mardi 2 mai 2023

MàJ Une étude européenne confirme la baisse des suicides au cours de la dernière décennie

D'apres article " Major European study confirms drop in suicides in last decade: may be linked to active measures to prevent suicide" https://www.eurekalert.org/ Communiqué de presse24 mars 2023

Une étude européenne majeure confirme la baisse des suicides au cours de la dernière décennie : peut être liée à des mesures actives de prévention du suicide

Baisse moyenne de 20 % des taux de suicide en Europe de 2011 à 2019
Association Psychiatrique Européenne

Une nouvelle étude majeure confirme la tendance à la baisse des suicides en Europe. Les résultats montrent que les taux de suicide sont en baisse dans 15 pays (dont l'Allemagne et l'Italie) et stables ailleurs (dont la France, l'Espagne et le Royaume-Uni). Seule la Turquie affiche une augmentation significative. Ce travail est présenté pour la première fois au Congrès Européen de Psychiatrie à Paris.

Le suicide est l'une des principales causes de décès prématuré, environ 700 000 suicides sont signalés chaque année dans le monde. Les taux de suicide en Europe sont généralement en baisse depuis le début du siècle. Chaque suicide indique une décision de mettre fin à ses jours et peut donc en principe être évitable.

Les statistiques de l'UE montrent qu'environ 1,1 % de tous les décès sont dus au suicide 2 , ce qui signifie que dans l'UE, une année moyenne, environ 56 000 décès résultent d'un suicide – plus si l'on considère l'ensemble de l'Europe.

La nouvelle étude a examiné les taux de suicide, tels qu'ils sont répertoriés dans les bases de données publiques européennes, dans 38 pays européens entre 2011 et 2019. 15 de ces pays ont montré une baisse significative des suicides (ajustés en fonction de la population), sans changement significatif dans les 22 autres pays. La Turquie a été le seul pays à signaler une augmentation significative, bien que les raisons de cette augmentation ne soient pas claires.

Chercheur, Dr. Anna Gimenez (Université de Barcelone) a déclaré :

"Ce travail confirme que les taux de suicide ont continué à baisser - ou au pire sont restés stables - à travers l'Europe entre 2011 et 2019. Les troubles psychiatriques sont liés à une proportion écrasante de ces cas. Au cours des dernières années, plusieurs interventions et plans d'action spécifiques pour la prévention du suicide ont été mis en œuvre dans un certain nombre de pays européens, et nous pensons qu'ils pourraient avoir eu un impact sur les tendances au suicide. Cela contraste avec, par exemple, les États-Unis 3, où les taux de suicide ont augmenté de 36 % sur la période 2000-2018, avant de commencer à baisser. Les différences de tendances d'un pays à l'autre reflètent bien sûr la société locale, mais peuvent également refléter l'adoption de mesures de prévention du suicide dans chaque pays. Nous n'en sommes pas encore sûrs, mais cela semble être la cause la plus probable. Des recherches antérieures ont montré que l'introduction de ces mesures peut être efficace, notre prochaine étape consiste donc à confirmer que l'amélioration est liée à cette action directe.

Le taux de suicide total en Europe (38 pays) est passé de 20 décès pour 100 000 personnes en 2011 à 16 pour 100 000 en 2019, soit une baisse des décès par suicide de près de 20 % sur cette période.

La Lituanie, qui avait auparavant de loin le taux de suicide le plus élevé d'Europe, a enregistré la plus forte baisse des suicides.

Tous les pays européens ont accepté de travailler avec l'Organisation mondiale de la santé pour mettre en œuvre des mesures de réduction du suicide, dont 4 : limiter l'accès aux moyens de se suicider (p. ex. pesticides, armes à feu, certains médicaments);
interagir avec les médias pour des reportages responsables sur les suicides ;
favoriser les compétences socio-émotionnelles de la vie chez les adolescents;
identification précoce, évaluation et prise en charge continue de toute personne affectée par des comportements suicidaires.

La co-chercheuse, le Dr Giovanna Fico (Université de Barcelone) a déclaré : « Bien sûr, notre étude nous a menés jusqu'en 2019 ; la COVID, et la guerre en cours en Ukraine peuvent affecter les tendances au suicide, mais dans l'ensemble, la tendance en Europe est à moins de suicides ".

Commentant, le professeur Philip Gorwood (ancien président de l'Association européenne de psychiatrie, Université de Paris) a déclaré :

"Alors que les pays font face différemment pour réduire le fardeau des troubles mentaux, il est intéressant de savoir quelles mesures sont efficaces et se traduisent réellement par quelque chose d'aussi crucial qu'une diminution du taux de mortalité suicidaire. Cette étude européenne est donc très intéressante, montrant qu'il existe de grandes hétérogénéités entre les pays, et que pour un nombre relativement important de pays, il est effectivement possible de réduire le nombre de décès par suicide par an".

