Les statistiques sont alarmantes : en 2005 déjà, l’Institut national de la recherche médicale relevait une augmentation des tentatives de suicide chez les 15-24 ans (40 000 par an) et un rajeunissement de ces candidats au « suicide ».
Et le phénomène semble encore s’amplifier : dans le Var, comme dans les Alpes-Maritimes, le constat des spécialistes de la santé des jeunes est le même : il existe une escalade des tentatives de suicide (TS) chez les adolescents, parfois des jeunes à peine sortis de l’enfance.
Ce qui constitue un motif supplémentaire d’inquiétude. « Plus ils sont jeunes, moins les adolescents sont conscients des dangers qu’ils encourent », note ainsi le Dr Michèle Battista, pédopsychiatre aux hôpitaux pédiatriques Lenval-CHU de Nice.
Ils jouent à la roulette russe
Médicaments, scarification, défenestration… ils jouent à la roulette russe, mais en connaissent-ils les règles ? « On est face à des jeunes dans la toute puissance ; et on le retrouve dans le passage à l’acte suicidaire. Souvent, ils manquent de limites, de cadre, de sécurité, souffrent d’un défaut de contenance éducative. Et cette absence de limites externes fait qu’ils sont aussi sans limites à l’intérieur. Lorsqu’ils passent à l’acte, en prenant par exemple une quantité massive de médicaments, c’est parce qu’ils veulent aller très vite mieux », témoigne le Dr Catherine Rascle, pédopsychiatre au CHI Toulon La Seyne.
La fragilité psychologique des parents, le contexte familial participeraient à expliquer l’escalade des TS les jeunes. « L’époque est marquée par beaucoup de ruptures familiales, affectives, de conflits, voire de contentieux graves entre les parents, auxquels s’ajoutent les difficultés économiques », analyse le Dr Rascle.
Tout converge ainsi à rendre les jeunes plus vulnérables. Et lorsqu’un événement vient donner un nouveau coup de canif dans leur estime de soi déjà lacérée, c’est parfois le coup de trop.
Prévention insuffisante
« La rupture sentimentale reste le principal facteur de risque. Un chagrin d’amour, pour l’adolescent, est aussi grave qu’un divorce après 20 ans de vie commune ! Il pense : si quelqu’un m’aime, c’est que je suis aimable et que je peux donc m’aimer… » Une rupture signifie donc que l’on n’est plus aimable.
Les psychiatres sont aujourd’hui unanimes à regretter l’insuffisance de la prévention. « Il faudrait davantage former les professionnels de l’enfance aux signaux d’alarme du mal-être. Pour essayer d’intervenir en amont. Les jeunes ne vont pas mal de 8 h à 17 h et en semaine… C’est souvent lorsqu’ils sont seuls, le soir, le week-end qu’ils vont passer à l’acte. »
Savoir que quelqu’un les attend quelque part. Créer du lien. Il s’agirait là de la meilleure prévention.