lundi 17 juin 2024

ETUDE RECHERCHE USA Deux suicides sur dix surviennent sans trouble psychiatrique connu

Deux suicides sur dix surviennent sans trouble psychiatrique connu

Un suicide n’est pas toujours la conséquence d’un trouble psychiatrique. Les estimations varient, mais, dans les pays occidentaux, le pourcentage des personnes décédées par suicide sans maladie psychiatrique varie de 5 % à 40 %, selon le pays. Cela est observé même avec les méthodes robustes « d’autopsie psychologique ». 

Une étude transversale auprès de 2 000 personnes

Pour avoir une estimation plus précise de ce chiffre, une étude a été menée aux Etats-Unis, sur un échantillon représentatif de la population et incluant plus 36 000 personnes âgées de 20 à 65 ans. L’interrogatoire retrouvait au moins un antécédent de tentative de suicide chez 2 000 d’entre elles. 

Les données montrent ici que 6,2 % des tentatives de suicide sont survenues en dehors de tout contexte de maladie psychiatrique au moment de l’enquête. Ce chiffre passe à 19,6 % lorsque sont incluses les personnes dont la première tentative de suicide est survenue alors qu’aucun antécédent psychiatrique n’était apparent, soit parce que le trouble est apparu ensuite, soit parce que les patients ne remplissaient pas les critères au moment de l’interrogatoire. Ces résultats sont valables quel que soit l’âge ou le genre.

Elargir le dépistage d’antécédents de TS

Ces données ont de nombreuses implications. D’un point de vue nosologique, le fait qu’une tentative de suicide peut survenir en l’absence de maladie psychiatrique suggère qu’il ne s’agit pas uniquement d’un symptôme, d’un épiphénomène ou de la conséquence de troubles comme une dépression majeure ou une personnalité borderline, pour lesquels l’idée de suicide ou le passage à l’acte constituent des critères diagnostiques. Cela va dans le sens d’un argument souvent avancé dans le contexte de l’aide médicale à mourir, selon lequel la mort volontaire n’est pas obligatoirement pathologique. 

Une autre implication est clinique. Il apparaît en effet de ces données que la recherche d’antécédents de tentative de suicide ne doit pas se limiter aux patients ayant des troubles psychiatriques, mais être menée aussi chez les personnes sans maladie psychiatrique, étant donné le lien entre une première tentative de suicide et des récidives. 

Les auteurs plaident donc pour une modification des stratégies de réduction du risque de suicide, qui devraient être élargies, et ne pas cibler seulement les personnes présentant une maladie psychiatrique.

References

Oquendo MA, Wall M, Wang S, et al. Lifetime Suicide Attempts in Otherwise Psychiatrically Healthy Individuals. JAMA Psychiatry. 2024 Jun 1;81(6):572-578. doi: 10.1001/jamapsychiatry.2023.5672.

https://www.jim.fr/viewarticle/deux-suicides-dix-surviennent-sans-trouble-psychiatrique-2024a1000b48?ecd=wnl_all_240614_jim_daily-doctor_etid6595337&uac=184019MG&impID=6595337&sso=true