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jeudi 25 novembre 2021
INSERM Covid-19 : Le lourd impact de l’épidémie sur la santé mentale des étudiants, notamment pendant les périodes de confinements
Covid-19 : Le lourd impact de l’épidémie sur la santé mentale des étudiants, notamment pendant les périodes de confinements
Communiqué | 09 nov. 2021 - 11h00 | Par INSERM (Salle de presse) https://presse.inserm.fr/*
La pandémie de Covid-19 s’est accompagnée d’une dégradation de l’état de santé mentale d’une grande partie de la population française. Afin de mettre en place des dispositifs de soutien adaptés, il est nécessaire de mesurer l’impact de l’épidémie et d’identifier les populations les plus exposées. Dans une nouvelle étude, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm et de l’Université de Bordeaux au Bordeaux Population Health Center montrent que les étudiants sont particulièrement vulnérables. Pendant les deux premiers confinements, les prévalences des troubles anxieux et dépressifs, ainsi que des pensées suicidaires, étaient plus élevées dans cette population en comparaison à des non étudiants. Ces résultats, publiés dans la revue Scientific Reports mettent en lumière la nécessité d’une grande vigilance en ce qui concerne la santé mentale des étudiants en contexte épidémique ainsi que l’importance de mettre en place rapidement des interventions spécifiques pour les aider à surmonter les effets délétères de cette crise sanitaire.
Les épidémies sont connues pour exacerber les problèmes de santé mentale de la population. Ainsi, des travaux antérieurs, réalisés lors de l’épidémie de SRAS au début des années 2000, ont montré que l’anxiété, la dépression et le stress post-traumatique étaient plus fréquents pendant et plusieurs années après la fin de l’épidémie.
Par ailleurs, les données de la littérature scientifique montrent que les étudiants constituent une population particulièrement vulnérable aux problèmes de santé mentale, même hors contexte d’épidémie. En France par exemple, le suicide est la deuxième cause de décès chez les 15-25 ans et des résultats portant sur une cohorte nationale, la cohorte i-Share, ont montré un taux élevé d’anxiété et de dépression dans cette population.
Face à ces différents constats, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm et de l’université de Bordeaux ont étudié de plus près la santé mentale des étudiants durant la pandémie de Covid-19 et lors des différents confinements. Les étudiants sont-ils plus à risque de développer des problèmes psychologiques dans ce contexte que les non-étudiants ?
Dépression, anxiété et pensées suicidaires
Les scientifiques ont recruté via les réseaux sociaux 3783 participants entre mars 2020 et janvier 2021, une période couvrant le premier et deuxième confinement, ainsi que la période intermédiaire de relâchement des restrictions à l’été 2020. Cette étude, désignée sous le nom de cohorte CONFINS, a permis de comparer deux groupes lors des analyses : les étudiants d’un côté et les adultes non-étudiants de l’autre. Au-delà de cette différence de statut et d’âge moyen, les deux groupes étaient très proches, avec des pourcentages similaires de femmes, de personnes ayant eu des antécédents de maladie mentale ou encore de personnes travaillant (ou étudiant) dans le domaine de la santé.
Chaque participant a été invité à remplir en ligne des échelles de référence pour l’évaluation de l’anxiété et de la dépression (le GAD-7, une échelle qui évalue les symptômes de l’anxiété et le PHQ-9, qui évalue la sévérité de la dépression) ainsi qu’à répondre à des questions sur la fréquence des pensées suicidaires au cours des 7 derniers jours.
Les analyses montrent que sur toute la période considérée, les étudiants sont plus touchés que les non étudiants par les problèmes de santé mentale. Ils sont ainsi 36,6 % à déclarer des symptômes dépressifs (contre 20,1 % des non étudiants) et 27,5 % des symptômes d’anxiété (contre 16,9 %). De plus, 12,7 % des étudiants ont rapporté des pensées suicidaires (contre 7,9 % des non étudiants).
Des inégalités importantes et qui se creusent
Les scientifiques se sont aussi penchés plus précisément sur chaque étape de la période considérée (premier confinement, déconfinement et deuxième confinement). Alors que la prévalence des troubles mentaux reste globalement stable dans le groupe des non-étudiants tout au long de la période, de grandes variations sont observées pour le groupe étudiant.
Ainsi, on observe que les fréquences des troubles de santé mentale sont beaucoup plus élevées en période de confinement que pendant le déconfinement dans ce groupe, et particulièrement lors du deuxième confinement. En effet, plus de la moitié des étudiants rapportaient des symptômes dépressifs lors du deuxième confinement (contre un quart des non étudiants), alors que cette proportion était de 36 % lors du premier confinement.
« La comparaison entre étudiants et non étudiants a rarement été étudiée jusqu’ici. Nous démontrons dans notre étude qu’il existe d’importantes inégalités de santé mentale entre ces deux groupes, et que l’écart s’est encore plus creusé avec le deuxième confinement. La vulnérabilité des étudiants n’a probablement pas une cause unique mais l’isolement et la solitude ont certainement beaucoup pesé. Les conditions matérielles et la difficulté de suivre les études sont également des facteurs importants. », explique Mélissa Macalli, première autrice de l’étude.
De l’observation à l’intervention
Ce travail de comparaison directe montre donc que, même si toute la population française a été affectée par la crise sanitaire et les restrictions associées, les étudiants sont une population particulièrement vulnérable. Ces chiffres devraient permettre d’orienter les stratégies de prévention et de renforcer les dispositifs d’accompagnement psychologique.
« Il est aussi important de réaliser que ce problème ne sera pas résolu simplement parce que les confinements ont cessé. La détresse d’un grand nombre d’étudiants est toujours très présente et beaucoup plus forte qu’avant l’épidémie. Il faut réaliser que les problèmes de santé mentale des étudiants ne sont pas derrière nous mais devant nous et qu’ils sont très diffus. Tous n’ont pas de maladie mentale sévère mais tous sont affectés, ont du mal à « fonctionner » correctement, et certains risquent de s’aggraver au cours du temps avec les risques de décrochage des études, de dépression, voire des comportements suicidaires dans le pire des cas », souligne le chercheur Christophe Tzourio, dernier auteur de l’étude.
Les scientifiques ont donc décidé d’aller au-delà du constat et du plaidoyer et ils travaillent désormais sur une intervention afin d’aider les étudiants sur ces questions complexes. Dans les mois qui viennent, l’équipe va développer une application mobile qui sera testée dans le cadre de la cohorte CONFINS, afin d’évaluer son impact réel lors d’une intervention contrôlée.
« Le but est que l’application, qui sera co-créée avec étudiants et professionnels de santé, apporte au plus grand nombre des connaissances sur les troubles mentaux et sur les dispositifs de soutien existants (professionnel de santé, numéros d’aide). D’autre part, pour ceux qui le souhaitent, elle leur permettra de mieux évaluer leur propre niveau de stress, d’anxiété et de dépression au cours du temps. Le plus souvent cela permettra de les rassurer et d’aider ceux qui en ont besoin à franchir le pas en sollicitant de l’aide de professionnels de la santé mentale dans une période de détresse », explique Mélissa Macalli.
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