mardi 10 septembre 2013

USA RECHERCHE ETUDE ADOPTION ET COMPORTEMENT SUICIDAIRE

D'apres article Medscape France " Enfants adoptés : 4 fois plus de tentatives de suicide" Auteur : Vincent Richeux

10 septembre 2013 http://www.medscape.fr/humeur/articles/1581267/

Washington, Etats-Unis - Menée sur plus d'un millier d'adolescents pendant une période de suivi de quatre ans, une étude américaine confirme le risque élevé de suicide chez les enfants adoptés. Quatre fois plus de tentatives de suicide ont été rapportées dans cette population par rapport aux enfants non adoptés [1].

De précédentes études ont déjà fait état d'un lien entre l'adoption et un risque accru de suicide, notamment en Suède. Aucune ne s'est toutefois attardée sur la présence de facteurs de risque chez les enfants adoptés.

Dans cette évaluation, les chercheurs ont travaillé à partir de l'étude Sibling Interaction and Behavior Study (SIBS) de l'université du Minesota. Celle-ci a suivi, de 1998 à 2004, 692 enfants adoptés et 540 enfants non adoptés.

Les enfants adoptés avaient 15 ans en moyenne au moment de l'inclusion. Tous avaient été recueillis dans leur famille avant l'âge de deux ans, la moyenne d'âge étant de 4,7 mois.

Les trois quart des enfants provenaient d'un pays étranger, majoritairement de Corée du Sud (90%), une proportion représentative des familles adoptives du Minesota, précisent les chercheurs.

Sur les quatre années de suivi, les enfants, les parents, ainsi que les professeurs ont été interrogés. Des enquêteurs ont demandé régulièrement s'il y avait eu une première tentative de suicide et ont évalué les facteurs de risque de suicide pour chaque enfant.

Pas de corrélation avec le type d'adoption

Parmi les facteurs de risques figurent l'usage de drogue et les troubles psychiatriques, tels que la dépression et les troubles du comportement, rappellent les auteurs

« Les traits de personnalité sont également impliqués, en particulier l'impulsivité, l'agressivité, la névrose et la faible estime de soi », tout comme « un contexte familial et scolaire difficile », ajoutent-ils.

Par conséquent, l'évaluation a porté notamment sur l'usage de drogue, le comportement, la personnalité, les troubles de l'humeur, l'environnement familial, ainsi que sur le décrochage scolaire de l'enfant.

Durant ce suivi, 47 tentatives de suicide (7,2%) ont été rapportées chez les enfants adoptés, contre neuf (1,8%) chez les enfants non adoptés, ce qui représente un taux quatre fois plus élevé. Les tentatives se sont davantage observées chez les jeunes filles adoptées, que chez les garçons, avec 31 tentatives contre 16.

Selon les chercheurs, il n'y a pas de corrélation entre le risque de suicide et l'âge de l'enfant lors de son placement dans sa famille d'accueil. Le comportement suicidaire n'est pas non plus associé au type d'adoption, qu'elle soit nationale ou internationale.

Les facteurs de risque de suicide se retrouvaient chez les enfants qui ont tenté de mettre fin à leurs jours, tant chez les enfants adoptés, que chez les enfants non adoptés. Ils présentaient plus fréquemment des troubles externalisés et rapportaient davantage de conflits avec leurs proches que les enfants sans comportement suicidaire.

Traumatisme lié à l'abandon

Entre les enfants adoptés et ceux non adoptés ayant tenté de se suicider, il est apparu une différence significative sur quelques facteurs de risque. Les troubles du comportement, une « baisse de moral » et des relations conflictuelles avec les proches étaient plus notables chez les enfants adoptés.

Après un ajustement prenant en compte les différents facteurs de risque de suicide, le taux de tentative est resté élevé chez les enfants adoptés, notent les auteurs, qui avancent un risque relatif de 3,70 contre 4,23 sans ajustement.

C'est la première fois que la hausse du risque de suicide chez les enfants adoptés est démontrée aux Etats-Unis, soulignent les auteurs.

Ces résultats confirment ceux d'une étude suédoise, publiée en 2002 [2], qui avait rapporté, en se penchant sur une cohorte de plus de 11 000 enfants adoptés, un risque accru de tentative de suicide (risque relatif de 3,6), mais aussi d'admission en hôpital psychiatrique (3,2), d'abus de drogue (5,2) ou d'alcool (2,6).

Parmi les facteurs pouvant être associés à cette hausse, les chercheurs évoquent l'héritage familial. « La toxicomanie, le comportement suicidaire ou les maladies psychiatriques des parents biologiques » peuvent en partie expliquer les cas de suicide chez l'enfant adopté.

S'y ajoutent « le traumatisme lié à l'abandon, aux séparations multiples, ainsi que les carences affectives précoces », des facteurs qui conditionnent le développement de la filiation entre enfants et parents adoptifs.

« Les praticiens doivent prendre en considération ce risque élevé de suicide chez les enfants adoptés, surtout lorsqu'ils présentent des facteurs de risque », ont conclu les chercheurs.