Ce sont les chiffres de l'Observatoire régional de la santé (Orsa) publiés en mars 2011 ("Profil sociosanitaire du territoire de Béarn-Soule"), les seuls disponibles sur le sujet au niveau local.
Le suicide serait-il tabou ? A la SNCF, on reconnaît "ne pas souhaiter communiquer" sur le sujet. Le nombre de décès constatés sur les voies serait "colossal, de l'ordre de 300 par an en France", selon le docteur Thierry Della, chef des urgences psychiatriques au centre hospitalier des Pyrénées à Pau. Le praticien reconnaît que peu de données existent en la matière car il est très difficile de les établir. "Cela reste sous-estimé car tous les décès par suicide ne sont pas comptabilisés en tant que tels". "En revanche on sait qu'on a toujours un décès sur 10 tentatives. Or, depuis l'ouverture du service des urgences psychiatriques à Pau, c'est-à-dire il y a une vingtaine d'années, nous avons un chiffre constant de 500 tentatives par an" indique le Dr Della.
Des données qui prennent en compte les admissions de l'hôpital François-Mitterrand, également "stables depuis 2005" selon l'établissement (154 patients admis après une tentative de suicide en 2011 contre 211 en 2005 selon les chiffres fournis). La tendance au niveau national serait d'ailleurs plutôt à la baisse. On serait passé de 15 000 par an, il y a une dizaine d'années, à 10 000 aujourd'hui. Une diminution qui concerne également les jeunes. "En 1993, le nombre de suicides chez les moins de 24 ans était de 900. En 2010, il est de 550" indique le Dr Della. Et le contexte économique et social morose ne semble pas un facteur aggravant. Même si à la médecine du travail, le Dr Gacia-Fondan, spécialiste de la souffrance au travail, note que "le nombre de gens qui ont pensé au suicide est important."
"Il y a un meilleur dépistage" estime le docteur Florence Guyot-Gans, psychiatre aux urgences du centre hospitalier des Pyrénées et responsable des consultations psychiatriques à l'hôpital général. "Il y a 20 ans, il n'y avait pas de psychiatre aux urgences de l'hôpital. Aujourd'hui, la consultation est obligatoire pour chaque personne admise après une tentative de suicide" souligne-t-elle. "Les médecins du travail sont extrêmement mobilisés et les généralistes ont été sensibilisés. Aujourd'hui, ils nous adressent plus facilement les personnes à risque" insiste le Dr Della.Cette meilleure prise en compte "participe à cette diminution" espèrent les deux psychiatres.
Les mentalités ont elles aussi évolué. "Avant, dans les familles, il y avait un grand nombre de non-dits autour du suicide. C'était marqué par le sceau de la honte. C'est toujours aussi difficile à vivre pour les familles mais elles savent où chercher de l'aide". Les gens vont également plus facilement consulter un psychiatre ou un psychologue. "L'an dernier, plus de 13 000 personnes par an ont consulté nos services" précise le Dr Della. "Or, le simple fait d'en discuter fait chuter le risque de passage à l'acte. Le pire, c'est celui qui n'a aucun moyen de s'extérioriser".