lundi 27 février 2017

SUISSE Documentaire Reprendre le cours de sa vie après un internement psy

Documentaire
Reprendre le cours de sa vie après un internement psy
article du 19 février 2017 sur lecourrier.ch*
Iliann Dunand

Immersion dans la vie de trois patients de l’hôpital Belle-Idée à Genève, Le seuil. Sortir d’une unité psychiatrique, de Frank Preiswerk, sonde les difficultés d’un retour à une vie indépendante.

Nicole, Pierre et Véronique sont en séjour à l’hôpital de Belle-Idée à Genève. Arrivés pour des raisons différentes, ils se retrouvent face à des difficultés semblables au moment de préparer leur retour à une vie indépendante après plusieurs mois d’internement. Ils sont les trois protagonistes du récent documentaire de Frank Preiswerk, Le seuil. Sortir d’une unité psychiatrique 1. Le documentaire sera projeté en première à Genève ce jeudi, puis circulera en Romandie 2.

Véronique, la trentaine, a déjà essayé quatre fois de mettre fin à ses jours, ne supportant plus ses dépressions chroniques. Quand elle pense à sa sortie, elle doute. Rongée par l’alcoolisme à petit feu, Nicole est déterminée à rentrer chez elle. Pierre, l’aîné des trois et personnage cocasse, est bipolaire mais s’auto-diagnostique autiste. Il semble heureux à l’hôpital où il donne l’impression d’avoir orchestré son séjour.

Peur de la solitude du domicile

Comment retourner vivre seul, sans accompagnement quotidien, dans un lieu ­chargé de souvenirs qu’on a quitté en détresse? Frank Preiswerk nous invite à suivre les réflexions des ­protagonistes sur leur volonté à «faire le pas». Plus que les images, ce sont les mots qui pèsent. Ils traduisent le va-et-vient intérieur, entre aspiration à la liberté, et sécurité de la prise en charge. Ou la peur de la solitude du domicile face aux nombreux liens sociaux créés durant le séjour, aussi bien avec le corps médical qu’avec d’autres patients. L’enjeu est «d’imaginer la suite».

C’est là tout le travail en amont du personnel médical: préparer la personne à ce qu’elle se sente prête. «Ce ­moment de bascule et tout le travail de préparation ont attiré mon attention, commente Franck Preiswerk. C’est une phase de la prise en charge somme toute peu documentée.» Après plusieurs tentatives, le réalisateur a également pu assister à ce qu’il perçoit comme le cœur philosophique de l’histoire du film et de la psychiatrie: les réunions du personnel où la cohérence de ce qui est mis en œuvre pour les patients est remise en question, critiquée, repensée. Avec des ­décisions lourdes à la clé: cet individu sera-t-il un jour ­capable de sortir? Peut-il être privé de liberté «pour son bien?»
1. 85 min, réalisation Frank Preiswerk, 2015.
2. Projections du film à la Haute école de Travail social (HETS) à Genève, du 23 février au 3 mars, avec un débat le dernier soir sur le thème «Pourquoi est-ce si difficile de quitter l’hôpital psychiatrique?»


Dès le 22 février le film sera à l’affiche du Zinéma à Lausanne. D’autres dates en Suisse romande sont en programmation.

* https://www.lecourrier.ch/node/146954