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lundi 13 janvier 2020

ETUDE RECHERCHE Traiter des suicides sans Durkheim : analyses et méthodes d’action de la psychodynamique du travail.

Traiter des suicides sans Durkheim : analyses et méthodes d’action de la psychodynamique du travail.
Fanny Jedlicki 1 Fanny Darbus 2
1 IDEES - Identités et Différenciation de l'Environnement des Espaces et des Sociétés
2 CENS - Centre Nantais de Sociologie
Résumé : Paru fin 2009, l’ouvrage du psychanalyste Christophe Dejours et de la psychologue Florence Bègue s’inscrit au cœur d’une actualité sociale tragique : l’augmentation des suicides liés au travail. De ce point de vue, la médiatisation sans précédent du nombre croissant de suicides parmi les salariés de France Télécom constitue la partie émergée de l’iceberg. C’est dans un contexte politique et social particulier, où les enjeux sont également économiques et scientifiques, que, de plus en plus fréquemment, spécialistes des conditions de travail et des risques psychosociaux issus de diverses disciplines sont amenés à intervenir sur demande des directions et/ou des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (chsct). Ici, les auteurs sont les tenants d’une approche et de modes d’action relevant de la psychodynamique, c’est-à-dire d’une analyse qui s’intéresse à la manière dont les individus sont amenés à réagir subjectivement et psycho-affectivement dans un environnement contraignant, celui du travail. Proposant la création d’espaces de parole visant à recréer du lien collectif pour moins subir et mieux vivre les tensions et souffrances générées par le travail, l’ouvrage se présente comme une sorte de « guide » à l’usage des salariés. Formellement, la première partie de l’ouvrage est constituée d’une analyse théorique tandis que la seconde, empirique, retrace l’intervention (c’est-à-dire le diagnostic et l’accompagnement) d’une psychologue au sein d’une pme marquée par une série de suicides de salariés ; la troisième partie recense quant à elle l’ensemble des comportements que les professionnels de la souffrance au travail se doivent d’observer dans le cadre d’une intervention. Si les auteurs balayent assez bien l’ensemble des problèmes sociaux et psychiques provoqués par les nouvelles normes organisationnelles, leur parti pris disciplinaire exclusif et excluant toute approche sociologique passe sans doute à côté d’éléments éclairants tant pour la poursuite des recherches scientifiques que pour l’amélioration des expertises et autres interventions en entreprise.