bénévole au sein de l'association Vivre son deuil Nord-Pas-de-Calais
Le
père de famille a choisi d'abandonner ses recherches. Jamais ouvert, le
dossier du procureur où figurent les auditions des camarades de Jeanne
prend la poussière sur son étagère. Pour Marc-Élie Huon,
psychologue à l'unité d'accompagnement et de soins palliatifs au CHRU
de Brest, face à l'énigme suicidaire, les proches élaborent «un roman personnel du suicide». «Vouloir tout comprendre de cet acte si étrange génère beaucoup plus de confusion que de clarté, décrypte-t-il. L'apaisement
des personnes endeuillées est étroitement lié au renoncement à posséder
la vérité de l'autre sur son acte. Il faut établir sa propre vérité.»
Échapper à la culpabilité
L'autre caractéristique du deuil après un suicide est sans doute son rapport exacerbé à la culpabilité. «C'est profondément anormal qu'un enfant meurt volontairement avant vous, souffle Patricia. Je
me disais que je ne l'avais pas assez serrée dans mes bras. Qu'en tant
que mère, je n'avais pas su la protéger. Je m'en suis voulu énormément.
Ce sentiment s'estompe, mais ne disparaît jamais.»
Pourquoi cette pente naturelle vers la culpabilité? Guy Cordier,
pédopsychiatre, spécialiste du deuil chez l'enfant et bénévole au sein
de l'association Vivre son deuil Nord-Pas-de-Calais, ose une hypothèse: «Le
sentiment de toute-puissance qui nous vient de l'enfance explique en
bonne partie la façon dont nous pouvons nous inventer des culpabilités.
Il y a un lien très fort. L'enfance est le moment où le sentiment de
toute-puissance nous habite le plus. On découvre en vieillissant que
l'on n'est pas tout-puissant.» Ainsi, les individus endeuillés
s'apaisent et passent d'un sentiment de culpabilité à un sentiment
d'impuissance. Et d'un sentiment d'impuissance à la reconnaissance de
l'impossibilité de pouvoir empêcher la mort.
Mais en réalité, chaque deuil est unique. L'année de son bac de français, Léa*, aujourd'hui 28 ans, a perdu son père qu'elle considérait comme son «meilleur ami». «Il a toujours été dépressif, décrit-elle. Le suicide était quelque chose qu'il verbalisait auprès de moi. C'était sa conception de la mort.» Alors, ce jour-là, en entendant le bruissement de la chambre voisine, elle lève la tête de ses fiches de révision.
«C'est le seul moment de ma vie où j'ai eu une intuition. Et j'ai
laissé faire. C'est moi qui l'ai trouvé. J'ai vécu avec le fait que
j'aurais pu l'empêcher. En même temps, j'ai toujours eu l'idée que je
l'avais laissé faire, parce que c'était son choix. Son suicide était
quelque part une marque de confiance. Je me suis autorisée à ne pas
culpabiliser.» «Nous faisons peur»
Comme
Léa, Carine, 47 ans, a été la première témoin de la mort de son
conjoint. Pendant de longs mois, la quadragénaire a dû détourner le
regard des ceintures, composer avec la force évocatrice des arbres. Et
puis cette ancienne gendarme est retournée vivre au domicile maternel à
40 ans, avec un bébé dans les bras et un fantôme qui dérange. «Dans notre famille, ça a précipité des ruptures, retrace-t-elle. Mon
père n'a plus jamais donné signe de vie. Pour son image, cette histoire
n'a pas dû lui plaire. Et ce qui était déjà pourri dans la famille de
mon conjoint s'est définitivement délité.»
«Il y a un avant et un après. Le
rapport à l'existence et au sens se modifie. Parfois, la culpabilité est
simplement trop dure à supporter.»
Marc-Élie Huon, psychologue au CHRU de Brest
Aux yeux de la société, le suicide reste encore le prototype de la mauvaise mort. «Si
les choses tendent à s'améliorer, le tabou et la stigmatisation sociale
persistent. Le sujet du suicide est une effraction. Beaucoup n'osent
pas en parler autour d'eux», estime Marie Tournigand, déléguée générale de l'association Empreintes, qui accompagne les personnes endeuillées.
Après la mort de sa fille, Fabrice se souvient des mots «extrêmement violents» de la directrice de son établissement scolaire: «Tout allait bien à l'école, ça ne peut venir que de la famille.» Patricia, elle, a été priée par son entourage de ne pas «encore faire chier» avec son histoire. «Ou alors les gens ne savent pas quoi dire, ajoute-t-elle. Ça les renvoie à eux-mêmes, à leurs propres angoisses. En fait, nous faisons peur.»
