lundi 20 novembre 2017

MàJ PARUTION à venir La vie après le suicide d’un proche

La vie après le suicide d'un proche, de Katia Chapoutier
Le Passeur Éditeur
Date de parution : 12 octobre 2017
"Un document rare sur les endeuillés du suicide qui entrecroise témoignages et regards de spécialistes afin de livrer les clefs fondamentales pour se reconstruire et continuer de vivre. "




En France, environ 10 000 personnes se suicident chaque année. Toutes les classes d’âge et les catégories socio-professionnelles sont touchées. On estime que chaque suicide impacte lourdement environ 40 personnes. Quand un proche se donne la mort, son entourage vit un véritable tsunami. Choc posttraumatique, culpabilité, colère, honte, le deuil après le suicide est bien particulier. Ce que vivent les familles touchées par le suicide d’un proche reste encore méconnu.

Ce livre donne la parole à ces endeuillés du suicide. Que le décès date de quelques mois ou de plusieurs années, ils racontent leurs histoires, partagent leurs expériences et prouvent que l’on peut non seulement survivre mais vivre. Leurs témoignages sont éclairés et complétés par les regards de spécialistes comme le psychiatre Christophe Fauré ou Xavier Pommereau, psychiatre travaillant avec les adolescents.

Ce travail sur le suicide mené par Katia Chapoutier donnera lieu à un
documentaire diffusé sur France 5 en février 2018. Ce livre en constitue
le prolongement et l’approfondissement en donnant aux lecteurs les
clefs fondamentales pour se reconstruire après le suicide d’un proche et
continuer de vivre.

L'auteur
Katia Chapoutier est journaliste et réalisatrice de documentaires. Elle collabore régulièrement avec France Télévision, Arte et TF1. Elle est également l’auteur au Passeur de Lost in Jerusalem (2013) et Les vies secrètes de Paris (2014).

Info http://www.le-passeur-editeur.com/les-livres/documents/la-vie-apr%C3%A8s-le-suicide-d-un-proche/

Relations presse
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Christel Bonneau
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1 er post : 25/09

COMPLÉMENT  ARTICLE

De l'obscurité à la lumière, voici comment j'ai survécu au suicide de ma soeur
Je visualise ma sœur dans son cabinet médical le dernier jour de sa vie. Une image que j'ai tellement imaginée qu'elle tient presque lieu de réalité scientifique.
14/11/2017 huffingtonpost.fr*