Les 22 pays suivants n'ont montré aucun changement significatif dans les taux de suicide de 2011 à 2019 :

Bulgarie, Danemark, Estonie, Grèce, Espagne, France, Croatie, Chypre, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Portugal, Slovénie, Finlande, Suède, Islande, Norvège, Royaume-Uni, Monténégro, Macédoine du Nord, Albanie, Ukraine.

Le Congrès Européen de Psychiatrie se déroule du 25 au 28 mars 2023, à Paris. Il s'agit du plus grand congrès européen dédié à la psychiatrie, avec environ 4500 participants https://epa-congress.org/


Remarques

1 This indication is part of a project from the Academy of Medical Sciences to improve press release communication.  See https://tinyurl.com/37pp49xu

2 EU statistics https://ec.europa.eu/eurostat/web/products-eurostat-news/-/DDN-20180716-1

3 US statistics https://www.cdc.gov/suicide/suicide-data-statistics.html

4 More info at: https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/suicide

 

***

Autre article 

Une baisse du taux de suicide observée en Europe

Liam Davenport

2 mai 2023 https://francais.medscape.com*

Paris, France – Une nouvelle étude présentée lors du Congrès 2023 de l’Association européenne de Psychiatrie fin mars à Paris montre que les taux de mortalité liés au suicide ont diminué de manière significative en Europe entre 2011 et 2019 : 15 pays affichant une baisse significative et 22 autres avec des taux stabilisés.

Afin de dresser un tableau des tendances récentes des taux de mortalité par suicide en Europe, les chercheurs ont rassemblé des données sur les statistiques nationales annuelles relatives au suicide pour les années 2011 à 2019 dans 38 pays européens à partir de la base de données publique d’Eurostat.

Une réduction du taux de suicide de 20 %

En estimant le taux de mortalité par suicide par an pour 100 000 habitants, l’équipe a constaté une réduction significative des taux de mortalité dans l’ensemble de l’Europe au cours de la période d’étude.

Le taux de suicide total sur ce continent est passé de 20 décès pour 100 000 personnes en 2011 à 16 pour 100 000 personnes en 2019, soit une réduction de 19,4 %.

C’est en Lituanie, qui affichait initialement le taux de suicide le plus élevé d’Europe, que la baisse du taux de suicide a été la plus importante. Viennent ensuite la Lettonie et la Pologne. L’Italie a enregistré la réduction significative la plus faible parmi les pays où les taux de suicide ont diminué. En revanche, les taux de suicide ont augmenté de manière significative en Turquie.

Dans l’ensemble, 15 pays ont enregistré une réduction des taux annuels de suicide au cours de la période étudiée. Aucun changement n’a été observé dans 22 pays, dont la France, l’Espagne et le Royaume-Uni.

La stratification des résultats par sexe a révélé que, chez les femmes, les taux de mortalité par suicide ont diminué de manière significative entre 2011 et 2019 en Hongrie, en Serbie, en Belgique et en Autriche, tandis qu’ils ont augmenté de manière significative au Royaume-Uni.

Chez les hommes, les taux de suicide ont diminué de manière significative dans 17 pays. Les baisses les plus importantes ont été signalées en Lituanie et en Hongrie, tandis que la baisse significative la plus faible a été observée en Albanie. Les taux de suicide chez les hommes ont augmenté de manière significative en Turquie.

La Dr Fico a déclaré qu’à l’avenir, tous les pays européens ont accepté de travailler avec l’Organisation mondiale de la santé pour mettre en œuvre des mesures de réduction du suicide, telles que la limitation de l’accès aux moyens de se suicider et un traitement responsable de l'information ayant trait au suicide dans les médias.

D’autres mesures comprennent la promotion des compétences socio-émotionnelles chez les adolescents et l’identification, l’évaluation et la prise en charge précoces des personnes affectées par un comportement suicidaire.

Comment l’expliquer ?

« Les différences de tendances d’un pays à l’autre reflètent des spécificités locales, mais elles peuvent être le reflet des mesures de prévention du suicide mises en œuvre dans chaque pays », a déclaré dans un communiqué l’auteure principale de l’étude la Dre Anna Gimenez (service de Psychiatrie, Clínic Barcelona, Espagne). « Des études antérieures ont montré que l’introduction de ces mesures peut être efficace, notre prochaine étape donc sera de confirmer que l’amélioration est liée à cette adoption », a-t-elle ajouté.

Les différences de tendances d’un pays à l’autre reflètent des spécificités locales, mais elles peuvent être le reflet des mesures de prévention du suicide mises en œuvre dans chaque pays.

 

La Dre Giovanna Fico, médecin dans l’unité des troubles bipolaires et dépressifs de la Clínic Barcelona, a également fait remarquer, lors de la présentation de l’étude, que celle-ci n’avait recueilli des données que jusqu’en 2019. C’est-à-dire antérieures à la pandémie de Covid-19 et à la guerre qui se déroule actuellement en Ukraine, ce qui pourrait influer sur les tendances suicidaires. Néanmoins, la tendance générale est « qu’en Europe, il y a eu moins de passages à l'acte », a-t-elle ajouté.

