Prédire le risque de suicide chez les jeunes adultes à risque
Source https://www.upmc.com/media/news/022719-suicide-prs-jama
27/02/2019
PITTSBURGH - Le suicide est la deuxième cause de décès aux États-Unis parmi les 15 à 34 ans. Pourtant, malgré des années de recherche en santé mentale, notre capacité à prédire le comportement suicidaire n’est que légèrement supérieure à celle du hasard. Des recherches menées par l’École de médecine de l’Université de Pittsburgh proposent une nouvelle approche du problème, montrant que la fluctuation et la gravité des symptômes dépressifs permettent de mieux prédire le risque de comportement suicidaire chez les jeunes adultes à risque que les diagnostics psychiatriques.
Publiés aujourd'hui dans JAMA Psychiatry, les résultats, qui incluent la description d'un nouveau Prediction Risk Score (PRS), pourraient aider les cliniciens à mieux identifier les patients à risque de comportement suicidaire et à intervenir plus tôt.
"Prédire le comportement suicidaire est l'une des tâches les plus difficiles en psychiatrie, mais pour un résultat aussi menaçant pour la vie, il est absolument inacceptable que nous ne fassions que légèrement mieux que le hasard", a déclaré Nadine Melhem, auteure principale, Ph.D., professeure agrégée de psychiatrie à la Pitt's School of Medicine et chercheure au UPMC Western Psychiatric Hospital.
Les médecins s’appuient beaucoup sur les diagnostics psychiatriques pour estimer le risque de suicide, mais bien qu'ils soient très utiles, les diagnostics à eux seuls ne font pas un excellent travail, car ce sont souvent des étiquettes qui ne changent pas. Au lieu de cela, Melhem souhaitait développer un modèle prédictif permettant d'identifier les symptômes susceptibles de changer au fil du temps, car un tel modèle indiquerait plus précisément la probabilité d'un comportement suicidaire chez les jeunes adultes à risque.
Dans l’étude, Melhem et ses collègues, David Brent, MD, professeur de psychiatrie à la Pitt School of Medicine, et John Mann, MD, professeur de psychiatrie à la Columbia University, ont suivi 663 jeunes adultes présentant un risque élevé de comportement suicidaire en raison de leur les parents avaient reçu un diagnostic de troubles de l'humeur. Au cours des 12 dernières années, les parents et leurs enfants ont été évalués périodiquement au moyen d’évaluations standard pour les diagnostics psychiatriques et les symptômes de dépression, de désespoir, d’irritabilité, d’impulsivité, d’agression et d’agression impulsive.
Après avoir analysé les données relatives à tous ces symptômes, les chercheurs ont découvert qu’avoir des symptômes dépressifs sévères et une grande variabilité dans le temps de ces symptômes était le prédicteur le plus précis du comportement suicidaire. La sévérité et la variabilité de l'impulsivité et de l'agressivité au fil du temps n'ont pas contribué au modèle de prédiction.
En combinant cette mesure de la variabilité des symptômes dépressifs à d'autres facteurs pertinents tels que l'âge précoce, les troubles de l'humeur, la maltraitance dans l'enfance et les antécédents personnels et parentaux de tentatives de suicide, Melhem et son équipe ont élaboré un score de risque prédictif. Ils ont conclu qu'un score d'au moins 3 de ces facteurs de risque indiquait un risque plus élevé de comportement suicidaire. En utilisant ce seuil dans la population de l’étude, ils ont découvert que le test prédictif était sensible à 87%, bien mieux que les modèles actuellement disponibles.
Le modèle doit être testé indépendamment et reproduit dans différentes populations. Des recherches futures visant à inclure des marqueurs biologiques objectifs seront nécessaires pour rendre le score de risque de prévision plus précis, note Melhem.
"Nos résultats suggèrent que lors du traitement des patients, les cliniciens doivent prêter une attention particulière à la sévérité des symptômes dépressifs actuels et passés et essayer de réduire leur sévérité et leurs fluctuations pour diminuer le risque de suicide", a déclaré Melhem. Prediction Risk Score est un ajout précieux à la trousse à outils du médecin pour aider à prévoir le risque de suicide chez les personnes à haut risque. Elle peut être réalisée à moindre coût, car les informations nécessaires sont déjà collectées dans le cadre d’évaluations standard."
L'étude a été financée par les subventions MH056612, MH056390 et MH077930 des National Institutes of Health.
