Troubles de la santé mentale: les enfants aussi
Documentaire. Ce mardi à 22h25 sur Arte.
Arte
08h55
A seulement 17 ans, Laura ne veut plus vivre. Elle croit que personne ne s'intéresse à elle. Elle ne s'imagine aucun avenir. 'Je dors pour que le temps passe et, dans ces moments-là, je me dis que mon coeur va peut-être s'arrêter de battre", confie-t-elle. Luis, 10 ans, a également envie de quitter ce monde qui le fait souffrir : "Une fois, je me suis retrouvé devant un couteau et j'ai pensé à me frapper avec." Ces
jeunes souffrent de dépression. Une maladie encore taboue en ce qui
concerne les enfants et les adolescents, parce qu'elle est plutôt censée
atteindre des adultes en proie à des difficultés personnelles, et que
les familles des petits malades se sentent stigmatisées dans leur
éducation.
Les parents ne sont pas toujours responsables, même si cet état peut effectivement résulter d'un manque d'affection ou d'un amour insuffisamment formulé. "Les problèmes environnementaux, sociaux, familiaux, scolaires, qui se mélangent, sont des problèmes de santé mentale qui s'expriment par des symptômes de dépression", explique la psychologue Sigrid Mathiszig dans le premier volet des deux documents allemands successivement diffusés ce soir. L'origine du mal est donc multiple et, parfois, essentiellement génétique ou psychique. Le problème est de parvenir à diagnostiquer la pathologie. Trop souvent, celle-ci est confondue par les médecins avec des troubles du déficit de l'attention avec hyperactivité (TDAH), soit une incapacité à canaliser ses impulsions, alors qu'il s'agit de tout autre chose. Concernant les symptômes de la dépression des plus jeunes : "Ils se caractérisent par un dégoût pour le jeu et un manque d'entrain général, indique Michael Schulte-Markwort, chef de service en psychiatrie infantile et juvénile. Plus les enfants sont âgés, plus ils sont tristes. Cela peut aller jusqu'à des pensées suicidaires." Mais, généralement, "la dépression est difficile à reconnaître parce que les petits nous montrent une autre image, ajoute l'éducatrice spécialisée Barbara Hertam. Ils restent souvent enjoués et hyperactifs malgré tout" .
En Allemagne, de 20 à 25 % des enfants et adolescents souffrent de troubles psychiatriques et psychosomatiques. Dans 6 % des cas, il s'agit d'une dépression. Des chiffres un peu moins élevés qu'en France et comparables au reste des pays européens. L'intérêt de la médecine pour cette maladie chez les enfants date seulement du début du XIXe siècle. L'histoire de la pédopsychologie n'apparaissant, elle, qu'un siècle plus tard, quand les enfants ont été considérés comme des personnes à part entière. Aujourd'hui, pour eux, le traitement passe par plusieurs méthodes, distinctes ou associées, selon le degré de gravité : psychopharmacologie, psychothérapie analytique et/ou comportementaliste, mais aussi relaxation, thérapie de groupe, thérapie familiale. Mais les soins peuvent être très longs. Beaucoup de parents, et en l'occurrence ceux de Laura, se sentent alors impuissants. "Au début, on pense que son enfant est capricieux, dit la mère de la jeune fille, puis on se rend compte que c'est plus profond que ça." Malgré la désignation de son problème, Laura s'entend encore dire : "Sors, bouge ! " "Mais cela ne sert à rien, poursuit-elle. Je ne peux pas. Je n'y arrive pas." Luis, hospitalisé depuis douze semaines, avec retour chez lui le week-end, ne pense qu'à fuir les médecins. Les critiques de sa mère sur le peu de résultats de son traitement l'influencent et nuisent à la thérapie.
La dépression des enfants et des adolescents frappe toutes les catégories sociales. Cependant, les plus défavorisées seraient les plus touchés. "Quand les parents n'ont pas de perspectives, qu'ils ont jeté l'éponge, qu'ils font une grande consommation de substances addictives, tel l'alcool, qu'ils ne transmettent pas de valeurs parce qu'ils sont sortis du système social, le développement psychique des enfants est compromis", souligne le professeur en psychiatrie infantile et juvénile Franz Resch. Or, si l'injustice sociale qui caractérise cette période de crise persiste, un accroissement des troubles psychiques chez les mineurs est à craindre. Tant pour ces enfants que pour la société. Relation de cause à effet : selon un rapport sur les suicides en prison, 40 % des détenus français souffrent d'une dépression remontant souvent à l'enfance, devenue chronique parce que pas, ou mal, traitée. D'où l'importance d'un diagnostic précoce.
