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vendredi 22 décembre 2017

ETUDE RECHERCHE Psychiatrie Innovation dans la schizophrénie De nouveaux atouts pour améliorer la prise en charge

Le Quotidien du Médecin
Article, lundi 18 décembre 2017
Psychiatrie
Innovation dans la schizophrénie
De nouveaux atouts pour améliorer la prise en charge
Recherche-Science
Même si le manque de précocité du diagnostic est encore un problème, le parcours de soins des personnes schizophrènes devrait connaître une amélioration sous l'effet conjugué d'innovations aussi bien organisationnelles que thérapeutiques.
La schizophrénie toucherait environ 1 % de la population, dont de nombreux jeunes puisque, chaque année en France, environ 10 000 adolescents sont frappés par cette maladie, première cause de handicap des jeunes adultes dont l'étiologie n'a pas encore apporté de réponses satisfaisantes.
À ce jour, les hypothèses les plus étayées suggèrent que des mécanismes auto-immuns s'activeraient sous l'effet d'agents infectieux. Les facteurs génétiques et environnementaux (complications obstétricales, infections, stress maternel, trauma infantile, hypovitaminose D, cannabis, isolement, précarité, migration...) joueraient également un rôle important. En suivant cette ligne, il est ainsi possible d'agir en prévention primaire, de mieux identifier les sujets à risque et de cibler les sous-groupes présentant des anomalies inflammatoires pour pouvoir les traiter par des thérapies adaptées (anti-inflammatoires/immunomodulateurs, anti-infectieux/antibiotiques, probiotiques...) Si en 10 ans, un réseau de 45 centres experts s'est créé en France en lien avec 70 laboratoires de recherche et permet le suivi de plus de 10 000 patients, il existe encore un délai beaucoup trop long entre l'apparition des symptômes et le début du traitement : de l'ordre de 2 ans avec des impacts importants, notamment le risque de suicide (15 % des patients tentent de se suicider avant une mise en route d'un traitement). Ce retard au diagnostic entraîne également une mauvaise réponse au traitement, une mauvaise évolution fonctionnelle, le développement de comorbidités addictives (abus de drogues), psychiatriques (dépression, anxiété) et médicales (obésité, maladies cardiovasculaires, auto-immunes). Or, « deux tiers des patients ne sont pas traités correctement pour les pathologies cardio-métaboliques et seulement 10 % d'entre eux sont traités par un antihypertenseur » , a souligné le Pr Marion Leboyer, directrice de la Fondation FondaMental lors du colloque de l'Association « Schizo ?...Oui » qui a eu lieu en novembre dernier. De fait, les maladies cardiovasculaires sont la première cause de décès après le suicide chez ces patients.
Nouvelles organisations, nouveaux traitements
Si en amont, des efforts sont encore à faire, l'horizon commence à se dégager en matière de prise en charge des malades diagnostiqués. Lors d'un symposium organisé dans le cadre du congrès de l'Encéphale de janvier dernier, le Dr Catherine Boiteux, psychiatre à l'Hôpital Sainte-Anne (Paris), s'est ainsi enthousiasmé à l'heure des Groupements hospitaliers de territoires (GHT, imposés par la loi de janvier 2016) que les 5 établissements parisiens aient renforcé leur projet médical partagé autour du virage ambulatoire tout en lançant plusieurs travaux sur l'hospitalisation. Selon elle, cette « fourmilière d'idées autour de la question du domicile, des populations précaires, des sujets âgés, de la réhabilitation psychosociale » indique le cap à suivre. L'innovation en la matière passe également par une plus grande participation des patients à leur suivi et une plus grande prise en compte de leurs attentes à l'égard des traitements par les praticiens. À titre d'exemple, les antipsychotiques injectables d'action prolongée (APAP) qui ne sont proposés par les psychiatres qu'à 35 % de leurs patients, de crainte d'essuyer un refus, sont pourtant acceptables pour 23 % des patients naïfs, 45 % des patients antérieurement traités, et 73 % en cours de traitement. Alors que les psychiatres se focalisent davantage sur les critères symptomatiques et les objectifs académiques, les patients s'attachent au bien-être subjectif, espérant une diminution des symptômes et plus d'indépendance. De fait, ces APAP très prometteurs pour retarder les rechutes chez les patients cliniquement stables doivent également leur permettre de ne plus avoir à penser chaque jour à prendre leur traitement et aux proches et d'être moins soucieux à l'égard de l'observance.
Des approches inédites contre « les voix »
Les premiers résultats d'une étude française présentés en septembre lors du 30e congrès du Collège européen de neuropsychopharmacologie (ECNP) montrent qu'une stimulation magnétique transcrânienne (SMT/TMS) permettait la disparition partielle du symptôme des hallucinations auditives ou « voix » entendues par 70 % des patients souffrant de schizophrénie. Chez 35 % des 26 patients ayant bénéficié d'un traitement par stimulation transcrânienne à haute fréquence (20 hertz) au niveau d'une zone précise du lobe temporal associée au langage, au niveau de la branche ascendante du sulcus latéral gauche (anciennement scissure de Sylvius) et du sulcus temporal supérieur gauche, une réduction significative du symptôme a été enregistrée contre 9 % dans le groupe contrôle. Si la profession invite à la prudence quant à l'intérêt d'un tel traitement à long terme, il n'en reste pas moins une arme de plus dans l'arsenal thérapeutique, notamment pour les patients non répondeurs aux médicaments (environ 25 %). C'est à ce dernier groupe que s'est justement intéressée l'équipe britannique à l'origine d'une étude publiée fin novembre dans « The Lancet Psychiatry » qui analyse les effets d'une thérapie à base d'avatars virtuels. L'objectif de cette approche est de permettre une interaction en face-à-face avec une représentation digitale de l'hallucination auditive. Le psychiatre facilite le dialogue entre l'avatar et le patient, de sorte que ce dernier arrive à reprendre le contrôle et force « la voix » à devenir plus conciliante. Résultat : à 12 semaines, les participants du groupe AVATAR ont décrit leurs hallucinations comme étant moins éprouvantes et moins puissantes que ceux du groupe thérapie de soutien. Pour le Pr Tim Craig, auteur principal de l'étude, les améliorations constatées « semblent durer jusqu'à 6 mois chez ces patients » .

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