Source https://www.upmc.com/media/news/022719-suicide-prs-jama
L’ouest
du département des Côtes-d’Armor présente de très forts taux de
suicide. Un sujet trop peu abordé. Deux soirées sur la vie après la
disparition d’un proche y seront consacrées, à Callac et Paimpol, les
26 février et 1er mars.
Les chiffres publiés récemment par Santé publique
France sont sans appel : la Bretagne est toujours la région de France
qui compte le plus de suicides par an (24,7 pour 100 000 habitants),
surtout en Côtes-d’Armor. Le Trégor-Goëlo-Argoat (zones de Guingamp,
Lannion, Paimpol et du Centre-Bretagne) est « le territoire le plus touché de France, avec près de 60 suicides chaque année, soit plus du double de la moyenne française », déplore Mélanie Coquelin, psychologue clinicienne à la fondation Bon-Sauveur de Bégard, animatrice de la cellule prévention suicide.450 personnes touchéesSelon elle, 450 proches sont touchés par ces disparitions, chaque année. « Le suicide et la souffrance qui en résulte ne sont pas des fatalités… Encore faut-il briser le tabou qui entoure cette question. »
Pour y concourir, deux soirées sur la vie après la disparition d’un proche sont organisées, à Callac et Paimpol, à destination du grand public et des professionnels, avec un objectif : lutter contre le silence. « On constate des phénomènes de honte autour de cette question : les gens se renferment, regrette Amélie Rabaud, chargée de mission santé au Pays de Guingamp. Alors que tous les sentiments sont légitimes après la perte d’un proche : abattement, colère, incompréhension, culpabilité… qui font doublement souffrir. C’est la double peine. »
Rompre l’isolementSi une personne présente des changements inexpliqués de comportements, s’isole, se replie, abandonne ses centres d’intérêt, verbalise des idées suicidaires, il ne faut pas hésiter à la questionner sur le sujet, pour rompre l’isolement. « L’on peut ensuite proposer plusieurs solutions, sans les imposer, poursuit Amélie Rabaud, comme l’inviter à consulter son médecin traitant, le centre médico-psychologique, voire les urgences ».
Soirées « La vie après la disparition d’un proche par suicide » : témoignages de parents endeuillés, avec la participation de professionnels, qu’il est possible de rencontrer pour des échanges individuels. Le 26 février à 20 h, au cinéma d’Argoat, à Callac. Puis le 1er mars, à 20 h, à la salle des fêtes, à Paimpol.
https://www.ouest-france.fr/bretagne/guingamp-22200/cotes-d-armor-briser-le-tabou-du-suicide-6230934
Complément
Côtes-d’Armor. « Je ne comprendrai jamais le suicide de ma fille »
Côtes-d’Armor. « Je ne comprendrai jamais le suicide de ma fille »
Ouest-France (site web)
mercredi 20 février 2019 603 mots
OUEST-FRANCE
La
fille de Paul Guibert s’est suicidée il y a 11 ans. Depuis, il s’engage
auprès d’associations, et viendra témoigner de sa reconstruction à
Callac et Paimpol.
Fabrice BERNAY.
Pour le restant de sa vie, Paul Guibert se souviendra de cette terrible journée de mai 2008. « Une amie de ma fille m’a appelé au téléphone, me disant de venir, très vite. »
Au volant de sa voiture, sur le trajet qui mène l’architecte vers
l’appartement de sa fille, à trois stations de métro, dans le XIIe
arrondissement de Paris, il pressent que sa vie bascule.
Ce jour-là, sa fille unique, Cassandre, s’est pendue dans l’étroit jardin de son domicile, à l’âge de 32 ans. « Elle était dépressive, en mal-être, mais je n’imaginais pas qu’elle puisse en arriver là », se remémore Paul, d’une voix blanche. Pourtant, il était prévenu : « Un jour, je le ferai », avait-elle annoncé à son père, au cours des cinq dernières années de sa vie. Des mois de hauts et de bas, de tentatives de suicide, d’hospitalisations, de rendez-vous psychiatriques, qui ne seront pas venus à bout de ses « idées noires ».
