lundi 21 novembre 2016

AUTOUR DE LA QUESTION Des promeneurs du Net pour repérer les jeunes en souffrance

Protection de l’enfance | 18/11/2016
Des promeneurs du Net pour repérer les jeunes en souffrance
par Catherine Piraud-Rouet gazette-sante-social.fr/*

Depuis 2012, le conseil départemental de la Manche expérimente un dispositif de présence éducative en ligne pour détecter les jeunes qui ne vont pas bien et mettre en place un suivi adapté.
Tout a commencé en 2010 par un constat de la CAF et du conseil départemental de la Manche : les jeunes désertaient les centres d’accueil de rue traditionnels. Où étaient-ils ? Sur les réseaux sociaux, dans la « rue numérique » chère à la « génération Z ».
Les responsables découvrent alors, à l’occasion d’un voyage d’étude en Suède, une fonction nouvelle : les promeneurs du Net. Une expérimentation est lancée en mars 2012.

Présence éducative sur internet

L’engouement est immédiat. Au départ prévue pour trois ans, l’initiative est prolongée en 2014.
Un cofinancement est mis en place avec le conseil départemental (CD), notamment sur le demi-poste dédié à l’animation du réseau départemental, assurée par Pascal Lainé, salarié de la maison des adolescents.
Une démarche de réseau pilotée conjointement avec les centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active (Cemea). « Le concept de présence éducative sur internet est intégré aux objectifs de la convention partenariale départementale  »projets éducatifs sociaux locaux », liant CAF, CD50, Mutualité Sociale Agricole, ainsi que deux institutions déconcentrées d’État : DPCS et Éducation nationale », précise Stéphane Mœris, directeur de l’éducation, de la jeunesse et des sports au CD de la Manche.
Dans ce département comme dans les trois autres, plusieurs dizaines de professionnels, tous salariés de structures d’animation ou d’éducation départementales, assurent quotidiennement une permanence en ligne sur les sites, réseaux sociaux, forums, chats ou blogs fréquentés par les jeunes et leurs parents. « Au-delà d’un  »bavardage » de routine, ces échanges sont l’occasion de détecter les jeunes qui, pour des raisons diverses, n’iraient pas bien, et de mettre en place un suivi adapté », précise Pascal Lainé.
L’activité, au départ volontaire, est aujourd’hui intégrée aux fiches de postes des animateurs.

Professionnalisation des promeneurs du Net

« L’évolution devrait se faire vers une ouverture plus large sur le champ médicosocial », précise Éric Dehainault, responsable de l’action sociale à la CAF de la Manche. Ce qui nécessite aussi une professionnalisation croissante des pratiques.
« Nous avons installé des rencontres départementales d’échange de pratiques et d’outils et des apports de contenu de formation », précise Béatrice Martellière, ex-directrice de la CAF de la Manche et aujourd’hui à la tête de celle du Morbihan, autre département acteur.
Les promeneurs du Net semblent avoir de beaux jours devant eux. Leur déploiement national a été officiellement lancé à Bourges, le 27 septembre dernier, entre la Cnaf et les partenaires des départements concernés. C’est aussi en s’appuyant sur ces troupes connectées que la Cnaf a candidaté à un appel à proposition de la Commission européenne sur le thème « Développer la capacité à traiter et à prévenir la marginalisation et la radicalisation violente chez les jeunes ». Un dispositif intitulé « The web walkers » et intégrant Suède, Finlande et Pays-Bas. Verdict en novembre.
© Danielle Rault-Verprey Mélody Collé, médiatrice numérique au centre d’animation Les Unelles (Coutances) et promeneur du Net depuis 2012

« Cette mission constitue une vraie continuité de mon travail éducatif »

« Aux Unelles, nous sommes six à nous partager une permanence hebdomadaire de 2 h 30, en fin de journée, sur les réseaux sociaux. Pour ma part, j’utilise Facebook, le plus fréquenté par les jeunes. J’avance à visage découvert, avec ma photo, celle de ma structure, le logo Promeneurs du Net et ma fonction. Je lance un  »coucou » et me ballade sur mon fil d’actualité afin de prendre la température. Je donne les infos de la structure, je prends des nouvelles des uns et des autres, notamment des profils les plus  »sensibles ». Je suis là en tant qu’adulte bienveillant, afin de les recadrer s’ils dérapent verbalement (discrimination, incitation à la haine, théories du complot…) ou entrer en contact avec eux en privé si besoin. Le virtuel permet des confidences plus aisées. En cas de souci détecté, j’accompagne le jeune vers un soutien extérieur. Cette mission constitue une vraie continuité de mon travail éducatif auprès des jeunes et des parents. »


En savoir plus : http://promeneursdunet.fr/

* http://www.gazette-sante-social.fr/32471/souffrance-internet-surveillance-jeunes?utm_source=flash-info-gss&utm_medium=email&utm_campaign=flash-info-16-11-2016