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lundi 7 janvier 2013

ARTICLE PRESSE "Suicide : Les éleveurs sont en première ligne

Suicide : Les éleveurs sont en première ligne Agriculture
samedi 05 janvier 2013 sur http://www.ouest-france.fr/actu/AgricultureDet_-Suicide-Les-eleveurs-sont-en-premiere-ligne_3640-2150201_actu.Htm

Alors que le plan national d’action contre le suicide dans l’agriculture s’apprête à être lancé, François-Régis Lenoir, docteur en psychologie sociale et agriculteur, alerte sur la situation des éleveurs, principalement exposés aux risques suicidaires.
« Nous estimons que le taux de suicide est le plus élevé chez les éleveurs. Ils sont en première ligne : surcharge de travail, horaires décalés, crises successives, prix du lait instable… La personne qui a aujourd’hui 100 hectares de céréales n’a rien à voir avec celle qui a 100 hectares, 50 vaches, de l’ensilage à faire, du maïs etc. », estime François-Régis Lenoir, à la fois docteur en psychologie sociale et responsable d’une exploitation agricole en polyculture-élevage (ovin) à Remaucourt, dans le sud des Ardennes. Depuis plus de dix ans, il mène des travaux sur le stress des agriculteurs étroitement lié, et de loin, à la santé économique de l’exploitation. Certains agriculteurs ont vu leur revenu se réduire de 20 à 50 % ces dix dernières années - des baisses à l’origine de niveaux de stress très élevés, a pu observer le docteur en psychologie.
Le poids de l’isolement
L’isolément est un autre facteur de stress. Quand, quarante ans plus tôt, une dizaine d’agriculteurs habitaient dans le même village, ils sont aujourd’hui très peu nombreux. « Ce phénomène démographique isole et rend la situation difficile quand il s’agit de s’associer avec des agriculteurs d’autres villages par exemple, parce qu’on ne sait pas faire avec l’autre ». Même difficulté « à faire avec l’autre » pour des agriculteurs qui se retrouvent à la tête de plusieurs salariés, sans formation en management.
Mieux accompagner
Pour François-Régis Lenoir, il faut davantage d’accompagnement. D’autant plus que le phénomène pourrait s’accentuer : un portrait social des agriculteurs à l’horizon 2020, récemment établi par le centre d’études et de prospective du ministère de l’Agriculture, montre que la prolifération des réglementations, en matière d’hygiène, de sécurité alimentaire, d’environnement et le souci croissant de la traçabilité notamment, sont susceptibles d’engendrer encore plus de stress dans les années à venir, tout comme les variations de plus en plus fortes des revenus, en lien avec la volatilité des prix agricoles.
Mise en place d’un plan national contre le suicide
Cependant, les mesures de prévention envisagée par le ministère avec la Mutualité sociale agricole (MSA), les associations et les syndicats, sont aussi susceptibles de parvenir à infléchir la tendance. Le plan national de lutte contre le suicide dans l’agriculture, annoncé en décembre 2011, verra le jour en début d’année. Premier volet : la mise en service d’un numéro national (payant mais non surtaxé) pour les agriculteurs en situation de détresse au premier trimestre 2013. Parallèlement, dans les trente-cinq caisses de la MSA se mettent actuellement en place des cellules pluridisciplinaires, avec pour mission de détecter, accompagner et orienter les assurés en situation de fragilité. Toutes devraient être opérationnelles début 2013. Le plan de lutte prévoit enfin un décompte du nombre de suicides parmi les exploitants agricoles en France, depuis 2007. Autrement dit, le fléau estimé officieusement, selon les observateurs, de 400 à 800 victimes par an, devrait enfin être évalué officiellement. Les résultats seront connus dans les prochaines semaines.
L'Ouest de la France plus exposé
Dans certaines régions plus que d’autres, ces mesures s’imposent. La Bretagne, la Normandie, les Pays de la Loire sont en effet les plus touchés par le fléau. « Je pense que la solution dans ce domaine viendra des femmes au sein des foyers, mais aussi des filières », juge François-Régis Lenoir. Elles sont en effet plus nombreuses à la consulter, quand bien même ce type de problème concerne en priorité une population masculine, « un peu limitée, estime l’expert, dans sa capacité à accepter les émotions et à accepter de ne pas être un surhomme ».
Vidéo
Une intervention de François-Régis Lenoir
Rosanne ARIES.