samedi 6 juillet 2019

ETUDE RECHERCHE Conduites suicidaires chez les personnes adultes sans abri : une revue de la littérature

Conduites suicidaires chez les personnes adultes sans abri : une revue de la littérature /
Pierre Jannel ; sous la direction d'Edouard Leaune

Thèse d'exercice : Médecine : Lyon 1 : 2019
Auteur(s) :  Jannel, Pierre  Auteur
Leaune, Edouard Directeur de thèse
Université Claude Bernard (Lyon). Organisme de soutenance

Accès en ligne : Accès au texte intégral
https://n2t.net/ark:/47881/m6n878zw


Résumé(s) :
Une population pour laquelle la suicidologie développe un intérêt est celle qu'on qualifie dans ce travail de « sans-abri ». Les facteurs de risque démographiques, sociologiques et cliniques qu'on retrouve chez cette population justifient l'intérêt de mieux identifier, quantifier et comprendre les conduites suicidaires chez ces personnes qui subissent un niveau extrême de précarité. L'objectif principal de cette revue de la littérature scientifique est de quantifier et caractériser les conduites suicidaires (qui comprennent : le suicide, les antécédents de tentatives de suicide (TS), la prévalence des idées (IS) et du risque (RS) suicidaires) survenant chez les personnes exposées au sans-abrisme. Ce travail vise aussi à évaluer l'efficacité des mesures de prévention des conduites suicidaires chez les personnes sansabri. Une revue de la littérature scientifique a été conduite pour investiguer les conduites suicidaires et identifier des stratégies de prévention du suicide chez les personnes sans-abri. En Août 2018, nous avons recherché sur les bases de données MEDLINE, SCOPUS et PSYCINFO les articles publiés depuis le 1er Janvier 1973 traitant des conduites suicidaires chez les personnes adultes sans-abri. Les sous-populations spécifiques d'anciens militaires américains ainsi que les enfants ou adolescents sans-abri ont été exclues de cette recherche compte tenu de travaux spécifiques les concernant. Nous avons inclus les articles originaux traduits en langue anglaise incluant un minimum de cent individus exposés au sans-abrisme, qui contenaient une estimation quantitative standardisée des conduites suicidaires : d'une part les suicides ou les décès inexpliqués formulés en ratios de mortalité, d'autre part les taux de prévalence de TS, IS, RS ou de lésions auto-infligées (« selfharm ») exprimés en pourcentage. 36 études observationnelles et 4 études interventionnelles ont été incluses dans cette revue. 4 de ces articles formulent une estimation standardisée par rapport au sexe et à l'âge des suicides comparée à une population générale de référence. Les estimations significatives de ces SMSR (Standadized Mortality by Suicide Ratio) ou HR (Hasard Ratio) vont de 1.9 (IC95%=1.5-2.5) à 14.2 (95%IC=9.2–20.9). 43% des personnes exposées au sans-abrisme interrogées sur le fait d'avoir réalisé une TS au cours de leur vie répondent positivement ; 39,7% des personnes sans-abri interrogées sur le fait d'avoir eu des IS au cours du dernier mois répondent affirmativement (moyennes pondérées par l'effectif des études ; 34% des personnes sans-abri étaient considérées d'après leurs déclarations comme ayant un RS élevé ou modéré actuel. Les études interventionnelles de type housing first (Logement d'abord) n'apportent pas de résultat significatif en termes du suicide. Cependant, ces quelques essais cliniques randomisés montrent de façon homogène une décroissance du taux d'IS entre le moment de l'inclusion et le suivi à 6 mois, 1 an et 2 ans, décroissance d'importance comparable dans les groupes housing first et témoin (suivi dans le cadre d'un traitement habituel). Les études de mortalité des personnes sans-abri méritent d'être actualisées à l'échelle locale, en prenant en compte la part des morts inexpliquées, afin de mieux évaluer l'ampleur du suicide chez les personnes sans-abri. En effet, la prévalence des conduites suicidaires apparaît globalement plus importante (environ dix fois supérieure) chez les sans-abri que dans la population générale, notamment les IS et les TS, d'où un RS plus élevé chez cette population. Ces marqueurs de souffrance psychique doivent être détectés et considérés comme des enjeux cliniques et sociologiques au sein de cette population extrêmement précaire. Cependant, il est difficile d'affirmer, compte tenu de l'hétérogénéité des études, de la faible puissance statistique de la plupart d'entre elles vis-à-vis de la fréquence des évènements étudiés, de la prévalence des cofacteurs et de l'absence de métaanalyse, que l'exposition au sans-abrisme est un facteur de risque indépendant de passage à l'acte suicidaire. Le sur-risque observé peut aussi être considéré comme une résultante des cofacteurs démographiques, cliniques (comorbidités somatiques psychiatriques et addictives notamment) et sociologiques (précarité, faible support et faibles facteurs protecteurs)

Source info http://www.sudoc.abes.fr//DB=2.1/SET=2/TTL=1/CLK?IKT=1016&TRM=Conduites+suicidaires+chez+les+personnes+adultes+sans+abri