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lundi 10 novembre 2014

«Les seniors sont les plus touchés au Luxembourg»

Un psy nous parle du suicide
«Les seniors sont les plus touchés au Luxembourg»

Au Luxembourg, on recense trois fois plus de suicides chez les 80-84 ans que chez les 20-24 ans.
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Publié le vendredi 7 novembre 2014 à 16:00

(Virginie Orlandi) - Au Luxembourg, on recense trois fois plus de suicides chez les 80-84 ans que chez les 20-24 ans et quatre fois plus de suicides chez les hommes que chez les femmes. Un phénomène que Fränz D'Onghia, docteur en psychologie et spécialisé dans la prévention au suicide, explique à wort.lu/FR.

Qui aurait cru que les personnes âgées sont plus touchées par le suicide que le reste de la population? La réalité est, en effet, bien loin de l'image d'Épinal que l'on se fait de la vieillesse et pour certains seniors, la sérénité escomptée en fin de vie n'est pas au rendez-vous.

Les pertes d'autonomie, du réseau social ou du permis de conduire une voiture sont pour certains autant de coups du sort qu'ils sont incapables de gérer et qui peuvent se terminer en graves dépressions voire en suicides.

«Toute rupture est difficile à vivre», commente Fränz D'Onghia, «Et pour chacun de nous, il y a trois moments dans la vie qui marquent une rupture irréversible, synonyme d'un impossible retour en arrière: la sortie du monde du travail, le retrait du permis de conduire et la perte de l'autonomie. Ces trois moments sont décisifs pour les seniors car, mal gérés, ils peuvent les plonger dans une dépression suicidaire».

C'est pourquoi au Centre de Prévention du Suicide où officie Fränz D'Onghia, on s'attache non seulement à sensibiliser les jeunes mais aussi les seniors à la problématique du suicide: «Une bonne gestion des émotions permet de renforcer la résilience de la personne et lui permet de mieux passer les caps de la perte de l'autonomie» poursuit le psychologue, «La personne âgée peut avoir l'impression de ne plus servir à rien et s'enfermer dans ses problèmes. Il s'agit alors de savoir repérer l'état suicidaire afin de lui venir en aide».
Quand la crise identitaire devient crise suicidaire

Une crise suicidaire est repérable mais encore faut-il être apte à la reconnaître. C'est pourquoi le Centre de Prévention au Suicide propose des formations spéciales destinées aux professionnels.

«Former les professionnels de première ligne est primordial», note le psychologue «L'aide soignant, l'aide socio-familiale sont très souvent mieux placés que le médecin traitant pour reconnaître les signes d'une crise suicidaire car ils fréquentent la personne âgée au quotidien pour les soins et la compagnie. Ces contacts réguliers nous sont précieux pour prévenir le suicide chez les seniors».
Tous les décès ne sont pas clairs

Au Luxembourg, on recense pour l'année 2013, 80 suicides et 1.600 tentatives de suicides. Des chiffres à prendre avec précautions comme le précise Fränz D'Onghia: «Au Luxembourg, on rassemble sous le même chiffre les suicides dont l'intention est claire et ceux dont l'intention ne l'est pas. Ainsi, sur les 80 suicides, on distingue 48 dont l'intention est claire, les 32 autres ne l'étant pas. Lors d'une chute ou d'une intoxication, il est difficile de dire si la personne a voulu mettre fin à ses jours ou s'il s'agit d'un accident».

Chez la personne âgée, la méthode pour se suicider est le plus souvent l'intoxication médicamenteuse à domicile et dans certains cas, il n'est pas aisé de savoir s'il s'agit vraiment d'un suicide: «Néanmoins, ces cas grossissent les statistiques des chiffres du suicide», précise le psychologue.

Cependant, le Luxembourg ne se situe pas au-dessus de la moyenne européenne qui est de 10,23 suicides pour 100.000 habitants puisqu'on recense au Grand-Duché 9,49 suicides pour 100.000 habitants.

«De plus, en ce qui concerne le chiffre de 1.600 tentatives de suicide en 2013, il s'agit d'une estimation», précise Fränz D'Onghia, «Et il faut savoir que selon les données internationales, seules 10 à 20 tentatives se transforment en véritable suicide. En 12 ans, entre 2000 et 2012, le Luxembourg a déploré 937 suicides dont la majorité était des hommes».
En cas de question, où aller?

Le ministère de la Santé travaille actuellement à améliorer la visibilité des structures de soin où se rendre en cas de question ou de besoins. Un plan national autour de la prévention du suicide est d'ailleurs en cours d'élaboration et se déroulera entre 2015 et 2019.

Cinq années durant lesquelles 33 actions seront menées en terme de recherche afin de mieux cibler les populations à risque, d'améliorer la collaboration entre les différentes structures et les professionnels, «ériger un filet de sécurité» comme le dit Fränz D'Onghia.

En cas de question autour du suicide ou de questions sur cette problématique, il est possible de contacter le Centre de Santé Mentale à Luxembourg-gare, les services psychiatriques des hôpitaux ou le Centre de Prévention Suicide à Luxembourg- Belair.

Cependant, d'après Fränz D'Onghia, «une bonne personne de confiance peut faire le même travail qu'un psy. Bien entendu, il ne faut pas hésiter à consulter en cas de besoin mais créer un vrai climat de confiance peut aider de manière efficace une personne en crise suicidaire».

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