« On l’aimait, elle sombrait »
Paul Guibert n’avait jamais pu se résoudre à penser l’impensable : « L’amour vous aveugle. Elle était une dessinatrice tellement douée, reçue deuxième sur 1 600 à l’école des Arts Déco… Je lui disais qu’elle était belle, que beaucoup de gens l’aimaient, et elle sombrait, avec une image dévalorisée d’elle-même. Je ne le comprendrai jamais. »
Un immense mal-être qui la mènera à ce geste fatal, après avoir griffonné un dernier message pour ses proches : « Elle ne voulait plus qu’on lui prodigue des soins, ni retourner à l’hôpital. Elle s’excuse auprès de ses amis, de nous, expliquant que la vie lui était devenue trop difficile. »
Une vie possible après
Une « immense douleur » s’empare des parents de Cassandre. L’état de sidération laisse place à la culpabilité, la colère, l’abattement, puis des centaines de questions assaillent ce père, orphelin de sa fille : « Pendant deux ou trois ans, 24 Heures sur 24. »
Et enfin, « l’espoir » : celui d’une vie possible « après ». Il se rapproche de l’association Phare enfants parents, intègre et anime des groupes de parole, qui lui ont « sauvé la vie. La verbalisation de la douleur m’a énormément aidé vers la reconstruction. »
Engagement militant
Il devient militant de la prévention du suicide, témoigne dans des documentaires et crée sa propre association : laVita, qui offre un soutien psychothérapeutique immédiat et gratuit aux jeunes en mal-être et milite pour la fin du tabou sur le suicide. Aujourd’hui encore, il est bénévole pour l’association Empreintes, qui accompagne les deuils.
Des endroits « où l’on peut rire, pleurer, revivre ». Un engagement dans le droit fil de celui qu’il mènera, auprès de la fondation Bon-Sauveur de Bégard, en venant témoigner de sa reconstruction, à Callac et Paimpol, les 26 février et 1er mars.
Soirées « La vie après la disparition d’un proche par suicide » : témoignages de parents endeuillés, avec la participation de professionnels, qu’il est possible de rencontrer pour des échanges individuels. Le 26 février à 20 h, au cinéma d’Argoat, à Callac. Puis le 1er mars, à 20 h, à la salle des fêtes, à Paimpol.
Cet article est paru dans Ouest-France (site web)
Ce jour-là, sa fille unique, Cassandre, s’est pendue dans l’étroit jardin de son domicile, à l’âge de 32 ans. « Elle était dépressive, en mal-être, mais je n’imaginais pas qu’elle puisse en arriver là », se remémore Paul, d’une voix blanche. Pourtant, il était prévenu : « Un jour, je le ferai », avait-elle annoncé à son père, au cours des cinq dernières années de sa vie. Des mois de hauts et de bas, de tentatives de suicide, d’hospitalisations, de rendez-vous psychiatriques, qui ne seront pas venus à bout de ses « idées noires ».
« On l’aimait, elle sombrait »
Paul Guibert n’avait jamais pu se résoudre à penser l’impensable : « L’amour vous aveugle. Elle était une dessinatrice tellement douée, reçue deuxième sur 1 600 à l’école des Arts Déco… Je lui disais qu’elle était belle, que beaucoup de gens l’aimaient, et elle sombrait, avec une image dévalorisée d’elle-même. Je ne le comprendrai jamais. »
Un immense mal-être qui la mènera à ce geste fatal, après avoir griffonné un dernier message pour ses proches : « Elle ne voulait plus qu’on lui prodigue des soins, ni retourner à l’hôpital. Elle s’excuse auprès de ses amis, de nous, expliquant que la vie lui était devenue trop difficile. »
Une vie possible après
Une « immense douleur » s’empare des parents de Cassandre. L’état de sidération laisse place à la culpabilité, la colère, l’abattement, puis des centaines de questions assaillent ce père, orphelin de sa fille : « Pendant deux ou trois ans, 24 Heures sur 24. »
Et enfin, « l’espoir » : celui d’une vie possible « après ». Il se rapproche de l’association Phare enfants parents, intègre et anime des groupes de parole, qui lui ont « sauvé la vie. La verbalisation de la douleur m’a énormément aidé vers la reconstruction. »
Engagement militant
Il devient militant de la prévention du suicide, témoigne dans des documentaires et crée sa propre association : laVita, qui offre un soutien psychothérapeutique immédiat et gratuit aux jeunes en mal-être et milite pour la fin du tabou sur le suicide. Aujourd’hui encore, il est bénévole pour l’association Empreintes, qui accompagne les deuils.
Des endroits « où l’on peut rire, pleurer, revivre ». Un engagement dans le droit fil de celui qu’il mènera, auprès de la fondation Bon-Sauveur de Bégard, en venant témoigner de sa reconstruction, à Callac et Paimpol, les 26 février et 1er mars.
