mardi 7 février 2023

SUISSE Nouvel outil thérapeutique pour prévenir le risque de suicide chez les adolescents

Nouvel outil thérapeutique pour prévenir le risque de suicide chez les adolescents

 02.02.2023

 

 

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Vaud, lundi 23 janvier 2023 sur 24 Heures (Suisse), no. 16522

Suicide des adolescents

Une nouvelle thérapie combat le risque de repasser à l'acte

L'outil AdoASSIP aide les jeunes à « comprendre leur histoire autourde la tentative de suicide » et à réagir si cette crise se répète.

Romaric Haddou

En Suisse, selon une étude de 2017, environ 10% des jeunes ont déjà eu des pensées suicidaires dans les deux dernières semaines et environ 1% des adolescents ont fait une tentative pendant les douze derniers mois. Pour prévenir la récidive, le Service universitaire de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent (SUPEA) du CHUV utilise depuis l'automne 2022 un nouvel outil thérapeutique. Intitulé AdoASSIP (pour Attempted Suicide Short Intervention Program for Adolescents), il est en place dans treize cantons et consiste en une thérapie brève qui vise à mobiliser les ressources de l'adolescent et de son entourage. Cheffe de la filière Hospitalisation et urgences/crises au SUPEA, Carole Kapp détaille cette nouvelle méthode.

Comment et par qui a été développé AdoASSIP?

C'est une adaptation de l'outil ASSIP, une thérapie de trois séances qui est destinée aux adultes, utilisée depuis environ quinze ans à Berne et implantée depuis 2021 en Suisse romande. Promotion Santé Suisse a soutenu cette adaptation qui est un peu plus complexe et comprend deux séances supplémentaires. Le but reste de prévenir la récidive chez des personnes ayant déjà fait une tentative de suicide. Pour cela, nous aidons l'adolescent à déculpabiliser, à comprendre et à expliciter cette tentative afin de lui permettre de mobiliser les stratégies à utiliser si ça devait se reproduire. C'est une thérapie qui complète la prise en charge ambulatoire de base, ce n'est pas un substitut.

En quoi consistent ces cinq séances?

Il y a d'abord un entretien préliminaire, en présence du jeune et de ses parents, puis une séance filmée où le thérapeute écoute le récit de l'adolescent. Il faut qu'il parvienne à comprendre ses émotions, ses pensées et ses comportements avant et pendant la tentative de suicide. Très souvent, il fera le lien avec les éléments qui ont engendré cette souffrance ou qui ont déclenché la tentative. Lors du deuxième entretien, on visionne certains extraits du premier afin d'approfondir cette compréhension. Et lors du troisième, le thérapeute présente l'histoire du patient, qu'il a écrite sur la base des rencontres précédentes. Cette histoire sera ajustée avec l'adolescent afin d'être lue aux parents si l'adolescent le souhaite. Un plan de sécurité personnel est aussi élaboré avec des objectifs, des signaux avant-coureurs à repérer et des stratégies en cas de réactivation du processus suicidaire. La cinquième séance est donc une nouvelle rencontre avec les parents afin de leur transmettre l'histoire de leur enfant. Le thérapeute ambulatoire participe aussi.

Cette méthode a-t-elle déjà des résultats?

Nous avons lancé AdoASSIP à l'automne dernier, mais une étude a été menée sur vingt-quatre mois concernant l'efficacité d'ASSIP auprès des adultes. Elle a montré qu'en ajoutant ASSIP à la prise en charge habituelle, on constate une baisse d'environ 80% de la récidive en plus d'une baisse de 72% des jours hospitalisés.

Combien d'adolescents imaginez-vous suivre par année?

À terme, selon les estimations du projet soutenu par Promotion Santé Suisse, environ une cinquantaine par année. Nous fonctionnons sur une base volontaire: pour initier AdoASSIP, il faut que l'adolescent et sa famille souhaitent faire ce travail thérapeutique supplémentaire.

L'implication des parents est-elle impérative?

Oui, il est important que l'environnement de vie soit partie prenante. La prévention n'est pas uniquement l'affaire des spécialistes, elle concerne la famille, les amis, les enseignants, les médecins... AdoASSIP est un dispositif spécialisé mais il y a tout un accompagnement qui doit être fait en dehors. Les décès par suicide restent rares chez les jeunes mais c'est malheureusement toujours la première cause de mortalité chez les 15-29 ans en Suisse.

Contact: adoassip.supea@chuv.ch

 

INFO plus 

Keller, R., Saillant, S., Gysin-Maillart, A., Michaud, L., ASSIP : nouvelle modalité thérapeutique après un geste suicidaire, Rev Med Suisse, 2021/751 (Vol.7), p. 1602–1605. DOI: 10.53738/REVMED.2021.17.751.1602 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2021/revue-medicale-suisse-751/assip-nouvelle-modalite-therapeutique-apres-un-geste-suicidaire