Haute-Vienne Des sentinelles pour repérer les agriculteurs en souffrance
Le constat est sans appel. « Le risque suicidaire chez les agriculteurs est de 20 à 30 % plus élevé que dans le reste de la population » indique Daniel Lenoir, coordinateur national interministériel du plan de prévention du mal-être en agriculture. Un phénomène mis en lumière par le réalisateur Edouard Bergeon, dans son film Au nom de la terre inspiré par la vie de son père. Emmanuel Macron avait alors commandé un rapport qui a abouti à une feuille de route présentée par le gouvernement le 23 novembre 2021 avec, pour objectif, de lutter contre ce mal-être en replaçant l’humain au centre des préoccupations.
Le mal-être n’a pas toujours une cause économique
« La Haute-Vienne a été parmi les premiers départements à mettre en place un comité de pilotage départemental, poursuit-il. Une stratégie nationale de prévention du suicide est en place depuis 2018, elle est désormais déclinée en agriculture avec le développement d’un réseau de sentinelles qui alertera les personnes dont c’est le métier comme les psychologues. » Les causes de ce mal-être sont connues mais il n’est pas toujours facile de repérer les agriculteurs concernés du fait de leur isolement ou de leur solitude.
« Les banques, les coopératives, les comptables peuvent détecter ces difficultés économiques mais le mal-être n’a pas toujours une cause économique », constate-t-il. Agribashing, difficile corrélation entre vie familiale et vie professionnelle, pour les femmes en particulier… « Un accompagnement global économique et social peut être proposé comme une aide au répit pour les exploitants ou les salariés pour prendre un peu de distance. »
« Une quarantaine de sentinelles formées »
Après la première réunion du comité départemental de pilotage le 20 juin, la seconde s’est déroulée le 23 février et a permis de faire le point sur le déploiement de ce plan. « L’objectif est que chaque comité départemental ait un outil adapté à son département » précise Nicolas Loubère, chef du service de l’économie agricole de la DDT.
En Haute-Vienne, un réseau de sentinelles est en train de se mettre en place. Chaque citoyen volontaire suit une formation d’une journée et à l’issue, se prononce sur son engagement. « Les formations ont commencé en octobre et une quarantaine de sentinelles pourront prochainement parler à des agriculteurs en situation de mal-être, les orienter vers l’un de nos services en fonction de leurs besoins qu’il soit économique, social ou médical. Cela peut être un technicien d’une coopérative, un banquier, un citoyen, des associatifs, des élus, des agriculteurs…»
Un soutien gratuit, confidentiel et personnalisé leur sera apporté. Plusieurs portes d’entrée sont proposées et accessibles via un dépliant. « Ces services sont peu sollicités car peu connus, remarque-t-il. Nous avons choisi de communiquer ces numéros de manière la plus simple afin d’intervenir le plus en amont possible pour éviter le risque suicidaire et diriger l’agriculteur vers la bonne personne.»
La cellule Agri Accompagnement suit une cinquantaine d’exploitations mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. La MSA, la Chambre d’agriculture et Solidarité Paysans en suivent plusieurs centaines. « Nous avons besoin de gens pour repérer des personnes même si ce ne sont pas des sentinelles. Ce chiffre est sous-évalué car le mal-être est lié à un certain isolement. »
Pour
un problème de mal-être (solitude, dépression, détresse), la cellule
Agri’écoute de la MSA est joignable au 09 69 39 29 19 ou sur agriecoute.fr.
Pour des difficultés multiples d’ordre économique, technique ou social,
la cellule Agri Accompagnement est joignable au 0800 80 80 87.
Pour des difficultés professionnelles, familiales ou personnelles, le
service social de la MSA est à l’écoute au 05 55 93 40 30.
A ces numéros s’ajoutent le 3414 (gratuit) pour les personnes en souffrance et le 15 ou le 112 du SAMU pour les urgences.
Pour suivre la formation sentinelle contacter le Centre hospitalier Esquirol au 05 55 43 10 10.
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