«Contagion suicidaire»
Est-ce un signe que la société française ne s'est pas totalement défait de son héritage religieux? En effet, la doctrine catholique
considère Dieu comme le seul souverain de la vie donnée. Comprendre: on
ne dispose pas de sa mort. Il a fallu attendre le début des années 1970
pour que le suicide pousse les portes du ministère de la Santé publique
et de la Sécurité Sociale, sous la tutelle du ministre Robert Boulin
(1969-1972). Aujourd'hui, le sort des personnes endeuillées tend à faire
partie intégrante de la stratégie de prévention nationale.
De plus en plus, les adolescents
connaissent des pensées suicidaires qui peuvent les amener jusqu'au
passage à l'acte. Violences, harcèlements, peur de l'avenir, les causes
sont diverses mais identifiées. Alors pour faire face à cette situation,
une unité de soins intensifs de jour pour adolescent a ouvert au CHU de
Clermont-Ferrand.
Un match de basket a été organisé dans le gymnase de l'hôpital de
jour pour adolescents du CHU de Clermont-Ferrand. Une séance de sport
entre patients et soignants. Pour Laura, 17 ans, un moyen de comprendre
les raisons de son mal-être. «On
a le stress de l’avenir, on est jeunes et on a tous des difficultés à
savoir ce qu’on veut faire plus tard ou où on se voit dans 5 ans. Avec
la dépression, on a encore plus de mal à s’imaginer l’après, même dans
un an.»
Une hospitalisation intensive
Depuis un passage aux urgences après une tentative de suicide, pour
elle, et pour 3 autres adolescents, chaque journée dans le service
commence de la même façon, en expliquant ses ressentis et son humeur du
jour. Une hospitalisation intensive aux méthodes innovantes que chaque
patient a choisie. Un lieu pour les accompagner dans la gestion de leur
crise, entourés de soignants. «On arrive à passer d’une difficulté hier, à une solution, jusqu’à une émotion positive», se félicite une soignante
Accepter son passé
Un espace où ils peuvent parler d'eux-mêmes, comme l'explique Jean-Christophe Faye, psychologue clinicien. «Quand
on a subi des agressions, c’est dur. Il faut accompagner à accepter ça.
Un patient ne peut pas évoluer s’il n’accepte pas ce qu’il a vécu et
s’il n’accepte pas ce qui se passe en lui. De ce fait, j’essaie de les
accompagner en acceptant moi, en le recevant de manière
inconditionnelle.»
Pour nouer le dialogue, les soignants ont mis en place des situations
du quotidien. Les jeunes préparent un gâteau. Lucas Rizzo, infirmier,
entame la conversation avec Nathan.
Préparer le retour à un environnement ordinaire est l'un des enjeux de ce séjour à l'hôpital. «On
va leur proposer une boîte à outils. Le but est qu’ils puissent piocher
dans les différentes médiations et les différents ateliers qu’on va
leur proposer pour le retransposer à l’extérieur face à leurs
difficultés. Ils doivent pouvoir s’aider de ça.»
Travailler le retour à l'extérieur
Ces hospitalisations sont brèves, entre 3 et 6 semaines. Alors tous
les moments comptent. Un rendez-vous hebdomadaire avec le médecin permet
de suivre au plus près le parcours des jeunes patients. «On
accueille les jeunes qui parfois ont besoin d’un cocon pour pouvoir se
poser, se reposer et se tranquilliser. Une fois qu’ils ont repris un peu
de forces, l’idée est de travailler le retour à l’extérieur pour que
les choses se passent bien », explique Jonathan Lachal, professeur des universités et chef de l'unité de soins intensifs de jour pour adolescents.
Une sortie toute proche pour Laura. Elle quittera dans quelques jours l'unité, le moment de mesurer le chemin parcouru.«De l’écoute, de l’aide, de la bienveillance, du soutien, tout ce que je recherchais avant d’arriver ici.»
Le risque de récidive après une tentative de suicide est au plus haut
l'année suivant le passage à l'acte. Il diminue significativement pour
les adolescents accueillis dans ce type d'unité.
-Propos recueillis par Mathieu Verlaine pour France 3 Auvergne
Interview du Dr. Edouard Leaune : les enjeux de la prévention du suicide (Partie 5) Source Le Vinatier
10 janv. 2025 A l'occasion de sa nomination au titre d'MCU-PH (Maitre de Conférence des Universités et Praticien Hospitalier), le Dr Edouard Leaune présente son parcours, sa recherche et ses missions au sein des unités de suicidologie et de prévention du suicide du Vinatier - Psychiatrie Universitaire Lyon Métropole. Dr Edouard Leaune est également praticien au sein des Hospices Civiles de Lyon, enseignant à l'université Claude Bernard Lyon 1 et chercheur au sein du laboratoire RESHAPE de l'Inserm.
