Y a-t-il plus de suicides après le suicide d’une célébrité ?
Niederkrotenthaler T & al. BMJ
18 mars 2020 Par Nathalie Barrès
Résumé d’articles
10 avr. 2020
À retenir
Les annonces par les médias du suicide d’une célébrité auraient un impact non négligeable puisqu’elles sont associées à une augmentation de 13% du risque de suicide et de 30% du risque de suicide par la même méthode, dans le mois qui suit au sein de la population générale. Pour juger de l’impact de cette association, en comparaison, les auteurs mentionnent que la crise financière de 2008 a été associée à une augmentation de 6% du taux de suicide dans le mois qui a suivi. Ces données renforcent les preuves de la nécessité d’une communication responsable et encadrée de la part des médias lorsqu’ils relatent de tels événements.
Protocole de l’étude
Une revue de la littérature a mis en évidence les études publiées jusqu’en septembre 2019 ayant évalué l’association entre le taux de suicide avant et après la communication par les médias du décès d’une célébrité par suicide. Les données de ces études ont ensuite été incluses dans une méta-analyse.
Quel est l’intérêt de cette étude ?
Ce phénomène encore appelé l’effet Werther du nom de protagoniste principal du roman de Goethe paru en 1774, les Souffrances du jeune Werthermettant en scène le suicide d’un jeune homme. Une vague de suicide a pu être constatée à la sortie de cet ouvrage. La reconnaissance de ce phénomène a conduit les organisations de santé mentale et de prévention du suicide, ainsi que l’OMS a établir des recommandations pour les médias lors de la diffusion d’informations sur le suicide de célébrités. Ces recommandations soulignent l’importance de rappeler le rôles des maladies mentales traitables, les rappels des moyens et des lieux d’aide aux personnes ayant des pensées suicidaires, ainsi qu’un message d’espoir valorisant le côté évitable de l’acte. Cependant, de nombreux médias n’en tiennent pas compte arguant que les niveaux de preuves de ces associations sont insuffisants, d’où l’intérêt d’une méta-analyse.
Principaux résultats
Au total les données de 20 études jugées comme à risque de biais modéré ont été incluses dans la méta-analyse. Les résultats montrent :
Qu’il n’y aurait pas d’augmentation significative du taux de suicide suite à l’annonce par les médias du suicide d’une personne non publiquement connue. La durée médiane du suivi dans les études en question était très courte.
En revanche l’annonce du suicide d’une célébrité augmenterait de 13% (ratio de taux poolée 1,13 [1,08-1,18], p<0,001) le risque de suicide dans la population générale au cours des 28 jours suivants l’annonce.
Le fait de communiquer sur la méthode de suicide utilisée par la célébrité augmentait de 30% (ratio de taux poolé 1,30 [1,18-1,44], p<0,001) les suicides par cette même méthode.
Principales limitations
Forte hétérogénéité entre les études incluses.
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Références
Disclaimer
Niederkrotenthaler T, Braun M, Pirkis J, Till B, Stack S, Sinyor M, Tran US, Voracek M, Cheng Q, Arendt F, Scherr S, Yip PSF, Spittal MJ. Association between suicide reporting in the media and suicide: systematic review and meta-analysis. BMJ. 2020;368:m575. doi: 10.1136/bmj.m575. PMID: 32188637
https://www.univadis.fr/viewarticle/y-a-t-il-plus-de-suicides-apres-le-suicide-d-une-celebrite-717254?