Soirées « La vie après la disparition d’un proche par suicide » : témoignages de parents endeuillés, avec la participation de professionnels, qu’il est possible de rencontrer pour des échanges individuels. Le 26 février à 20 h, au cinéma d’Argoat, à Callac. Puis le 1er mars, à 20 h, à la salle des fêtes, à Paimpol.
Cet article est paru dans Ouest-France (site web)
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Suicide. Une soirée pour parler de la souffrance
Publié le 21 février 2019 Le Télégramme
Amélie Rabaud, chargée de mission santé au pays de Guingamp, et Mélanie Coquelin, psychologue, ont présenté les grandes lignes de cette soirée.
Le pays de Guingamp et celui de Lannion sont particulièrement touchés par le phénomène du suicide. Le 26 février, une soirée se déroulera au cinéma de Callac pour échanger sur la souffrance après la disparition d’un proche par suicide.
C’est un sujet qui reste encore tabou. Le mardi 26 février, à 20 h, la parole pourra se libérer au cinéma La Belle équipe, à Callac. Le pays de Guingamp et la fondation Bon Sauveur de Guingamp vont y organiser une soirée sur le thème du suicide. Le film « La vie après la disparition d’un proche par suicide » de Katia Chapoutier sera projeté au cinéma callacois, en présence de Paul Guilbert, parent endeuillé. Trois animateurs de la cellule prévention suicide de la Fondation Bon sauveur animeront cette soirée. Cette soirée est à destination du grand public. « L’idée de cette soirée, c’est d’aborder la question du suicide, de la souffrance liée au suicide et de la souffrance liée au deuil après un suicide. On veut surtout passer un message fort qui est que le suicide et la souffrance ne sont pas une fatalité. Il y a des aides qui sont appropriées à partir du moment où l’on veut en parler. L’objectif de la soirée, c’est de briser un tabou et un silence », commente Mélanie Coquelin, psychologue et animatrice de la cellule prévention suicide.
Un territoire très touché
Cette soirée permettra aussi de souligner que tout le monde peut traverser cette épreuve et aller mieux avec les aides adaptées. Sur le pays de Guingamp, le suicide demeure toujours un fléau : 30 cas par an. « Le Trégor Goëlo Argoat, le pays de Guingamp et de Lannion, est le territoire de France le plus concerné par le suicide et par les tentatives de suicide », ajoute Mélanie Coquelin. C’est quelque 60 suicides par an sur ce Territoire. « Ça veut dire que ce sont 450 personnes qui vont être impactées. On s’adresse aux personnes qui auraient des idées suicidaires mais aussi aux personnes qui auraient été touchées par un proche qui s’est suicidé ou qui aurait des idées suicidaires ».
Depuis une quinzaine d’années, ces chiffres reculent. Les tentatives de suicide sont ainsi tombées de 750 à 450. Le nombre de suicides a également baissé. « Ça reste encore élevé et nous restons toujours très concernés ». Cette soirée permettra aux animateurs de la cellule prévention suicide de la fondation Bon Sauveur d’informer le public sur les différents points d’accueil et d’écoute pour ceux qui seraient confrontés au suicide : les centres médicaux psychologiques, point d’accueil et d’écoute pour les jeunes… Après la projection du film, un temps d’échange est prévu.
Les vigilants veilleurs
Cette soirée ne se déroule pas à Callac par hasard. C’est l’occasion également de faire connaître les groupes de vigilants veilleurs. C’est un dispositif de prévention et d’aide. « Ce dispositif est actif par le biais de bénévoles. Ce sont des citoyens bien installés dans leur commune et en lien avec les résidents de la commune ». Formés, ces citoyens sont aptes ensuite à reconnaître des personnes suicidaires et les orienter vers des points d’aide. Des groupes existent déjà sur les secteurs de Belle-Isle-en-Terre, La Roche-Jaudy ou Tréguier. Le pays de Guingamp et la fondation Bon Sauveur aimerait bien développer ce dispositif sur de nouveaux territoires. Par exemple, vendredi 1er mars, à 20 h, le film « la vie après la disparition d’un proche par suicide » sera projeté à la salle des fêtes de Paimpol.
© Le Télégramme https://www.letelegramme.fr/cotes-darmor/guingamp/suicide-une-soiree-pour-parler-de-la-souffrance-21-02-2019-12214282.php#Lzhs5Qk8YDOjq1fB.99