- Le suicide est
la première cause de mortalité des 15–29 ans en Suisse. Dans ce pays
pourtant prospère, un jeune décède tous les 3 jours par suicide, et
des milliers d’autres tentent de s’ôter la vie chaque année. La
majorité de ces tentatives ne font pas l’objet d’un suivi médical et
restent tues, cachées. STOP SUICIDE
se bat depuis 14 ans pour briser le tabou autour du suicide et
encourager la parole, première étape indispensable à une meilleure
prévention.
Contrairement à une idée reçue, le taux de suicide en Suisse est dans la moyenne européenne1, ce qui n’a pas toujours été le cas. Le taux de suicide de la population et celui des jeunes ont été divisés par deux depuis les années 1990, grâce à des actions de prévention et à l’amélioration de la prise en charge des personnes suicidaires. Les helplines se sont développées et l’information sur les ressources d’aide est de plus en plus facile d’accès avec Internet.
Rappelons cependant que le suicide est toujours la première cause de décès des 15–29 ans, avant les accidents de la route2. Rappelons que nous ne savons toujours pas combien de jeunes ont fait une tentative de suicide au cours de leur vie, car les chiffres disponibles datent de 2002. Rappelons qu’au menu des priorités de l’école en matière de santé, l’éducation sexuelle et le « manger-bouger » sont incontournables, alors que la promotion de la santé mentale reste en option, tout comme la lutte contre les discriminations raciales, l’homophobie ou la transphobie.
Non mais sérieusement : vous faites comment pour empêcher les jeunes de se suicider ? Vous ne répondez pas au téléphone ? ça doit être dur ça. Moi, je ne pourrais pas. Vous allez directement parler aux jeunes de suicide ? C’est pas trop glauque comme boulot ?
Quand on travaille à STOP SUICIDE, ce genre de conversation est un classique, une habitude. On débat, on argumente et on essaie de convaincre. La prévention du suicide ? Il y a ceux qui y croient et ceux qui n’y croient pas. Et surtout, tous ceux qui ne se sont jamais posé la question. On fait de la prévention du sida, de la prévention de l’alcoolisme, du tabagisme, des addictions, des accidents de la route… pourquoi pas de la prévention du suicide ?
À STOP SUICIDE, cela fait 14 ans qu’on y croit, et surtout qu’on agit.
Au départ, il y a une réaction, une révolte même, face au drame du suicide d’un ami de 17 ans, et face à la chape de plomb qui retombe, après le décès, sur tous. Dans la cité de Calvin, on ne parle pas, la douleur est personnelle, individuelle et n’a pas lieu d’être exprimée dans l’espace public. Pourtant, le suicide d’un jeune, d’une amie, d’un camarade de classe ou même d’une vague connaissance, ça remue ! Ça questionne, ça fait mal, ça fascine, ça réveille, ça déprime, ça fait parler. Un suicide est toujours un traumatisme pour les proches. Aurait-on pu voir ? Agir ? Qu’aurait-on pu faire ou dire ? Que peut-on faire maintenant ? Et surtout… pourquoi ? Le pourquoi d’un geste qu’on tente de comprendre, de deviner, de rationaliser pour pouvoir expliquer, comprendre ou rejeter l’inexplicable.
Il y a 14 ans, un groupe de collégiens avait réussi à transformer sa douleur et sa colère en paroles et en actes et avait fondé une association – STOP SUICIDE – pour prévenir le suicide des jeunes.
L’association a beaucoup évolué; elle a connu des périodes de vaches maigres et d’autres de succès. Est-ce que les adolescents de l’époque s’y retrouveraient ? Nous aimerions voyager dans le temps et aller les voir pour les féliciter, les remercier. Leur ouvrir une fenêtre sur le futur et leur dire qu’en 2014, nous sommes 20 personnes actives de façon bénévole, en stage ou salariée. Un peu plus vieux qu’eux à l’époque, avec 25 ans de moyenne d’âge, mais toujours motivés ! Notre newsletter est lue par 200 professionnels de l’associatif, de la politique et du milieu de la santé, une revue de presse est publiée chaque semaine, et notre profil Facebook a plus de 2000 amis. Les affiches de la campagne sont diffusées dans toute la Suisse romande jusque dans les transports lausannois, les rues de Saint-Maurice ou les petites communes du Jura.
Nous espérons qu’ils et elles seraient fiers.
Aujourd’hui, STOP SUICIDE a gagné en légitimité et en professionnalisme, les rapports d’activité en témoignent. Mais le combat est-il pour autant passé de mode ? Que fait-on aujourd’hui de plus qu’il y a quatorze ans pour prévenir le suicide des jeunes en Suisse ? À quel point se préoccupe-t-on de prévention dans les cantons helvétiques ? On ne peut que répondre : pas assez. De bonnes initiatives existent, venant d’associations, d’individus ou des pouvoirs publics. Depuis dix ans, des services médicaux spécialisés ont été conçus ou organisés pour accueillir des jeunes en détresse. Des professionnels ont été formés dans le canton de Vaud3 ou à Fribourg4, Genève est en train de mettre en place son plan cantonal de santé mentale, le 147 répond aux appels… c’est bien. Mais de toute évidence, ça ne suffit pas. Nous rencontrons encore beaucoup de résistance quand il s’agit d’aller parler de suicide aux jeunes, particulièrement dans les écoles.
Libérer la parole, c’est la première étape pour prévenir le suicide. Faire connaître les ressources d’aide, inciter chacun à être attentif et bienveillant envers son entourage, à connaître ses propres ressources et à s’appuyer sur elles, voilà ce dont nous parlons avec les jeunes que nous rencontrons. Refuser de croire que le suicide est une fatalité, qu’on n’y peut rien, alors qu’il suffit parfois d’une écoute, d’un geste, d’une parole pour faire dévier une trajectoire. On n’a jamais dit que c’était facile. Mais on affirme que c’est possible.
Nous invitons toutes les personnes qui souhaitent connaître les acteurs et actrices de la prévention, comprendre les ressorts de la crise suicidaire, soutenir notre travail à s’informer sur notre site, notre page Facebook ou notre compte Twitter @stopsuicide1.
Ressources d’aide en Suisse : http://www.stopsuicide.ch/site/content/trouver-de-laide
1. http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/product_details/dataset?p_product_code=TPS00122
2. http://www.stopsuicide.ch/site/sites/default/files/docs/Publicatoins-STOP_stats.pdf$
3. http://www.formation-continue-unil-epfl.ch/faire-face-au-risque-suicidaire
4. http://www.hef-ts.ch/files/prestations/pdf/AFM/AFM_23_RFSM_VAL.pdf
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