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L’automutilation chez les patients psychiatriques hospitalisés, une pratique très répandue
Michael Simm 24 avril 2023 https://francais.medscape.com/*
Paris, France—De nouveaux développements dans l’identification des facteurs de risque associés aux automutilation non suicidaires ont été discutés lors d’une session plénière du 31e Congrès européen de psychiatrie (EPA) à Paris par la Dr Sabine Herpertz, chef du service de psychiatrie générale à l’hôpital universitaire de Heidelberg, en Allemagne.
L’oratrice a rappelé que l’automutilation non suicidaire[1] accompagne souvent diverses pathologies, notamment le trouble de la personnalité limite, le trouble de la personnalité antisociale, les troubles de l’alimentation, la toxicomanie ou l’autisme. Mais que, depuis 2015, elle a été ajoutée en tant que catégorie distincte dans le Manuel de diagnostic et de statistique des troubles mentaux (DSM-5).
Même si les patients n’ont pas l’intention de se tuer, la létalité non intentionnelle due aux automutilations non suicidaires est d’environ 0,6 % (Halicka et al., 2018) [2], a précisé la Dre Herpertz. Le plus souvent, cela se produit lorsque le patient se coupe accidentellement une artère.
Un comportement qui commence dès la pré-adolescence
Les données de deux méta-analyses récentes [3,4] estiment que la prévalence au cours de la vie chez les enfants préadolescents atteints de troubles de la personnalité borderline est de 6,2 %, et qu’elle atteint 22,1 % chez les adolescents. La prévalence chez les patients psychiatriques hospitalisés s’élève toutefois à 50-72 %.
Même si le comportement peut commencer dès la préadolescence, il atteint son apogée entre 20 et 25 ans. Il est plus fréquent chez les personnes souffrant d’un trouble de la personnalité limite.
Trois à quatre fois plus de femmes
Les femmes sont 3 fois plus nombreuses que les hommes, voire 4 fois plus nombreuses. Parmi les patients souffrant d’un trouble de la personnalité limite, 60 % des adultes et 90 % des adolescents qui se sont fait du mal n’ont pas consulté de services médicaux ou psychologiques par la suite.
De nombreuses recherches sont consacrées à l’étude des facteurs de risque, explique la Dr Herpertz. Les plus importants d’entre eux, avec un rapport de cotes >3, sont les troubles de la personnalité du groupe B et le désespoir.
Les pensées suicidaires antérieures, l’exposition à un pair pratiquant l’automutilation non suicidaire et les patients prédisant qu’ils pratiqueront l’automutilation non suicidaire à l’avenir sont également des facteurs importants, qui augmentent tous le risque d’au moins un facteur de 2.
Automutilation et tentative de suicide
L’automutilation non suicidaire ne prédit généralement pas les tentatives de suicide dans le trouble de la personnalité borderline, selon deux études d’Andrewes et al. (2018,2019) [5,6]. Mais une augmentation relative de la fréquence et de la gravité de l’automutilation non suicidaire a été observée dans les mois précédant une tentative de suicide.
« En tant que clinicien, si vous constatez une augmentation de la fréquence et de la gravité des automutilations non suicidaires, vous devriez vous alarmer, car elles sont prédictives des tentatives de suicide », explique la Dre Herpertz.
Les automutilations non suicidaires peuvent à leur tour être prédites par des niveaux élevés de colère, de frustration et de discussions avec les parents et les pairs. Ce phénomène a été mesuré à l’aide d’évaluations écologiques momentanées, qui consistent à recueillir des données sur les pensées et les comportements d’une personne dans sa vie quotidienne et dans son environnement normal.
« Contrairement aux attentes de la plupart des collègues, le renforcement social – à l’exception des patients hospitalisés – ne semble pas jouer un rôle central dans la motivation de l’automutilation non suicidaire », souligne-t-elle (Hepp et al., 2021) [7].
Quelle prise en charge ?
En premier lieu, l’interrogatoire est essentiel pour comprendre les raisons d’une automutilation.
Une recommandation allemande récente préconise (niveau A) la thérapie comportementale dialectique et la thérapie de mentalisation pour les patients souffrant d’un trouble de la personnalité limite et d’automutilations non suicidaires graves. « Cependant, les effets sont faibles ou moyens », avertit Herpertz.
Cet article a initialement été publié sur Univadis.com sous l’intitulé Nonsuicidal self-injury highly prevalent in psychiatric inpatients. Traduit et adapté par Mona El-Guechati
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