De l'obscurité à la lumière, voici comment j'ai survécu au suicide de ma soeur.
C'est un de ces jours de juin où l'on ose enfin les manches courtes. Nous sommes en 2012.
J'ai un rendez-vous téléphonique avec une journaliste de la ville de mes parents. Pour cette interview, je me suis installée dans un jardin public. Je suis bien.
En fin de discussion, je sens que la journaliste veut glisser sur un terrain plus privé, elle lâche alors... "Vous savez, j'ai vu votre sœur le jour de sa mort."
Cette petite phrase me fait l'effet d'un coup de batte de baseball dans l'estomac. Je n'ai plus de souffle. Instantanément, je visualise ma sœur dans son cabinet médical le dernier jour de sa vie. Une image que j'ai tellement imaginée et scrutée qu'elle tient presque lieu de réalité scientifique.
"Et bien elle n'allait pas bien du tout" poursuit la journaliste "Si vous saviez comme je me suis culpabilisée. C'est un des événements les plus difficiles de ma vie."
Si beaucoup de gens vous fuient ou finissent par lâcher en période de deuil post-suicide, la culpabilité, elle, est d'une fidélité rare.
Des sensations, des morceaux de souvenirs, des bouts de phrases me reviennent à l'esprit de manière désordonnée. Des choses vécues, d'autres que mon cerveau a créées de toutes pièces pour combler les trous.
Je coupe court à la conversation. Je suis projetée 6 ans et un mois en arrière.
"On a dépêché un hélicoptère pour chercher le corps" Qui a dit cela? Un corps? Quel corps? On doit trouver ma sœur. Pas un corps. Le bruit de l'hélicoptère, l'ai-je entendu par téléphone ou mon esprit l'a-t-il créé de toutes pièces en piochant dans des souvenirs de film? Je ne sais pas mais il est pourtant là.
Je replonge malgré moi dans les premiers temps...
"Vous n'avez rien vu venir?" demandent alors les gens inlassablement.
Franchement, vous imaginez-vous que quelqu'un que vous aimez va un jour se tuer? Vous pouvez le concevoir d'une manière abstraite mais franchement, vous pouvez y croire?
"Vous n'avez rien pu faire?" est en général la question jumelle. Une question qui a le mérite de secouer un temps soit peu votre culpabilité. Vous savez cette ombre fantomatique qui est devenue votre compagne de route quotidienne.
Si beaucoup de gens vous fuient ou finissent par lâcher en période de deuil post-suicide, la culpabilité, elle, est d'une fidélité rare. Un souvenir d'enfance. Elle pointe son nez. Une photo qui vous attendrit, elle se rappelle à votre bon souvenir. Toute occasion est bonne pour qu'elle envahisse tout l'espace.
Pour canaliser la douleur, il faut trouver des réponses. Des réponses, des réponses, des réponses.
On ne peut pas la rater, elle annonce sa venue avec une phrase qui commence par "Et si..." Avec ses variantes "Et si seulement" "Et si j'avais" "Et si par chance", la déclinaison est infinie et cela tombe bien parce que les premiers mois, les nuits sont sans fin.
Alors on se transforme en tête chercheuse. Pour canaliser la douleur, il faut trouver des réponses. Des réponses, des réponses, des réponses.
Comprendre le geste, la souffrance. Ou tout au moins essayer. Mettre les événements dans l'ordre. Refaire précisément le chemin des derniers jours. Quel maillon ai-je raté? En quoi ai-je rendu cela possible?
On cherche frénétiquement et sans logique. C'est certain les réponses sont quelque part, il suffit de les trouver.
On découvre une réalité insoupçonnée: le suicide tue trois fois plus que les accidents de la route.
Une personne sur 4 sera touchée de près par le suicide au cours de sa vie.
Se dire que finalement notre histoire est un cas d'école vécu des millions de fois.
Dans cette quête inlassable, j'ai fini par échouer sur un forum d'endeuillés du suicide. Chacun y allait de ses questions et de ses informations. J'ai tout dévoré alternant désespoir, ennui et empathie.
Le deuil est un chemin de douleur. Mais sur le bord, on y trouve des petites pierres d'humanité qui permettent de continuer à avancer.
Et puis soudain, je me souviens, j'ai vu un écrit pas tout à fait comme les autres. Lumineux. Elle s'appelait Sabah. On a échangé. On s'est appelées. Son frère s'était suicidé quelques jours après ma sœur.
Je ne te connaissais pas, Sabah, mais soudain tu m'étais la personne la plus proche au monde.
On a continué à se parler par téléphone. On s'est aidées à ranger nos tripes. On a ri. On a pleuré. On a refait le monde. On s'est vues. On s'est épaulées. On a avancé.
Car au final, le deuil est un chemin de douleur. Mais sur le bord, on y trouve des petites pierres d'humanité qui permettent de continuer à avancer. Elles sont là, comme des vers luisants. Une toute petite lumière qui accompagne nos pas dans l'obscurité de la souffrance.
Aujourd'hui, onze ans après le décès de ma soeur, la souffrance est bien moindre.
La douleur s'est muée en douceur.
La lumière a vaincu l'obscurité.
J'ai depuis rencontré des endeuillés extraordinaires qui, le temps d'un film et d'un livre, ont bien voulu me raconter leur histoire et leur retour à la vie.
Pas pour se vanter. Non bien sûr.
Mais peut-être pour changer les choses... Pour que l'on s'intéresse au plus grand tabou de notre société qui est partout... Rendez-vous compte: chaque jour en France, 27 personnes mettent fin à leurs jours et plus de 500 font une tentative.
N'est-il pas temps d'en parler?
Enfin sachez que l'on peut aider les endeuillés du suicide... des petites gestes suffisent... Apportez-leur des plats cuisinés, mettez une main sur l'épaule, écoutez-les avec douceur et sans trop parler... pour éviter de dire des bêtises.
Et puis surtout, surtout, prononcez le nom de la personne partie. De manière simple "Tu te souviens comme Clara aimait la tarte aux pommes?" ou "j'ai revu le film que Pierre citait souvent..." Des mots simples qui permettront que ce prénom ne devienne pas, lui aussi, un tabou.
Le Passeur Editeur
Katia Chapoutier, "La vie après le suicide d'un proche", Le Passeur Editeur