samedi 29 octobre 2016

Mà J : CABINET DE CURIOSITE DEBAT SOCIAL/POLITIQUE Sécurité sociale : bataille de psys pour soigner les jeunes

La rubrique " Le cabinet de curiosités d'Infosuicide.org "
des sujets, actualités, débats plus ou moins documentés et sous réserves d'informations complémentaires et/ou fiables, qui toutefois nous questionnent et nous interpellent...
Nous les relayons essentiellement comme matière à penser et à débattre.
Aidez nous à alimenter une réflexion...


 Deux articles :
- Sécurité sociale : bataille de psys pour soigner les jeunes
- Marie-Rose Moro : « Il faut parfois attendre un an pour démarrer une psychothérapie chez un ado »



Sécurité sociale : bataille de psys pour soigner les jeunes

Santé |Daniel Rosenweg 27 octobre 2016,  leparisien.fr *

A partir de l’an prochain, les jeunes pourraient être orientés vers des psychologues libéraux par les médecins et les pédiatres.
Daniel Rosenweg

Le projet de loi de financement de la Sécu prévoit une expérimentation : les psychologues, qui ne sont pas médecins, pourront prendre en charge les 6-21 ans. Colère des psychiatres.

Troubles du comportement, anorexie, suicides... Améliorer d'urgence l'accès aux soins des jeunes souffrant de troubles psychiques, tout le monde y est favorable. Mais la méthode que propose d'expérimenter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2017 divise.

Actuellement en discussion à l'Assemblée, ce PLFSS prévoit d'expérimenter en 2017 la prise en charge des jeunes de 6 à 21 ans par des psychologues de ville. N'étant pas médecins, les consultations de ces spécialistes ne sont aujourd'hui pas prises en charge par l'Assurance maladie et restent à la charge des patients ou de leur famille.

Défendue par la députée socialiste de Gironde Michèle Delaunay, l'expérimentation vise, rappelle-t-elle, à « vérifier si les psychologues de ville ont une utilité qui peut justifier une prise en charge par l'Assurance maladie ». Deux mille jeunes seront donc orientés l'an prochain par des médecins, pédiatres ou médecins scolaires vers un psychologue libéral qui sera chargé d'établir le diagnostic. Mais les modalités pratiques sont encore floues, notamment le niveau de remboursement.

Un bilan sera dressé à l'issue de cette expérience qui se veut une réponse à la difficulté de faire prendre en charge des jeunes malgré la présence de 13 000 psychiatres en France.

Quid de l'erreur de diagnostic ?

« Ce test a en ligne de mire une probable généralisation à terme, s'inquiète le docteur Eric Henry, président du Syndicat des médecins libéraux. Or, insiste-t-il, les psychologues n'ont, a minima, qu'une maîtrise de psychologie quand les psychiatres ont fait dix ans d'études de médecine. On va brader la santé de nos enfants pour des considérations financières. »

Président du Syndicat des psychiatres français, majoritaires chez les libéraux, le docteur Maurice Bensoussan tire la sonnette d'alarme : « En cas d'erreur de diagnostic, que se passera-t-il ? Nous, nous engageons notre responsabilité. Nous avons des propositions pour améliorer la prise en charge précoce, nous sommes d'accord pour associer les psychologues, mais le diagnostic doit rester à nous. »

Fin novembre, les psychiatres français vont se réunir et discuter de ce test. Michèle Delaunay, elle, assure que toutes les garanties seront là, les psychologues ne faisant que suivre les recommandations de bonnes pratiques en vigueur. Mais combien seront rémunérés ces psychologues ? Aucune réponse. Pour le moment

Reste qu'en 2009, l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé regrettait déjà qu'« aucune réforme d'ampleur n'ait encore été menée » en psychiatrie. Un propos toujours d'actualité.

http://www.leparisien.fr/economie/bataille-de-psys-pour-soigner-les-jeunes-27-10-2016-6256899.php


 ***
Marie-Rose Moro : « Il faut parfois attendre un an pour démarrer une psychothérapie chez un ado »

Adresser des enfants et des adolescents à des psychologues de ville ? L’expérimentation, votée jeudi 27 octobre par les députés, est saluée par le professeur Marie-Rose Moro, chef de service à la maison des adolescents de Cochin à Paris.
Marie-Rose Moro. / Pierre Verdy/AFP

Marie-Rose Moro.

Psychiatre et psychanalyste, Marie-Rose Moro est aujourd’hui chef de service à la maison des adolescents de Cochin à Paris. Mais elle a longtemps exercé en Seine Saint-Denis, notamment à l’hôpital Avicenne de Bobigny. Et dès le début des années 2000, elle s’est battue, avec d’autres au sein du collectif « Pedopsy 93 » pour dénoncer le manque de moyens de la psychiatrie et de l’adolescent dans ce département.

La Croix  : Que pensez-vous de cette expérimentation, votée en première lecture par l’Assemblée nationale et visant à faciliter la prise en charge de jeunes de 6-21 ans par des psychologues de ville avec un remboursement de l’assurance-maladie ?
Marie-Rose Moro : Face à cette initiative, il faut se garder de toute réaction corporatiste. C’est une expérimentation assez révolutionnaire et qui va dans le bon sens. Tout ce qui peut permettre une prise en charge psychologique plus précoce des enfants et des adolescents dans notre pays doit être soutenu. Et je pense que les psychologues peuvent être très utiles pour atteindre cet objectif, sans écarter pour autant les psychiatres.
Les syndicats de psychiatres ne sont pas favorables à cette expérimentation…
M-R. M. : Je me bats depuis des années pour qu’on renforce les moyens de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, en particulier dans certaines zones urbaines ou rurales où le manque de professionnels est dramatique. Mais il faut être conscient qu’aujourd’hui, les psychiatres ne peuvent pas prendre en charge dans un délai raisonnable tous les jeunes en souffrance.
Cette expérimentation va se dérouler de manière très encadrée. Elle vise aussi réduire les inégalités sociales. Car actuellement, les parents qui ont les moyens de faire accéder leur enfant à un psychologue de ville peuvent espérer un rendez-vous dans un délai pas trop important. Alors que s’ils doivent se tourner uniquement vers les structures publiques, les délais d’attentes sont très longs, y compris dans une ville comme Paris.
Et qu’en est-il dans un département comme la Seine-Saint-Denis ?
M-R. M. : La première consultation, celle pour faire le diagnostic et envisager la suite de la prise en charge, peut être relativement rapide. Mais ensuite, il faut toujours compter en moyenne six à neuf mois d’attente pour faire démarrer une psychothérapie à un adolescent. Dans certains endroits, le délai est même d’un an.
C’est terrible car à cet âge, la prise en charge doit souvent pouvoir être lancée dans le mois qui vient. Six mois après, la situation est parfois devenue totalement différente. Et c’est la même chose pour un enfant avec des troubles du langage. Il n’est pas admissible de devoir attendre plusieurs mois avant de pouvoir le prendre en charge.