Sylvie Véran
Les parents ne sont pas toujours responsables, même si cet état peut effectivement résulter d'un manque d'affection ou d'un amour insuffisamment formulé. "Les problèmes environnementaux, sociaux, familiaux, scolaires, qui se mélangent, sont des problèmes de santé mentale qui s'expriment par des symptômes de dépression", explique la psychologue Sigrid Mathiszig dans le premier volet des deux documents allemands successivement diffusés ce soir. L'origine du mal est donc multiple et, parfois, essentiellement génétique ou psychique. Le problème est de parvenir à diagnostiquer la pathologie. Trop souvent, celle-ci est confondue par les médecins avec des troubles du déficit de l'attention avec hyperactivité (TDAH), soit une incapacité à canaliser ses impulsions, alors qu'il s'agit de tout autre chose. Concernant les symptômes de la dépression des plus jeunes : "Ils se caractérisent par un dégoût pour le jeu et un manque d'entrain général, indique Michael Schulte-Markwort, chef de service en psychiatrie infantile et juvénile. Plus les enfants sont âgés, plus ils sont tristes. Cela peut aller jusqu'à des pensées suicidaires." Mais, généralement, "la dépression est difficile à reconnaître parce que les petits nous montrent une autre image, ajoute l'éducatrice spécialisée Barbara Hertam. Ils restent souvent enjoués et hyperactifs malgré tout" .
En Allemagne, de 20 à 25 % des enfants et adolescents souffrent de troubles psychiatriques et psychosomatiques. Dans 6 % des cas, il s'agit d'une dépression. Des chiffres un peu moins élevés qu'en France et comparables au reste des pays européens. L'intérêt de la médecine pour cette maladie chez les enfants date seulement du début du XIXe siècle. L'histoire de la pédopsychologie n'apparaissant, elle, qu'un siècle plus tard, quand les enfants ont été considérés comme des personnes à part entière. Aujourd'hui, pour eux, le traitement passe par plusieurs méthodes, distinctes ou associées, selon le degré de gravité : psychopharmacologie, psychothérapie analytique et/ou comportementaliste, mais aussi relaxation, thérapie de groupe, thérapie familiale. Mais les soins peuvent être très longs. Beaucoup de parents, et en l'occurrence ceux de Laura, se sentent alors impuissants. "Au début, on pense que son enfant est capricieux, dit la mère de la jeune fille, puis on se rend compte que c'est plus profond que ça." Malgré la désignation de son problème, Laura s'entend encore dire : "Sors, bouge ! " "Mais cela ne sert à rien, poursuit-elle. Je ne peux pas. Je n'y arrive pas." Luis, hospitalisé depuis douze semaines, avec retour chez lui le week-end, ne pense qu'à fuir les médecins. Les critiques de sa mère sur le peu de résultats de son traitement l'influencent et nuisent à la thérapie.
La dépression des enfants et des adolescents frappe toutes les catégories sociales. Cependant, les plus défavorisées seraient les plus touchés. "Quand les parents n'ont pas de perspectives, qu'ils ont jeté l'éponge, qu'ils font une grande consommation de substances addictives, tel l'alcool, qu'ils ne transmettent pas de valeurs parce qu'ils sont sortis du système social, le développement psychique des enfants est compromis", souligne le professeur en psychiatrie infantile et juvénile Franz Resch. Or, si l'injustice sociale qui caractérise cette période de crise persiste, un accroissement des troubles psychiques chez les mineurs est à craindre. Tant pour ces enfants que pour la société. Relation de cause à effet : selon un rapport sur les suicides en prison, 40 % des détenus français souffrent d'une dépression remontant souvent à l'enfance, devenue chronique parce que pas, ou mal, traitée. D'où l'importance d'un diagnostic précoce.
Sylvie Véran