La Dre Fico a expliqué à Medscape Medical News que des pays comme l’Italie, la France et le Royaume-Uni disposent de plans nationaux structurés de lutte contre le suicide, ce qui n’est pas le cas de pays comme la Turquie. Elle pense que cela peut « impacter l’augmentation ou la diminution des taux de suicide ».

Toutefois, elle a souligné que l’étude était limitée par le fait que de nombreux pays européens ne communiquent pas de taux de suicide détaillés. En Ukraine, par exemple, les suicides de femmes ne sont pas enregistrés dans le registre national du pays.

Des données qui contrastent avec celles des Etats-Unis

La réduction globale des taux de suicide en Europe contraste fortement avec ce qui est observé aux États-Unis, où les Centres de Contrôle et de Prévention (Centers for Control and Prevention – CDC) signalent que les taux de suicide ont augmenté de 36 % entre 2000 et 2018, avant de diminuer de 5 % entre 2018 et 2020.

La Dre Fico a émis l’hypothèse que cet écart entre les comportements pourrait être liée aux différences entre les systèmes de soins en Europe et aux États-Unis et aux problèmes d’accès aux soins, en particulier pour les personnes à faible revenu.

Le Dr W. Vaughn McCall du Département de psychiatrie et de comportement sanitaire au Medical College of Georgia à l’université d’Augusta (Augusta, États-Unis), a suggéré que la facilité d’accès aux armes à feu pourrait aussi expliquer une part importante de cette différence.

La Dre Fico a déclaré que le suicide était « l’une des principales causes de décès prématuré ». Il coûte la vie à environ 700 000 personnes dans le monde chaque année, soit un taux de 10,7 pour 100 000 personnes en 2019. La « proportion écrasante de ces cas est liée à des troubles psychiatriques ».

La Dre Fico a noté qu’en 2020, 12,2 millions d’adultes aux États-Unis ont sérieusement envisagé le suicide, 3,2 millions ont planifié une tentative de suicide et 1,2 million d’entre eux ont tenté de se suicider, parmi lesquels 45 979 sont décédés. Selon les calculs du CDC, cela équivaut à un décès toutes les 11 minutes.

La cause la plus fréquente des suicides aux États-Unis

Le Dr McCall s’est dit « surpris » par les résultats, d’autant plus que les données américaines « semblent très différentes », en commentant les résultats pour Medscape Medical News.

Il a déclaré que « les tendances séculaires et les déterminants sociaux de la santé jouent sans aucun doute un rôle dans les taux de suicide ».

Soulignant l’augmentation constante du taux de suicide aux États-Unis, suivie d’une légère réduction pendant la pandémie, le Dr McCall a déclaré que « personne ne sait avec certitude pourquoi il a chuté, si ce n’est qu’en période de détresse universelle, l’humanité peut se montrer à la hauteur de la situation ».

Toutefois, il a déclaré qu’il ne serait pas surpris si les taux de suicide recommençaient à augmenter maintenant que la pandémie s’est calmée. Concernant les raisons possibles des différences de taux de suicide entre l’Europe et les États-Unis, le Dr McCall a suggéré que « la plus grande différence » est peut-être « l’accessibilité aux armes à feu ».

Il a déclaré que « les armes à feu sont la cause la plus fréquente de suicide aux États-Unis » et que la réduction de leur accès « est la pierre angulaire de la prévention du suicide ».

Par ailleurs, le Dr McCall a noté que si la population américaine « est plus à l’aise pour parler de la plupart des sujets de santé mentale, elle ne l'est pas quand il s'agit de parler du suicide. Il semble que faciliter les discussions sur le suicide soit nécessaire à la prévention. »

Dans un commentaire, le Pr Philip Gorwood du centre Hospitalier Sainte Anne (Paris, France), a affirmé que « comme les pays font face différemment pour réduire le fardeau des troubles mentaux, il est intéressant de savoir quelles mesures sont efficaces, et ont pour conséquence quelque chose d’aussi crucial qu’une diminution du taux de mortalité par suicide ».

« Cette étude européenne est très intéressante, car elle montre qu’il existe de grandes hétérogénéités entre les pays mais que pour un nombre relativement important d'entre eux, il est effectivement possible de réduire le nombre de décès par suicide par an », a-t-il déclaré.

Cette étude européenne est très intéressante, car elle montre qu’il existe de grandes hétérogénéités entre les pays.

 

Financements et liens d’intérêts
La Dre Fico a bénéficié d’une bourse de la Fondation La Caixa et entretient des relations avec les Drs Angelini, Janssen-Cilag et Lundbeck.

Cet article a initialement été publié sur Medscape.com Steady Drop in Suicide Deaths Across Europe. Traduit et adapté par Mona El-Guechati

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