Des chercheurs identifient les politiques publiques efficaces pour prévenir le suicide
d'apres article Researchers Identify Public Policies that Work to Prevent Suicide 7 janvier 2025
Rachel Harrison https://www.nyu.edu*
Ville de New York
Les politiques relatives à la sécurité économique, à la
consommation d’alcool et aux restrictions de sécurité sont celles qui
ont le plus grand potentiel pour réduire les décès par suicide.
Une
étude menée par des chercheurs de l'Université de New York a permis de
déterminer quelles politiques publiques permettent de prévenir
efficacement les suicides aux États-Unis. Mais les politiques limitant
le nombre d'armes à feu et élargissant l'accès aux soins de santé ne
sont pas les seules à être efficaces. De nombreuses politiques
économiques et sociales qui ne sont pas explicitement axées sur la santé
mentale peuvent également prévenir le suicide, selon leur article publié dans l' Annual Review of Public Health .
«
La plupart des politiques qui démontrent des preuves ne mentionnent pas
le suicide et n’ont pas été adoptées pour prévenir le suicide. Il
s’agit de politiques qui visent à résoudre d’autres problèmes – par
exemple, augmenter le salaire minimum pour promouvoir la sécurité
économique ou réduire la consommation d’alcool – mais elles ont des
retombées bénéfiques dans la mesure où elles préviennent également les
suicides », a déclaré Jonathan Purtle, professeur associé de politique et de gestion de la santé publique à
la NYU School of Global Public Health et auteur principal de l’étude.
« Cette étude souligne l’importance de prendre en compte les déterminants sociaux dans la prévention du suicide », a déclaré Michael A. Lindsey, doyen et professeur de travail social à la Silver School of Social
Work de l’Université de New York et co-auteur de l’étude. « Le bien-être
mental d’un individu est influencé non seulement par des facteurs
cliniques, mais aussi par son environnement, ses circonstances et ses
expériences. »
Accroître l’activité politique pour répondre à un besoin croissant
Le suicide est l’une des principales causes de décès aux États-Unis et les taux ont augmenté
au cours des deux dernières décennies. Les politiques publiques,
notamment les lois votées par les élus et les réglementations adoptées
par les organismes publics, jouent un rôle important dans la réduction
des décès par suicide. Si le suicide est abordé par certaines politiques
fédérales, la plupart des pouvoirs en matière de politique de santé
publique relèvent des États.
Dans leur article paru dans l’ Annual Review of Public Health
, les chercheurs ont analysé le nombre de projets de loi adoptés par
les États qui mentionnent le suicide au cours des deux dernières
décennies, ainsi que le volume de publications sur les réseaux sociaux
des législateurs des États sur le sujet, un indicateur de priorité
politique. Ils ont constaté une augmentation spectaculaire de ces deux
éléments, en particulier à partir de 2017.
Tendance
annuelle du nombre de lois adoptées par les États et du taux de
publications sur les réseaux sociaux des législateurs des États
mentionnant le suicide. Graphique reproduit avec l'aimable autorisation
de Purtle J, Mauri AI, Lindsey MA, Keyes KM. 2025. Preuves des
politiques publiques visant à prévenir les décès par suicide aux
États-Unis. Annu. Rev. Public Health, Vol. 46. doi:
10.1146/annurev-publhealth-071723-121359. Sous presse
«
Notre analyse suggère que les décideurs politiques reconnaissent que le
suicide est un problème de santé publique important et tentent de le
résoudre, et il existe une préoccupation bipartite », a déclaré Purtle.
Des politiques efficaces
Bien
que de nombreuses études aient examiné l’impact des politiques
individuelles sur le risque de suicide, jusqu’à présent, il n’existait
pas d’analyse examinant collectivement la recherche afin de fournir une
compréhension plus approfondie des politiques les plus efficaces.
Pour
développer cette analyse, Purtle, Lindsey et leurs collègues ont
examiné plus de 100 études et ont découvert trois catégories de
politiques qui, selon les recherches, ont le potentiel de prévenir le
suicide :
Politiques
limitant l’accès aux moyens mortels (par exemple, politiques de
stockage sécuritaire des armes à feu et de délais d’attente pour l’achat
d’armes à feu, installation de barrières sur les ponts)
Politiques
qui augmentent l’accès aux services de santé mentale (par exemple,
l’extension de Medicaid, les lois exigeant une assurance pour couvrir
les soins de santé mentale)
Les
politiques qui s’attaquent aux facteurs de risque sous-jacents du
suicide, notamment celles qui augmentent la sécurité économique (par
exemple, les lois sur le salaire minimum, les congés de maladie payés,
les allocations de chômage, les programmes de nutrition complémentaire),
interdisent la discrimination (par exemple, la protection de l’identité
sexuelle et de genre dans les lois sur les crimes haineux) et limitent
l’accès à l’alcool et au tabac
Bien
que les politiques dans ces trois catégories aient un certain potentiel
pour réduire les décès par suicide, les chercheurs ont constaté que les
politiques visant à améliorer la sécurité économique, à limiter l’accès
à l’alcool et à restreindre l’accès aux moyens mortels disposent des
preuves les plus solides.
«
L’accès à l’alcool et aux moyens de se suicider, ainsi que la pauvreté,
sont tous des facteurs de risque connus du suicide », a déclaré
Lindsey. « Nos recherches suggèrent qu’un bon point de départ pour
sauver des vies est de financer et de mettre en œuvre des politiques
publiques qui ciblent ces trois domaines. »
En
outre, alors que certaines des politiques les plus efficaces visent à
améliorer le bien-être à long terme, d’autres – notamment celles liées
aux armes à feu et à la restriction d’autres moyens mortels – visent à
rendre plus difficile la prise de décisions rapides qui peuvent avoir
des conséquences fatales.
«
Le suicide est souvent un acte impulsif », a déclaré Purtle. « Tout ce
que vous pouvez faire pour retarder cette impulsivité sera bénéfique et
permettra de prévenir le suicide du point de vue de la santé publique. »
Les
armes à feu sont la méthode de suicide la plus courante et la plus
mortelle, même si les recherches sur la violence armée ont longtemps été
entravées par une loi fédérale bloquant le financement de ces travaux.
Cependant, au cours de la dernière décennie, des preuves ont commencé à
s'accumuler sur la politique relative aux armes à feu et le risque de
suicide, ce qui a permis aux chercheurs d'inclure ce sujet dans leur
analyse.
L’étude
a identifié des études qui ont déterminé que la présence d’une arme à
feu à la maison augmente considérablement le risque de suicide et que
les politiques visant à limiter l’accès aux armes à feu peuvent réduire
ce risque. Bien que toutes les politiques en matière d’armes à feu ne se
soient pas révélées aussi efficaces, les lois imposant une période
d’attente pour l’achat d’armes à feu se sont révélées modérément
efficaces pour prévenir les suicides. De plus, les lois fixant des
limites d’âge plus restrictives pour l’achat d’armes à feu et celles qui
imposent un entreposage sécuritaire des armes à feu à la maison – avec
des conséquences pour les adultes qui ne rangent pas leurs armes en
toute sécurité – ont réduit les décès par suicide chez les jeunes.
Plus de données nécessaires
Les
chercheurs ont souligné plusieurs domaines de recherche qui nécessitent
une attention particulière à l'avenir, notamment la nouvelle ligne
d'assistance téléphonique 988 pour les personnes en situation de suicide
et de crise. Purtle dirige des recherches financées par le NIH
sur la mise en œuvre et l'impact des politiques sur la ligne
d'assistance téléphonique, avec des études récentes décrivant
l'augmentation du volume d'appels à la ligne d'assistance téléphonique
au cours de ses deux premières années, l'expérience des utilisateurs et
la manière dont les investissements fédéraux et étatiques dans le 988
ont amélioré la capacité de ces systèmes.
Les
auteurs appellent également à davantage de recherches sur la
technologie et la santé mentale des jeunes, notamment sur l’impact des
restrictions d’âge sur les réseaux sociaux, l’interdiction des
téléphones portables dans les écoles et les politiques qui empêchent
l’exposition à des contenus en ligne préjudiciables liés au suicide. Les
premiers efforts visant à réduire les risques en ligne ont largement
permis aux entreprises technologiques de s’autoréguler, mais ces
dernières années, des efforts croissants ont été déployés pour mettre en
œuvre des politiques visant à protéger les jeunes des dangers
potentiels de la technologie.
«
Le paysage politique a changé très rapidement, mais il faudra du temps
pour étudier ces changements, nous n'avons donc pas encore de preuves
solides de ce qui fonctionne », a déclaré Purtle.
Amanda
Mauri de la NYU School of Global Public Health et Katherine Keyes de la
Columbia Mailman School of Public Health sont également les auteurs de
l'étude. La recherche est financée en partie par le National Institute
of Mental Health (R01MH131649).